National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission prend note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en date du 10 janvier 2002 relatifs à l’application de la convention, qui ont été transmis au gouvernement le 28 janvier 2002. Elle prend également note des commentaires de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) communiqués par le gouvernement avec son rapport en septembre 2002. Un exemplaire de ces mêmes commentaires a été reçu directement d’UNSITRAGUA en novembre 2002. La commission prend note de la réponse du gouvernement à la question soulevée par l’UNSITRAGUA et constate qu’il n’a fourni aucune information sur la question de la traite des personnes à laquelle la CISL se réfère.
1. Traite des personnes
Dans ses commentaires, la CISL indique que, bien que la Constitution interdise le travail forcé, il existe une traite d’êtres humains, notamment d’enfants, à des fins de prostitution. Selon la CISL, dans leur majorité, les enfants victimes de cette traite viennent de pays voisins du Guatemala, et ce phénomène est évident dans les régions frontalières avec le Mexique et le Salvador. Le gouvernement n’a communiqué aucune information à ce sujet. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection des enfants contre la traite et la prostitution forcée et de répondre aux graves questions soulevées par la CISL.
2. Travail non rémunéré effectué après la journée ordinaire de travail dans les secteurs public et privé.
La commission prend note des commentaires de l’UNSITRAGUA selon lesquels «dans la plupart des communes du pays, il existe seulement un juge de paix, à qui il incombe en conséquence de rester de service 24 heures sur 24 tous les jours de l’année. Le personnel auxiliaire du juge doit assurer les tours de service par rotation en tant que travail supplémentaire s’ajoutant à sa journée ordinaire de travail. Les permanences assurées les jours fériés, les samedis et les dimanches sont compensées en temps, mais celles réalisées après la fin de la journée ordinaire de travail ne sont ni compensées en temps ni rémunérées. L’Accord 31-2000 réglementant la loi de service civil de l’organisme judiciaire (décret no 48-99) ne contient aucune disposition relative à la rémunération des heures de travail supplémentaires. De plus, le non-accomplissement des tours de service susvisés constitue une infraction passible de licenciement.»
L’UNSITRAGUA évoque également le cas des entreprises qui fixent à leurs travailleurs des objectifs de production tels que ceux-ci doivent, afin de percevoir le salaire minimum, travailler au-delà des limites de la journée ordinaire de travail, le temps de travail en plus n’étant pas rémunéré. Selon l’organisation, «ces cas se rencontrent le plus fréquemment dans les exploitations qui, en tant que producteurs indépendants, produisent des bananes pour la multinationale fruitière américaine «Chiquita», présente dans les exploitations de la commune de Morales, département d’Izabal, et sur la côte sud du Guatemala». L’UNSITRAGUA cite en outre comme exemple «les exploitations El Real et El Atlántico, situées dans le district de Bogos, commune de Morales, département d’Izabal, où les exploitants refusent de négocier si leur interlocuteur n’admet pas comme préalable, au mépris des dispositions en vigueur, que le travail à la pièce n’est pas soumis à la journée de travail [ordinaire]».
La commission prend note des rapports de 2000 et 2001 sur la responsabilité sociale de Chiquita Brands International. Ces deux rapports indiquent qu’au Guatemala «les travailleurs rémunérés à l’heure et les administrateurs travaillent parfois plus de 60 heures» et que «les travailleurs excèdent le nombre maximum d’heures supplémentaires». La commission note ces données avec préoccupation même si en même temps elle apprécie la transparence des informations contenues dans le rapport, issues d’investigations menées par Chiquita au titre de son engagement volontaire en matière de responsabilité sociale, dans le cadre de ses efforts pour le respect de la norme du travail SA8000.
L’UNSITRAGUA évoque également la situation des travailleurs de l’Etat appartenant à la catégorie 029. La condition des employés de l’Etat se définit par la catégorie budgétaire à laquelle ils appartiennent. Cette catégorie 029 a été créée pour permettre d’engager du personnel professionnel et technique qualifié pour des prestations définies et temporaires. Ces travailleurs ne bénéficient toutefois pas du statut d’employés des services publics, leurs contrats sont renouvelés tant que des crédits sont alloués pour cela et ils n’ont pas droit aux prestations reconnues de droit au personnel permanent. L’UNSITRAGUA allègue que les travailleurs recrutés selon ce système ne perçoivent pas de rémunération pour le travail effectué au-delà de la journée de travail ordinaire et que tout refus de leur part de faire plus que cette journée ordinaire a une incidence sur l’évaluation de leur rendement et peut entraîner la rupture de leur contrat sans que la responsabilité de l’Etat ne soit engagée.
La commission prend note de la réponse du gouvernement aux points soulevés par l’UNSITRAGUA. S’agissant des auxiliaires des juges de paix, le gouvernement indique que ce type de travail «est régi par les dispositions du Code du travail, article 125» et qu’en ce sens «il existe un règlement interne de la Cour suprême de justice». La commission constate que l’article 125 du Code du travail prévoit l’obligation faite à l’Exécutif de préciser la manière dont les dispositions relatives à la journée de travail s’appliquent «aux entreprises de transport, de télécommunications et à toutes celles dont l’activité revêt des caractéristiques très particulières ou est par nature continue». La commission espère que le gouvernement indiquera si la législation applicable au personnel auxiliaire des juges de paix est la loi de service civil de l’organisation judiciaire (décret 48-99) et son règlement - l’Accord 31-2000 - ou bien les dispositions du Code du travail.
Le gouvernement n’a pas communiqué d’informations sur les autres points soulevés par l’UNSITRAGUA, à savoir: la situation des travailleurs qui, pour percevoir le salaire minimum, doivent travailler au-delà des limites de la journée ordinaire de travail, ce temps de travail ne leur étant pas rémunéré. Le gouvernement n’a pas abordé non plus la situation des travailleurs de l’Etat appartenant à la catégorie 029.
Aux fins de la convention, l’expression travail forcé ou obligatoire désigne tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré.
La commission relève que, dans le cas des travailleurs auxiliaires des juges de paix et dans celui des travailleurs de l’Etat appartenant à la catégorie 029, tout refus d’accomplir du travail en sus de la journée ordinaire de travail peut avoir comme conséquence la perte de l’emploi. Dans le cas des entreprises qui conviennent d’une rémunération en contrepartie de l’exécution d’un objectif de production, l’obligation de travailler au-delà de la journée ordinaire de travail dérive de la nécessité d’accomplir ce travail pour pouvoir obtenir le salaire minimum. Dans chacun de ces cas, le commun dénominateur est la prestation d’un travail ou service pour lequel l’intéressé ne perçoit pas de rémunération. Dans chacun de ces cas, le travailleur ne peut «se libérer» de la contrainte qu’il subit qu’en quittant l’emploi ou en acceptant le licenciement qui sanctionne son refus d’effectuer un travail non rémunéré.
La commission note la vulnérabilité du travailleur, qui a théoriquement la possibilité de ne pas travailler au-delà de la journée ordinaire de travail. Il ne s’agit toutefois pas d’un vrai choix dans la pratique compte tenu de la nécessité de gagner au moins le salaire minimum et de conserver son emploi. Ainsi, ceci aboutit à l’exécution d’un travail ou de services non rémunérés. La commission considère que, dans ces situations, le travail ou service est imposé par l’exploitation de la vulnérabilité du travailleur, sous la menace d’une peine: le licenciement ou une rémunération inférieure au salaire minimum.
Sur ce point, la commission se réfère aussi au paragraphe 92 de son étude d’ensemble de 1958 sur les conventions nos 26 et 99, relatives à la fixation des salaires minima, où elle indique que: «il convient, lorsqu’un système de salaires minima repose essentiellement sur les taux aux pièces, de veiller à ce que, dans des conditions normales, un travailleur puisse gagner assez pour jouir d’un niveau de vie suffisant et que son rendement, et par conséquent ses gains, ne soit pas indûment limité par des facteurs indépendants de ses propres efforts».
La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour assurer qu’il ne soit pas imposé de travail non rémunéré aux travailleurs payés à la pièce, aux auxiliaires des juges de paix et aux travailleurs de l’Etat appartenant à la catégorie 029 à travers l’exploitation de leur vulnérabilité, et qu’il fournira des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer le respect de la convention à cet égard.
3. La commission prend note du rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones, consécutif à la mission au Guatemala (document E/CN.4/2003/90/Add.2, en date du 10 février 2003). Le Rapporteur spécial indique que l’on constate «une persistance des pratiques d’«enganche» (embauche entachée de tromperie) et de transferts d’indigènes utilisés comme main-d’œuvre dans des plantations traditionnelles ou nouvelles, et aussi d’autres formes de mainmise sur cette main-d’œuvre, qui est soumise à des conditions précaires, avec des salaires inférieurs aux minimums légaux, sans couverture sociale, au mépris des normes les plus élémentaires en ce qui concerne la rémunération, la stabilité de l’emploi et les conditions de travail». La commission espère que le gouvernement communiquera des informations sur lesdites pratiques d’«enganche» et de transfert ou autres formes de mainmise sur la main-d’œuvre indigène.
4. Article 25 de la convention. Dans sa précédente observation, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer la célérité des procédures judiciaires engagées suite à l’imposition d’un travail obligatoire, dans les affaires pour lesquelles le Procureur de la République du Guatemala avait émis une résolution confirmant la responsabilité des personnes qui n’avaient fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire appropriée. Dans son rapport, le gouvernement indique avoir accéléré le traitement des procédures administratives et judiciaires. La commission souhaiterait que le gouvernement communique copie des décisions des juridictions administratives ou judiciaires sanctionnant l’imposition de travail forcé.