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Observación (CEACR) - Adopción: 2007, Publicación: 97ª reunión CIT (2008)

Convenio sobre la libertad sindical y la protección del derecho de sindicación, 1948 (núm. 87) - Colombia (Ratificación : 1976)

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La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle prend note également de la communication du ministre de la Protection sociale adressée au Directeur général du BIT, lue au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2007, dans laquelle il affirme à nouveau son engagement envers l’accord tripartite pour le droit d’association et la démocratie, signé à Genève le 1er juin 2006 par le gouvernement et les représentants des employeurs et des travailleurs. Le ministère fait part de sa volonté de renforcer l’application de cet accord. La commission prend note également de la réponse du Directeur général indiquant que le Bureau fera tout son possible pour soutenir l’application effective des mesures énoncées et, dans ce sens, il propose d’envoyer une mission de haut niveau du Bureau international du Travail dans le but d’identifier les nouveaux besoins en vue de garantir l’application effective de l’accord tripartite et du programme de coopération technique. La commission prend également note des nombreux cas concernant la Colombie en instance devant le Comité de la liberté syndicale.

La commission prend note également des commentaires présentés au sujet de l’application de la convention par la Confédération syndicale internationale (CSI), en date du 28 août 2007, ainsi que des commentaires de la Confédération générale du travail (CGT), de la Confédération des travailleurs de Colombie (CTC) et de la Confédération des pensionnaires de Colombie (CPC), par une communication en date du 28 mai 2007, et de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), en date du 31 août 2007, portant sur les questions examinées par la commission, en particulier sur les actes de violence contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, entraînant assassinats, séquestrations, attentats contre la vie, disparitions; le manque grave de sanctions qui entourent ces faits; l’utilisation des coopératives de travail associé qui implique l’impossibilité pour les travailleurs de former des syndicats ou d’en devenir membres; le refus d’enregistrer de nouvelles organisations syndicales ou les nouveaux statuts ou le comité directeur d’une organisation syndicale de manière arbitraire, ainsi que l’interdiction de l’exercice du droit de grève dans certains services qui ne sont pas uniquement des services essentiels.

Situation de violence et impunité

La commission prend note que, en ce qui concerne les actes de violence commis envers des dirigeants ou des membres d’organisations syndicales, la CSI signale que la majorité de ces actes perpétrés contre les syndicalistes sont liés à des conflits au travail. Elle déclare à nouveau le fait que les groupes paramilitaires stigmatisent le mouvement syndical comme étant sympathisant des guérillas ou des mouvements d’extrême gauche le rend très vulnérable. Selon la CSI, les efforts réalisés par le gouvernement pour assurer la sécurité des dirigeants syndicaux et des affiliés ne sont pas suffisants. Ainsi, en 2006, 78 assassinats de syndicalistes ont été enregistrés, le secteur de l’enseignement étant le plus touché puisque 49 syndicalistes de ce secteur ont été assassinés. La CSI mentionne également les nombreuses menaces et les nombreux attentats. Quant aux centrales syndicales colombiennes, elles font état d’une situation récurrente de violence antisyndicale, à laquelle participeraient, selon elles, quelques institutions étatiques associées à des groupes paramilitaires et à des narcotrafiquants, responsables de l’assassinat de nombreux dirigeants syndicaux reconnus. Selon les centrales, dans la majorité des cas, ces assassinats incombent aux groupes paramilitaires. Selon la CSI, les guérillas ont pris elles aussi, bien que dans une moindre mesure, une part importante aux actes de violence contre les syndicalistes.

La commission prend note du fait que, à ce sujet, le gouvernement se réfère aux mesures de protection adoptées dans le cadre du programme de protection établi en 1997. Il ajoute que le budget accordé à ce programme a été chaque année augmenté. Le gouvernement énumère en détail la quantité de mesures de protection prévus et signale qu’actuellement 25,25 pour cent de la protection assurée est consacrée exclusivement au mouvement syndical, en vue du financement, entre autres moyens de protection, du blindage des sièges des syndicats, de services d’escorte, d’autos blindées et de gilets pare-balles. Le gouvernement ajoute qu’il a mis au point une politique de défense et de sécurité démocratique visant à protéger de manière efficace les droits des citoyens colombiens. Selon lui, cette politique fonctionne en coordination avec toutes les entités du gouvernement et a permis la réduction du nombre d’homicides, y compris ceux dont sont victimes les syndicalistes. Tenant compte du fait que le secteur de l’enseignement est le plus touché par les assassinats, le gouvernement signale que, en liaison avec la Fédération colombienne des éducateurs (FECODE), un groupe de travail national d’enseignants menacés a été formé, auquel participent les ministères de la Protection sociale, de l’Education nationale, de l’Intérieur et de la Justice, ainsi que la police nationale et les participants au Programme présidentiel des droits de l’homme. Ce programme a permis l’affectation de nombreux enseignants à d’autres postes. Après avoir indiqué que, au cours de l’année 2007, 18 assassinats ont été commis, le gouvernement renouvelle sa volonté de réduire ce chiffre à zéro.

A cet égard, la commission se dit préoccupée du fait que les syndicalistes continuent à être victimes de graves actes de violence à cause de leur affiliation. La commission note que le gouvernement a fourni des efforts significatifs pour assurer la protection des dirigeants syndicaux, des affiliés ou des sièges des syndicats. La commission observe néanmoins que le nombre de personnes protégées a diminué et considère que la protection doit être renforcée. Tout en rappelant une nouvelle fois qu’un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans le respect des droits fondamentaux de l’homme (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 26) et que c’est seulement dans un climat exempt de violence que les organisations d’employeurs et de travailleurs peuvent exercer librement et véritablement leur activité, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de continuer à prendre les mesures nécessaires pour garantir le droit à la vie et à la sécurité des dirigeants syndicaux et des affiliés, afin de permettre l’exercice des droits garantis par la convention. S’agissant en particulier des mesures de protection, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour accorder à tous les syndicalistes qui en font la demande les moyens de protection suffisants et pour que les syndicalistes puissent avoir confiance dans ces mesures.

S’agissant de la lutte contre l’impunité, les centrales syndicales colombiennes reconnaissent les efforts déployés par la «Fiscalía General de la Nación» (Bureau du Procureur général de la nation) en vue de faire progresser les enquêtes relatives aux cas de violation graves des droits humains des syndicalistes. Elle souligne cependant que le pourcentage de cas où les enquêtes ont conduit à une action en justice ou à une condamnation des responsables est infime.

La commission note à cet égard que le gouvernement signale que, dans le cadre du compromis inscrit dans l’accord tripartite, le 15 septembre 2006 a été signée entre le gouvernement et la «Fiscalía General de la Nación» la convention interadministrative no 15406 destinée à encourager les enquêtes dans les cas de non-respect des droits de l’homme des syndicalistes, dont les objectifs sont les suivants: 1) mettre au point des stratégies visant à faire toute la lumière sur les faits; 2) identifier et condamner les auteurs et les participants de ces actes de violation; 3) prévenir les délits commis à l’encontre des droits humains des syndicalistes en adoptant les plans et programmes interinstitutionnels, nationaux et locaux qui s’imposent. Pour ce faire, la «Fiscalía» a nommé 13 magistrats instructeurs accompagnés de leur groupe d’enquêteurs respectif appartenant à la police judiciaire et au service technique d’enquêtes et composé de 78 personnes, plus 24 avocats chargés de l’instruction des enquêtes. Celles-ci portent en particulier sur les assassinats dénoncés dans le cadre du cas no 1787 en instance devant le Comité de la liberté syndicale. Le gouvernement ajoute que le Conseil supérieur de la magistrature a désigné trois juges spécialisés dans l’examen des cas signalés par la «Fiscalía». Le gouvernement a envoyé une liste exhaustive d’enquêtes (48) ayant conduit à la condamnation des responsables des actes de violence contre des dirigeants syndicaux. Ces condamnations ont été prononcées entre juin 2002 et début 2007.

Tout en observant que le nombre de condamnations effectives prononcées depuis 2002 continue à être faible, la commission prend note des efforts accomplis par le gouvernement, que les organisations syndicales ne peuvent que reconnaître, en vue de traiter les enquêtes relatives à des cas de violation des droits humains des syndicalistes. Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de continuer à prendre toutes les mesures possibles pour faire avancer les enquêtes menées contre des actes de violence à l’encontre du mouvement syndical. Elle exprime le ferme espoir que les mesures récemment adoptées concernant la nomination de nouveaux magistrats instructeurs et de nouveaux juges permettront de réduire la situation d’impunité et de faire toute la lumière sur les actes de violence commis contre les dirigeants syndicaux et les membres syndicaux ainsi que l’arrestation des responsables de ces actes.

Par ailleurs, la commission rappelle qu’elle avait prié le gouvernement de la tenir informée de l’application de la loi no 975 sur la justice et la paix, en particulier en ce qui concerne les cas relatifs aux dirigeants syndicaux et aux syndicalistes. A cet égard, la commission prend note du fait que la Cour constitutionnelle s’est prononcée sur les recours présentés contre cette loi et l’a déclarée applicable, tout en affirmant que certains de ses articles étaient inapplicables et inconstitutionnels. La commission relève que le gouvernement n’a pas communiqué les observations qu’elle avait demandées. Elle renouvelle donc sa demande sur ce point.

Questions pratiques et législatives en suspens

La commission rappelle les commentaires qu’elle a formulés, certains depuis plusieurs années, sur les questions suivantes:

–           L’utilisation de diverses modalités contractuelles de travail telles que les coopératives de travail associé, les contrats de prestations de service et les contrats civils ou commerciaux, qui impliquent de véritables relations de travail et qui servent à effectuer des fonctions et des tâches s’inscrivant dans le cadre des activités normales de l’entité, en vertu desquelles les travailleurs ne sont pas autorisés à constituer des syndicats ou à y adhérer. La commission prend note du fait que le gouvernement signale que: a) le décret no 4588 de 2006, qui a été promulgué, prévoit que les coopératives ne peuvent être utilisées comme intermédiaires du travail et leur utilisation injustifiée, semblable aux activités des entreprises de service temporaire, prive les travailleurs des garanties du Code du travail. Le gouvernement signale aussi que la circulaire no 0036 de 2007 définit la portée de ce décret; b) la «Superintendencia de Economía solidaria» (Direction générale de l’économie solidaire) est l’entité compétente chargée d’enquêter et de sanctionner toute déviation de l’objet social des coopératives de travail associé, le ministère de la Protection sociale déterminant, quant à lui, le moment où l’intermédiation du travail s’exerce et définissant les cas où les normes de sécurité sociale intégrée sont respectées; et c) la «Unidad Especial de Inspección y Vigilancia y Control de Trabajo» (Unité spéciale d’inspection, de surveillance et de contrôle du travail) a effectué 1 067 visites dans des coopératives de travail associé, 961 d’entre elles ayant donné lieu à des enquêtes qui ont entraîné des sanctions imposées à 118 coopératives de travail associé pour utilisation injustifiée de ces dernières dans le cadre de l’intermédiation du travail. A cet égard, la commission rappelle que l’article 2 de la convention prévoit que les travailleurs et les employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. Dans ce sens, la commission rappelle que, lorsque les travailleurs des coopératives ou d’autres types de contrats civils ou commerciaux doivent effectuer des tâches qui s’inscrivent, en termes de subordination, dans le cadre normal des activités de l’entité, ils doivent être considérés comme des salariés employés dans le cadre d’une véritable relation de travail et doivent donc bénéficier du droit à l’affiliation syndicale. En conséquence, la commission prie une fois de plus le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir la pleine application de l’article 2 de la convention, de sorte que tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, puissent bénéficier du droit de constituer des organisations ou de celui de s’affilier à ces organisations.

–           Le refus d’inscrire de nouvelles organisations syndicales, les nouveaux statuts ou le comité directeur d’une organisation syndicale de manière arbitraire et discrétionnaire, pour des motifs qui vont au-delà des dispositions prévues expressément dans la législation. La commission prend note du fait que le gouvernement fait part de l’entrée en vigueur de la résolution no 1651 de 2007, qui modifie les articles 2, 3 et 5 de la résolution no 1875 de 2002, dans le but d’accélérer le processus d’enregistrement des organisations syndicales. A la lecture du décret no 1651 de 2007, la commission observe que l’un des motifs pouvant entraîner le refus d’enregistrement d’une organisation syndicale est le suivant: si l’organisation syndicale n’a pas été formée dans le but de garantir le droit fondamental d’association mais plutôt pour assurer la stabilité au travail. A cet égard, la commission rappelle que l’article 2 de la convention garantit le droit des travailleurs et des employeurs de constituer des organisations «sans autorisation préalable» des autorités publiques et que les réglementations nationales concernant la constitution des organisations ne sont pas en elles-mêmes incompatibles avec les dispositions de la convention, à condition cependant qu’elles n’équivalent pas à une autorisation préalable ou qu’elles ne constituent pas un obstacle tel qu’elles aboutissent en fait à une interdiction pure et simple (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 68 et 69). La commission estime en outre que l’autorité administrative ne doit pas avoir le pouvoir de refuser l’enregistrement d’une organisation pour le seul motif que, d’après elle, cette organisation risque d’avoir des activités susceptibles de dépasser les activités syndicales normales ou qu’elles ne pourraient pas être en mesure d’assurer ses fonctions. Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la disposition en question du décret no 1651 de 2007 et pour veiller à ce que l’autorité administrative ne bénéficie pas de pouvoirs discrétionnaires contraires à l’article 2 de la convention, et de procéder sans retard injustifié à l’enregistrement de nouvelles organisations ou de comités exécutifs, ainsi qu’aux modifications des statuts.

–           L’interdiction imposée aux fédérations et confédérations de déclarer une grève (art. 417 i) du Code du travail). Une fois de plus, la commission rappelle que les organisations de niveau supérieur doivent pouvoir recourir à la grève en cas de désaccord avec la politique économique et sociale du gouvernement. La commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de la modification de l’article 417 i) du Code du travail.

–           L’interdiction de la grève, non seulement dans les services essentiels au sens strict du terme, mais aussi dans toute une série de services publics qui ne sont pas nécessairement essentiels (art. 430 b) relatif aux transports, d), f), g) et h); art. 450, paragr. 1 a), du Code du travail et décrets nos 414 et 437 de 1952; 1543 de 1955; 1593 de 1959; 1167 de 1963; 57 et 534 de 1967), et la possibilité de licencier les dirigeants syndicaux qui sont intervenus ou qui ont participé à une grève illégale (art. 450, paragr. 2, du Code du travail), y compris lorsque l’illégalité résulte de prescriptions contraires aux principes de la liberté syndicale. La commission prend note du fait que le gouvernement reconnaît que l’article 430 n’est pas conforme aux dispositions de la convention et insiste sur le fait que le ministère n’a qu’à de rares occasions déclaré des grèves illégales et que cette décision est actuellement à l’étude auprès du Conseil d’Etat. De plus, la commission note avec intérêt que le gouvernement a envoyé copie d’un projet de loi soumis au Congrès de la république qui prévoit que l’illégalité d’une suspension ou d’accord collectif de travail sera déclarée par le juge du travail. Compte tenu du fait que le gouvernement reconnaît la nécessité de modifier certaines de ces dispositions, et qu’il a présenté un projet de loi au Congrès qui prévoit certaines modifications au Code du travail, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre à profit ce projet pour modifier la totalité des dispositions légales dont il est question et l’invite à solliciter l’assistance technique du Bureau.

–           La capacité du ministère du Travail de soumettre le différend à une décision arbitrale lorsqu’une grève se prolonge au-delà d’une certaine période – soixante jours (art. 448(4) du Code du travail). La commission prend bonne note du fait que le gouvernement informe de la soumission du Congrès de la République d’un projet de loi qui prévoit une modification de cet article, disposant que les parties peuvent convenir d’un mécanisme de conciliation ou d’arbitrage pour mettre fin aux différends, ainsi que du fait que l’intervention de la sous-commission de la Commission de concertation des politiques salariales et du travail. Cependant, la commission observe que le projet prévoit que, si une solution définitive ne peut être trouvée, les parties ou l’une d’entre elles sollicitera le ministère de la Protection sociale de convoquer un tribunal arbitral. La commission rappelle que, à l’exception des cas où les parties le sollicitent, l’arbitrage obligatoire pour mettre un terme à une grève n’est acceptable que dans les cas où cette grève peut être limitée, voire interdite, c’est-à-dire dans les cas de conflits au sein de la fonction publique touchant des fonctionnaires qui exercent leur fonction d’autorité au nom de l’Etat ou dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire ceux dont l’interruption mettrait en péril la vie, la sécurité ou la santé de l’ensemble ou d’une partie de la population. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier cette disposition en tenant compte du principe mentionné.

Rappelant qu’elle formule ces commentaires depuis de nombreuses années, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires sans délai pour modifier les dispositions législatives visées afin d’en assurer la conformité avec la convention. La commission espère également que la mission de haut niveau réalisée en novembre 2007 permettra d’assister utilement le gouvernement dans ses efforts pour mettre en œuvre la convention. Elle prie le gouvernement de la tenir informée de toute évolution survenue à cet égard.

La commission adresse directement au gouvernement une demande concernant d’autres points.

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