National Legislation on Labour and Social Rights
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La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans ses rapports qui lui sont parvenus en octobre 1996 et septembre 1998. Elle prend également note d'une communication reçue le 21 août 1998 du Conseil australien des syndicats (ACTU), qui contenait des déclarations concernant le travail pénitentiaire dans les prisons privées au Victoria se rapportant à la l'application de la convention, ainsi que de la réponse du gouvernement à ces allégations, parvenue le 6 novembre 1998.
Articles 1 a) et 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. 1. L'ACTU indique qu'il existe trois prisons privées dans l'Etat de Victoria, où sont incarcérés 47 pour cent de tous les détenus de cet Etat, et où tous les détenus de moins de 65 ans doivent y travailler sous peine de sanction. Le conseil ajoute qu'à la prison de femmes Deer Park les détenues qui refusent de travailler sont transférées dans les quartiers les moins désirables; à la prison de Fulham et de Port Phillip, les détenus perdent leurs avantages s'ils refusent de travailler. Il déclare enfin que dans toutes les prisons privées le travail est placé sous le contrôle d'opérateurs privés (et non de l'autorité publique) et que les détenus doivent travailler pour une entreprise privée (l'entreprise gérant la prison). Le taux de rémunération journalier serait de 6,50 dollars australiens ou 7,50 dollars australiens dans les prisons privées, contre un minimum de près de 75 dollars australiens pour les travailleurs libres.
2. Le gouvernement indique dans sa réponse que, tant dans les prisons publiques que dans les prisons privées, le travail pénitentiaire est placé sous la surveillance et le contrôle d'une autorité publique et que la garde des prisonniers reste la prérogative de l'Etat, qui en conserve la responsabilité globale; l'Office of the Correctional Services Commissioner (OCSC) garde la responsabilité directe du calcul des peines, de l'évaluation des prisonniers ainsi que de la classification et de l'attribution des niveaux de sécurité. En ce qui concerne les prisons privées, le ministre, le directeur de la Chancellerie et toute personne autorisée par lui ont libre accès à la prison, aux détenus, au personnel carcéral et à tous les documents pertinents qui sont en la possession des opérateurs privés, afin de veiller à ce que ces derniers respectent toutes lois et obligations contractuelles pertinentes, et que la sécurité et la santé des détenus soient assurées.
Les détenus des prisons privées seraient tenus de travailler dans le cadre des activités professionnelles prévues dans ces établissements en vertu de la "Victorian Corrections Act". Seuls les détenus malades et les détenues en état de grossesse ou s'occupant d'un enfant en bas âge ne seraient pas tenus de travailler. Les taux de rémunération et les horaires de travail seraient établis par l'OCSC. Les seuls détenus à ne percevoir aucun salaire sous quelque forme que ce soit seraient ceux ayant directement refusé de travailler, en infraction à la "Corrections Act", les "salaires" des détenus s'entendant plus comme des "allocations" pour coopération avec le système carcéral. Les détenus dans l'incapacité de travailler pour cause de maladie, de maternité, d'invalidité ou en raison de leur âge percevraient des "salaires" réduits. Les prisonniers ne seraient pas couverts par la "State Workers Compensation Scheme" ni admis à bénéficier de la plupart des prestations de sécurité sociale.
Le gouvernement indique que les bénéfices dégagés des activités professionnelles en milieu carcéral ne sont pas acquis aux opérateurs privés. L'Accord sur les services pénitentiaires conclu entre le gouvernement du Victoria et chaque opérateur privé prescrit à ce dernier de veiller à ce que toute recette provenant des activités professionnelles (en milieu carcéral) soit séparée des recettes de l'entrepreneur et de veiller à ce que tout bénéfice dégagé par les activités professionnelles (en milieu carcéral) soit réinvesti dans ces activités ou soit dépensé de telle autre manière que le directeur de la Chancellerie jugera opportune.
Selon le gouvernement, il n'est pas opportun de comparer les taux de rémunération des prisonniers avec ceux des travailleurs libres effectuant le même travail, sans tenir compte du contexte dans lequel s'effectue le travail pénitentiaire. L'activité professionnelle en milieu carcéral a pour but d'apporter aux détenus des capacités et une expérience professionnelles; elle s'inscrit dans le processus de leur réinsertion en vue de leur réintégration dans le marché du travail, une fois libérés.
3. Dans son rapport de 1996, le gouvernement se référait de manière détaillée au travail en prison dans les prisons non étatiques d'Australie-Méridionale, de Nouvelle-Galles du Sud, du Queensland et du Victoria, aucune prison privée n'existant dans le Territoire du Nord. Dans son rapport parvenu en septembre 1998, le gouvernement se réfère aussi à la législation appliquée par la Queensland Correction Services Commission et déclare que le travail pénitentiaire au Queensland rentre dans la dérogation prévue à l'article 2, paragraphe 2 c), que les détenus soient incarcérés dans un établissement de l'Etat ou dans un centre pénitentiaire privatisé. Il déclare également que, s'il n'existe pas de mesure dissuasive ou de sanction incitant les prisonniers à accepter de travailler, le refus de travailler serait considéré comme un refus de participer pleinement au processus de réinsertion autodirigée. Le gouvernement déclare encore que la "Queensland Corrective Services (Administration) Act de 1988" -- établissant les conditions de gestion et de fonctionnement de centres pénitentiaires gérés par des organismes privés agissant pour le compte de la Queensland Corrective Services Commission -- implique que les détenus des prisons gérées contractuellement sont "sous la surveillance et le contrôle des autorité publiques", conformément aux dispositions de cet article de la convention.
4. La commission rappelle qu'un travail ou un service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire est exclu du champ d'application de la convention aux deux conditions suivantes: "que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées". Le fait, donc, que le prisonnier reste à tout moment sous la supervision et le contrôle d'une autorité publique ne dispense pas en soi de la deuxième nécessité, à savoir qu'il ne doit pas être "concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées". La convention ne prévoit aucune exception à cet égard: l'interdiction est absolue et doit être respectée sans considération de la manière dont le revenu excédent attribué à l'entité de gestion de la pension privée est, à son tour, distribué. La commission fait observer, au paragraphe 98 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, que cette interdiction porte non seulement sur le travail en dehors de l'établissement pénitentiaire, mais s'applique également au travail dans des ateliers que des entreprises privées font fonctionner à l'intérieur des prisons et que, a fortiori, elle s'applique à tout travail organisé dans des prisons privées.
L'utilisation du travail de condamnés dans de tels ateliers ne serait compatible avec la convention que dans la mesure où elle serait soumise au libre consentement des prisonniers concernés et à des garanties quant au paiement d'un salaire normal, etc. La commission note que la rémunération accordée aux prisonniers est dix fois inférieure au salaire minimum. Même si les prisonniers acquièrent simultanément des capacités et l'expérience du travail, comme l'affirme le gouvernement, le taux de cette rémunération demeure nettement plus bas que celui des travailleurs en cours de formation. La commission observe également qu'un tel taux de rémunération ne saurait inciter les prisonniers à un travail productif. La pratique de la notion de surveillance et de contrôle des autorités publiques devrait également être examinée en profondeur, car la convention ne permet pas une délégation totale de la supervision ou du contrôle à une entreprise privée.
5. Se référant aux paragraphes 97 et 98 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé et aux paragraphes 116 à 125 de son rapport général de 1998 concernant le travail dans les prisons gérées par le secteur privé, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations, dans son prochain rapport, sur les mesures adoptées ou envisagées pour garantir, tant en droit que dans la pratique, que les détenus travaillant pour des employeurs privés se sont offerts de plein gré, sans être soumis à des pressions ou à la menace d'une peine quelconque et avec les garanties susmentionnées. Elle prie le gouvernement, compte tenu des exigences de la convention et des commentaires formulés ici, de continuer à communiquer des informations sur le travail dans les prisons non étatiques dans les juridictions autres que celle du Victoria.
[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 1999.]