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Informe provisional - Informe núm. 58, 1962

Caso núm. 168 (Paraguay) - Fecha de presentación de la queja:: 10-AGO-57 - Cerrado

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  1. 60. A sa vingt-septième session (février 1961), le Comité a poursuivi l'examen du présent cas, au sujet duquel il avait présenté au Conseil d'administration un rapport intérimaire, contenu aux paragraphes 140 à 157 de son quarante-neuvième rapport, et formulé des conclusions et des recommandations qui figurent aux paragraphes 55 à 78 de son cinquante-deuxième rapport. Ce rapport a été approuvé par le Conseil d'administration lors de sa 148ème session (mars 1961).
  2. 61. Les seules allégations sur lesquelles le Comité n'ait pas présenté ses conclusions définitives au Conseil d'administration sont certaines allégations relatives au déni de droits syndicaux au Paraguay. Il ne sera traité, dans le présent document, que de ces allégations restées en suspens.
  3. 62. Le Paraguay n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (ne 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations relatives à un déni de droits syndicaux

A. Allégations relatives à un déni de droits syndicaux
  1. 63. Il est allégué qu'un état de siège injustifiable existe dans le pays, que l'exercice des libertés constitutionnelles, du droit d'organisation et du droit de grève est rendu impossible et que les travailleurs ne peuvent améliorer leurs conditions de travail parce qu'ils ne sont pas autorisés à constituer une organisation syndicale libre et indépendante; une centrale syndicale, patronnée par le gouvernement, est la seule organisation reconnue. En conséquence - déclarent les plaignants -, les travailleurs du Paraguay demandent la cessation de l'état de siège et revendiquent le droit de s'organiser et le droit de grève, ainsi qu'un salaire minimum de 156,52 guaranis.
  2. 64. Dans sa réponse - datée du 1er juin 1960 -, le gouvernement déclare qu'il n'a, à aucun moment, refusé de reconnaître les droits syndicaux des travailleurs ou invoqué l'état de siège pour persécuter ceux-ci. Le gouvernement affirme que, pendant la période 1948-1960, des lois protégeant le droit des travailleurs de s'affilier à des syndicats ont été adoptées; il existe des lois réglementant le droit des travailleurs de s'organiser ainsi que le droit de grève. Le gouvernement nie l'existence d'une « centrale syndicale d'Etat » et déclare qu'il existe dans le pays des centaines de syndicats qui élisent librement leurs membres et dont les délégués ont constitué la Confédération des syndicats du Paraguay. Dans le pays; le déclenchement des grèves est subordonné au respect des conditions définies par la loi; il existe des conseils de conciliation. Les questions concernant les travailleurs sont du ressort du ministère du Travail. Le gouvernement ajoute que les plaintes émanant des travailleurs ont toujours été examinées avec toute l'attention appropriée, mais que des grèves ont été déclenchées à maintes reprises pour des raisons professionnelles. Le gouvernement conclut en déclarant que le salaire d'une journée de travail de huit heures est de 161 guaranis, soit un salaire supérieur à celui que les plaignants mentionnent dans leur plainte.
  3. 65. A sa vingt-sixième session (novembre 1960), le Comité a observé que l'un des arguments essentiels invoqués par le gouvernement est que, pendant la période 1948-1960; des lois garantissant le droit des travailleurs de constituer des syndicats ont été promulguées, ainsi que d'autres textes concernant le droit de grève. Aucun autre détail n'est fourni à ce sujet. Le Paraguay est redevenu Membre de l'O.I.T en 1956, il n'a fourni aucun des rapports prévus par l'article 19 de la Constitution de l'O.I.T sur l'application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ou de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, pendant la période se terminant le 31 décembre 1957, comme l'avait demandé le Conseil d'administration.
  4. 66. Dans ces conditions, le Conseil d'administration, sur la recommandation du Comité, a prié le gouvernement de bien vouloir lui fournir le texte des dispositions législatives qu'il a mentionnées dans sa réponse.
  5. 67. Dans sa communication du 24 janvier 1961, le gouvernement déclarait que la liberté syndicale était définie au Paraguay par les dispositions des articles 19 et 32 de la Constitution, dont il a communiqué un exemplaire au Bureau et que la protection des organisations de travailleurs et d'employeurs est assurée aux termes du décret législatif no 3080, du 18 décembre 1937. Le gouvernement déclarait qu'il avait également joint à sa réponse un exemplaire de Informaciones, revue du Département du travail, contenant le texte du décret législatif susmentionné. Toutefois, ce document n'était pas joint à la communication en question.
  6. 68. A sa vingt-septième session (février 1961), le Comité avait constaté que la situation juridique concernant les allégations portées devant le Comité n'était nullement claire. Alors que l'article 19 de la Constitution consacre le droit d'association à des fins légales, conformément à la législation réglementant l'exercice de ce droit, l'article 32 auquel le gouvernement se réfère également prévoit que l'Etat réglemente l'organisation, le fonctionnement et les activités des groupements ou entités de caractère public.
  7. 69. Le 12 mars 1931, le gouvernement du Paraguay a promulgué le décret no 39361 concernant le droit de réunion et d'association. Le 20 février 1945, le gouvernement a promulgué le décret no 7347, qui déclare que les organisations de travailleurs sont dans une phase de réorganisation. Dans sa lettre du 24 janvier 1961, le gouvernement déclarait que la protection des organisations de travailleurs est assurée aux termes du décret législatif no 3080, du 18 décembre 1937, dont un exemplaire avait été, selon l'affirmation du gouvernement, joint à sa lettre, mais qui n'était pas parvenu au Bureau. Enfin, dans la lettre du 1er juin 1960, le gouvernement déclarait que, durant la période 1948-1960, des lois protégeant le droit des travailleurs d'adhérer à des syndicats ont été adoptées, tandis que d'autres lois concernent le droit syndical et le droit de grève; mais, en réponse à la demande d'informations du Conseil d'administration, le gouvernement ne donnait pas de détails sur ladite législation d'après la guerre.
  8. 70. Par conséquent, le Comité a estimé qu'avant de formuler ses recommandations au Conseil d'administration sur cet aspect du cas, il serait nécessaire d'obtenir du gouvernement des informations, afin de savoir si le décret ne 39361, du 12 mars 1931, concernant le droit de réunion et d'association est encore en vigueur, la mesure dans laquelle le décret législatif no 3080, du 18 décembre 1937, s'est trouvé modifié aux termes du décret no 7347, du 20 février 1945, déclarant que les organisations de travailleurs sont dans une phase de réorganisation, et afin de savoir si ce dernier décret est encore en vigueur. Le Comité a également exprimé le désir d'avoir connaissance du texte du décret législatif no 3080, du 18 décembre 1937, et d'informations y relatives, y compris les exemplaires des textes s'y rapportant de la législation dont il est question dans la lettre du gouvernement du 1er juin 1960 comme ayant été promulguée entre 1948 et 1960 pour protéger le droit des travailleurs d'adhérer à des organisations syndicales, et des autres lois concernant le droit d'association et le droit de grève dont il est également question dans la lettre du gouvernement du 1er juin 1960.
  9. 71. En conséquence, le Comité a recommandé au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir lui fournir les informations et les exemplaires des textes législatifs mentionnés au paragraphe 70 ci-dessus. Le Conseil d'administration a adopté cette recommandation à sa 148ème session (mars 1961).
  10. 72. Par une lettre du 14 mars 1961, cette décision du Conseil d'administration a été portée à la connaissance du gouvernement, lequel, par une communication du 17 mai 1961, a fourni certaines informations complémentaires, de même que le texte des instruments législatifs qui lui avaient été demandés.
  11. 73. Dans sa réponse, après avoir fait des observations sur certaines des allégations déjà examinées par le Comité, le gouvernement déclare, en ce qui concerne la législation mentionnée au paragraphe 70 ci-dessus, que le décret no 39361, du 12 mars 1931, sur le droit de réunion et d'association a été abrogé par le décret no 1217, du 11 novembre 1943, lui-même abrogé par le décret no 15465, du 17 septembre 1946. En dépit de cette dernière abrogation, le gouvernement déclare que le décret no 39361 n'est plus en vigueur. De même, le décret no 7347, du 20 février 1945, qui déclare que les organisations de travailleurs sont en voie de réorganisation, n'est plus en vigueur.
  12. 74. En fait, il semblerait ressortir de la dernière réponse du gouvernement que les seuls textes législatifs se rapportant à l'exercice des droits syndicaux sont la Constitution de 1940 (art. 19 et 32) et le décret législatif no 3080, du 18 décembre 1937, portant création du Département national du travail. Alors que le gouvernement déclarait dans sa lettre du 1er juin 1960 que des textes législatifs avaient été promulgués entre 1948 et 1960 en vue de la protection du droit des travailleurs d'adhérer à des organisations syndicales, il déclare maintenant, dans sa communication du 17 mai 1961, qu'aucun texte n'a été promulgué sous le présent gouvernement en raison du fait qu'un projet de code du travail, qui prévoira le droit d'association sans autorisation préalable, sera examiné au cours de la présente année par le Congrès législatif. Le gouvernement déclare avoir- reçu les avis de fonctionnaires du Bureau international du Travail en ce qui concerne le projet de code.
  13. 75. L'article 19 de la Constitution de 1940, dont le texte a été fourni par le gouverne— ment, dispose que tous les habitants du Paraguay auront le droit de s'associer pour un but légal et que l'exercice de ce droit sera réglementé par la loi. Le gouvernement déclare qu'il n'a été promulgué aucun décret ou aucune loi qui apporte des restrictions à cette disposition constitutionnelle.
  14. 76. Le gouvernement fournit également le texte du décret législatif no 3080, du 18 décembre 1937, portant création du Département national du travail. Les dispositions suivantes se réfèrent directement aux organisations de travailleurs et d'employeurs. En vertu de l'article 2, un représentant des organisations centrales de travailleurs et d'employeurs, « fera partie » du Département du travail. L'article 9 f) dispose que le département sera chargé de l'enregistrement et du « contrôle légal » (control légal) des organisations de travailleurs et d'employeurs, de même que de l'approbation de leurs statuts et règlements en accord avec le pouvoir exécutif; le département est en outre chargé de la préparation du projet de code du travail (art. 9 m)). Plus précisément, l'examen et le « contrôle légal », des statuts et règlements des organisations de travailleurs et d'employeurs entreront dans les attributions de la section de la législation, des statistiques et des informations sociales du Département national du travail (art. 15 c)). A certains égards, les délégués des organisations de travailleurs exerceront les fonctions d'inspecteurs du travail (art. 21). Un registre des syndicats et de leurs membres sera tenu à jour par la section de l'emploi du département (art. 22 1) et 2)).
  15. 77. Aucune grève ou lock-out ne pourra avoir lieu avant que soient épuisées les procédures de règlement des conflits établies par le décret (art. 26). Il est prévu tout d'abord une tentative de conciliation directe entre les délégués des deux parties (art. 27); en cas d'échec, le différend doit être porté devant le Département du travail (art. 28), qui renvoie la question à une commission de conciliation composée de fonctionnaires du département (art. 29 et 30). Si aucun résultat ne peut être obtenu, le président du Département du travail invite les parties à porter le différend devant un tribunal d'arbitrage (art. 31) et, si celles-ci acceptent, le tribunal rend une sentence. L'une quelconque des parties peut demander que la sentence ait force de loi au cas où les parties ne pourraient pas s'entendre quant à la mise en oeuvre de la sentence (art. 38) ; lorsque l'entreprise impliquée dans le conflit est responsable du fonctionnement d'un service public, la sentence a toujours force de loi (art. 39). Le fait pour l'une quelconque des parties de refuser l'intervention du Département national du travail constitue un délit (art. 52). Dans l'accomplissement de son mandat, le Département national du travail est tenu de respecter le « principe reconnu » de la liberté d'association (art. 60).

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 78. Le Comité estime que, sur la base de ce seul texte législatif et en l'absence d'informations plus détaillées sur la situation syndicale telle qu'elle existe en fait et la manière dont la législation est appliquée dans la pratique, il ne lui est pas possible de formuler en connaissance de cause une conclusion quant à la mesure dans laquelle les travailleurs paraguayens peuvent librement exercer leur droit d'association. La question paraît dépendre en partie de la façon dont certaines des dispositions législatives mentionnées plus haut sont appliquées, en particulier l'article 9f) du décret législatif no 3080, qui prévoit le contrôle des syndicats par le Département national du travail et l'approbation de leurs statuts et règlements par ledit département en accord avec le pouvoir exécutif; le texte fourni par le gouvernement ne contient aucune indication quant aux critères applicables, par exemple, lors de l'approbation ou de la désapprobation des statuts d'un syndicat, ce qui donne à penser que la question de l'approbation est laissée à la seule discrétion des autorités administratives. A cet égard, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a fait remarquer que le droit des organisations d'élaborer librement leurs statuts et leurs règlements administratifs paraissait sensiblement limité dans le cas des pays où les statuts doivent être soumis à une approbation préalable des autorités, dont le pouvoir de décision ne semble être limité par aucune règle particulière. De plus le Comité ne dispose d'aucun élément lui permettant de vérifier dans quelle mesure il existe des moyens par lesquels l'exercice du droit d'association des travailleurs pris individuellement est protégé et la liberté de gestion et d'administration interne des organisation de travailleurs, garantie.
  2. 79. Le Comité a noté cependant que le gouvernement déclare qu'un projet de code du travail, prévoyant la liberté d'association sans autorisation préalable et au sujet duquel le gouvernement a bénéficié des avis de fonctionnaires du Bureau international du Travail, doit être examiné cette année par le Congrès législatif.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 80. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de prendre note de la déclaration du gouvernement selon laquelle un projet de code du travail, qui prévoira le droit d'association sans autorisation préalable, sera examiné par le Congrès législatif au cours de la présente année;
    • b) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée au principe selon lequel les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, doivent avoir le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières; au principe selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs doivent avoir le droit d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d'action, et selon lequel les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal; au principe, enfin, selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative;
    • c) d'exprimer le vif espoir que les textes législatifs qui doivent être examinés par le Congrès, législatif tiendront pleinement compte des principes énoncés à l'alinéa b) ci-dessus ainsi que des autres principes généralement admis en matière de liberté d'association et de droits syndicaux qui figurent dans des conventions internationales du travail et, en particulier, dans la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et que la législation donnant pleinement effet à ces principes sera promulguée dans un proche avenir;
    • d) de suggérer au gouvernement, lorsque la législation en question sera promulguée, d'envisager de ratifier la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949;
    • e) de demander au gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant des progrès effectués en ce qui concerne le projet de code du travail qui doit faire l'objet, cette année, d'un examen de la part du Congrès législatif du Paraguay.
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