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- 27. La plainte du Syndicat suisse de l'imprimerie et de la Fédération nationale suisse des syndicats chrétiens est contenue dans deux communications adressées directement à l'O.I.T les 25 octobre et 2 décembre 1958, respectivement.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 28. Il est allégué qu'un typographe suisse, M. Paul Rück, s'est rendu à Copenhague le 18 août 1958 au titre de l'accord passé entre la Suisse et le Danemark et relatif à l'échange de jeunes travailleurs. M. Rück était membre du Syndicat suisse de l'imprimerie, organisation chrétienne qui n'est pas reconnue par la Fédération danoise des typographes. Pour cette raison - allèguent les plaignants - la Fédération aurait empêché l'employeur de Copenhague d'utiliser les services de M. Rück en le menaçant d'une grève; ultérieurement, toutefois, la Fédération aurait accepté que M. Rück prenne un emploi en dehors de Copenhague à la condition qu'il s'affilie à la Fédération suisse des typographes à son retour en Suisse. Les plaignants joignent en annexe à leur plainte copie des lettres échangées entre l'employeur en question, les plaignants, l'Office danois d'émigration et le Conseil de D'artisanat, les plaignants joignent également à leur plainte copie de communications émanant de divers services suisses et danois ainsi que de représentants diplomatiques; toutes ces annexes visent à confirmer ce que contiennent les allégations formulées de même que le fait que M. Rück s'est rendu à Copenhague en se conformant strictement à la procédure fixée pour l'échange des jeunes travailleurs. Les plaignants déclarent que l'exclusion de M. Rück de son emploi en raison de son appartenance à un syndicat chrétien suisse, ce qui a eu pour conséquence le refus de la part de la fédération danoise de l'accepter comme membre, constitue une violation de l'article premier de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. Les plaignants prétendent en outre que la tentative faite ultérieurement par la fédération danoise en vue d'inciter l'intéressé à adhérer à la Fédération suisse des typographes constitue une négation de son droit de rester fidèle à son syndicat chrétien et, par suite, viole la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
- 29. Dans sa communication en date du 17 janvier 1959, le gouvernement danois confirme la version des faits donnés par les plaignants. Il indique que la Fédération danoise des typographes est partie à un accord de réciprocité avec la Fédération suisse des typographes aux termes duquel les deux fédérations s'engagent à assister les travailleurs échangés. Un tel accord n'existe pas entre la fédération danoise et le Syndicat suisse de l'imprimerie. Le gouvernement déclare d'autre part que M. Rück s'étant depuis affilié à la Fédération suisse des typographes, les raisons qui sont à l'origine de ses difficultés ont cessé d'exister.
- 30. Le gouvernement explique en outre que si, dès l'abord, l'employeur de Copenhague avait informé la Confédération des employeurs danois de la situation, cette organisation aurait pu porter le cas devant le Tribunal permanent d'arbitrage du Danemark, conformément à la loi no 536 du 4 octobre 1919, en arguant que l'attitude adoptée par la Fédération danoise des typographes constituait une violation du fondamental « Accord de septembre » conclu en 1899 entre les organisations centrales danoises de travailleurs et d'employeurs. Cette voie de recours n'a pas été utilisée.
- 31. Le gouvernement se réfère, enfin, au cas no 120 (France) examiné par le Comité de la liberté syndicale, dans lequel le Comité, se fondant sur le rapport de la Commission des relations professionnelles instituée par la Conférence internationale du Travail et adopté par cette dernière lors de sa 32ème session tenue en 1949, s'était refusé à considérer les accords de sécurité syndicale comme étant contraires à la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 32. La convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ont toutes deux été ratifiées par le Danemark.
- 33. L'article premier de cette dernière convention dispose que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre les actes de discrimination syndicale à l'emploi et, en particulier, contre les actes ayant pour but de subordonner l'emploi d'un travailleur à la condition qu'il ne s'affilie pas à un syndicat ou cesse de faire partie d'un syndicat, ou de congédier un travailleur ou lui porter préjudice par tous autres moyens en raison de son affiliation syndicale.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 34. Dans un certain nombre de cas antérieurs, le Comité a refusé de retenir des allégations relatives à des clauses de sécurité syndicale, en se fondant sur l'opinion, exprimée dans un rapport de la Commission des relations professionnelles instituée par la Conférence internationale du Travail, que la convention en question ne devrait d'aucune façon être interprétée comme autorisant ou interdisant les clauses de sécurité syndicale et que de telles questions relèvent de la réglementation et de la pratique nationales. Dans le cas d'espèce, toutefois, il est clair que les mesures prises par la Fédération danoise des typographes, du fait qu'elle avait conclu un accord intersyndical avec la Fédération suisse des typographes et non pas avec le Syndicat suisse de l'imprimerie, n'ont pas été prises à la suite d'un véritable accord de sécurité syndicale conclu avec l'organisation dont l'employeur intéressé était membre. En fait, ces mesures semblent avoir leur origine dans une rivalité intersyndicale entre deux organisations de tendances différentes en Suisse, avec l'une seulement desquelles le syndicat danois intéressé entretient des relations. Une situation présentant de nombreux points d'analogie avec le cas présent a été examinée par le Comité de la liberté syndicale dans le cadre du cas no 182 mettant en cause le Royaume-Uni. Dans le cas no 182, il n'existait aucune clause de sécurité syndicale découlant d'un accord entre le syndicat et l'association d'employeurs intéressée, mais plutôt, il semblait qu'il y eût un conflit intersyndical en raison du fait que l'un des syndicats « exerçait une pression visant à instaurer ce qui, en cas de succès, aurait été en fait une clause d'affiliation obligatoire et de sécurité syndicale». Le Comité, même en l'absence d'une véritable clause de sécurité syndicale, a estimé qu'il s'agissait essentiellement « d'un cas se rapportant à un conflit intersyndical portant sur la question de la sécurité syndicale » et a recommandé au Conseil d'administration de décider que le cas n'appelait pas un examen plus approfondi. Dans le cas d'espèce, et pour les mêmes raisons, le Comité estime devoir aboutir à la même conclusion. En conséquence, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que le cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
- Genève, 4 mars 1959. (Signé) Paul RAMADIER, Président.