National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
Visualizar en: Inglés - EspañolVisualizar todo
La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 26 août 2009 et des observations de la Confédération nationale indépendante de Cuba (CONIC) (dont le gouvernement conteste le caractère syndical) du 10 août 2009. La commission prend note aussi de la réponse du gouvernement au sujet de ces observations.
Droits syndicaux et libertés publiques
La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour libérer sans délai les syndicalistes et dirigeants syndicaux condamnés à des peines d’emprisonnement de 12 à 26 ans pour trahison et conspiration. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir qu’il déplore qu’il n’ait pas été tenu compte des réponses qu’il a adressées et qu’il réitère ce qu’il a déclaré en d’autres occasions. Le gouvernement souligne qu’il n’y a pas à Cuba de syndicalistes emprisonnés, persécutés ou menacés au motif qu’ils sont syndicalistes, et qu’il n’a pas été confisqué de biens à des organisations syndicales. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait noté que, selon le gouvernement: 1) aucun des condamnés n’était dirigeant syndical, étant donné qu’ils avaient pris la décision de ne pas avoir de relation de travail depuis plusieurs années; 2) ils menaient des activités visant à renverser l’ordre politique, économique et social décidé par le peuple cubain et consacré dans la Constitution; 3) leur responsabilité a été établie pour des actes qualifiés de délits qui visaient à nuire à la souveraineté de la nation; ils ont été sanctionnés conformément à l’article 91 du Code pénal et à la loi no 88 de 1999 de protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba; 4) aucun d’entre eux n’a été jugé ou sanctionné pour avoir exercé ou défendu la liberté d’opinion ou d’expression; 5) tous ont porté atteinte aux droits de l’homme du peuple cubain, en particulier à l’exercice des droits à la libre détermination, au développement et à la paix; 6) actuellement, la plupart des condamnés sont en prison où ils purgent leur peine, mais plusieurs ont bénéficié de mesures «extrapénales» pour des raisons humanitaires; et 7) la dignité humaine et l’intégrité physique et psychique des condamnés ont été respectées rigoureusement, et les détenus ont bénéficié en prison des mesures amples dont jouit l’ensemble de la population carcérale cubaine.
A ce sujet, la commission note avec préoccupation que, dans ses commentaires de 2009, la CONIC fait état des conditions de détention déplorables des syndicalistes qui sont encore détenus (et qui subissent notamment des châtiments physiques, des mauvais traitements et des menaces). Tout en soulignant que le Comité de la liberté syndicale s’est également prononcé sur ces condamnations et a demandé la libération des dirigeants condamnés, la commission répète ses observations précédentes et rappelle que la liberté syndicale n’est qu’un aspect de la liberté d’association en général qui, elle-même, doit s’intégrer dans le vaste complexe des libertés fondamentales de l’homme, interdépendantes et complémentaires les unes des autres. Elle rappelle en outre qu’en 1970 la Conférence internationale du Travail a énuméré de manière explicite les droits fondamentaux qui sont nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, à savoir: a) le droit à la liberté et à la sûreté de la personne, ainsi qu’à la protection contre les arrestations et les détentions arbitraires; b) la liberté d’opinion et d’expression, et en particulier le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de rechercher, de recevoir et de diffuser, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit; c) la liberté de réunion; d) le droit à un jugement équitable par un tribunal indépendant et impartial; et e) le droit à la protection des biens des syndicats. Dans ces conditions, la commission prie instamment le gouvernement de faire le nécessaire pour que soient libérés sans délai les dirigeants syndicaux qui ont été condamnés à de sévères peines d’emprisonnement, pour enquêter sur les faits allégués par la CONIC et, dans le cas où ces faits seraient avérés, pour sanctionner les auteurs.
Par ailleurs, la commission avait demandé au gouvernement d’adresser ses commentaires au sujet des observations formulées par la CSI le 28 août 2007, qui portaient sur d’autres cas concrets de détention de travailleurs de la CONIC, de harcèlements et de menaces d’emprisonnement qui visent des délégués du Syndicat des travailleurs de l’industrie légère (SITIL), et sur la confiscation de matériel et de l’aide humanitaire envoyée de l’étranger au Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC) (dont le gouvernement conteste le caractère syndical). La commission note que la CSI, dans ses dernières observations du 26 août 2009, ajoute que quatre des dirigeants du CUTC qui avaient été condamnés ont été libérés et expatriés, mais que cinq autres sont toujours en prison. La commission note aussi que la CONIC, dans ses commentaires du 10 août 2009, fait état de ce qui suit: 1) la détention, du 18 au 24 février 2009, de 14 membres de la CONIC; 2) la disparition, le 24 février 2009, d’un dirigeant syndical de la CONIC; et 3) les intimidations de l’autorité publique qui visent des dirigeants syndicaux de la CONIC, du Syndicat indépendant «William Le Santé» et du Syndicat indépendant des industries légères, pour qu’ils cessent de participer à des activités syndicales.
La commission note que, à ce sujet, le gouvernement indique que les personnes en question ne sont pas des dirigeants syndicaux et qu’elles n’ont aucune représentativité; les faits qui leur sont reprochés ont été dûment démontrés avec toutes les garanties de procédure établies dans la législation cubaine; ces personnes ont commis des délits qui sont définis dans la législation cubaine et, pour cette raison, elles ont été dûment jugées et sanctionnées par les tribunaux; aucune n’a été poursuivie ou sanctionnée au motif qu’elle exerçait ou défendait des droits syndicaux, et la responsabilité de tous a été démontrée dans des actes qualifiés de délits qui visaient directement à porter atteinte à la souveraineté de la nation. Le gouvernement ajoute que ni le CUTC ni la CONIC sont des organisations syndicales. Il nie que les dirigeants qui ont été libérés aient été expatriés; ils ont été remis en liberté pour des raisons humanitaires et, de leur propre gré, ils sont partis dans d’autres pays. Quant à la communication de la CONIC de 2009, le gouvernement indique qu’il s’agit d’allégations sans fondement qui constituent une manœuvre politique destinée à tromper les syndicalistes des autres pays et à donner une image de division entre les travailleurs cubains, afin de discréditer le mouvement syndical cubain et ses conquêtes. Cette organisation ne réunit pas des travailleurs, ses rares membres ne sont liés par aucune relation de travail et ne représentent aucun secteur des travailleurs. Le gouvernement ajoute qu’il n’y a pas à Cuba de restriction ou d’interdiction de l’exercice des droits syndicaux. Les travailleurs cubains bénéficient de l’un des systèmes les plus complets et rigoureux de protection des droits au travail et de syndicalisation. Le gouvernement indique qu’il fournira de plus amples informations à la commission afin que celle-ci puisse procéder à une évaluation intégrale et impartiale. La commission note qu’il y a des contradictions entre les commentaires de la CSI et la réponse du gouvernement. Dans ces conditions, notant que nombreuses sont les allégations en matière de droits de l’homme et de libertés publiques, la commission demande au gouvernement de communiquer le texte des décisions judiciaires dont il fait mention dans son rapport.
Questions législatives
Dans ses observations précédentes, la commission avait pris note de l’information du gouvernement selon laquelle la révision du Code du travail se poursuivait. La commission avait exprimé l’espoir que la révision du Code du travail parviendrait à son terme dans un proche avenir et que les commentaires qu’elle formule seraient pris en compte. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique ce qui suit: la législation en vigueur est maintenue; la structure et le fonctionnement des organismes de l’administration centrale de l’Etat sont en cours de modification depuis une date récente; et on s’efforce de perfectionner et de rendre plus efficaces les institutions. Le 2 mars 2009, une restructuration importante de plusieurs organismes centraux a eu lieu et l’examen de la structure actuelle et du fonctionnement du gouvernement se poursuit, ce qui, inévitablement, a des répercussions sur le programme législatif du pays. Le gouvernement ajoute que les consultations se poursuivent, ainsi que l’actualisation du projet de Code du travail, conformément à l’orientation des activités actuelles. A cet égard, la commission espère que la révision du Code du travail s’achèvera prochainement et qu’il sera tenu compte des commentaires formulés sur l’application de la convention qui sont examinés ci-après. La commission rappelle au gouvernement qu’il peut bénéficier de l’assistance technique du Bureau. Le gouvernement est prié de communiquer copie du projet de Code du travail en question.
Monopole syndical
Articles 2, 5 et 6 de la convention. Depuis de nombreuses années, la commission souligne qu’il est nécessaire de supprimer, des articles 15 et 16 du Code du travail de 1985, la mention qui est faite de la Centrale des travailleurs de Cuba. La commission note que le gouvernement indique de nouveau que la législation en vigueur et la pratique quotidienne dans tous les centres de travail garantissent le plein exercice de l’activité syndicale et du droit d’association. Selon le gouvernement, la représentativité des travailleurs est exercée à différents niveaux et instances de décision par les syndicats nationaux de branche et par la centrale syndicale qui, comme l’ont décidé les travailleurs eux-mêmes, a été instituée lors de leurs congrès et constitue l’expression de la volonté d’unité du mouvement syndical cubain. L’existence d’une centrale syndicale unitaire n’a pas été imposée par le gouvernement et ne découle d’aucune disposition, sinon de la volonté souveraine des travailleurs cubains. L’application pratique de la convention est garantie par des dispositions juridiques qui établissent que «tous les travailleurs, manuels et intellectuels, ont le droit, sans autorisation préalable, de s’associer volontairement et de constituer des organisations syndicales». Ces droits sont garantis dans la pratique par l’existence de 19 syndicats nationaux de branche dotés de structures municipales et provinciales et présents dans 169 municipalités et 14 provinces, qui réunissent près de 110 000 sections syndicales ou syndicats de base. Il y a dans chaque centre de travail une ou plusieurs sections syndicales. Leurs dirigeants sont élus par les travailleurs. Dans chaque centre de travail, les conventions collectives du travail sont définies par les administrations et l’organisation syndicale et sont adoptées par les travailleurs réunis en assemblées. Au cours de celles-ci, ils peuvent formuler des suggestions et s’exprimer au sujet des questions qui font l’objet de ces conventions. Le gouvernement ajoute que ni le Code du travail en vigueur ni la législation complémentaire n’établissent de restrictions à la création de syndicats. Tous les travailleurs ont le droit de constituer des organisations syndicales sans autorisation préalable et de s’y affilier librement. Le gouvernement répète que l’article 15 du Code du travail reprend pour l’essentiel les dispositions de l’article 3 de la convention. Les statuts, règlements et principes qui régissent l’activité des 19 syndicats nationaux de branche et de la Centrale des travailleurs de Cuba, à laquelle ces syndicats se sont affiliés de leur plein gré, sont examinés et adoptés par les syndicats lors de leurs congrès respectifs. A ce sujet, aucune disposition de la législation ne donne d’indication au sujet de la structure syndicale. Toutefois, la commission doit insister une fois de plus sur le fait que le pluralisme syndical doit être possible dans tous les cas, et que la loi ne doit pas institutionnaliser un monopole de fait en se référant à une centrale syndicale spécifique. Même dans le cas où l’unification du mouvement syndical a eu, à un moment donné, la préférence de tous les travailleurs, ceux-ci doivent toujours pouvoir conserver le libre choix de créer, s’ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure établie et de s’affilier à l’organisation de leur choix [voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 96]. Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de faire le nécessaire pour veiller à ce que tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, aient le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. La commission demande aussi au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les articles susmentionnés du Code du travail et d’indiquer dans son prochain rapport toute mesure prise à cet égard.
Article 3. La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle dit qu’il est nécessaire de modifier l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983, article qui confère à la Centrale des travailleurs de Cuba le monopole de la représentation des travailleurs du pays devant les instances gouvernementales. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que les travailleurs affiliés à chaque syndicat proposent et élisent leurs dirigeants aux différents niveaux, des assemblées de travailleurs, à la base, jusqu’aux congrès respectifs qu’ils organisent périodiquement, dans le respect absolu de la plus stricte démocratie syndicale. Les représentants syndicaux démocratiquement élus par les travailleurs participent, avec d’amples facultés, aux conseils de direction qui prennent les décisions qui les concernent, tant au niveau de l’entreprise que dans les organismes et institutions de l’administration de l’Etat. Le gouvernement ajoute que sont menées actuellement des activités ayant trait à la structure et au fonctionnement de plusieurs organismes de l’administration centrale de l’Etat et à la structure du gouvernement dans son ensemble. La commission exprime le ferme espoir que, dans le cadre des études menées actuellement sur la structure et le fonctionnement de l’administration de l’Etat, le gouvernement modifiera prochainement l’article 61 du décret-loi no 67 de 1983 afin de garantir le pluralisme syndical, par exemple en remplaçant la mention qui y est faite de la Centrale des travailleurs de Cuba par la mention «organisation la plus représentative».
Droit de grève
Depuis plusieurs années, la commission note que le droit de grève n’est pas reconnu dans la législation et que, dans la pratique, le recours à la grève est interdit. La commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour garantir que nul ne puisse faire l’objet d’une discrimination ou d’un préjudice dans le cadre de son emploi au motif d’avoir exercé pacifiquement le droit de grève. La commission note que le gouvernement réaffirme de nouveau que la législation cubaine n’interdit pas le droit de grève, pas plus qu’elle ne prévoit de sanction pour l’exercice de la grève, et que les organisations syndicales ont pour prérogative de décider de leur action à ce sujet. Si les travailleurs cubains décidaient de faire grève, rien ne pourrait les en empêcher. Le gouvernement ajoute que la revendication par les travailleurs de certains de leurs droits qui, dans beaucoup de pays, conduit à utiliser les mécanismes propres à la grève, est inutile dans la pratique des relations professionnelles à Cuba en raison de l’existence et de l’utilisation d’autres mécanismes plus efficaces pour exercer leurs droits. Les travailleurs utilisent systématiquement ces mécanismes grâce aux formes multiples de leur participation effective et grâce à l’exercice d’un pouvoir réel de décision dans les affaires qui les intéressent, ce qui ne peut pas être considéré comme une restriction ou une interdiction du droit de grève. Dans les différentes formes institutionnalisées de participation des travailleurs et de leurs représentants au règlement de différends et à la prise de décisions, les représentants syndicaux ont d’amples capacités et un mandat étendu. Les travailleurs cubains bénéficient du dialogue social participatif et démocratique à tous les niveaux de la prise de décisions. L’accent a été mis sur la collaboration, et non sur le conflit, ce qui a permis d’améliorer les salaires, les prestations de sécurité sociale, les mesures de sécurité et de santé, entre autres, et d’accroître constamment les qualifications des travailleurs. Les représentants syndicaux participent à tous les processus d’élaboration de la législation du travail et de la sécurité sociale et, très souvent, les projets sont menés en consultation avec les assemblées de travailleurs dans les centres de travail. La commission rappelle que la convention n’exige pas l’adoption de dispositions juridiques qui réglementent le droit de grève, à condition que, dans la pratique, le droit de grève puisse être exercé sans que les organisations et les participants risquent de subir des sanctions. La commission rappelle aussi que presque tous les Etats ont choisi de reconnaître expressément et/ou de réglementer le droit de grève. Par conséquent, la commission invite le gouvernement, afin de garantir la sécurité juridique des travailleurs qui décident de faire grève, d’envisager, dans le cadre de la réforme législative en cours dont le gouvernement fait mention, d’adopter des dispositions reconnaissant expressément le droit de grève, ainsi que les principes fondamentaux exprimés par la commission [voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 136 à 179].