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- 27. Les plaintes présentées contre le gouvernement du Maroc figurent dans six télégrammes envoyés directement à l'O.I.T les 6 et 7 juin 1962 par six organisations syndicales marocaines, à savoir: le Bureau régional de Fez, la Fédération de l'éclairage et des forces motrices de Casablanca, la Fédération nationale des fonctionnaires et agents des services municipaux du Maroc, la Jeunesse ouvrière (U.G.T.M.) de Marrakech, la Fédération des transports libres et une organisation de travailleurs des docks, toutes affiliées à l'Union générale des travailleurs du Maroc (U.G.T.M.).
- 28. Par lettre en date du 19 juin 1962, l'U.G.T.M a été informée du droit qu'avaient les organisations plaignantes de présenter, dans le délai d'un mois, des informations complémentaires à l'appui de leurs plaintes. Aucune des six organisations mentionnées au paragraphe 27, non plus d'ailleurs que l'U.G.T.M, n'a fait usage de ce droit. Le gouvernement du Maroc a envoyé ses observations par une communication en date du 29 octobre 1962.
- 29. Le Maroc n'a pas ratifié la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (no 87); il a ratifié en revanche la convention sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 (no 98).
- 30. Bien que, de façon générale, toutes les communications des plaignants aient fait mention du traitement discriminatoire dont ils auraient été victimes de la part de l'Etat et des employeurs, par rapport à une autre organisation syndicale, l'Union marocaine du travail (U.M.T.), elles seront examinées ci-après séparément, par souci de clarté.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- Allégations relatives à certaines mesures discriminatoires prises à l'encontre de la Fédération des transports libres du Maroc
- 31 La Fédération des transports libres du Maroc allègue, dans son télégramme du 7 juin 1962, que le directeur de la Compagnie des tramways et autobus de Casablanca (T.A.C.) et la direction de la Compagnie auxiliaire de transports au Maroc (C.T.M) ont pris des mesures discriminatoires à son égard et ont violé les droits syndicaux. Elle ajoute que les directions de ces deux compagnies ont exercé, avec la collaboration des dirigeants du syndicat U.M.T, une pression intolérable pour entraver la bonne marche des activités syndicales.
- 32 Dans sa réponse, le gouvernement déclare que le télégramme des plaignants ne donne aucune précision sur l'objet de la plainte et que le signataire de celle-ci, M. Chahir Bauchaib, secrétaire général de la Fédération des transports libres du Maroc, n'a pas répondu aux convocations qui lui avaient été adressées par l'inspecteur du travail. Le gouvernement ajoute que, néanmoins, il a été possible de déterminer que la plainte concernait la situation des salariés adhérant à l'U.G.T.M qui travaillent pour la Compagnie auxiliaire de transports au Maroc (C.T.M.) et pour la Compagnie des tramways et autobus de Casablanca (T.A.C.). Dans la première des compagnies précitées, poursuit le gouvernement, le seul incident à signaler serait une grève d'une heure, déclenchée le 25 septembre 1962 par les travailleurs affiliés à l'U.M.T, pour protester contre le fait que la direction, accédant à une demande du comité syndical U.G.T.M de l'entreprise, avait mis un local à la disposition des délégués syndicaux. Quant à la Compagnie des tramways et autobus de Casablanca (T.A.C.), le gouvernement déclare que le bureau syndical U.G.T.M avait demandé à la direction de l'entreprise, au début de juin 1962, qu'un de ses membres assiste à la distribution de jouets faite aux enfants des travailleurs à l'occasion de la fête de l'Achoura, et que la direction n'avait pas répondu favorablement à cette demande, étant donné que la distribution de jouets était organisée par le comité des oeuvres sociales de l'entreprise, dont les membres sont élus par l'ensemble du personnel.
- 33 Le Comité estime que les plaignants, malgré la possibilité qui leur avait été accordée de compléter et de motiver leur plainte, laquelle avait été rédigée en termes excessivement vagues et imprécis, n'ont apporté aucune preuve de violation réelle des droits syndicaux et, par conséquent, il recommande au Conseil d'administration de décider qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas.
- Allégations relatives à des irrégularités commises lors des élections aux organismes statutaires des compagnies d'électricité
- 34 La Fédération de l'éclairage et des forces motrices de Casablanca allègue, dans son télégramme en date du 6 juin 1962, qu'il y a eu des élections imposées par l'U.M.T, au cours desquelles de multiples abus ont été commis, élections qu'elle considère comme sans valeur.
- 35 Dans sa réponse, le gouvernement déclare que la Fédération de l'éclairage et des forces motrices de Casablanca s'est abstenue de participer aux élections des organismes statutaires des compagnies d'électricité: Conseil de la Caisse mutuelle de sécurité sociale, Conseil des oeuvres sociales et Commission tripartite pour la formation professionnelle, soit parce qu'elle a craint d'essuyer un échec, soit parce qu'elle était dans l'impossibilité de présenter des candidats. Cependant, ajoute le gouvernement, toute latitude lui avait été laissée d'établir ses listes et, par lettre du 4 mai 1962, le directeur général de l'Energie électrique du Maroc avait écrit à M. Nouara Mohammed, dirigeant de la Fédération susmentionnée, que, « tenant compte de l'information que votre fédération ne serait en mesure de remettre ses listes de candidats que le 13 mai, il a été décidé de fixer au 14 mai 1962, à 18 heures, la nouvelle date limite de dépôt des candidatures ». Le gouvernement poursuit en disant que le voeu de l'U.G.T.M était que ces élections fussent retardées à l'automne, mais qu'il n'a pas été possible de retarder davantage un scrutin qui aurait dû avoir lieu plus tôt. Lors des élections, l'U.M.T a obtenu 91 pour cent des voix.
- 36 Le Comité, estimant que les plaignants n'ont apporté aucune preuve des faits allégués et qu'il ressort de la réponse du gouvernement, au contraire, qu'ils ont bénéficié de garanties suffisantes pour participer aux élections mentionnées au paragraphe précédent, recommande au Conseil d'administration de décider qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas.
- Allégations relatives au licenciement de certains travailleurs
- 37 La Jeunesse ouvrière (U.G.T.M) de la ville et de la région de Marrakech allègue, dans son télégramme en date du 7 juin 1962, que ni la liberté du travail ni les idées syndicales ne sont réalisées et que certains ouvriers exclus de leurs fonctions sont victimes de la faim depuis 1959.
- 38 Le gouvernement fait valoir dans sa réponse que la plainte est rédigée en termes vagues, qui ne permettent pas d'identifier de façon précise l'affaire invoquée par la Jeunesse ouvrière (U.G.T.M.) de Marrakech, mais que, néanmoins, une enquête approfondie a été menée par les services de l'Inspection du travail, qui a permis de recueillir les renseignements ci-après: le directeur de la Société des transports miniers (S.T.M.) a déclaré que les sept travailleurs qui avaient demandé leur réintégration dans leur emploi à la Société n'avaient pas été licenciés, mais qu'il avait fallu les considérer comme « démissionnaires » à la suite d'une absence injustifiée supérieure à quatre jours; le 22 février 1962, l'inspecteur du travail, chef de la circonscription de Marrakech, est intervenu auprès de la direction et a obtenu de celle-ci qu'elle verse aux intéressés une indemnité de licenciement dont le montant serait équivalent à celui de l'indemnité payée à ses salariés par une société de transports d'Agadir dans une affaire semblable; il était envisagé de faire recruter les sept ouvriers par une société filiale de l'O.N.A. (Omnium nord-africain) qui contrôle la S.T.M, entre autres entreprises; l'U.G.T.M, priée de faire connaître si elle acceptait ou refusait ces propositions, n'a jamais donné de réponse; les sept ouvriers en question sont actuellement employés, cinq sur les chantiers de la Promotion nationale, à Marrakech, et deux dans une entreprise gérée par le Bureau de recherches et de participations minières; si les intéressés s'estimaient lésés par la mesure prise à leur encontre, ils avaient la possibilité de saisir de leur requête le tribunal du travail, qui est la juridiction compétente pour trancher les litiges survenus entre employeurs et salariés.
- 39 Le Comité, estimant que les faits auxquels les plaignants font vaguement allusion ont été suffisamment élucidés par le gouvernement dans sa réponse et qu'il ne paraît pas en découler que les droits syndicaux auraient été violés de quelque façon que ce soit, recommande au Conseil d'administration de décider qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas.
- Allégations relatives au licenciement abusif de cent cinquante travailleurs du port de Casablanca
- 40 Les plaignants allèguent, dans leur télégramme en date du 7 juin 1962, que cent cinquante travailleurs auraient été victimes d'un licenciement abusif décidé par diverses compagnies de navigation du Maroc, et cela, en accord avec l'U.M.T.
- 41 Le gouvernement déclare dans sa réponse qu'à la fin de l'année 1957, un groupe d'environ trois mille chômeurs se tenaient à la disposition des compagnies de navigation et des usagers du port de Casablanca, qui faisaient appel à eux chaque fois qu'ils avaient à faire face à un surcroît de travail exceptionnel. Ce groupe avait obtenu du gouverneur de la préfecture de Casablanca l'autorisation de stationner à l'entrée du port et de bénéficier d'une embauche prioritaire sur les chômeurs arrivant des campagnes. Cependant, ajoute le gouvernement, au cours des quatre dernières années, la plupart d'entre eux sont parvenus à trouver un travail stable et, finalement, il n'est resté, sur le groupe initial, que cent cinquante travailleurs, qui ont adhéré à l'U.G.T.M, et tenté de se faire considérer comme des dockers permanents; à cet effet, ils ont provoqué certains incidents à la suite desquels le syndicat U.M.T a demandé au directeur du port de décider, une fois pour toutes, si les intéressés devaient être admis parmi les dockers permanents ou s'ils devaient rester occasionnels et, en ce cas, être confondus avec la masse des occasionnels, sans distinction particulière. En outre, poursuit le gouvernement, durant une réunion tenue le 19 avril 1962 au secrétariat de l'Association des agents maritimes et consignataires du Maroc, sous la présidence du directeur du port, il a été décidé, entre autres choses, que la carte de priorité délivrée à certains dockers occasionnels était supprimée et que, de ce fait, il n'existait plus que deux catégories de dockers: les professionnels et les occasionnels.
- 42 Il semble ressortir des informations qui précèdent que les cent cinquante travailleurs qui, selon les plaignants, ont été licenciés abusivement n'ont jamais été inscrits sur le rôle des entreprises portuaires et que, par conséquent, il ne serait pas indiqué de parler de licenciement et moins encore de licenciement abusif. En effet, ces travailleurs, qui, à l'origine, faisaient partie d'un groupe plus important composé de trois mille personnes, avaient obtenu en 1957, en raison de circonstances spéciales - qui, d'après le gouvernement, n'existent plus -, d'être embauchés par priorité de préférence à d'autres chômeurs qui cherchaient également à être occupés comme travailleurs occasionnels dans le port de Casablanca. Cette situation privilégiée a été supprimée récemment par les autorités portuaires, et cela, selon le gouvernement, à la suite d'incidents provoqués par le groupe en question, de sorte -que tous les travailleurs qui sont occupés occasionnellement dans le port se trouvent désormais dans la même situation, indépendamment, semble-t-il, de leur affiliation syndicale.
- 43 En vertu de ce qui précède, le Comité estime que les plaignants n'ont pas apporté la preuve de violation de leurs droits syndicaux et, pour cette raison, recommande au Conseil d'administration de décider qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas.
- Allégations relatives au traitement discriminatoire des fonctionnaires et agents des services municipaux affiliés à l'U.G.T.M.
- 44 La Fédération nationale des fonctionnaires et agents des services municipaux du Maroc (U.G.T.M.) de Casablanca allègue, dans son télégramme du 7 juin 1962, que l'U.M.T viole les droits syndicaux des bureaux syndicaux de l'U.G.T.M et de leurs adhérents et que les dirigeants de service ont pris des engagements avec le bureau syndical de l'U.M.T contre les adhérents de l'U.G.T.M.
- 45 Le gouvernement déclare, dans sa réponse, que la plainte concerne les fonctionnaires et agents des services municipaux et que, pour l'étudier, le ministère de l'Intérieur a mené une enquête dont il ressort que tous les agents des services municipaux sont traités sur un pied d'égalité, en dehors de toutes considérations syndicales ou politiques. Le gouvernement ajoute que lesdits agents bénéficient des avantages prévus aux termes de textes élaborés par la Direction de la fonction publique, que leur situation est donc statutaire et que, par conséquent, elle ne peut être menacée par un quelconque favoritisme.
- 46 Le Comité constate que les plaignants, qui ont rédigé leur plainte en termes extrêmement vagues, n'y ont signalé aucun fait concret qui pourrait constituer une violation des droits syndicaux et que le gouvernement, dans sa réponse, affirme que tous les employés municipaux sont traités sur un pied d'égalité, leur statut se trouvant régi par des règlements qui n'établissent aucun favoritisme, quel qu'il soit. Dans ces circonstances, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas.
- Allégations relatives à une enquête sur le problème syndical au Maroc
- 47 Les syndicats affiliés à l'U.G.T.M, dans la ville et dans la région de Fez, demandent, dans leur télégramme en date du 6 juin 1962, que l'O.I.T intervienne pour l'ouverture d'une enquête sur le problème syndical au Maroc.
- 48 Le gouvernement déclare, dans sa réponse, qu'une demande d'enquête sur une question qui intéresse l'ensemble du royaume aurait dû être présentée par le secrétariat général national de l'U.G.T.M et non par les syndicats d'une province et que, de surcroît, le texte du télégramme ne donne aucune précision sur les faits susceptibles de justifier l'ouverture d'une telle enquête. Il ajoute que, pour ces raisons, il n'est pas possible de soumettre au Comité de la liberté syndicale des observations plus concrètes.
- 49 Le Comité estime que la communication des plaignants est extrêmement vague et qu'en dépit de la possibilité qui leur a été offerte de la compléter et de la motiver, ils n'ont pas signalé de faits susceptibles d'engager le Comité à poursuivre l'examen de la question. Dans ces circonstances, il recommande au Conseil d'administration de décider qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 50. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider, pour les raisons exposées dans les paragraphes 33, 36, 39, 43, 46 et 49, qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen du cas.