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Caso individual (CAS) - Discusión: 2024, Publicación: 112ª reunión CIT (2024)

Convenio sobre la abolición del trabajo forzoso, 1957 (núm. 105) - Turkmenistán (Ratificación : 1997)

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Informations écrites communiquées par le gouvernement

Le gouvernement a fourni les informations écrites suivantes ainsi qu’une copie de la feuille de route pour les activités de coopération entre le BIT et le gouvernement du Turkménistan pour 2024-25.
Au cours de la mission de haut niveau de l’OIT de février 2024, il a été question de la suite de la coopération, discussion à laquelle les partenaires sociaux ont activement pris part, et des réunions ont été organisées avec des vice-présidents du Cabinet des ministres, des représentants du ministère des Affaires étrangères, du Parlement (Mejlis), du ministère du Travail et de la Protection sociale, du ministère de l’Intérieur, du ministère des Finances et de l’Économie, du ministère de l’Agriculture, du ministère de la Justice (Adalat), du ministère de l’Industrie textile, du Bureau de l’Ombudsman, de l’Institut de l’État, du droit et de la démocratie, du Bureau du procureur général, du ministère de l’Éducation, de la Commission nationale de statistique, de la Centrale nationale des syndicats, de l’Union des industriels et des entrepreneurs, du principal service public (Turkmenstandartlary), de l’entreprise d’État, Turkmenpagta, et des organes administratifs provinciaux. Cette collaboration constructive a permis l’adoption de la feuille de route relative à la coopération avec le BIT pour la période 202425.
Les principaux domaines couverts par la feuille de route sont les suivants.
  • 1) Des mesures prioritaires seront prises pour renforcer le cadre politique afin de prévenir la mobilisation de la main-d’œuvre enfantine. À cette fin, il est prévu d’inscrire dans la loi des dispositions interdisant le travail forcé ou obligatoire pendant la récolte du coton, c’est-à-dire de préparer et de soumettre un projet de décret présidentiel sur les mesures favorisant une récolte du coton minutieusement organisée, prenant en considération l’organisation de l’emploi volontaire et justement rémunéré pendant la récolte.
  • S’agissant de la prévention du travail des enfants, la liste des emplois, professions et postes présentant des conditions de travail pénibles ou dangereuses (et particulièrement pénibles ou particulièrement dangereuses), dans lesquels l’emploi de personnes de moins de 18 ans est interdit, doit être révisée afin d’y inclure les activités liées à la récolte du coton. Des dispositions seront prises pour garantir que les enfants de moins de 18 ans ne participent pas à la récolte du coton et que la législation relative à l’âge minimum d’admission à l’emploi est respectée. Des mesures de sensibilisation des autorités locales, des partenaires sociaux et du public seront élaborées et déployées pour prévenir la mobilisation et le travail des enfants. Il est ainsi prévu d’élaborer et de mettre en œuvre un plan de diffusion des informations pertinentes aux parties prenantes, aux autorités locales et aux associations de daikhan (agriculteurs), aux employeurs, aux travailleurs et au grand public, informations relatives à la façon d’identifier et de signaler les risques et les incidents, y compris les pratiques inacceptables dans le recrutement des cueilleurs de coton, en encourageant la déclaration volontaire avant et pendant la récolte du coton.
  • La feuille de route prévoit également:
  • la promotion et la mise en place d’une rémunération juste et décente pour les cueilleurs de coton en analysant la possibilité de fixer (réviser) le salaire minimum (pour la cueillette d’un kilogramme de coton) pour les récoltes de coton de 2024 et 2025, à la suite de recherches et de consultations sous forme de dialogue social avec le gouvernement;
  • l’assistance technique du BIT au Turkménistan en vue de l’adhésion à la convention (no 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969, et à la convention (no 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952, par l’analyse de la législation nationale pertinente; la signature d’un mémorandum d’accord sur l’organisation d’une analyse de l’examen des conditions de travail au Turkménistan;
  • l’élaboration de protocoles de protection couvrant toutes les personnes qui portent plainte, y compris de mesures de protection de la confidentialité, de protection contre le harcèlement et d’orientation vers les services d’assistance appropriés; l’élaboration et la mise en œuvre de mécanismes pilotes de retour d’information/de plainte pendant la récolte de 2024 et l’amélioration des mécanismes de plainte pour la récolte de 2025.
  • 2) En ce qui concerne l’amélioration du cadre législatif:
  • le cadre législatif relatif au travail forcé et au travail des enfants doit être amélioré conformément à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, à la convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, à la convention (no 138) sur l’âge minimum, 1973, et à la convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999;
  • les recommandations de l’OIT concernant la révision de la législation et la rédaction de modifications législatives doivent être mises en œuvre;
  • les dispositions, règles et systèmes relatifs aux conditions de travail et d’emploi décentes pendant la récolte du coton doivent être améliorés, notamment en renforçant la réglementation sur le recrutement des cueilleurs de coton afin que des contrats appropriés soient conclus entre eux et les producteurs agricoles, et en contrôlant le respect de l’application du salaire minimum;
  • une assistance technique doit être fournie pour soutenir les progrès en vue de la ratification de la convention (nº 81) sur l’inspection du travail, 1947, et de la convention (nº 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969;
  • les capacités doivent être renforcées et une assistance technique doit être fournie en vue de la ratification du protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, de la convention (nº 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, de la convention (nº 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, 2006, et de la convention (nº 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952.
  • 3) Le cadre d’application de la loi comprend la fourniture d’une assistance technique en vue d’améliorer l’accès des victimes à des voies de recours efficaces (Bureau de l’Ombudsman, police et autorités judiciaires aux niveaux central et régional) et la mise au point de protocoles et d’outils soutenant l’accès aux voies de recours.
  • La feuille de route aborde également des réformes plus larges, telles que l’étude de l’expérience internationale pour mettre en place un système de recrutement et un mécanisme de sélection pour les emplois liés à la récolte du coton, la promotion du dialogue social dans la production de coton, et la définition des réformes structurelles possibles pour augmenter la productivité et la pérennité de la production de coton, ainsi que favoriser les possibilités de travail décent tout au long de la chaîne de valeur du coton.
La mission technique effectuée du 14 au 17 mai 2024 par des fonctionnaires du BIT a contribué positivement à la mise en œuvre des mesures prioritaires de la feuille de route pour 202425, et visait à en examiner les activités, notamment l’élaboration d’instructions du gouvernement relatives à la sélection du personnel et aux conditions de travail pendant la récolte de coton de 2024, la révision de la liste des emplois, professions et postes présentant des conditions de travail pénibles ou dangereuses (et particulièrement pénibles ou particulièrement dangereuses) dans lesquels l’emploi de personnes de moins de 18 ans est interdit, et les mécanismes de traitement des plaintes et l’accès à des voies de recours efficaces. Au cours de cette mission, une table ronde a été organisée avec toutes les parties prenantes. Un projet de mémorandum d’accord entre le gouvernement du Turkménistan et l’OIT est en cours d’élaboration quant à la tenue d’une enquête sur les conditions de travail pendant la récolte de coton de 2024 au Turkménistan.
Le Parlement du Turkménistan, représenté par le corps des députés, mène activement des activités visant notamment à sensibiliser la société sur la prévention et l’interdiction du travail forcé, y compris le travail des enfants. Les activités organisées par les syndicats dans les etraps (districts) et les villes consistent également en l’organisation de séminaires de sensibilisation destinés aux parties prenantes tripartites nationales et locales et à la société civile, afin de garantir un dialogue ouvert sur les difficultés actuelles, les cadres existants et les mécanismes mis en place au sujet des questions relatives à l’emploi équitable des travailleurs. Des articles et des publications ont été consacrés à la réglementation juridique des relations de travail dans divers secteurs, dont l’agriculture. Le gouvernement du Turkménistan envisageant actuellement de ratifier le protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, des consultations sont menées avec les ministères, les départements et les partenaires sociaux concernés à cette fin. En outre, nous souhaiterions souligner notre engagement à étudier l’expérience internationale en matière de prévention du travail forcé, y compris du travail des enfants sous toutes ses formes. En témoigne notamment la participation, en mars 2024, d’une délégation turkmène à un voyage d’études à Tachkent, en Ouzbékistan, dans le cadre du projet de l’USAID sur les migrations sûres en Asie centrale. La délégation a pris connaissance de la situation en matière d’éradication du travail des enfants et du travail forcé dans le secteur du coton du pays. En tant que participant au programme conjoint, le ministère du Travail du Turkménistan continuera à jouer un rôle actif dans la mise en œuvre des activités relevant de sa compétence.

Discussion par la commission

Président – J’invite le représentant du gouvernement du Turkménistan, Ambassadeur et représentant permanent du Turkménistan auprès du Bureau des Nations Unies à Genève, à prendre la parole.
Représentant gouvernemental – Le cas du Turkménistan a été examiné à de nombreuses reprises au sein de la commission lors de ses sessions annuelles sur la mise en œuvre des dispositions de la convention, au cours desquelles notre pays a accepté les recommandations formulées, dont celle d’inviter une mission d’assistance technique de haut niveau de l’OIT. Depuis la mission de haut niveau, nous nous sommes engagés dans un important programme de coopération avec l’OIT, et de nombreuses visites ont été effectuées par l’OIT au Turkménistan, y compris des missions de haut niveau.
La ratification par le Turkménistan des deux conventions de gouvernance de l’OIT en 2019 et 2021, de l’amendement constitutionnel de 2022 de la déclaration de l’OIT de 1998, l’adoption et la pleine mise en œuvre de la feuille de route pour la coopération avec le BIT à l’horizon 2023 témoignent à l’évidence d’une étroite coopération.
La mise en œuvre des activités de la feuille de route a été menée en étroite collaboration et coopération avec le personnel du BIT, notamment pour le réexamen de la politique et de la structure administrative régissant la récolte du coton; le renforcement de l’inspection du travail; la promotion du plein emploi, et librement choisi dans le secteur du coton; le développement d’actions de sensibilisation et la promotion du dialogue social dans les activités de production et du processus de transformation du coton.
Parmi les activités menées avec le BIT, une étude qualitative sur les pratiques d’embauche des cueilleurs de coton dans des régions sélectionnées du Turkménistan a été conduite, et des visites de contrôle des conditions de travail ont été effectuées dans les champs de coton au cours de la période de récolte. Parallèlement, les autorités étatiques ont procédé à une étude quantitative sur les ménages pour évaluer l’évolution statistique de la récolte de coton au cours des cinq dernières années.
En septembre 2023, le gouvernement et l’OIT ont signé le Mémorandum d’accord sur l’application des conditions de travail lors de la campagne de récolte de 2023 au Turkménistan. Conformément au mémorandum, sept équipes de spécialistes du BIT ont effectué plusieurs visites de plantations de coton pendant la récolte, dans plusieurs régions du Turkménistan en septembre-octobre 2023. Au cours des visites, les équipes du BIT ont pu rencontrer et interviewer des cueilleurs de coton, des métayers, des associations d’agriculteurs et des représentants d’exploitations agricoles.
Un rapport de l’OIT a été élaboré sur la base des résultats du suivi effectué dans le cadre de la feuille de route et a été discuté entre les parties prenantes au Turkménistan en février 2024. Le rapport contient des informations sur l’industrie cotonnière du Turkménistan, le résultat des visites de champs de coton, la récolte manuelle du coton, les salaires et le temps de travail des égreneurs de coton, la règlementation pour un recrutement équitable et choisi par les travailleurs et pour leur remplacement pendant la récolte du coton, ainsi que sur l’organisation des inspections des conditions de travail des cueilleurs de coton.
Le rapport présente également des recommandations pour la poursuite d’efforts visant à améliorer la législation sur la prévention et l’interdiction du travail forcé, sur la sensibilisation des employeurs et des autorités des collectivités locales à la prévention du recours au travail forcé, notamment au travail des enfants, sur le mécanisme de traitement des plaintes, ainsi que d’autres recommandations. Le rapport contient en outre des recommandations pour la ratification d’un certain nombre de conventions de l’OIT, en particulier les conventions sur l’inspection du travail, le protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, ainsi qu’un certain nombre de conventions sur la sécurité et la santé au travail.
Lors de la mission de haut niveau de l’OIT en février 2024 avec la participation active des partenaires sociaux, les questions à examiner lors de la prochaine étape de coopération ont été discutées. Lors de la visite, des réunions ont eu lieu avec des collaborateurs du président du Conseil des ministres, des représentants du Parlement, du ministère des Affaires étrangères, du Bureau de l’Ombudsman, les principaux ministres et départements, ainsi que des autorités locales.
La mise en œuvre des recommandations de l’OIT avec notre coopération constructive, en consultation des partenaires sociaux, a abouti à l’adoption de la feuille de route pour la coopération avec l’OIT pour la période 2024-25. Nous avons soumis la feuille de route à la commission. Vous pouvez la consulter sur le site Web de l’OIT. Les principaux domaines de la feuille de route comprennent des actions prioritaires pour le renforcement du cadre politique en vue d’interdire la mobilisation de la main-d’œuvre enfantine à travers:
  • l’amélioration du cadre législatif du travail forcé et du travail des enfants, en conformité avec la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, la, convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, la convention (no 138) sur l’âge minimum, 1973, et la convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999;
  • la fourniture par le BIT d’une assistance technique visant à encourager les progrès vers la ratification de la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947, la convention (no 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969, la convention (no 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, la convention (no 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, 2006, la convention (no 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952, et le protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930;
  • la signature d’un Mémorandum d’accord sur la méthode d’analyse de la révision des conditions de travail au Turkménistan et sur l’observation de la récolte du coton par l’OIT;
  • le développement et la mise en œuvre de mécanismes de suivi des plaintes au cours de la campagne de récolte de l’année 2024, et l’amélioration du suivi des mécanismes de recours pour la campagne de 2025.
Le contrôle de l’application inclut l’assistance technique visant à améliorer l’accès pour les victimes à des voies de recours efficaces à travers le Bureau de l’Ombudsman, les forces de l’ordre et le système judiciaire aux niveaux central et régional.
La feuille de route prévoit en outre des réformes plus larges, notamment inspirées de l’expérience internationale, pour mettre en place un système de recrutement et un mécanisme d’embauche adéquats pour les emplois liés à la récolte de coton, la promotion du dialogue social dans la production de coton et l’identification de possibilités de réformes structurelles pour améliorer la productivité et la pérennité de la production cotonnière et pour favoriser des opportunités de travail décent tout au long de la chaîne de valorisation du coton. Il est important de noter que nous avons déjà commencé à œuvrer à la mise en œuvre de cette feuille de route avec l’OIT.
En particulier, la première réunion entre le Bureau de l’Ombudsman, l’OIT et les experts du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) s’est déroulée il y a quelques jours, le 4 juin, afin de discuter des actions à venir sur la mise en œuvre de la feuille de route susmentionnée. Le lendemain, une réunion s’est tenue entre des experts de l’OIT et des représentants des ministres du Travail, de la Justice, de l’Agriculture et du ministère des Affaires étrangères du Turkménistan. Nous attendons également, vers la fin du mois de juin, une visite de travail des experts du BIT à Achgabat.
En outre, nous avons récemment reçu du BIT des propositions de mesures et actions concrètes dans le cadre de la mise en œuvre de notre nouvelle feuille de route pour 2024-25, toujours en lien avec le Bureau de l’Ombudsman, la campagne de sensibilisation, la surveillance de la récolte de coton de l’année en cours, etc., sujets déjà abordés lors des réunions évoquées.
À l’heure actuelle, le Turkménistan entreprend une réforme cruciale du secteur agraire tout en poursuivant l’amélioration de son fonctionnement. Le ministère de l’Agriculture a été réorganisé au début de cette année, en février, par décret du Président du Turkménistan.
Afin d’augmenter les rendements des cultures, de développer l’élevage et l’aviculture, de créer des installations modernes pour la production de produits agricoles de haute qualité et d’introduire des technologies de production, des structures sectorielles agricoles (entreprises et associations) en des zones spécifiques, y compris l’entreprise d’État «Turkmenpagta», ont été créées et séparées du ministère de l’Agriculture du Turkménistan.
La décision du gouvernement d’augmenter de manière significative le prix d’achat du coton de 1,5 à 5 manat pendant la campagne de récolte marque une étape importante dans le contexte du présent cas. Une telle augmentation était justifiée par la nécessité de fournir aux agriculteurs des incitations et des revenus accrus, ainsi que d’augmenter la rémunération des cueilleurs de coton pour chaque kilogramme récolté, en fonction du moment de la récolte et de la qualité de celle-ci.
La mission technique du BIT, en mai de cette année, qui visait à réaliser les activités de la feuille de route susmentionnée, y compris l’élaboration d’instructions du gouvernement relatives au recrutement et aux conditions de travail lors de la récolte de coton 2024, a contribué de manière efficace à la mise en œuvre des actions prioritaires de la feuille de route pour 2024-25. Au cours de la mission, une table ronde a été organisée avec la participation de toutes les parties prenantes. Une seconde table ronde a également été organisée pour discuter de l’inscription de la cueillette du coton dans la liste des métiers, professions et postes de travail caractérisés par des conditions de travail difficiles et dangereuses ne permettant pas l’emploi de personnes de moins de 18 ans. Des travaux de suivi de ces tables rondes sont déjà engagés en étroite coordination avec le BIT.
Une réunion de la commission tripartite des partenaires sociaux est actuellement envisagée. L’une des questions clés à l’ordre du jour est l’examen du plan d’action de la feuille de route pour 2024-25, notamment l’amélioration de la liste des travaux dangereux et périlleux, en y incluant la cueillette du coton.
Par ailleurs, dans le cadre de la discussion du plan d’action, la question de l’amélioration du cadre juridique régissant les relations entre les employeurs et les cueilleurs de coton est à l’examen. En outre, des travaux sont parallèlement en cours pour préparer un projet de Mémorandum d’accord entre le gouvernement et l’OIT relatif à la surveillance des conditions de travail, par des experts indépendants, lors de la récolte de coton de 2024 au Turkménistan.
Le gouvernement envisage actuellement d’adhérer au protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, et des consultations sont en cours avec les ministres, départements et partenaires sociaux concernés.
Dans le même temps, nous tenons à souligner notre engagement à étudier l’expérience internationale en matière de prévention du travail forcé, y compris de travail des enfants sous toutes ses formes. Cela s’est concrétisé par la participation, en mars de cette année, d’une délégation du Turkménistan à un voyage d’étude en Ouzbékistan, à Tachkent, dans le cadre du projet de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) sur la migration sûre dans la région centrale Asie, au cours duquel la délégation a étudié l’expérience de l’Ouzbékistan en matière d’abolition du travail forcé, y compris du travail des enfants dans le secteur cotonnier du pays.
Nous apprécions grandement la coopération avec l’OIT pour atteindre les objectifs mondiaux en matière de travail équitable et sommes déterminés à poursuivre cette coopération pour donner suite aux recommandations des organes de contrôle.
Au vu de tous les programmes cibles de l’État, du travail constant d’amélioration du cadre législatif et institutionnel du Turkménistan et des résultats des activités pratiques dans le domaine du travail, de l’emploi et de la protection sociale de la population, le Turkménistan présente un fort potentiel de ratification d’un certain nombre d’autres conventions prioritaires de l’OIT et de mise en œuvre effective de leurs dispositions.
En conclusion, je voudrais vous assurer de la ferme détermination du Turkménistan d’accorder une attention particulière aux problèmes de justice sociale et économique, en vue de garantir les libertés et droits fondamentaux de l’homme.
Membres employeurs – Nous notons avec intérêt les informations partagées par le gouvernement. Nous souhaitons encourager le Turkménistan à poursuivre ses efforts pour mieux identifier et résoudre les problèmes inhérents au travail forcé dans la récolte du coton, qui ont conduit à faire de l’application de la convention par le Turkménistan un sujet de récurrent de discussion au sein de la commission. Le Turkménistan a ratifié la convention en 1997. La convention no 105 de l’OIT est une convention fondamentale qui appelle à l’abolition du travail forcé. Ce cas a été discuté en 2016, 2021, 2023 et, à nouveau, en 2024. Des observations ont été formulées par la commission d’experts sur ce cas en 2015, 2016, 2019, 2020, 2021, 2022, 2023, et encore aujourd’hui en 2024.
Pour être clair, les membres employeurs souhaitent souligner leur profonde détermination à parvenir à l’éradication du travail forcé. Nous sommes unis dans notre conviction qu’il ne devrait y avoir aucune place pour travail forcé dans notre monde du travail, en particulier un travail forcé commandé ou facilité par un État souverain. Nous sommes en outre prêts à exercer nos prérogatives à titre de partenaire social pour contribuer à l’éradication du travail forcé, que ce soit au Turkménistan ou n’importe où ailleurs dans notre monde.
Le contexte, comme toujours, est évidemment crucial, et il convient ici de noter que l’économie du Turkménistan est en grande partie dirigée par l’État, le secteur privé restant relativement faible et étroitement réglementé par l’État. Nous notons également que le Turkménistan est – selon la source consultée – le 13e ou 14e producteur mondial de coton, et que la récolte de coton du Turkménistan revêt une importance vitale pour son économie. Sans entrer dans le détail du contexte politique, nous souhaitons rappeler à nouveau que la commission a exprimé de graves préoccupations quant à l’indépendance des syndicats et des organisations d’employeurs du pays.
Quant au contexte juridique, outre la ratification de la convention, nous notons que la Constitution du Turkménistan (art. 33) garantit le droit de choisir librement une profession, un métier et un lieu de travail, dans des conditions de travail saines et sûres. Comme cela est indiqué dans la Feuille de route pour les activités de coopération entre l’OIT et le gouvernement pour 2024-25, la législation nationale interdit le travail forcé ou obligatoire sous forme de:
  • «toute pratique consistant à contraindre ou à mobiliser de force des personnes travaillant dans des entreprises, quelle que soit la forme de propriété, ou toute autre personne de moins ou de plus de 18 ans à cueillir du coton»;
  • «cueillette de coton par des salariés d’entreprises (organisations, institutions) de quelque forme de propriété que ce soit, pendant la semaine de travail, selon les horaires de travail fixés»;
  • «toute pratique qui oblige des salariés du secteur public ou privé ou toute autre personne à cueillir le coton, à embaucher des cueilleurs, à payer des cueilleurs de remplacement ou à financer d’une autre manière la cueillette du coton».
La réglementation en vigueur est assez éloignée du respect et de l’application de la législation susmentionnée. Il est évidemment utile d’avoir une réglementation, et ce, surtout en l’espèce, s’agissant d’un pays qui a volontairement ratifié la convention. Il semble néanmoins y avoir une lacune persistante et regrettable dans sa mise en œuvre et nous devrions tous nous en souvenir et continuer à avoir à l’esprit que le travail de cette estimable commission consiste à rechercher et garantir le respect de certaines conventions volontairement ratifiées, comme la convention no 105.
À cette fin, nous notons que la commission d’experts a identifié à plusieurs reprises de nombreuses pratiques abusives contraires à la convention, en particulier à l’article 1 b) de la convention qui interdit le travail forcé ou obligatoire comme méthode de mobilisation et pour des objectifs de développement économique, en soulignant ces pratiques au sein de l’industrie cotonnière turkmène.
Ces préoccupations sont à l’origine des missions de haut niveau de l’OIT, puis d’une feuille de route de coopération entre l’OIT et le Turkménistan, adoptée en mars 2023. La feuille de route de 2023 couvrait les six domaines suivants:
  • 1) le réexamen du cadre politique et administratif;
  • 2) l’amélioration de l’inspection du travail et de la mise en œuvre de la loi;
  • 3) la promotion du plein emploi, productif et librement choisi dans le secteur du coton;
  • 4) l’amélioration de la production et de la récolte de coton;
  • 5) la conception et la mise en œuvre d’activités de sensibilisation; et
  • 6) la promotion du dialogue social dans la production de coton.
Nous apprécions tous les progrès atteints dans le cadre de la feuille de route de 2023 et notons l’indication par le gouvernement que: i) une analyse du cadre législatif actuel a été réalisée et des projets de textes législatifs ont été soumis au Parlement; ii) des réunions ont eu lieu avec la participation des ministères et agences concernés, des partenaires sociaux et de représentants de l’OIT; iii) des efforts continuent d’être déployés pour produire une étude qualitative des pratiques de recrutement pour la récolte du coton; iv) un atelier technique a été organisé, lors de la mission du BIT en juillet 2023, sur l’emploi saisonnier et occasionnel; v) en 2021-22, plus de 200 réunions de sensibilisation, ateliers et tables rondes ont été organisés pour traiter des questions de l’emploi; et vi) enfin, les organisations nationales d’employeurs et de travailleurs sont associées activement à la mise en œuvre de toutes les mesures définies dans la feuille de route de 2023.
En outre, une autre mission de haut niveau de l’OIT, dirigée par le directeur régional du BIT pour l’Europe et l’Asie centrale, s’est déroulée du 19 au 23 février 2024 et s’est concentrée sur certains sujets, une table ronde ayant été organisée avec les autorités gouvernementales et les représentants des organisations nationales d’employeurs et de travailleurs pour discuter de la prochaine phase de coopération dans le cadre d’une feuille de route biennale pour 202425 et de la production d’un rapport synthétisant toutes les activités de recherche et les observations relatives à la récolte de coton de 2023. Une mission technique du BIT a également été effectuée du 14 au 16 mai 2024, il y a tout juste quelques semaines.
La nouvelle feuille de route bisannuelle conjointe a été approuvée par le gouvernement il y a quelques semaines, le 13 mai 2024. La feuille de route 2024-25 s’articule en quatre volets principaux: i) des actions prioritaires visant à renforcer le cadre politique, à prendre immédiatement et avant la récolte de coton de 2024, qui commence dans seulement deux mois. Cela implique, par exemple, la préparation d’un décret présidentiel, comme première étape d’une réforme législative, ainsi qu’une campagne de sensibilisation du public; ii) une amélioration substantielle du cadre législatif; iii) le renforcement de l’application de la législation et des normes internationales du travail; iv) d’autres réformes et une assistance complémentaires telles que, notamment, diverses mesures du programme d’assistance technique de l’OIT.
Les membres employeurs souhaitent souligner que le volet iv) de la feuille de route reconnaît que l’élimination durable du travail forcé dans la production de coton nécessite la participation active et le suivi du processus par des organisations d’employeurs et de travailleurs indépendants. Il convient de noter tout particulièrement à cet égard, que la commission d’experts a soulevé, dans son observation de l’année dernière sur l’application par le Turkménistan de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de graves problèmes d’ordre juridique liés au contrôle de l’État sur les organisations d’employeurs et de travailleurs. La Confédération syndicale internationale (CSI) a en outre questionné l’indépendance du mouvement syndical dans le pays, les membres employeurs partageant le même questionnement quant à l’indépendance des organisations d’employeurs et d’entreprises au Turkménistan. Les membres employeurs souhaitent souligner à cet égard que la liberté syndicale et la création d’organisations indépendantes d’employeurs et de travailleurs ne sont pas seulement des principes fondamentaux, mais qu’ils représentent également la garantie du respect des autres normes de l’OIT, telles que la convention no 105. Nous sommes convaincus que, comme prévu par la feuille de route, et conformément aux orientations fournies par les organes de contrôle des normes de l’OIT, une cartographie et une évaluation approfondies des organisations représentant les employeurs et les travailleurs au Turkménistan, ainsi que la révision du cadre juridique et institutionnel de ces organisations seront réalisées.
Nous notons également que la feuille de route 2024-25 prévoit la signature d’un mémorandum d’accord par le gouvernement et le BIT en vue d’une surveillance efficace des conditions de travail actuelles et de la production de rapports pertinents.
De notre point de vue, ce ne sont pas les protocoles envisagés ou les actions suggérées qui manquent sur le chemin qui mènera à l’élimination du travail forcé pendant les campagnes de récolte du coton au Turkménistan. Beaucoup d’encre a coulé à ce sujet. Il semblerait néanmoins que ce fléau perdure. Nous voulons croire et espérons que tous les efforts sont déployés pour donner effet aux protocoles et feuilles de route antérieurs afin de garantir un accès facilité et plus objectif aux faits et circonstances sur le terrain et, en outre, pour veiller à ce que le travail forcé soit éradiqué au Turkménistan.
Les membres employeurs n’ont jamais toléré et ne toléreront jamais le travail forcé en violation de la convention, en particulier le travail forcé commandé ou facilité par un État souverain. Le travail forcé est une pratique inadmissible et préjudiciable à tous points de vue, et ce, même d’un point de vue commercial. Il est radicalement contraire à l’éthique et c’est ce qu’on appelle une mauvaise affaire, dans tous les sens du terme.
Même si nous encourageons le gouvernement à poursuivre sa coopération avec le BIT, dans le cadre de la feuille de route 2024-25, nous insistons une fois de plus sur la nécessité de sa mise en œuvre avec des résultats tangibles. Nous sommes prêts, en tant que membres employeurs, à apporter toute l’aide que nos moyens permettent. Nous attendons avec impatience d’entendre les points de vue d’autres groupes sur ce cas.
Membres travailleurs – C’est la quatrième fois que notre commission examine l’application de la convention par le gouvernement. Cette année sera la deuxième année consécutive. En 2021, notre commission a invité le gouvernement à recevoir une mission de haut niveau. Cette mission s’est déroulée en novembre 2022. Les contacts entre le gouvernement et l’OIT ont conduit à l’adoption d’une feuille de route en mars 2023. Une autre mission de haut niveau de l’OIT a eu lieu en février 2024, aboutissant à une mise à jour de la feuille de route, approuvée par le gouvernement le 13 mai 2024.
Cette feuille de route prévoit des activités dans plusieurs domaines, qui permettront de progresser vers une plus grande conformité à la convention et une amélioration significative de la situation de nombreux travailleurs au Turkménistan. Cela constitue une avancée louable, mais on est encore loin de l’objectif d’éradication du travail forcé au Turkménistan. Nous exhortons le gouvernement à déployer sans délai tous les efforts nécessaires à la mise en œuvre effective de cette feuille de route.
En dépit de toutes les initiatives entreprises, des rapports établis par des observateurs indépendants indiquent que des pratiques de travail forcé persistent à grande échelle dans la production de coton au Turkménistan. L’absence de libertés fondamentales continue d’être un obstacle à l’élimination du travail forcé, et le droit fondamental de constituer un syndicat indépendant est toujours dénié aux travailleurs.
En 2022, les dirigeants des entreprises publiques ont été soumis à une pression accrue pour la mobilisation de travailleurs dans les plantations de coton. En particulier, des dizaines de milliers d’employés du secteur public, y compris des enseignants, des médecins, des personnels de la culture, ainsi que des fonctionnaires, ont été mobilisés pour récolter le coton afin d’atteindre les objectifs du plan national de récolte du coton. Nous avons cependant compris qu’en 2023 les enseignants et les médecins ne sont plus du tout impliqués dans la cueillette du coton, mais des milliers d’autres employés du secteur public sont encore mobilisés.
Les cueilleurs de coton sont contraints de travailler dans des conditions dangereuses et insalubres, notamment sous des températures allant de -10 degrés en décembre à plus de 40 degrés en août, exposés sans protection au soleil et ne disposant pas d’eau potable en quantité suffisante. Les cueilleurs de coton sont exposés aux substances chimiques sans mise en garde à ce sujet et ne bénéficient d’aucun équipement de protection ni de suivi médical. En outre, ils doivent payer leur propre nourriture, leur eau, leur transport et leur hébergement. Certains d’entre eux sont contraints de faire appel à des cueilleurs de remplacement, qu’ils rémunèrent de leur poche, pour éviter leur propre participation à la récolte du coton.
Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a, lui aussi, exprimé son inquiétude, dans ses observations finales de 2023, au sujet du recours généralisé au travail forcé des employés du secteur public pendant la campagne de récolte cotonnière, sous la menace de sanctions, telles qu’une rupture de leur contrat de travail ou encore la perte ou une réduction de leur salaire.
Par ailleurs, une mission indépendante d’observation du BIT sur les conditions de travail et le recrutement de cueilleurs de coton, composée de personnels du BIT et de consultants indépendants, s’est déroulée pendant la campagne de récolte en octobre 2023. Les premiers résultats de cette mission mettent en évidence des preuves directes et indirectes d’une mobilisation de fonctionnaires dans toutes les régions visitées, à l’exception d’une seule. Nous regrettons que le rapport complet de cette mission d’observation ne soit toujours pas mis à disposition de la commission.
Il est agréable de noter que la coopération du gouvernement avec l’OIT pour la mise en œuvre des recommandations de notre commission permet une vision plus claire de la situation sur le terrain, et d’être ainsi en mesure de fournir au gouvernement l’assistance la plus appropriée. Néanmoins, nous sommes obligés de partager la profonde préoccupation de la commission d’experts face à la pratique persistante du travail forcé dans le secteur du coton. C’est pourquoi nous ne pouvons qu’inviter instamment le gouvernement à redoubler d’efforts pour donner suite à toutes les initiatives prises en collaboration avec l’OIT.
Ces initiatives ont clairement identifié les domaines dans lesquels des mesures assorties de délais sont nécessaires.
Tout d’abord, il faut que le cadre politique et administratif régissant la récolte du coton soit revu. Nous avons vu par le passé que le plan national de récolte et les objectifs qui lui sont assignés sont mis en œuvre aux niveaux régional et local. Il est donc important que chaque maillon de cette chaîne apporte sa contribution aux efforts visant à mettre la situation en conformité avec la convention.
Une mission technique du BIT a été constituée en mai 2024 pour aider le gouvernement à formuler des instructions précises sur le recrutement et les conditions de travail pour la prochaine récolte de coton, la mise à jour de la liste des travaux dangereux pour les enfants, la fixation d’un salaire juste pendant la récolte de coton, la mise en place de mécanismes de plaintes, la stratégie et les mesures relatives aux campagnes de sensibilisation, ainsi que les paramètres à prendre en compte pour l’observation de la récolte de coton de 2024 par l’OIT.
L’inspection du travail a évidemment un rôle fondamental à jouer pour résoudre les problèmes inhérents à la récolte de coton. Le gouvernement doit s’atteler à renforcer l’inspection du travail et à son fonctionnement efficace. Les initiatives concrètes prises dans la perspective de la ratification des conventions nos 81 et 129 doivent être saluées, et nous encourageons le gouvernement à poursuivre sans relâche ses efforts dans cette voie.
Des efforts doivent également être consacrés par le gouvernement à la promotion de l’emploi productif et librement choisi, au développement et à la mise en œuvre d’actions de sensibilisation et de promotion du dialogue social dans le processus de production du coton.
Nous notons que plus de 200 réunions, ateliers et tables rondes de sensibilisation se sont déroulés au cours de la période 2021-22. Face à l’enracinement des pratiques de mobilisation forcée à l’occasion des campagnes de récolte de coton au Turkménistan, il est indispensable de poursuivre ce type d’activités et de les multiplier pour que toutes les couches de la société soient sensibilisées à cette problématique.
Les conditions de production et de récolte du coton doivent être améliorées pour compenser la carence de travail décent dans plusieurs régions. La prochaine récolte de coton sera déterminante pour évaluer les avancées concrètes réalisées par le gouvernement.
Nous voulons croire que le gouvernement ne manquera pas de faire publiquement des déclarations de politique de haut niveau condamnant travail forcé, et interdisant aux responsables, à tous les niveaux, de recourir à la coercition pour mobiliser quiconque à travailler. En outre, nous espérons que des observateurs indépendants du travail pourront documenter et signaler, sans entrave et sans crainte de représailles, les conditions de travail, et veiller à ce que leurs conclusions soient intégrées dans le suivi du contrôle.
Outre le maintien d’une étroite collaboration avec le BIT, il est important que le gouvernement autorise des partenaires sociaux nationaux et internationaux indépendants à participer au processus. Cette participation garantira la transparence, un plus grand respect de la convention et un suivi étroit de la mise en œuvre de la feuille de route conjointe. C’est seulement grâce au dialogue social tripartite que des réponses durables aux défis auxquels le Turkménistan est confronté pourront être trouvées. Il est donc de la plus haute importance que le Turkménistan garantisse également un environnement propice à la liberté d’association afin de mettre fin aux défauts d’application de la convention.
Membre gouvernementale, Belgique – J’ai l’honneur d’intervenir au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres. L’Albanie, la Macédoine du Nord et le Monténégro, pays candidats, ainsi que la Norvège, pays de l’Association européenne de libreéchange et membre de l’Espace économique européen, s’alignent sur cette déclaration.
L’Union Européenne et ses États membres se sont engagés à respecter, à protéger et à appliquer les droits de l’homme, y compris les droits du travail. Nous encourageons la ratification universelle et la mise en œuvre effective des conventions fondamentales de l’OIT et soutenons l’OIT dans l’élaboration et la promotion de normes internationales du travail, ainsi que dans le contrôle de leur application.
Les droits de l’homme constituent un aspect fondamental de nos relations bilatérales avec le Turkménistan. L’Union européenne et le Turkménistan entretiennent un dialogue annuel donnant lieu à des discussions sur les droits de l’homme.
En juin 2023, la commission a déploré la persistance du recours généralisé au travail forcé dans les campagnes annuelles de récolte de coton organisées par l’État et le fait que le gouvernement n’a pas réalisé de progrès significatifs en la matière depuis les discussions de ce cas de 2016 et 2021.
Nous saluons, dans ce contexte, le développement récent de la coopération entre le gouvernement et le BIT en vue de traiter ce problème durable lié à la mise en œuvre efficace de la convention. Nous remercions le Bureau pour son engagement actif dans la promotion des droits du travail et de l’éradication du travail forcé au Turkménistan, ainsi que le gouvernement pour avoir accepté de se prévaloir de l’assistance technique du BIT, impliquant plusieurs missions. Nous exhortons le Turkménistan à traduire son engagement par des avancées concrètes.
Nous prenons note des informations écrites fournies par le gouvernement, notamment au sujet des domaines prioritaires de la feuille de route adoptée pour les activités de coopération entre le BIT et le gouvernement pour la période 2024-25. Nous nous réjouissons de ce que la priorité soit accordée, par le biais de politiques et de mesures administratives et législatives, à l’abolition et à la prévention du travail des enfants et du travail forcé ou obligatoire à l’occasion de la récolte du coton.
Nous référant à la feuille de route, nous attendons du gouvernement qu’il assure une protection adéquate de toutes les personnes qui déposent des plaintes, et qu’il fournisse aux victimes des services de soutien, ainsi qu’un accès effectif aux moyens de recours. Nous saluons le projet du Bureau de l’Ombudsman de s’impliquer dans le contrôle de la situation et le traitement des plaintes liées au travail forcé. Il est extrêmement important que le gouvernement garantisse par la voie du dialogue social un emploi et des conditions de travail décents pour les cueilleurs de coton, notamment une rémunération juste et décente. La poursuite de la collaboration avec l’OIT est importante à cet égard, en particulier dans la perspective de ratification de la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947, et de la convention (no 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969, des conventions fondamentales sur la santé et la sécurité au travail; la convention (no 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, la convention (nº 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, 2006, la convention (no 102), concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952, ainsi que le protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930.
Nous saluons la collaboration avec l’OIT pour la préparation d’un projet de mémorandum d’accord sur l’étude des conditions de travail de la campagne de récolte cotonnière de 2024 au Turkménistan, et appelons avec force la concrétisation des améliorations annoncées du cadre législatif. Nous avons pris note des informations fournies par le gouvernement quant à l’engagement du Parlement du Turkménistan en matière d’activités de sensibilisation au travail forcé et au travail des enfants et encourageons le gouvernement à persévérer dans ce sens.
Tout en saluant les initiatives du gouvernement, nous sommes profondément préoccupés par les observations de la CSI sur la pression accrue exercée sur les dirigeants des entreprises étatiques pour une mobilisation de travailleurs, y compris des employés du secteur public, pour la récolte du coton, afin de respecter les objectifs de la récolte nationale de coton. Nous sommes aussi profondément préoccupés par les conditions dangereuses dans lesquelles le travail est exécuté, la pratique consistant à imposer des taxes pour le remplacement de cueilleurs et par le fait que la majorité des fonctionnaires soumis au travail forcé est constituée de femmes.
Nous regrettons que les conclusions de la mission d’observation indépendante du BIT, menée lors de la récolte en octobre 2023, fournit également des preuves directes ou indirectes d’une mobilisation de fonctionnaires.
Nous associant à la demande de la commission d’experts, nous exhortons le gouvernement à redoubler d’efforts dans son engagement à collaborer avec l’OIT et les partenaires sociaux, afin de mettre pleinement en œuvre la convention dans la pratique, et de garantir ainsi l’élimination complète du recours aux travail forcé des travailleurs, notamment du secteur public, dans la production de coton. Nous voulons croire que le gouvernement continuera de fournir des informations sur les mesures concrètes prises pour mettre pleinement en œuvre la feuille de route.
L’Union européenne et ses États membres saluent la récente ouverture du gouvernement à la perspective de l’élimination du travail forcé dans le pays et sa disponibilité à continuer à coopérer avec l’OIT. Nous espérons que cela aboutira bientôt à des avancées concrètes. Nous sommes prêts à apporter notre appui au Turkménistan pour lui permettre de remplir ses obligations au titre des conventions ratifiées, et nous continuerons à suivre de près la situation dans le pays.
Membre gouvernementale, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord – Je m’exprime au nom de l’Australie, du Canada et de mon propre pays, le Royaume-Uni. La Grande-Bretagne est, depuis plusieurs années, directement engagée sur cette question au Turkménistan.
Nous remercions le gouvernement pour les nouvelles informations fournies sur la mise en œuvre de la convention. Nous notons que ces informations mettent en évidence plusieurs mesures prises par le gouvernement en réponse aux observations de la commission d’experts, notamment via la feuille de route des activités de coopération entre le BIT et le gouvernement pour 2024-25, adoptée suite à la mission de haut niveau de l’OIT en février 2024.
Nous notons les projets du gouvernement visant à inscrire dans la législation des dispositions interdisant le travail forcé ou obligatoire pendant la récolte du coton, notamment un projet de décret présidentiel. Nous espérons une adoption rapide de ce texte.
En ce qui concerne le travail des enfants, nous saluons le projet d’inclusion, dans la législation, des activités liées à la récolte du coton, afin d’interdire le travail des enfants, ainsi que l’annonce d’une vaste campagne de sensibilisation du public sur l’interdiction de la mobilisation et de l’implication du travail des enfants. Nous espérons que de telles initiatives se concrétiseront rapidement.
Nous notons également les avancées enregistrées dans d’autres domaines dépassant le champ d’application immédiat de la convention, comme la fourniture d’une assistance technique pour faciliter l’accès des victimes à des procédures de recours efficaces. Tout en constatant des progrès, nous demeurons profondément inquiets et exhortons vivement le gouvernement à prendre des mesures immédiates et efficaces pour:
  • adopter ses projets législatifs et déployer rapidement ses activités de sensibilisation;
  • continuer à travailler de manière constructive et en collaboration avec l’OIT, le Coordonnateur résident des Nations unies, des partenaires sociaux indépendants et d’autres programmes de développement;
  • continuer à se prévaloir de l’assistance technique du BIT pour cette convention, les autres conventions mentionnées dans la feuille de route et son adhésion au protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé.
Nous pensons que, en agissant avec détermination, le Turkménistan pourra éliminer, une fois pour toutes, le travail forcé, et améliorer les conditions de recrutement et de travail dans la filière du coton.
Nous espérons sincèrement que le prochain rapport du gouvernement à la commission d’experts fournira la démonstration de la pleine mise en œuvre de la feuille de route, ainsi que d’autres avancées tangibles vers l’élimination du travail forcé au Turkménistan.
Membre employeuse, Argentine – Le secteur employeur argentin apprécie l’acceptation par les autorités du Turkménistan de l’assistance technique du BIT, ainsi que des missions de haut niveau qui se sont succédé ces dernières années, en particulier les missions couvrant les périodes de récolte de coton d’octobre 2023 et février 2024. Néanmoins, au vu des conclusions résultant de ces missions, nous regrettons de devoir constater, à nouveau cette année, l’absence de progrès tangible en matière de respect des obligations découlant de la convention. En conséquence, nous faisons écho à la demande des experts au gouvernement de poursuivre ses efforts pour garantir l’élimination du travail forcé au Turkménistan.
Nous souhaitons, en particulier, mettre en lumière le point 4.3 de la feuille de route 2024-25 pour souligner l’importance du recours à l’assistance technique afin de garantir le dialogue avec des organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives et indépendantes. Le dialogue avec les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs permet d’identifier et de traiter les causes et les facteurs de risque associés au travail forcé, et de contrôler de manière efficace la mise en œuvre des politiques définies.
À cet égard, nous estimons que ce cas doit être examiné en lien avec les recommandations de la commission d’experts sur l’application de la convention no 87 au Turkménistan.
Nous voulons souligner que la liberté d’association, y compris le libre choix des représentants des travailleurs et des employeurs, sont non seulement des principes fondamentaux, mais également des éléments qui définissent les conditions nécessaires au plein respect des autres normes internationales du travail, comme de cette convention.
Ainsi que cela a été dit au cours d’autres sessions de cette commission, l’efficacité et la durabilité des mesures visant à lutter contre le travail forcé sont indissociables de l’environnement réglementaire et économique des pays.
Par conséquent, nous espérons que, à la lumière de ce débat, le gouvernement mettra en œuvre les mesures définies dans la feuille de route 2024-25 et s’engagera à déployer tous les efforts nécessaires pour garantir le fonctionnement de mécanismes de dialogue social institutionnalisés et transparents, et qu’il continuera, afin d’éliminer le travail forcé dans le pays, de s’appuyer sur l’assistance technique du BIT pour un suivi adéquat, en droit et dans la pratique.
Membre gouvernemental, Azerbaïdjan – L’Azerbaïdjan exprime sa gratitude pour les informations détaillées fournies sur la situation actuelle relative à la mise en œuvre de la convention. Nous tenons à souligner les efforts déployés par le gouvernement pour mettre en œuvre la convention, en étroite coopération avec l’OIT. Les missions d’observation effectuées par l’OIT en 2023, ainsi que la mission programmée pour la période de récolte de coton de l’année en cours, augurent d’une ouverture et d’un engagement du gouvernement à coopérer pour la résolution des problèmes.
Nous saluons le succès de la mise en œuvre de la feuille de route de coopération entre le Turkménistan et le BIT pour 2023, ainsi que l’élaboration et l’adoption de la nouvelle feuille de route pour 2024-25, avec des mesures concrètes en vue de l’application de la convention et de l’adoption de la base législative pertinente.
Je voudrais également souligner les mesures prises par le gouvernement pour maintenir le dialogue avec les partenaires sociaux. Comme l’a mentionné la délégation, la réunion de la commission tripartite avec les partenaires sociaux est un bon exemple de l’engagement de la partie turkmène pour une approche globale.
Membre travailleur, Pays-Bas – Cette déclaration est également faite au nom des travailleurs allemands et autrichiens, ainsi qu’au nom des travailleurs de la Confédération du Travail de Russie (KTR). Année après année, lors de la récolte du coton, qui a lieu entre août et décembre, le gouvernement turkmène oblige des dizaines de milliers de travailleurs du secteur public à cueillir du coton ou à rémunérer des cueilleurs de remplacement, sous peine de sanction, y compris perte d’emploi, réduction du temps de travail ou du salaire, et extorque de l’argent aux mêmes travailleurs pour payer des dépenses liées à la récolte.
Au Turkménistan, la récolte du coton au moyen du travail forcé n’est pas une anomalie, mais constitue une partie intégrante du système autoritaire de la production agricole, qui induit à la fois la pauvreté dans les zones rurales et le travail des enfants.
Le recours au travail forcé des employés du secteur public pour la récolte du coton est généralisé et systémique dans toutes les régions qui ont été observées par des chercheurs indépendants. De nombreux fonctionnaires évoquent des mobilisations d’ici la mi-août. En décembre, malgré des températures inférieures à zéro, environ 25 pour cent des employés du secteur public ont été contraints de cueillir du coton ou de payer pour leur remplacement pendant la semaine, et encore plus d’employés étaient envoyés aux champs le week-end.
Nous saluons la signature récente de la feuille de route pour 2024-25 et l’engagement du gouvernement à travailler avec l’OIT. Nous considérons que la feuille de route contient les mesures importantes et indispensables, que le gouvernement devra prendre pour abolir toutes les formes de travail forcé dans le pays.
Cependant, toute initiative visant à définir des solutions, doit impliquer la participation d’organisations indépendantes de travailleurs tout au long du processus. Malheureusement, ce n’est toujours pas le cas. Par conséquent, nous tenons à souligner qu’il est inacceptable que les représentants du gouvernement du Turkménistan formulent et exécutent des plans avec le BIT sans impliquer les partenaires sociaux, constituants à part entière de cette institution.
Nous joignons notre voix à celles des orateurs précédents, pour exhorter les autorités du Turkménistan à coopérer pleinement avec les organes du mécanisme de contrôle de l’OIT et à mettre en œuvre leurs recommandations. Le gouvernement devra établir, sur la base des conseils techniques de l’OIT, des critères précis lui permettant de remplir ses obligations au titre de toutes les conventions fondamentales du travail de l’OIT et en faire rapport.
Interprétation du russe: Membre gouvernemental, Bélarus – Je voudrais remercier le gouvernement pour les informations détaillées sur la question dont nous sommes saisis. Nous notons l’engagement du gouvernement et des organisations de travailleurs et d’employeurs s’agissant des principes du dialogue tripartite et de la participation active de l’OIT à l’élaboration de la feuille de route pour 2024-25. Nous saluons les recommandations de la feuille de route d’inclure dans les dispositions de la législation nationale des dispositions relatives à l’interdiction du travail forcé, du travail des mineurs dans des entreprises dangereuses, ainsi qu’à la création d’un environnement de travail sûr. Nous saluons les efforts déployés par le gouvernement pour coopérer avec les partenaires sociaux, ainsi que la sensibilisation accrue de la population au rejet du recours au travail forcé et au travail des enfants. Nous saluons le travail du BIT et invitons ce dernier à continuer de fournir une assistance technique, notamment dans le cadre de feuille de route pour 2024-25, et garantir de nouveaux progrès tout en protégeant les droits et intérêts des travailleurs.
Membre employeur, États-Unis d’Amérique La Fédération américaine du travail et Le Congrès des organisations industrielles (AFL-CIO) sont des membres fondateurs de Cotton Campaign, une coalition multipartite dédiée à mettre fin au recours au travail forcé à l’occasion des récoltes annuelles de coton dans plusieurs pays d’Asie centrale. En tant que membre de cette campagne, nous saluons la décision prise par le gouvernement des États-Unis, en 2018, d’interdire l’importation de produits contenant du coton turkmène, au motif du recours systématique au travail forcé soutenu par l’État. Comme d’autres l’ont fait, nous prenons note des progrès significatifs réalisés depuis l’examen de ce cas par cette commission l’année dernière.
Il est important de noter que le gouvernement ne nie plus l’existence du travail forcé au cours de la récolte annuelle de coton, comme en témoigne la feuille de route 2024-25, récemment signée. Mais ce n’est là qu’un premier pas sur la route qui conduira à la fin du recours systémique au travail forcé pour la récolte du coton. Comme cette commission le sait trop bien, la feuille de route n’en est qu’une première étape. Des progrès réels dépendront de sa mise en œuvre effective et transparente, avec la pleine participation des partenaires sociaux.
Comme le montre un récent rapport de suivi indépendant, le recours systémique au travail forcé par le gouvernement persiste bel et bien dans les activités de récolte de coton au Turkménistan.
  • Des employés du secteur public sont à nouveau mobilisés en masse et contraints de récolter le coton ou de payer pour des cueilleurs de remplacement.
  • Des enfants sont toujours embauchés dans les champs de coton, comme «cueilleurs de remplacement» ou pour aider un parent à respecter un quota.
  • Des observateurs indépendants et des journalistes sont toujours persécutés et encourent de gros risques lorsqu’ils font des rapports sur la récolte annuelle.
  • Les travailleurs se voient toujours refuser leurs droits fondamentaux de constituer un syndicat indépendant et de négocier collectivement.
Le plan d’action est une première étape importante, mais il faudrait à présent le voir mis en œuvre de manière inclusive et transparente. Cela signifie que les partenaires sociaux de l’OIT doivent être pleinement consultés aux fins d’évaluation du degré de conformité et comprendre les méthodologies sur lesquelles s’appuient les conclusions de tout rapport de l’OIT. C’est de cette seule manière que pourra être bâtie la conviction que des progrès durables sont réalisés et que l’État s’attaque effectivement aux causes profondes de ce système bien enraciné de travail forcé. Ce sera alors, et seulement alors, que le Turkménistan pourra enfin produire et commercialiser du coton exempt de toute souillure de travail forcé.
Membre gouvernemental, Kazakhstan – La délégation kazakhe remercie le représentant du gouvernement du Turkménistan pour son rapport. Nous saluons l’engagement récent du gouvernement avec l’OIT, notamment à mettre en œuvre la feuille de route de coopération pour la période 2024-25. Cette feuille de route définit des mesures concrètes ainsi que le renforcement du dialogue entre le gouvernement et le BIT. Nous encourageons le gouvernement à poursuivre ses efforts visant l’élimination complète du recours au travail obligatoire dans la production de coton.
Membre travailleur, Royaume-Uni – Le coton s’infiltre partout dans les chaînes d’approvisionnement. Nous savons qu’une partie du coton du Turkménistan arrive directement au Royaume-Uni mais, ce qui est bien plus inquiétant, c’est la grande partie qui passe par la Turquie, fournisseur important de produits textiles finis sur le marché britannique. Dès lors que ce coton devient un produit fabriqué en Turquie et est exporté vers nos magasins, ses origines deviennent plus difficiles à tracer.
Nous savons que les entreprises sont responsables du respect des droits de l’homme dans leurs chaines d’approvisionnements, comme énoncé dans les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (UNGP) et – de plus en plus – dans les législations nationales et transnationales. Des syndicats libres et indépendants, parfois par le biais d’initiatives multipartites, comme l’initiative conjointe de commerce équitable du Royaume-Uni et de l’Irlande, jouent un rôle à la fois dans l’amélioration des droits des travailleurs dans les chaînes d’approvisionnement et dans la supervision de ces améliorations, en fournissant une part de la diligence nécessaire qu’aucun auditeur de passage ne pourrait jamais fournir.
La situation au Turkménistan représente néanmoins un défi à cet égard. Le coton produit par recours au travail forcé se faufile facilement dans la complexité des chaînes d’approvisionnement des entreprises, lesquelles, si ce n’était pas le cas, pourraient avoir un comportement éthique, relever le défi et le dépasser à la source. Mais, au Turkménistan, les syndicats ne peuvent pas fonctionner librement et n’ont donc pas la possibilité de vérifier si ce coton, dont une partie finira inévitablement dans les chaînes d’approvisionnement britanniques, est exempt de tout signe de travail forcé.
Il semble à première vue qu’il y ait eu des progrès au Turkménistan et cela doit être salué. Cependant, la façade est tout ce qu’il nous est permis de voir et, tant que les choses ne changent pas sur le terrain, nous continuerons à craindre que les réformes soient parcellaires et ne parviennent pas à répondre aux préoccupations importantes générées par des études antérieures et les évaluations indépendantes de la récolte de 2023. Celles-ci nous indiquent que, si ces derniers temps les médecins et les enseignants ont finalement été exemptés de la cueillette du coton, d’autres employés du secteur public sont toujours obligés de travailler dans les champs de coton, sans aucune intervention efficace du gouvernement pour demander des comptes aux responsables. Ceux qui étaient obligés de travailler ont dû supporter les conditions difficiles, insalubres et dangereuses décrites plus tôt par mes collègues.
Mettre fin au travail forcé nécessite une stratégie globale qui va bien au-delà d’une simple réduction du nombre de personnes obligées de cueillir le coton. Pour garantir des réformes pérennes, il est indispensable de généraliser l’imposition des droits du travail, y compris les libertés d’association et de négociation collective. Des partenaires sociaux indépendants peuvent jouer un rôle essentiel dans l’élaboration, la mise en œuvre et – plus encore – la vérification de réformes substantielles et durables visant à éliminer le travail forcé imposé par l’État et l’exploitation des agriculteurs dans le secteur du coton.
Les syndicats sont prêts à s’impliquer dans la feuille de route avec le BIT et estiment que des structures fortement responsabilisées sont indispensables pour aider à soutenir les progrès vers les buts visés et à éviter un prochain retour trop rapide devant le système de contrôle de l’OIT. Cet engagement doit être consistant, impliquer des syndicats indépendants à tous les niveaux et, en fin de compte, assurer que ces derniers seront en mesure de jouer le rôle qu’ils jouent ailleurs, tout en contribuant aux progrès espérés par toutes les parties, et en les vérifiant.
Membre gouvernemental, Kirghizistan – La délégation kirghize exprime sa gratitude au gouvernement pour son rapport écrit. Nous félicitons le Turkménistan pour son engagement à défendre les conventions de l’OIT et reconnaissons les progrès qu’il a réalisés en réponse aux recommandations de l’OIT.
Nous apprécions les efforts fournis pour soutenir les droits des travailleurs et les initiatives nationales favorisant le dialogue social. L’engagement du Turkménistan en faveur du dialogue et de la coopération avec l’OIT est particulièrement louable. En février de cette année, le gouvernement s’est engagé, avec la délégation de haut niveau du BIT, dans des discussions approfondies qui ont abouti à l’adoption de la feuille de route pour la coopération 2024-25.
Le Turkménistan continue de prendre résolument des mesures visant à interdire le travail forcé et le travail des enfants, et à aligner sa législation sur la convention de l’OIT sur l’interdiction du travail des enfants, tout en dirigeant ses efforts vers l’adhésion aux principales conventions de l’OIT sur l’inspection du travail et sur la sécurité sociale. En outre, le Turkménistan a accueilli une mission technique du BIT, il y a quelques semaines au cours du mois de mai.
Nous sommes convaincus de l’importance du dialogue et de la coopération, tels que soulignés dans la Constitution de l’OIT. Le maintien d’un dialogue constructif est crucial pour le bénéfice des travailleurs, des employeurs et de l’économie, en général.
En conclusion, nous exprimons au gouvernement notre sincère reconnaissance pour son engagement en faveur d’un dialogue constructif avec l’OIT, et appelons à la poursuite d’un engagement actif avec les organes de l’OIT, pour le bien de tous
Membre travailleur, France – Je m’exprime au nom des travailleurs français. Le Turkménistan est le 14e producteur mondial de coton et le recours au travail forcé pour assurer sa récolte y est organisé par les autorités publiques. Pour opérer la récolte, les autorités publiques établissent des quotas coercitifs, mobilisent toutes les ressources humaines disponibles et font donc appel, sous la contrainte, aux agents de l’État, aux fonctionnaires, dont la tâche n’est pas du tout habituellement l’agriculture. Des sanctions frappent celui ou celle qui voudrait échapper à ce système. Les autorités créent ainsi un environnement propice aux abus et à la corruption tout au long de la chaîne de production.
Les conditions de travail sont très difficiles. Ils n’ont pas assez d’eau potable, doivent trouver à se loger et à se nourrir. Ils ne reçoivent pas les équipements de protection appropriés, sont exposés à des produits chimiques et à des engrais.
Les travailleurs ne peuvent échapper à cette mobilisation forcée: soit ils vont travailler dans les champs, soit ils trouvent et payent quelqu’un pour se faire remplacer, soit ils versent une contribution à leur responsable hiérarchique sur leur lieu de travail habituel qui se chargera ensuite de recruter des remplaçants et de prélever au passage sa dîme. Ce système frappe surtout les employés du secteur public et singulièrement les femmes, qui constituent la majorité de cette main-d’œuvre payée au lance-pierre et mobilisée de façon quasi forcée dans des métiers qui ne sont pas les leurs.
Selon les observateurs indépendants, si pour la récolte 2023 deux catégories des agents publics – les enseignants et les médecins – n’étaient plus forcés à travailler ou à payer des remplaçants, ce système a perduré pour d’autres catégories d’agents publics moins qualifiés tels les aides-soignants, infirmiers, personnels techniques, cantonniers, etc.
L’intention du gouvernement de travailler avec l’OIT, qui s’est concrétisée par des missions sur le terrain et la signature de la feuille de route 2024-25, est une étape importante et nécessaire pour mettre fin à cette pratique de travail forcé. Toutefois, l’absence de liberté d’association, l’inexistence de syndicats indépendants, l’absence de liberté de la presse rendent très difficiles le contrôle et l’application des recommandations de l’OIT et rendent incertain et fragile tout progrès éventuel. L’intention d’éradiquer le travail forcé ne pourra être couronnée de succès que si le pays met véritablement en œuvre les conventions fondamentales de l’OIT.
Membre gouvernemental, Suisse – La Suisse soutient la déclaration faite par l’Union européenne et souhaite partager les points suivants. Tout comme l’OIT, la Suisse accorde une importance particulière à l’abolition du travail forcé à travers le monde. À cet égard, la Suisse regrette de devoir à nouveau discuter du non-respect de la convention no 105 – une convention fondamentale – par le Turkménistan.
Le recours au travail forcé dans la production de coton à travers la mobilisation et l’utilisation généralisées de maind’œuvre, y compris des fonctionnaires, semble être toujours une pratique courante et répandue au Turkménistan. Ces travailleurs, principalement des femmes, sont menacés de sanctions, telles que la résiliation de leur contrat de travail, la réduction de leur salaire ou d’autres pénalités s’ils ne se soumettent pas à cette obligation de travail. En outre, les travailleurs forcés de cueillir du coton travaillent généralement dans des conditions dangereuses et insalubres.
La Suisse rappelle que ce cas a déjà fait l’objet de discussions devant la commission à trois reprises au cours des dernières années: en 2016, 2021 et 2023. Ces discussions ont toutes abouti à des appels clairs et répétés au gouvernement de mettre un terme à ses pratiques systémiques de recours au travail forcé dans le cadre de la récolte et production de coton.
La Suisse prend note et salue le fait que, après plusieurs missions d’assistance technique de haut niveau du BIT, une feuille de route pour la coopération entre le BIT et le gouvernement, incluant des mesures tangibles pour améliorer les conditions des travailleurs, a été adoptée en mars 2023. La Suisse regrette toutefois que ces mesures ne soient pas systématiquement mises en œuvre par le gouvernement – certains groupes de travailleurs du secteur public semblant en effet être exclus du champ d’application de celles-ci.
Dans ce contexte, la Suisse réitère instamment son appel au gouvernement de mettre en place des mesures concrètes et effectives pour éliminer, en droit et en pratique, le travail forcé pour tous les travailleurs, conformément à la convention.
Enfin, la Suisse soutient les conclusions et recommandations de la commission d’experts enjoignant le Turkménistan à communiquer activement sur les mesures prises et les résultats concrets obtenus, ainsi que de continuer à utiliser l’assistance technique du BIT pour améliorer les conditions de recrutement et de travail dans le secteur du coton.
Membre gouvernemental, États-Unis – Les États-Unis remercient le gouvernement pour les informations complémentaires fournies à cette commission en réponse aux récentes observations de la commission d’experts. Nous saluons l’approbation et la publication de la feuille de route pour la coopération 2024-25 entre le BIT et le gouvernement, portant sur: des mesures et des campagnes de sensibilisation pour lutter contre le travail forcé et le travail des enfants et garantir aux travailleurs un salaire minimum et des conditions de travail sûres dans un environnement sain; l’amélioration du cadre législatif de prévention et d’interdiction du travail forcé; une assistance technique favorisant l’adhésion du gouvernement à d’autres conventions de l’OIT; une assistance technique pour l’élaboration de procédures de poursuite contre les personnes accusées de porter atteinte aux droits du travail d’autrui; une assistance technique en matière de développement et d’analyse de bases de données permettant de scruter les pratiques d’embauche, le travail des enfants et le travail forcé, et de promouvoir le dialogue social, le travail décent et une évolution juste dans la filière du coton; ainsi que l’organisation de tables rondes périodiques d’information sur la formulation de politiques visant à prévenir la mobilisation et le recours au travail des enfants dans les activités cotonnières.
Nous encourageons le gouvernement à poursuivre activement ses efforts pour parvenir à l’élimination complète du recours au travail obligatoire dans la production de coton. Nous saluons la coopération du gouvernement avec l’OIT pour l’élaboration des normes législatives alignées sur la convention, tout en luttant contre le travail forcé dans le secteur du coton.
Nous notons par ailleurs que des représentants indépendants de travailleurs joueront le rôle de partenaires essentiels pour l’adoption de nouvelles approches juridiques et politiques vers l’élimination des causes profondes du travail forcé dans la filière du coton. Nous exhortons le gouvernement à modifier, à cette fin, les dispositions de la loi sur les syndicats et celles de la loi sur les associations publiques, qui confèrent au gouvernement le pouvoir d’exercer un contrôle indu sur les activités syndicales, y compris sur le choix des dirigeants syndicaux. Tout en saluant la décision du gouvernement de confier aux représentants de l’OIT l’observation de la récolte de coton, nous sommes préoccupés par la persistance d’informations documentées sur le recours au travail forcé dans les plantations et sur des politiques qui perpétuent la mobilisation des travailleurs pour le travail forcé. Nous espérons vivement que la coopération du gouvernement avec l’OIT et la mise en œuvre intégrale de la feuille de route 2024-25 se poursuivront en vue de l’éradication du travail des enfants et du travail forcé. Les États-Unis sont résolument déterminés à fournir leur appui au gouvernement pour faire progresser les droits des travailleurs au Turkménistan.
Observateur, Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) – Les rapports de la Campagne du Coton et de la Mission de surveillance des droits du travail en Asie centrale montrent que l’utilisation de diverses formes de coercition pour la récolte du coton reste massive et systémique au Turkménistan. De larges groupes de travailleurs du secteur public, y compris des employés d’écoles, d’institutions préscolaires, d’établissements de santé et d’entreprises d’État, sont toujours envoyés dans les champs.
Le gouvernement nie systématiquement la nature coercitive de la main-d’œuvre forcée, arguant que les autorités ne reçoivent pas de plaintes. Il y a lieu d’observer que le pays n’a pas créé des conditions permettant un contrôle public par des organisations non gouvernementales, des médias, ni des syndicats indépendants, qui pourraient réagir à une telle information et mener, en collaboration avec des organisations internationales, des actions visant à protéger les travailleurs.
À cet égard, nous saluons la signature récente de la feuille de route, qui démontre l’intention du gouvernement de coopérer avec l’OIT pour éradiquer le travail forcé. Un certain nombre de mesures prévues dans le document pourraient effectivement avoir un impact positif sur la situation, si le travail est réalisé de manière transparente et ouverte à des consultations avec les partenaires sociaux indépendants, en particulier les syndicats mondiaux internationaux comme le nôtre, l’UITA, et la CSI.
Nous appelons le gouvernement à poursuivre de manière significative sa coopération avec l’OIT afin d’aligner la législation et l’application pratique de la législation sur les dispositions des conventions ratifiées. Cela devrait s’inscrire dans un cadre plus large visant à conduire le pays vers la mise en œuvre effective de toutes les conventions fondamentales de l’OIT et, par-dessus tout, du droit à la liberté syndicale.
Président Le délégué des employeurs et le délégué des travailleurs du Turkménistan demandent à prendre la parole. J’accepte cette demande et donne la parole au délégué des travailleurs du Turkménistan.
Interprétation du russe: Membre travailleur, Turkménistan – Nous sommes très heureux de pouvoir prendre la parole au sein de notre réunion d’aujourd’hui. Comme cela a déjà été dit, le cas du Turkménistan a été discuté à plusieurs reprises. Je voudrais me concentrer en particulier sur le rôle joué par les syndicats pendant cette période: ce qu’ils ont accompli, les progrès réalisés et les résultats atteints. Comme l’ont noté les experts et d’autres intervenants, les syndicats du Turkménistan ont été activement impliqués dans le processus de dialogue social tripartite. Nous avons participé activement aux discussions, après la signature de la feuille de route pour 2024-25. Au début de cette année, nous avons été impliqués dans la mission de haut niveau, dirigée par de nombreux représentants de haut niveau du BIT. De plus, la délégation des syndicalistes et de leurs dirigeants ont coopéré étroitement avec ACTRAV tout au long de ce processus. Au cours de cette période, les syndicats ont effectué un travail considérable. Notre législation est en cours de révision. Elle définira clairement des notions telles que le travail forcé. En 2016, la nouvelle version de la Constitution a inclus des dispositions relatives à l’interdiction des pires formes de travail des enfants et à l’élimination du travail forcé. C’est un grand succès pour notre pays. Ces principes sont désormais inscrits dans le texte juridique le plus élevé: la Constitution. Il y a eu d’autres nouvelles lois et amendements législatifs, qui reflètent désormais les principes des normes du travail dont nous avons discuté. À l’heure actuelle, il existe une série de mesures législatives pour interdire le travail forcé des enfants et des sanctions légales en cas de violations. Des changements positifs ont été enregistrés au cours des dernières années.
Ces changements ont eu une influence certaine sur le développement de principes de droit, sur le cadre juridique et la sécurité et la santé au travail. De plus, les possibilités offertes aux partenaires sociaux en termes de supervision sont plus grandes. L’inspection du travail est plus efficace et elle implique les syndicats, qui reflètent l’opinion publique et servent de mécanisme de retour d’information pour l’État, lui permettant de corriger sa politique sociale. Conformément au Code du travail, les syndicats entreprennent régulièrement des travaux pour évaluer la mise en œuvre de la convention no 105 ainsi que d’autres conventions.
Il est dans la nature des syndicats de mettre en œuvre les principes de l’inspection du travail, et ils interviennent chaque fois que des problèmes de violation de normes du travail et d’accords collectifs sont soulevés. Les syndicats se tiennent aux côtés des partenaires sociaux. Nous avons adopté une loi portant création d’une commission tripartite et, à ce jour, le Turkménistan a ratifié la convention fondamentale (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976. Le dialogue social entre le gouvernement, les représentants des employeurs et des travailleurs porte ses fruits. Dans le cadre du partenariat social, il existe depuis cette année, et pour une durée de trois ans, un accord général sur le tripartisme. Nous visitons les régions et menons des activités de sensibilisation auprès des travailleurs, des agriculteurs, des métayers et des autorités locales, et nous organisons des ateliers et des séminaires visant à fournir des informations sur les conventions de l’OIT.
En mai et juin, nos inspections du travail mènent des campagnes relatives à la récolte, notamment avec la participation des agriculteurs et des travailleurs agricoles. Nous effectuons également des évaluations de l’efficacité des observateurs des normes du travail. Des sessions d’information et des ateliers sont organisés. Nous tenons à jour, à destination de nos collègues dans les régions, ainsi que des agriculteurs, les informations relatives à la mise en œuvre de la feuille de route 2024-25 et à ses dispositions, y compris sur la vaste gamme de mesures directement liées à la résolution des problèmes concernant l’interdiction du travail forcé et du travail des enfants, ainsi que sur la mise en œuvre de la convention.
Les séminaires que nous organisons incluent des documents provenant d’experts internationaux, et consolidés grâce au travail fourni ces dernières années. Nous y participons activement avec les institutions internationales du travail.
En 2024, le BIT et le gouvernement ont approuvé et signé la feuille de route. Les syndicats travaillent, dans le cadre de cette feuille de route, à l’amélioration et au renforcement de la législation du travail ainsi que de leurs propres règlements. Nous sommes membres du groupe parlementaire chargé du développement d’un nouveau Code du travail, et nous espérons vivement qu’à la lumière de ces efforts des amendements pertinents seront apportés au Code du travail.
Depuis la visite d’experts internationaux en mai 2024, les syndicats examinent les questions relatives aux mesures visant à améliorer les méthodes de travail pendant la récolte, des conditions de recrutement et de la conclusion des contrats avec les travailleurs agricoles. Le signal envoyé par la mission de haut niveau est positif en tant qu’il reflète la détermination du gouvernement à travailler avec l’OIT. Cette étape est importante vers l’objectif fixé d’en finir avec la pratique du travail forcé, et je veux également souligner que, ces dernières années, la coopération a été de plus en plus active non seulement avec l’OIT, mais aussi avec les organisations syndicales régionales. Nous avons conclu un accord avec la Fédération des syndicats de l’Ouzbékistan. Nous savons que l’Ouzbékistan a également suivi un chemin difficile; aussi, nous tenons compte de l’expérience de nos voisins pour trouver les solutions susceptibles de nous permettre de surmonter les problèmes auxquels nous sommes confrontés.
De plus, sachez que nous travaillons sur deux questions relatives à la révision de la liste des professions et à l’opportunité d’y inclure des activités inhérentes à la récolte du coton.
Nous tenons à dire que, tout en constituant une part effective du partenariat social, cela résulte également du travail efficace avec l’OIT.
Interprétation du russe: Membre employeuse, Turkménistan – Comme indiqué dans le rapport du gouvernement, un accord de coopération entre le Turkménistan et le BIT relatif aux conditions de travail pendant la récolte du coton a été conclu. Les employeurs de notre pays ont participé à la mission de haut niveau du BIT, qui a abouti à l’adoption de la feuille de route pour 2024-25. Tout cela reflète la volonté du gouvernement et du secteur privé, de travailler ensemble, en étroite coopération avec une organisation aussi respectable que l’OIT. Les organisations de travailleurs et d’employeurs sont disposées à poursuivre cette coopération dans tous les secteurs de l’économie et à garantir que les conditions d’embauche et de rémunération des travailleurs pendant la récolte du coton soient équitables et que l’inclusion des mineurs soit restrictive.
La part du secteur privé dans l’agriculture est de plus en plus importante, approchant les 90 pour cent. Les syndicats et les organisations d’employeurs cherchent à améliorer la situation des agriculteurs, par exemple par l’accord de prêts et l’accès à des équipements. Nous traitons également de la question de l’embauche de mineurs. Nous déployons actuellement des efforts pour une amélioration de la législation relative aux conditions de travail pendant la récolte, ainsi que pour la conclusion d’ententes entre employeurs et cueilleurs de coton en matière de salaire. Dans ce contexte, je pense qu’il est particulièrement important de noter qu’en février de cette année, en vue de développer davantage cette filière de l’agriculture, le président du Turkménistan a signé un décret de réorganisation du ministère de l’Agriculture. En plus de donner une impulsion à l’ensemble de l’organisation du secteur agricole et d’améliorer la productivité du pays, la réforme du ministère créera également de meilleures conditions pour la participation de l’ensemble du pays au secteur agricole. Le Président a signé un décret relatif à l’augmentation du prix d’achat du coton. Les mesures arrêtées seront mises en place cette année. Cela stimulera le travail des agriculteurs et augmentera l’attractivité du secteur. Les employeurs du Turkménistan ont participé activement à la feuille de route pour 2024-25 et ont été invités à en mettre en œuvre certains éléments. Notre organisation accomplit un travail considérable pour améliorer les activités de nos membres. Nous souhaitons exprimer une fois de plus notre détermination à tirer des leçons de l’expérience internationale et à relever le défi posé par les problèmes du travail forcé et du travail des enfants dans ce secteur. En conclusion, je voudrais vous convaincre de notre volonté d’accorder à l’avenir une attention particulière aux questions de justice socio-économique, afin de garantir les droits et libertés fondamentaux des personnes.
Président – Plus personne ne souhaite prendre la parole, j’invite en conséquence le représentant gouvernemental du Turkménistan à exposer ses remarques finales.
Représentant gouvernemental – Permettez-moi d’exprimer ma gratitude à la commission, au nom de la délégation gouvernementale du Turkménistan, pour le travail accompli, ainsi qu’aux membres employeurs et travailleurs et aux délégations des pays pour les déclarations, les propositions et les recommandations émises. Nous avons pris note de toutes ces recommandations.
Je voudrais également exprimer ma gratitude pour l’approche constructive du dialogue et pour l’intérêt qu’ils ont accordé aux documents fournis en amont de cette réunion par la partie turkmène. Je voudrais toutefois appeler les représentants des travailleurs et des employeurs, ainsi que les gouvernements, à examiner de manière plus objective et impartiale les documents et commentaires fournis par le gouvernement.
Comme indiqué dans notre déclaration principale, le Turkménistan travaille de manière cohérente, avec l’appui actif du BIT, à cette question importante et à la mise en œuvre les dispositions des conventions, tant au niveau législatif que dans la pratique. Je peux vous assurer que toutes les propositions et recommandations formulées de manière concertée par les experts internationaux dans ce contexte seront soigneusement étudiées et analysées non seulement au niveau ministériel, mais également au plus haut niveau gouvernemental. Il convient de souligner que les feuilles de route de notre partenariat avec le BIT ne constituent pas de simples formalités, mais des documents qui contiennent des procédures permettant d’apporter des solutions pratiques à des problèmes spécifiques liés au travail.
En ce qui concerne l’amélioration du cadre législatif, je voudrais souligner que nous avions eu une discussion technique sur la révision de la législation, mise en œuvre dans la précédente feuille de route pour 2023. L’étape actuelle – la nouvelle feuille de route – prévoit des mesures éminemment pratiques dans cette direction. Actuellement, le Parlement examine les recommandations et suggestions émises par les gouvernements, les travailleurs et les employeurs pour améliorer le cadre réglementaire. S’agissant de la question de la sensibilisation, le ministère du Travail a entamé, en coopération avec le ministère de l’Agriculture, dans la perspective de la campagne de récolte du coton de cette année, un travail approfondi avec les organes des autorités locales autonomes, visant à prévenir les situations de travail forcé.
Je veux saisir cette occasion pour réitérer l’engagement du gouvernement d’honorer ses obligations au titre des conventions et protocoles de l’OIT auxquels le Turkménistan a adhéré.
Membres travailleurs – Tout en reconnaissant volontiers des signes encourageants dans l’évolution du cas du Turkménistan, nous demeurons profondément préoccupés par la persistance de la mobilisation forcée à l’occasion des campagnes de récolte du coton. Nous espérons avoir bientôt le plaisir de constater les résultats concrets de toutes les initiatives prises récemment.
Nous ne pouvons donc qu’encourager le gouvernement à poursuivre ses efforts pour mettre un terme définitif durable à la pratique de la mobilisation forcée à l’occasion des campagnes de récolte du coton. Cela implique la mise en œuvre de la feuille de route adoptée à la suite de la mission de haut niveau du BIT dans le pays. Le gouvernement doit établir à cet effet un calendrier précis des mesures à prendre pour atteindre l’objectif d’élimination définitive durable du travail forcé des travailleurs des secteurs public et privé, ainsi que des étudiants, dans le contexte de la récolte de coton organisée par l’État.
Le gouvernement doit également mettre en œuvre de manière proactive les mesures recommandées par la mission technique de l’OIT pour améliorer les conditions d’embauche et de travail dans la filière cotonnière, en conformité avec les normes internationales du travail.
Nous n’ignorons pas que la campagne nationale de récolte du coton se déroule sur la base d’un système de quotas obligatoires, cause principale des nombreux abus constatés. Nous persistons à exiger que le gouvernement mette fin au système des quotas obligatoires et que le non-respect des quotas n’entraîne ni sanction ni menace de sanction.
Nous attendons du gouvernement qu’il fasse des déclarations publiques de politique de haut niveau condamnant le travail forcé, interdisant aux responsables à tous les niveaux de recourir à la contrainte pour mobiliser quiconque au travail. Toute personne, y compris les personnalités publiques, impliquée dans la mobilisation forcée de travailleurs pour la production ou la récolte du coton devra être poursuivie et sanctionnée de manière appropriée. Les victimes de mobilisation forcée doivent également avoir accès à des mécanismes efficaces d’indemnisation. Le gouvernement doit veiller au renforcement des services d’inspection, notamment en poursuivant ses efforts tendant à la ratification des conventions nos 81 et 129.
Nous sommes d’avis que les initiatives de réforme législative actuellement à l’examen doivent être mises en œuvre pour garantir la conformité de la législation nationale à la convention. Sans prétendre dresser un tableau exhaustif des législations qui demeurent problématiques, on peut citer la loi sur l’état d’urgence, la loi sur les interventions d’urgence, la loi du Turkménistan sur la préparation et la mise en œuvre de la mobilisation, ainsi que l’article 19 du Code du travail.
Enfin, le gouvernement devra favoriser un environnement propice à la liberté syndicale dans le pays, promouvoir le dialogue social dans la filière du coton, renforcer sa collaboration avec l’OIT et permettre la participation de partenaires sociaux nationaux et internationaux indépendants au processus visant à garantir l’application de la convention dans la pratique, notamment dans le cadre de la feuille de route, et documenter toutes les preuves de recours au travail forcé à l’occasion des campagnes de récolte cotonnière.
En outre, nous voulons croire que des observateurs indépendants du travail pourront documenter et faire rapport sur les conditions de travail sans crainte de représailles, et être certains que leurs conclusions seront intégrées dans le document de suivi.
Nous demandons au gouvernement de poursuivre sa collaboration avec le BIT dans le cadre des initiatives déjà entreprises et de celles qui sont en cours, y compris la feuille de route, et de communiquer à la commission d’experts, le 1er septembre, un rapport complet sur la mise en œuvre des recommandations et sur les résultats des initiatives évoquées. Nous lui demandons en outre de continuer à rendre compte, jusqu’à la mise en œuvre intégrale de la feuille de route des, de progrès réalisés.
Membres employeurs – Nous remercions tous ceux qui ont pris la parole aujourd’hui, et en particulier le gouvernement, pour les informations partagées, et surtout pour les engagements qu’il a pris.
En conclusion, nous tenons à souligner une fois de plus que, du point de vue des membres employeurs, toutes formes de travail forcé et autres pratiques abusives s’apparentant au travail forcé sont inacceptables. Lorsqu’elles ciblent les catégories les plus vulnérables de la société et sont orchestrées par des autorités centrales, notre position s’aligne sur celle exprimée dans le rapport de la commission d’experts et sur celle des travailleurs. Tout en saluant les efforts déployés pour répondre aux problèmes soulevés par la commission d’experts ainsi que les engagements inscrits dans la feuille de route 2024-25, et ceux qui ont été pris aujourd’hui, nous notons toutefois avec regret des rapports décrivant la persistance du travail forcé ordonné par l’État pendant la récolte de coton.
Les membres employeurs demandent en conséquence au gouvernement:
  • 1) d’assurer l’élimination complète du travail obligatoire et de son utilisation;
  • 2) de continuer sa coopération avec l’OIT et des partenaires sociaux indépendants pour garantir l’application pleine et entière de la convention dans la pratique, y compris dans le cadre de la feuille de route 2024-25;
  • 3) de fournir des informations sur les mesures concrètes prises à cet effet, ainsi que sur les activités mentionnées dans la feuille de route 2024-25, et de faire un rapport détaillé sur les résultats tangibles obtenus.
Nous voulons croire que le gouvernement ne manquera pas de mettre en œuvre ces recommandations en temps utile, afin de parvenir à une pleine conformité avec la convention.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des informations orales et écrites fournies par le gouvernement et de la discussion qui a suivi.
Tout en prenant bonne note des explications que le gouvernement a fournies au sujet de la collaboration avec le BIT pour traiter la question du travail forcé associé à la récolte du coton, la commission a déploré que persiste le recours généralisé au travail forcé associé à la récolte annuelle du coton organisée par l’État au Turkménistan.
Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission a prié instamment le gouvernement, en consultation et en coopération avec les partenaires sociaux, de prendre toutes les mesures nécessaires pour:
  • garantir l’élimination complète du recours au travail obligatoire;
  • améliorer le recrutement et les conditions de travail dans le secteur du coton, conformément aux normes internationales du travail;
  • éliminer le système de quota obligatoire pour la production et la récolte de coton, et garantir que nul ne soit menacé de sanction si les quotas de production ne sont pas atteints, conformément à la convention;
  • donner des instructions claires sur l’interdiction du recours au travail forcé et renforcer l’inspection du travail et les mécanismes responsables de l’application de la loi;
  • poursuivre et sanctionner de manière appropriée tout fonctionnaire qui participe à la mobilisation forcée des travailleurs pour la production ou la récolte du coton;
  • veiller à ce que les victimes de la mobilisation forcée aient accès à des voies de recours efficaces, y compris des mesures pour empêcher que ne se produisent d’autres atteintes à l’avenir;
  • garantir que, conformément à la convention, la loi sur l’état d’urgence, la loi sur les interventions d’urgence, la loi sur la préparation et la mise en œuvre de la mobilisation au Turkménistan, ainsi que l’article 19 du Code du travail ne servent pas de base juridique ou de prétexte au travail forcé; et
  • promouvoir le dialogue social et continuer à coopérer avec le BIT et les organisations indépendantes d’employeurs et de travailleurs, afin de garantir la pleine application de la convention dans la pratique, y compris dans le cadre de la feuille de route 202425, et fournir des informations sur les mesures concrètes prises et les résultats tangibles obtenus à cet égard.
La commission a prié le gouvernement de fournir, d’ici au 1er septembre 2024, un rapport détaillé à la commission d’experts sur la mise en œuvre des recommandations.
Représentant gouvernemental – Tout d’abord, je voudrais saisir cette occasion pour exprimer notre gratitude aux membres de la commission, aux représentants du groupe gouvernemental, des groupes des employeurs et des travailleurs, ainsi qu’à diverses ONG qui ont participé à la discussion du cas du Turkménistan.
En réaffirmant notre volonté de coopérer davantage avec les partenaires sociaux et l’OIT afin de garantir les conditions nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de la convention no 105 au Turkménistan, je voudrais, une fois de plus, attirer l’attention de la commission sur les efforts considérables accomplis ces dernières années par le gouvernement pour mettre en œuvre les recommandations émises au cours des discussions sur le Turkménistan. En effet, nous avons pu concrétiser de réelles avancées, notamment avec le lancement d’un dialogue continu avec l’OIT, la mission d’observation du BIT en septembre-octobre 2023, l’adoption et la mise en œuvre de l’assistance technique du BIT, ainsi que deux feuilles de route pour combler les carences de manière progressive.
La feuille de route 2024-25 de coopération récemment approuvée entre le gouvernement du Turkménistan et le BIT a été mise à disposition de la commission, en tant que document public, de sorte à permettre à nombre d’entre vous de la consulter à l’avance. Le document énonce clairement un plan d’action visant la résolution des problèmes soulevés et témoigne ainsi de la volonté et de l’ouverture du gouvernement à un engagement effectif. Cependant, à notre grand regret, la commission a, une fois de plus, omis de prendre acte des efforts considérables déployés par le Turkménistan. Nous prenons note de toutes les recommandations que vous avez formulées, tout en rappelant que presque tous les sujets évoqués figurent déjà dans notre feuille de route 2024-25.
Je voudrais attirer à nouveau votre attention sur la nécessité de rechercher le dialogue, tant avec le gouvernement qu’avec les partenaires sociaux. Faire pression ne peut pas être le meilleur moyen de parvenir à une coopération efficace et à des résultats positifs. À cet égard, notre vœu sincère est de maintenir les relations de confiance constructives établies entre le gouvernement du Turkménistan et l’OIT.
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