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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d'administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d'administration- 63. Le comité a examiné le présent cas qui a trait à des actes d’ingérence des autorités dans les affaires de la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), à son exclusion de toutes les consultations tripartites nationales et à des actes antisyndicaux de certaines entreprises à l’égard de ses dirigeants, pour la dernière fois lors de sa réunion de juin 2016. [Voir 378e rapport, paragr. 758-774.] À cette occasion, le comité a prié le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour établir des critères clairs et préétablis de représentativité syndicale tout en privilégiant un dialogue social inclusif pour la détermination de ces critères en s’efforçant d’élargir le champ de consultation à toutes les organisations concernées du paysage syndical et patronal tunisien afin de prendre en considération les divers points de vue.
- 64. Le comité note que, dans ses communications datées du 20 août 2018, signées conjointement avec la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (CONECT) et le Syndicat des agriculteurs de Tunisie (SYNAGRI) les 4 avril 2019 et 24 septembre 2021, la CGTT dénonce son exclusion persistante du dialogue social et notamment du Conseil national du dialogue social en vertu des dispositions du décret gouvernemental n° 2018-676 du 7 août 2018 portant fixation du nombre des membres du Conseil national du dialogue social. Selon la CGTT, l’article 2 de ce décret, pris sans concertation avec les partenaires sociaux, prévoit expressément que les 35 membres travailleurs seront issus de l’organisation de travailleurs la plus représentative au détriment de la représentation proportionnelle. L’organisation plaignante ajoute que cette logique de représentation exclusive est également appliquée à la représentation des membres employeurs dans les secteurs agricole (5 membres) et non agricole (30 membres). Ces dispositions conduisent nécessairement à limiter la représentation syndicale et patronale à trois entités, en excluant toutes les autres organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs. La CGTT ajoute que les dispositions du décret sont en contradiction avec les dispositions de la loi n° 2017-54 du 24 juillet 2017 portant création du Conseil national du dialogue social, dont l’article 8 soutient expressément la logique du pluralisme syndical dans la composition de l’assemblée du Conseil, qui est composée «de représentants des organisations les plus représentatives des travailleurs et de représentants des organisations les plus représentatives des employeurs dans les secteurs agricole et non agricole».
- 65. Par ailleurs, la CGTT rappelle que la justice a confirmé dans un arrêt de la Cour administrative d’appel de Tunis en date du 5 février 2019, confirmant un jugement du Tribunal administratif en date du 26 juin 2015, son droit de bénéficier des droits et avantages liés à son statut d’organisation syndicale, notamment ceux relatifs à la retenue des cotisations syndicales, à la disponibilité des dirigeants syndicaux et au droit à la négociation collective.
- 66. Le comité prend note de l’indication du gouvernement contenue dans une communication du 21 décembre 2021 selon laquelle le ministre des Affaires sociales a pris le décret du 26 septembre 2018 établissant les critères adoptés pour déterminer l’organisation syndicale la plus représentative au niveau national aux fins de la détermination de la composition du Conseil national du dialogue social. Ces critères sont: i) le nombre d’adhérents au sein de l’organisation syndicale jusqu’au 31 décembre 2017; ii) la tenue du congrès électoral de l’organisation syndicale; iii) le nombre de structures sectorielles de l’organisation syndicale et la nature de son activité; et iv) le nombre de structures syndicales régionales et locales de l’organisation syndicale. Selon ces critères est considérée l’organisation syndicale des travailleurs et des employeurs la plus représentative l’organisation qui a tenu son congrès électoral et celle qui a le plus grand nombre d’adhérents et le plus grand nombre des structures sectorielles, régionales et locales. Il en va de même pour la représentation des employeurs.
- 67. Le gouvernement indique que, suite à la publication de l’arrêté, le ministère des Affaires sociales a envoyé une correspondance à cet effet aux organisations professionnelles afin qu’elles fournissent les informations requises. Toutefois, des réponses n’ont été reçues que de la part des organisations suivantes: l’Union générale des travailleurs tunisiens; l’Union syndicale des travailleurs tunisiens; et l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat. Sur cette base, le ministre des Affaires sociales a publié une décision le 6 novembre 2018 nommant les organisations susmentionnées membres du Conseil national du dialogue social.
- 68. En ce qui concerne la représentation au Conseil national du dialogue social, le comité note que l’article 8 de la loi no 2017-54 du 24 juillet 2017 portant création du conseil en question prévoit que l’assemblée générale du conseil se compose d’un nombre égal de représentants du gouvernement, de représentants des organisations les plus représentatives des travailleurs et de représentants des organisations les plus représentatives des employeurs dans les secteurs agricole et non agricole, tandis que le décret no 2018-676 établit des critères de représentativité clairs aux fins de déterminer la participation au conseil. Le comité regrette toutefois que le gouvernement n’ait pas répondu aux allégations des organisations plaignantes selon lesquelles le dialogue social inclusif pour la détermination de ces critères que le comité avait demandé lors de son dernier examen de ce cas n’a pas eu lieu et prie le gouvernement de tenir compte des points de vue des autres organisations représentatives lorsqu’il discute de questions qui peuvent les concerner.
- 69. Par ailleurs, rappelant que les tribunaux reconnaissent depuis longtemps les droits et avantages conférés à la CGTT par son statut d’organisation syndicale, le comité veut croire que le gouvernement veillera au plein respect de ces décisions, notamment en ce qui concerne l’octroi des facilités visées.
- 70. Enfin, rappelant que, à l’origine, ce cas concernait la question de la représentativité syndicale aux fins de la négociation collective à tous les niveaux et que les lois susmentionnées semblent ne traiter que de la question de la représentativité au sein du Conseil national du dialogue social, le comité prie à nouveau le gouvernement d’engager des consultations inclusives avec toutes les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées afin de garantir que la détermination des organisations représentatives au niveau des secteurs et des entreprises soit également fondée sur des critères clairs, préétablis et objectifs. Le comité porte à l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations les aspects législatifs de ce cas. Dans ces conditions, le comité considère que le présent cas est clos et il n’en poursuivra pas l’examen.