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Interim Report - Report No 397, March 2022

Case No 3405 (Myanmar) - Complaint date: 05-MAR-21 - Active

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Allégations: La plainte s’appuie sur de graves allégations de nombreuses attaques des autorités militaires contre des syndicalistes, des travailleurs et des fonctionnaires qui demandent le retour à un régime civil suite au coup militaire au Myanmar le 1er février 2021. Les allégations portent sur des actes d’intimidation et des menaces à l’encontre de syndicalistes, de travailleurs et de fonctionnaires pour qu’ils reprennent leur travail et renoncent à participer au mouvement de désobéissance civile, sur la suspension de postes et le recours au remplacement de grévistes, le retrait d’avantages sociaux et de certificats de compétence professionnelle, l’établissement de listes de travailleurs et de syndicalistes par la police en vue de leur arrestation, de leur emprisonnement et de leur détention, ainsi que sur de nombreux décès à la suite d’interventions des forces militaires et policières lors de manifestations pacifiques, dont le meurtre et la torture de dirigeants syndicaux

  1. 503. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de juin 2021 et, à cette occasion, il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 395e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 342e session, paragr. 284-358  .]
  2. 504. La Confédération syndicale internationale (CSI) a présenté de nouvelles allégations dans une communication datée du 5 octobre 2021.
  3. 505. Le ministère du Travail, de l’Immigration et de la Population (MOLIP) et la mission permanente à Genève ont présenté leurs réponses dans des communications datées du 9 juin, du 30 septembre et des 3, 9 et 17 décembre 2021.
  4. 506. Le Myanmar a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais n’a pas ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 507. À sa réunion de juin 2021, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 395e rapport, paragr. 358]:
    • a) Le comité regrette la grave détérioration de la liberté syndicale et d’autres droits humains pertinents qui se produit dans le pays et exprime en particulier sa profonde préoccupation face aux allégations d’attaques contre des travailleurs en grève au chantier naval de Mandalay, qui ont fait deux morts, et face au meurtre et à la torture de Zaw Myat Lynn. Le comité demande une enquête complète et indépendante sur les circonstances de ces décès et à être tenu informé de ses résultats.
    • b) Le comité prie instamment les autorités militaires responsables de cesser immédiatement de recourir à la violence contre les manifestants pacifiques et de rétablir les protections qui étaient garanties par la loi protégeant la vie privée et la sécurité des citoyens, de retirer les pouvoirs de surveillance qui ont été rétablis dans les circonscriptions et les villages, d’abroger l’alinéa 505A du Code pénal et de modifier l’article 38(c) de la loi sur les transactions électroniques en vue de garantir le plein respect des libertés publiques fondamentales nécessaires à l’exercice des droits syndicaux, notamment la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion, le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement et le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial, afin que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités et leurs fonctions sans être exposés à des menaces d’intimidation ou de violence et dans un climat de sécurité totale.
    • c) Le comité demande aux autorités responsables de réintégrer les fonctionnaires, les travailleurs du secteur de la santé ou les enseignants licenciés ou suspendus pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile et de rétablir les avantages qui ont pu être supprimés en conséquence afin que leurs droits syndicaux soient rétablis. Le comité s’attend en outre à ce que des mesures appropriées soient prises pour veiller à ce que les syndicalistes et les travailleurs du secteur privé ne soient pas pénalisés pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile pour le rétablissement de leurs droits syndicaux et à ce qu’ils retrouvent leur emploi et les avantages correspondants le cas échéant.
    • d) Le comité demande instamment que toutes les mesures nécessaires soient prises pour garantir qu’aucune personne n’est détenue du fait de la participation à une action de protestation pacifique en faveur du rétablissement de ses droits syndicaux. Le comité demande en outre instamment la libération immédiate de toutes les personnes qui auraient été arrêtées et/ou détenues pour avoir participé à une manifestation pacifique pour le rétablissement de leurs droits syndicaux et d’être tenu informé de toutes les mesures prises à cette fin.
    • e) Le comité demande instamment le retrait immédiat de la déclaration des autorités militaires du 26 février qui a désigné 16 syndicats comme n’étant pas légaux.
    • f) Le comité demande en outre que des informations détaillées soient fournies en réponse aux informations supplémentaires et aux nouvelles allégations soumises par la CSI dans sa communication du 30 mai 2021.
    • g) Le comité attire l’attention du Conseil d’administration sur le caractère grave et urgent du présent cas.

B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes

B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes
  1. 508. Dans sa communication datée du 30 mai 2021, la CSI présente des informations supplémentaires et de nouvelles allégations que le comité se propose d’examiner en détail à l’occasion de son prochain examen. La CSI exprime son inquiétude grandissante face à la détérioration rapide de la situation dans le pays où près de 4 000 personnes ont été arrêtées et de centaines d’autres auraient été tuées. La liberté de la presse et de l’information est non existante depuis le 8 mars dernier, date à laquelle le Conseil d’administration de l’État (SAC), qui relève du ministère des Affaires intérieures, a retiré leur licence de presse à cinq médias indépendants, soit: le Mizzima, Myanmar Now, 7Day News, Democratic Voice of Burma (DVB) et Khit Thit Media. En outre, le 25 avril, le Conseil d’administration de l’État a déclaré illégales les organisations qui documentaient les atrocités commises par l’armée comme l’Association d’assistance aux prisonniers politiques pour incitation à la panique publique, aux émeutes et atteinte à la stabilité de l’État. En date du 4 mai, au moins 80 journalistes avaient été arrêtés lors de leur reportage sur le coup militaire et le mouvement de désobéissance civile. La plupart d’entre eux ont été accusés d’avoir enfreint l’article 505A du Code pénal et d’avoir propagé de fausses informations.
  2. 509. Le mouvement de désobéissance civile est toujours en butte à des attaques plus violentes de la part des autorités militaires. Les ministères recrutent systématiquement des travailleurs journaliers et nomment des suppléants pour remplacer les fonctionnaires grévistes. En date du 10 mai, 3 000 fonctionnaires avaient été licenciés ou suspendus, 70 pour cent d’entre eux étant des femmes. De la documentation sur 1 533 cas de licenciement ou de suspension de fonctionnaires est jointe à la plainte. Elle concerne au 28 avril 2021: 638 suspensions et licenciements au ministère de l’Électricité et de l’Énergie (MOEE) – soit 380 suspensions au Département de l’énergie hydroélectrique et de la mise en œuvre (DHPI), au Département du contrôle de la transmission d’électricité (DPTC) et au Bureau du ministère à Naypyidaw et Mandalay; 168 employés permanents à Mandalay licenciés en application du règlement no 220 de la fonction publique et 90 employés licenciés à l’Office de l’électricité à Myingyan; 90 licenciements à la société de distribution électrique de Mandalay relevant du MOEE; 247 licenciements à l’entreprise pétrochimique du Myanmar relevant du MOEE; 69 suspensions à la Banque centrale; 102 cas de suspension, de licenciement, de procédure judiciaire et arrestations à l’encontre de fonctionnaires du MOLIP; 35 cas de mesures disciplinaires prises à l’encontre de fonctionnaires du Département de l’administration générale (GAD); intimidations et menaces de sanctions disciplinaires à l’encontre de 22 employés du ministère des Finances (MOF), et de 77 employés de la Direction de l’investissement et de l’administration des entreprises (DICA) relevant du ministère de l’Investissement et des Relations économiques extérieures (MIFER).
  3. 510. La CSI allègue en outre que le conseil militaire a pris le contrôle du ministère de l’Éducation (MOE), d’universités et d’écoles et a remplacé des chanceliers d’université, des directeurs d’école et des enseignants et, le 13 avril 2021, 32 recteurs d’université à Mandalay, Yangon, Dawei, Kyaukse, Lashio, par des suppléants nommés par les militaires. Un total de 990 cas de licenciement ou de suspension ont été signalés dans le monde de l’éducation. Pour sa part, la Fédération des enseignants du Myanmar a confirmé le licenciement ou la suspension, entre le 8 et le 10 mai, d’au moins 11 000 universitaires, enseignants et travailleurs de l’éducation qui avaient boycotté, les 6 et 7 mai, la réouverture des écoles par les élèves, les enseignants et le personnel, ce qui porte à environ 20 000 le nombre total d’enseignants licenciés. Les chiffres qui suivent sont fournis à titre d’exemples des cas de licenciement et de suspension: 369 licenciements dans les bureaux de district et de circonscription et aux services juridique et de recherche du MOE; 72 chargés de cours de l’Université technologique de Taungoo; le 28 avril, des chargés de cours de l’Université pour le développement des ethnies nationales à Sagaing, de l’Université à distance de Yangon, de l’Université technologique de Yangon (YTU), et 2 chargés de cours de l’Université de Yangon ont été licenciés; 149 chargés de cours et des employés de l’Université des langues étrangères de Mandalay (MUFL), 249 professeurs, professeurs associés, employés des résidences universitaires de l’Université de Mandalay, 60 chargés de cours de l’Université technologique de Myitkyna, 91 enseignants et employés de l’Université technologique de Taunggyi, 132 enseignants et employés de l’Université de Myint Kan, 88 enseignants et employés de l’Université technologique de Myint Kan, et 139 enseignants et employés de l’Université de Maung Bin ont été licenciés le 6 mai; 339 chargés de cours et 81 employés de l’Université de Yangon ont été licenciés les 6 et 7 mai; 731 licenciements à l’Université technologique de Yangon et à l’Université technologique de Mandalay le 7 mai; 55 employés de l’Université technologique de Lashio ont été suspendus le 3 mai; 34 enseignants du lycée technique public à Monywa et 46 enseignants de l’Institut technique public d’Hakha, dans l’État Chin ont été suspendus le 5 mai; 339 chargés de cours et employés de l’Université de Yangon ont été suspendus le 6 mai; 546 chargés de cours et employés de l’Université de Mandalay ont été suspendus au 6 mai, et 619 chargés de cours et employés de l’Université de Yadanabon à Mandalay ont été suspendus le 8 mai.
  4. 511. Selon la CSI, les actes d’intimidation à l’encontre des travailleurs, qui visent à priver ces derniers de leur droit à la liberté de réunion pacifique, se poursuivent. Le 3 mars, les travailleurs du MOEE et de la Myanmar Oil, Gas and Energy (MOGE) ont émis une déclaration attestant du fait que de nombreux employés avaient reçu des menaces de la part du gouvernement pour les forcer à renoncer à exercer ce droit et à se conformer à la loi sur la fonction publique, en violation de leurs droits. Ces travailleurs ayant décidé de continuer d’appuyer les protestations et ayant refusé de reconnaître le gouvernement militaire, le MOEE a embauché de la main d’œuvre de remplacement pour prendre leur place.
  5. 512. Dans le secteur ferroviaire, les syndicats estiment que près de 90 pour cent des 30 000 employés du ministère du Transport ferroviaire (MRT) ont refusé de travailler depuis la grève générale du 8 février. Le ministère a riposté en expulsant des logements du gouvernement au moins 1 600 cheminots et leurs familles, les laissant à la rue. Des perquisitions militaires auraient eu lieu dans des villages où les travailleurs expulsés sont logés temporairement par les comités de bénévoles du mouvement de désobéissance civile. L’une de ces perquisitions a eu lieu le 13 avril dans le village de Myinge, à Amarapura (région de Mandalay) où 25 familles expulsées avaient trouvé refuge.
  6. 513. Les familles des travailleurs du secteur de la santé ont également fait l’objet de pressions et de harcèlement de la part de l’armée. Le 28 avril 2021, à Pathein (région d’Ayeyarwady), les militaires ont convoqué à une réunion 30 parents de médecins grévistes des hôpitaux généraux pour leur demander de convaincre leurs enfants de retourner travailler.
  7. 514. La CSI déclare avoir vérifié 60 cas d’arrestation et de perquisition à l’encontre de 116 syndicalistes et a fourni à l’appui des renseignements détaillés en annexe à sa communication (la CSI a demandé que les noms des personnes demeurent confidentiels pour les protéger de graves représailles). Le 19 mars, les militaires ont occupé 60 écoles et campus universitaires dans le pays et ont passé à tabac des enseignants qui tentaient de pénétrer dans les locaux de leur école. Le 27 mars, le précepteur individuel Kyaw Moe Kaing a été arrêté par la police dans la circonscription de Dagon Seikkan et est mort à l’hôpital militaire de Mingaladon le 30 mars par suite des actes de torture infligés par la police. Le 28 avril, 3 travailleurs de l’éducation de l’Université de East Yangon et 1 autre de l’Université de Dagon ont été inculpés de soutien au mouvement de désobéissance civile, au titre de l’article 505A du Code pénal, suivi, le 2 mai, de 6 directeurs d’école élémentaire dans la région d’Ayeyarwady et Monywa.
  8. 515. La CSI ajoute que les arrestations de masse visent également les médecins, les travailleurs du secteur de la santé et les travailleurs sociaux en grève qui ont été nombreux à quitter les logements du gouvernement et qui habitent chez des amis pour continuer à fournir une assistance médicale aux blessés du mouvement de désobéissance civile. Les militaires auraient vandalisé ces infirmeries mobiles et les maisons funéraires, et volé dons et fournitures médicales. Entre le 13 et le 28 avril 2021, 215 médecins des hôpitaux publics de plusieurs régions (Yangon, Naypyidaw, Thanintharyi, Sagaing, Mandalay) et États (Kachin et shan) ont été inculpés au titre de l’article 505A du Code pénal.
  9. 516. À Yangon, l’armée multiplie les descentes, intensifie les perquisitions de domiciles et de bureaux pour identifier les syndicalistes et menacer les civils qui protègent les clandestins de poursuites en application de la version révisée de la loi sur l’administration des circonscriptions et des villages. Les 6 et 7 mars 2021 à Yangon, lors de perquisitions et de tirs aveugles chez des particuliers, les militaires ont arrêté 7 dirigeants syndicaux du secteur de l’habillement qui vivaient dans la clandestinité. Le 21 mars 2021, aux alentours de minuit, trois camions de soldats sont partis en repérage dans la cité de Htee Hlaing Shin où ils ont fait pression sur le propriétaire pour obtenir l’adresse des bureaux des organisations syndicales. Ce même jour, des soldats armés se sont déployés devant les bureaux d’une fédération syndicale et ont interrogé des résidents du quartier. Le 13 avril 2021, la maison des parents d’un dirigeant syndical située dans un village de la région de Mandalay a été perquisitionnée et pillée par l’armée. Lors de la descente, les militaires ont passé à tabac son frère jumeau et ont tué par balle un membre de la Fédération des syndicats de l’industrie, de l’artisanat et des services du Myanmar (MICS-TUsF). Le 15 avril 2021, la directrice du syndicat Solidarity Trade Union Myanmar (STUM) a été arrêtée par 40 soldats lors d’une perquisition au bureau du STUM dans la circonscription de Shwepyithar (Yangon) et ont été inculpés au titre de l’article 505A du Code pénal. Le STUM figure parmi les seize organisations syndicales qui ont été bannies par l’armée à compter du 1er mars. Le 25 avril 2021, un membre actif de la Fédération des travailleurs du bâtiment et du bois (BWFM) affiliée à la Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM) et responsable des finances du Syndicat des briqueteries de Hmawbe a été arrêtée par des militaires à son domicile, à Hmawbe (Yangon). On est sans nouvelles d’elle depuis.
  10. 517. La CSI allègue en outre que les militaires interpellent au hasard des travailleurs dans les rues pour leur réclamer leur téléphone mobile ou une amende à payer pour leur éviter une arrestation. Dans les zones industrielles de Hlaing Thar Yar et Shwe Pyi Thar, les syndicalistes sont victimes de chantage de la part des chefs de police de circonscription et des commandants/hauts gradés. Les dirigeants syndicaux de la CTUM et de la Fédération des travailleurs de l’industrie (IWFM) passés dans la clandestinité ont été menés par des intermédiaires aux postes de police où ils ont été forcés de verser des millions de kyats (plusieurs centaines de dollars des États-Unis) à la police en échange de leur liberté. Des officiers armés s’emploient à retrouver les coordonnées de dirigeants syndicaux et exigent de la direction d’usines de les dénoncer à la police.
  11. 518. En plus du meurtre de deux travailleurs de l’éducation signalé en mars par l’Internationale de l’éducation – Tin Nwet Yi, enseignante de l’école d’enseignement secondaire de base No 10 (No-10 BEHS (Branch)) dans la circonscription de Hlaing Thar Yar (Yangon), et Myint Myint Zi, enseignant à Monywa (Sagaing) –, la CSI signale 26 meurtres brutaux de syndicalistes commis par l’armée depuis le coup militaire. La plupart des victimes ont été tuées par des soldats et des tireurs embusqués alors qu’elles participaient aux manifestations du mouvement de désobéissance civile, ou par des militaires lors de tirs aveugles. En voici la liste:
    • Deux travailleurs de l’usine de chaussures Pouchen (ci-après «l’usine de chaussures A») et membres de Action Labor Rights (ALR), tués par balle à Hledan, Yangon, le 28 février 2021.
    • Deux travailleurs, membre de l’ALR et membre du syndicat de l’usine Mar Mar Noodle respectivement, tués par balle lors de la manifestation à Hlaing Thar Yar, Yangon, le 28 février 2021.
    • Ko Ko Lay, enseignant tué par balle lors de la manifestation à Myitkyna (État Kachin), le 8 mars 2021.
    • Htoo Aung Kyaw, employé de banque, tué par balle lors de la manifestation à Mandalay, le 11 mars 2021.
    • Tun Win Han, membre de l’ALR et du syndicat des industriels fabricants de pâtes alimentaires Mar, tué par balle lors de la manifestation à Hlaing Thar Yar, Yangon, le 14 mars 2021.
    • Zaw Zaw Htwe, membre du syndicat JCK relevant du STUM, tué par balle lors de la manifestation à Shwephyithar (Yangon), le 14 mars 2021.
    • Ko Aung Kaung Moe, employé de banque, tué par balle lors de la manifestation à Yangon, le 16 mars 2021.
    • Deux travailleurs de l’usine de chaussures Xing Jia (ci-après «l’usine de chaussures B»), tués par balle alors qu’ils réclamaient des arriérés de salaires à l’usine, à Hlaing Thar Yar (Yangon), le 16 mars 2021.
    • Nay Lin Thu, membre du syndicat (Power Battery) et du comité des jeunes de la MICS-TUsF, tué par balle par un tireur embusqué lors de la mobilisation organisée à l’occasion de la Journée des forces armées, à Mandalay, le 27 mars 2021.
    • Zaw Lin Maung, enseignant, tué par balle lors de la mobilisation organisée à l’occasion de la Journée des forces armées, à Mandalay, le 27 mars 2021.
    • Ko Zi Lin Aung, fonctionnaire, tué par balle par un tireur embusqué alors qu’il montait des barricades lors d’une manifestation à Pathein, le 29 mars 2021.
    • Ko Wei Zin, membre de l’Association des guides touristiques, tué par balle lors de la manifestation à Mandalay, le 27 mars 2021.
    • Kyw Win Maung, membre du Groupe des ingénieurs au sein du Comité du mouvement de désobéissance civile, tué par balle lors de la manifestation à Mandalay, le 27 mars 2021.
    • Phyo Tant Wai et Thiha Tun, médecins, membres du Comité du mouvement de désobéissance civile, tués par balle lors de la manifestation à Mandalay, le 27 mars 2021.
    • Chan Myae Kyaw, membre du comité de la jeunesse de la CTUM, tué par balle lors de la manifestation à Salingyi, Sagaing, le 27 mars 2021.
    • Kyaw Moe Kaing, précepteur individuel, mort sous la torture alors qu’il était détenu à la prison d’Insein, le 27 mars 2021.
    • Thar Zein Hein, secouriste, tué par balle lors de la manifestation à Monywa, le 28 mars 2021.
    • Khine Zar Thwe, employé de banque, tué par balle lors de la manifestation à Yangon, le 28 mars 2021.
    • Nay Lin Zaw, membre du syndicat AD Furniture Union relevant de la MICS-TUsF, tué par balle par des soldats lors d’une embuscade dans la zone industrielle de South Dagon, le 29 mars 2021.
    • Su Su Kyi, employé de banque, tué par balle lors de la manifestation à Yangon, le 1er avril 2021.
    • Un travailleur de l’usine Fuji, membre de la MICS-TUsF, tué par balle lors de perquisitions au village de Myinge Amarapura, Mandalay, le 13 avril 2021.
    • Maung Yan Aung, étudiant d’université, tué par balle lors de la manifestation à Phyu, le 29 mars 2021.
  12. 519. Selon la CSI, les actes d’intimidation et violentes attaques à l’encontre de syndicalistes du secteur privé se poursuivent également; les employeurs ne sont pas tenus responsables des atteintes aux droits des travailleurs sur le lieu de travail, et aucune garantie n’existe quant à la sécurité des travailleurs qui sont forcés de se rendre au travail. La CSI dénonce les attaques aveugles et la brutalité des militaires dans l’usine de chaussures B à Yangon. Le 17 mars 2021, 6 personnes ont été tuées à l’usine de chaussures Xing Jia (Myanmar) Shoes Company, dans la zone industrielle de Hlaing Thar Yar, lorsque les travailleurs se sont rassemblés à l’usine pour réclamer leurs arriérés de salaires, craignant que le propriétaire ne quitte le pays. Trois camions de soldats sont arrivés sur les lieux, ont enfermé ces travailleurs dans leur usine et ont aggravé la situation en utilisant leurs armes, tuant 6 des travailleurs, dont 2 à l’intérieur de l’usine et 4 habitants du village de Ding Su. Dix travailleuses enfermées dans l’usine ont pu sortir le lendemain matin, tandis que 70 autres travailleurs ont été arrêtés. Les syndicats ont confirmé 25 de ces arrestations; 3 des travailleurs sont détenus à la prison d’Insein depuis le 12 avril.
  13. 520. La CSI évoque en outre les cas d’employés licenciés dans des banques privées pour cause d’arrêt de travail. Le 27 mars 2021, à Mandalay, la Myanmar Oriental Bank (ci-après «la banque A») a refusé d’accorder un congé à 197 employés et a licencié ces derniers. Le 29 avril 2021, cette banque a également licencié 200 employés en congé pour leur participation au mouvement de désobéissance civile. La KBZ Bank (ci-après «la banque B») a menacé ses employés de poursuites judiciaires s’ils ne reprenaient pas le travail d’ici au 20 avril 2021.
  14. 521. Les dirigeants syndicaux du secteur privé sont immédiatement exposés à des menaces et à des risques pour leur sécurité lorsqu’ils représentent des dizaines de milliers de travailleurs dans des négociations avec les employeurs au sujet des arriérés de salaires dus à de soudaines fermetures d’usine ou à des suspensions résultant de commandes annulées ou d’actes de vandalisme. Des litiges au sujet de licenciements injustifiés se multiplient alors que les employeurs prennent pour prétexte des demandes de congé non autorisé de plus de trois jours pour licencier des travailleurs et ne pas verser leur salaire, sans se soucier des préoccupations soulevées par les syndicats au nom de leurs membres concernant la sécurité, le blocus militaire ou autre. L’IWFM, la MICS-TUsF et des organisations syndicales ont condamné les employeurs qui se sont défilés et ceux qui ont fait fi des protestations des syndicats, de la liberté syndicale et de la sécurité des travailleurs; elles ont exigé, de concert avec les syndicats, que les travailleurs reçoivent leur salaire et qu’un congé non rémunéré leur soit accordé.
  15. 522. Les dirigeants syndicaux et les organisations syndicales appelés à régler des conflits du travail avec les employeurs s’exposent aux pressions de l’armée ou à des actes de violence. L’armée procède à des inspections d’usine comme celle qui s’est produite le 3 mai 2021 dans la zone industrielle de Hlaing Thar Yar, à Yangon. Les directeurs ont indiqué à certains dirigeants syndicaux que l’armée avait exigé de savoir où se trouvaient les dirigeants et les responsables, et avait interdit toute constitution de syndicat. Les dirigeants syndicaux n’ont aucun moyen de recours à l’encontre des employeurs qui exploitent des conditions de vulnérabilité par des pratiques antisyndicales.
  16. 523. Dans sa communication datée du 5 octobre 2021, la CSI complète les informations fournies antérieurement en mettant le doigt sur la situation dramatique et dangereuse dans laquelle se trouvent les travailleurs et la société civile au Myanmar. Au 28 septembre 2021, l’armée birmane avait tué 1 139 civils et manifestants du mouvement de désobéissance civile, arrêté 6 891 personnes, inculpé 1 989 d’entre elles en en condamnant 293.
  17. 524. Le 22 juillet 2021, la CTUM et l’organisation affiliée du secteur de l’habillement, l’IWFM, ont indiqué que la situation s’était détériorée à un point tel que les syndicats de base devaient suspendre leurs activités. Les lieux de travail ne sont plus sûrs pour les syndicalistes et certaines directions profitent de la situation pour supprimer les syndicats ou, dans certains cas, les livrer à l’armée. Elles notent que l’armée utilise les administrateurs de circonscription et les directeurs d’usine comme indicateurs pour mieux cibler les fouilles et les perquisitions de domicile sur les syndicalistes et les membres actifs du mouvement de désobéissance civile. Les dirigeants syndicaux risquent de s’exposer encore davantage en poursuivant leurs activités syndicales ou en se rendant dans les départements du travail au nom de leurs membres. De plus en plus de mandats d’arrêt sont délivrés contre des dirigeants des syndicats de base et de syndicalistes actifs pour participation au mouvement de désobéissance civile ou soutien du gouvernement d’unité nationale (NUG). Le 23 mai 2021, le domicile du président de la BWFM, qui siège également au comité central de la CTUM, a été perquisitionné par des militaires, et le magistrat d’East Dagon a délivré un mandat d’arrêt à l’administrateur de la circonscription pour qu’il soit livré à l’armée à son retour à son domicile. Le 25 mai 2021, un mandat d’arrêt a été délivré au vice-président de la Fédération de l’agriculture et des agriculteurs du Myanmar (AFFM) qui siège également au comité central de la CTUM et est membre élu du Conseil national d’arbitrage. Le 3 juin 2021, 124 mandats d’arrêt ont été délivrés contre des membres des fédérations de la CTUM, dont des membres du comité central de la CTUM. Six d’entre eux ont été inculpés au titre de l’article 124 du Code de procédure pénale, qui érige en infraction le fait de tenter d’inciter à la haine ou au mépris, ou de susciter le mécontentement à l’égard du gouvernement, de l’armée ou du personnel militaire. Cette disposition a été amendée et la peine encourue, qui était de trois ans d’emprisonnement, est désormais de sept à vingt ans. Les 14 et 15 juin 2021, les bureaux de la MICS-TUsF à Myint Nge, Amarapura et South Dagon (Yangon) ont été perquisitionnés. Le responsable de la MICS-TUsF à South Dagon a été interrogé. Le 4 septembre 2021, les militaires ont fait irruption en force dans une usine de confection dans la zone industrielle de la circonscription de Shwe Pyi Tthar, à Yangon, et ont arrêté deux travailleurs pour leur participation au mouvement de désobéissance civile.
  18. 525. Pour avoir exercé leur droit à la liberté syndicale, à la liberté d’expression et à la liberté de réunion pacifique, les travailleurs de l’éducation et les travailleurs du secteur de la santé suivants ont été inculpés au titre de l’article 505A du Code pénal: 81 employés du secteur de l’enseignement de base et de l’enseignement supérieur ainsi que des recteurs d’université, dont 23 ont été arrêtés et jugés, notamment un directeur d’école et 3 enseignants de Myeik qui ont chacun été condamnés à des peines maximales de trois années d’emprisonnement. La CSI indique n’avoir aucune information au sujet de l’issue du procès pour 8 d’entre eux ni du lieu où se trouvent 9 autres personnes qui ont été arrêtées, dont le président de l’Association des professeurs d’université.
  19. 526. La CSI ajoute que les militaires continuent d’attaquer les établissements de soins et les travailleurs qui fournissent de l’aide humanitaire au mouvement de désobéissance civile ou qui traitent les malades du COVID-19 dans des cliniques de fortune: 241 médecins de toutes les régions du pays – Bago, État shan, Naypyidaw, Sagaing, Magway, Yangon, État Môn, Ayeyarwady, Mandalay, État Kachin, État Kayine, État rakhine, États de Kayah et Chin – 69 infirmiers et infirmières également de toutes les régions du pays – Tanintharyi/Dawei, Ayeyarwady, Yangon, État shan, Sagaing, Naypyidaw, Bago, État Kachin, États de Kayin/Karen, État de Kayah, Mawlagumyine/État Môn, Mandalay et Mogway – ont été inculpés au titre de l’article 505A du Code pénal.
  20. 527. Enfin, la CSI fournit des renseignements sur les autres syndicalistes et travailleurs arrêtés et placés en détention depuis son précédent compte rendu. Un travailleur de l’usine Suntime JCK, membre du STUM, qui a été arrêté le 15 avril 2021, demeure en détention à la prison d’Insein. Un haut responsable de la BWFM a été arrêté à Hmawbi (Yangon), le 25 avril 2021, inculpé au titre de l’article 505A du Code pénal, et est toujours en détention. Un membre du comité central exécutif de la Fédération des syndicats de toute la Birmanie (ABFTU) et membre du comité de Sagaing pour le mouvement de désobéissance civile a été arrêté à Yaynanchaung (Mandalay) le 13 juin et est toujours en détention. Le 14 juin 2021, le domicile de U Thet Hnin Aung, secrétaire général de la MICS-TUsF et membre de comité de Mandalay pour le mouvement de désobéissance civile, a été perquisitionné par les militaires; le domicile de ses parents, dans le village de Myint Nge (Mandalay) avait été perquisitionné le 15 avril 2021. Le 18 juin 2021, U Thet Hnin Aung a été arrêté et placé en détention au centre d’interrogation Shwe Pyi Thar pendant des semaines avant d’être transféré, le 30 juillet, à la prison d’Insein où sa santé s’est détériorée. Le 24 août, il a été admis à l’hôpital de la prison pour une hémorragie digestive. Il est inculpé au titre de l’article 17(1) de la loi sur les associations illégales qui érige en infraction le fait d’être membre d’une association illégale ou d’y être affilié, infraction passible de trois ans d’emprisonnement. Le 26 février 2021, le gouvernement militaire a déclaré que la MICS TUsF et 15 autres syndicats et organisations syndicales étaient des organisations illégales. Le 23 août 2021, le procès a commencé au tribunal de South Dagon, sans la présence d’un avocat. Le 24 août 2021, à Hlaing Thar Yar, une ouvrière du textile a été arrêtée pour avoir affiché dans les réseaux sociaux son soutien au gouvernement d’unité nationale. Elle a été placée en détention au poste de police de Hlaing Thar Yar. Le 28 août 2021, un responsable de la CTUM a été arrêté dans un monastère à Yangon pour association présumée à la Force de défense populaire (PDF); il est toujours en détention. Le 31 août 2021, deux syndicalistes indépendants ont été arrêtés dans la circonscription de Hlaing Thar Yar (Yangon) pour association présumée à la PDF; ils sont toujours en détention.
  21. 528. Les licenciements et suspensions de fonctionnaires et d’agents publics et de travailleurs d’entreprises d’État qui appuient le mouvement de désobéissance civile se poursuivent. Le MOEE a suspendu ou démis de leurs fonctions 366 travailleurs, dont des travailleurs journaliers de l’électricité à North Okklapa (Yangon), 188 électriciens des circonscriptions de Mandalay, 90 travailleurs de la Mandalay Electricity Supply Corporation, des employés du DIHE (Department of Hydropower Implementation) et du Service de la transmission d’énergie et du contrôle des systèmes, et des responsables syndicaux au MOEE. Plus de 2 000 des quelque 7 000 employés de l’entreprise publique MOGE ont été licenciés: dans l’industrie pétrolière et gazière et dans les entreprises d’engrais appartenant à la MOGE, 1 473 travailleurs ont été licenciés (247 travailleurs de l’usine d’engrais no 1, 66 travailleurs de l’usine d’engrais no 5, 531 manœuvres du champ pétrolifère Htauk Shabin à Minbu (Magway), 86 manœuvres des champs pétrolifères Letpanto, Mann et Htaukshabin, 324 manœuvres du champ pétrolifère Mann et 219 manœuvres du champ pétrolifère Yaynangyaung). L’entreprise publique MPE (Myanma Petrochemical Enterprise) a engagé au moins 800 journaliers non qualifiés comme main-d’œuvre de remplacement pour leur permettre de reprendre la production aux usines d’engrais no 3, 4 et 5. Le 30 mars 2021, 900 employés de la MOGE à Minbu ont été expulsés de leur logement. Le13 mai 2021, le conseil militaire a émis une directive les autorisant à réintégrer leurs logements à condition de présenter des excuses pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile. À ce jour, les travailleurs concernés n’ont pas cédé à ces pressions: 645 fonctionnaires et employés d’entreprises d’État relevant du ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et de l’Irrigation (MOALI) ont été licenciés, dont: 23 travailleurs de l’État Chin et de la région de Sagaing, 60 employés de la Myanmar Development Bank, à Yangon, 137 fonctionnaires dans la région d’Ayeyarwady, 182 employés du Département du développement rural à Monywa et Sagaing, 74 employés à Mandalay, 81 employés de la région d’Ayeyarwady et 88 employés dans l’État Chin. En outre, 331 fonctionnaires et employés de la MEB (Myanmar Economic Bank) relevant du ministère de la Planification et des Finances (MOPF) ont été licenciés, dont: 194 employés des bureaux syndicaux ministériels à Naypyidaw, 91 employés de la MEB dans l’État Chin et 46 employés de la MEB dans la région d’Ayeyarwady. De plus, 335 fonctionnaires des bureaux syndicaux du ministère de l’Éducation ont été licenciés, soit: 255 de Yangon, 54 de Kachin et 26 de l’État Chin. Enfin, 106 travailleurs du secteur de l’éducation ont également été licenciés, dont: 16 employés dans le secteur du développement de l’énergie nucléaire, 90 employés du Département de recherche en biotechnologie.
  22. 529. En outre, la CSI allègue que près de 150 000 professeurs d’université et enseignants du secteur de l’éducation de base ont été suspendus de leurs fonctions, dont: 23 703 enseignants du secteur de l’éducation de base dans 31 villes et régions, mais principalement dans les régions d’Ayeuarwarddy (2 150), de Yangon (1 922) et de Tanintharyi/Dawei (1 832); 4 918 personnes travaillant en université – chargés de cours, professeurs associés, recteurs et personnel administratif. Le tiers de ces personnes travaillaient dans les établissements suivants: dans la région de Mandalay (619 de l’Université de Yatanarpon, 499 de l’Université de Mandalay, 331 de la MTU (Université technologique de Mandalay), 242 de la MUFL, 132 de l’Université de Myint Kan, 101 de l’Université du génie aérospatial du Myanmar et 8 recteurs de l’Université de Kyauk Se, de l’Université d’études informatiques de Mandalay et de l’ICT de Yatanarpon). Le quart d’entre elles sont des recteurs et professeurs d’université de la région de Yangon, dont: 766 de l’Université de Yangon, 189 de l’Université des sciences de l’éducation de Yangon, 128 de l’Université des langues étrangères de Yangon et 122 de l’Université de Hmawbi. Dans la région d’Ayeyarwady, 597 personnes ont été démises de leurs fonctions, dont: 218 de l’Université de Hinthada, 146 de l’Université de Pathein, 137 de l’Université de Ma U Pin, 49 de l’Université technologique de Pathein et 49 de l’Université technologique de Ma U Pin. Dans d’autres régions et États, 1 185 personnes ont été licenciées, soit: 340 de l’Université de Hakha (État Chin), 316 de l’Université de Kalay et de l’Université de Monywa (région de Sagaing), 155 de l’Université de Mawlamyne (État mon), 146 de l’Université de Monyin (État Kachin), 73 de l’Université technologique de Bago, 94 des universités de Taungyi et Lashio (État shan) et 1 personne à l’Université d’études informatiques à Dawei.
  23. 530. La CSI indique également qu’en milieu hospitalier 457 personnes ont été licenciées et menacées d’arrestation par le ministère de la Santé et des Sports (MOHS), dont: 408 employés du Central Women’s Hospital (Mandalay), qui font l’objet d’enquêtes et de surveillance; 34 employés du Thein Ni General Hospital (État shan), qui ont été menacés de poursuites judiciaires, et 15 employés du Département de médecine traditionnelle du MOHS (Naypyidaw). Les attaques à l’encontre des personnels et centres médicaux se poursuivent. L’armée continue d’occuper les hôpitaux publics, de passer à tabac des travailleurs du secteur de la santé, d’endommager des cliniques de fortune, de voler et de confisquer du matériel médical, des médicaments et des bouteilles d’oxygène. De plus en plus de membres du personnel des services de santé passent dans la clandestinité, le conseil militaire ayant retiré leur permis d’exercer à des collègues qui ont joint le mouvement de désobéissance civile. L’armée a également annulé les permis d’exploitation des cliniques et d’hôpitaux dans lesquels ils travaillaient. L’Organisation des Nations Unies a signalé au moins 260 cas d’attaque de travailleurs du secteur de la santé ou de centres de santé jusqu’au 25 août, et 600 mandats d’arrestation ont été émis à l’endroit de travailleurs du secteur de la santé.
  24. 531. Dans le secteur des transports, la CSI allègue que 1 293 cheminots et conducteurs de locomotive relevant du ministère des Transports et des Communications (MTC) ont été suspendus de leurs fonctions, dont 583 travailleurs de l’État Kachin, 391 autres à Amarapura et Pyin Oo Win (Mandalay), 303 employés de la Diesel Locomotive Company (Sagaing), 58 de l’État shan, et 58 de la région de Magway.
  25. 532. L’armée continue de prendre des mesures coercitives pour punir les travailleurs qui appuient toujours le mouvement de désobéissance civile et pour les obliger à reprendre le travail. Le 12 mai 2021, le MOHS a ordonné aux travailleurs du secteur de la santé publique qui avaient exprimé leur soutien au mouvement de désobéissance civile de rembourser au conseil militaire les bourses d’État dont ils avaient bénéficié pour aller étudier à l’étranger. Le MOHS a également ordonné à tous les membres de son personnel gréviste de reprendre le travail avant le 13 mai. Le 5 mai 2021, le ministère de l’Information (MOI) a émis une directive pour exiger de son personnel de rembourser au conseil militaire les prêts consentis par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) au titre de l’aide en période de COVID-19, d’un montant équivalant à deux mois de salaire. Le 11 mai 2021, U Win Thaw, sous-gouverneur de la Banque centrale, a enjoint à tous les citoyens de déposer leur argent à la banque. Ceux qui refusent d’obtempérer seront inculpés d’atteinte au bon fonctionnement de l’économie de l’État.
  26. 533. Dans le secteur privé, la CSI indique que, outre les allégations susmentionnées, certaines entreprises ont profité de la détérioration de la situation en matière de droits humains et de droits du travail pour porter atteinte à la liberté syndicale des travailleurs et ont omis de respecter les droits relatifs aux conditions de service – mesures légales de protection des salaires, prestations, indemnités de départ ou dédommagement en cas de licenciement –, y compris les conditions prévues par les conventions collectives, et n’ont pas consulté les syndicats ni les représentants des travailleurs sur ces questions. L’IWFM a documenté des cas de violation des droits des travailleurs dans le secteur de l’habillement, en mettant en évidence des infractions systématiques au droit du travail du Myanmar et en matière de liberté syndicale. Les dirigeants syndicaux et les syndicalistes sont particulièrement visés pour les licenciements associés à la réduction des effectifs ou les suspensions de contrat de travail temporaire sans consultations dignes de ce nom. Les dirigeants syndicaux et les autres travailleurs qui soutiennent le mouvement de désobéissance civile et qui ont été licenciés sont mis sur liste noire par certains employeurs du secteur de l’habillement. Les travailleurs sont licenciés de façon arbitraire, sans procédure régulière ni justification ni indemnisation. Les pratiques antisyndicales sont courantes là où seulement des travailleurs non syndiqués ou des travailleurs qui se sont engagés à se désaffilier d’un syndicat sont réembauchés après la reprise des activités de production. Les emplois permanents ont été remplacés par des contrats de travail journaliers ou mensuels. Dans un cas, l’employeur a obligé les travailleurs à lui verser une indemnité forfaitaire et à remettre à la direction leur carte d’identité et leur téléphone mobile en guise de garantie à la signature d’un nouveau contrat de trois mois. L’effectif restreint est contraint d’accepter de travailler de plus longues heures et de façon plus intensive, sans bénéficier d’une rémunération supplémentaire ni pour ces plus longues heures ni pour le travail de nuit. Les prestations et les salaires ont chuté pour passer, au mieux, à 70 pour cent des minima légaux, et les congés payés et congés de maladie ont été supprimés. Les travailleurs sont réduits au silence et renoncent à porter plainte pour diverses violations de leurs droits au travail par peur d’être dénoncés aux autorités par la direction. Des cas précis sont présentés en annexe de la communication.
  27. 534. Enfin, la CSI allègue que l’armée utilise les mesures liées au COVID-19 comme prétexte pour porter atteinte encore davantage à la liberté syndicale et au respect de la dignité et des droits fondamentaux des travailleurs. Ainsi, un confinement en cellule est imposé dans les prisons, y compris dans les centres de détention des postes de police, privant les syndicalistes emprisonnés des services d’aide juridique et de contacts familiaux dans des conditions sanitaires raisonnables. Dans l’intervalle, les enquêtes policières se poursuivent et les décisions judiciaires sont prises sans la présence d’un avocat. Le confinement en cellule est imposé à la prison d’Insein depuis le 8 juillet 2021, et dans les prisons de Bago et d’Ayeyarwaddy depuis la fin de juin 2021. Selon le vice-ministre de l’Information au Conseil d’administration de l’État, au moins 375 détenus avaient été infectés au COVID-19 en date de juillet 2021, un chiffre sous évalué compte tenu de la surpopulation carcérale résultant du placement en détention de plus de manifestants du mouvement de désobéissance civile et de syndicalistes. L’état de santé des syndicalistes emprisonnés et des détenus est alarmant. Le blocage de l’accès à l’information concernant les nouvelles arrestations, détentions et procédures judiciaires à l’encontre de syndicalistes et de manifestants du mouvement de désobéissance civile empêchent les syndicats d’exercer leur solidarité en soutenant leurs membres, y compris en surveillant la situation des droits de l’homme dans les établissements de détention.
  28. 535. La CSI conclut en affirmant que la situation exige une attention immédiate, à commencer par les violations commises à l’endroit des travailleurs, et particulièrement de syndicalistes et de membres de syndicat, ainsi que les attaques contre la représentation syndicale. Elle se déclare profondément préoccupée par la violation permanente des droits des travailleurs par des entreprises et de la recrudescence de la violence militaire à l’encontre des citoyens ordinaires et des travailleurs.

C. Réponse du gouvernement

C. Réponse du gouvernement
  1. 536. Les réponses du MOLIP et de la mission permanente à Genève transmettant les vues de certains ministères ont été reçues le 9 juin, le 30 septembre et les 3, 9 et 17 décembre 2021.
  2. 537. S’agissant des allégations spécifiques relatives au décès de participants au mouvement de désobéissance civile, il est indiqué que l’équipe d’enquête conjointe représentant l’armée du Myanmar (la Tatmadaw), les forces de police du Myanmar et le Département de l’administration générale a effectué une inspection inopinée au Suu Vocational College pour assurer le maintien de l’ordre et la stabilité. Lorsque Zaw Myat Lynn a été sommé d’ouvrir la porte, juste après minuit, il a éteint la lumière, a pris l’escalier et a sauté dans le vide pour atterrir dans l’arrière-cour; il est tombé sur un tuyau d’acier fixé à la clôture et est mort de ses blessures intestinales. La police a mené une enquête, puis a saisi le tribunal de la circonscription de Shwepyithar de l’affaire où elle est jugée. Tin Nwet Yi, une manifestante, est décédée d’une crise cardiaque après avoir été blessée au bras gauche alors que les forces de police tentaient de disperser la foule. Un dossier a été ouvert au poste de police pour un cas de décès ordinaire, d’après le certificat de décès après autopsie.
  3. 538. Il est affirmé par ailleurs que les directives émises par le MOLIP et le MOE ne contenaient pas de pressions exigeant le retour au travail ni de menaces de licenciement ou de suspension ou de poursuite à l’encontre des employés ayant joint le mouvement de désobéissance civile; elles constituaient de simples rappels demandant le retour au travail.
  4. 539. Concernant la détention de Sean Turnell, il est indiqué qu’il a été prouvé que, à l’hôtel où il séjournait, il recevait, recueillait, enregistrait des croquis, plans et notes d’information et autres documents, et les communiquait à d’autres personnes en utilisant le mot de passe ou code secret officiel, compromettant ainsi la sécurité nationale ou les intérêts nationaux et qu’il a été poursuivi au titre de la loi sur les secrets d’État du Myanmar. Il a également été inculpé pour infraction à la réglementation en matière de visas relevant de la loi sur l’immigration du Myanmar.
  5. 540. S’agissant des propositions présentées au Bureau du commandant en chef des forces armées par le Parti de la solidarité et du développement de l’Union (USDP) en faveur du remplacement des fonctionnaires impliqués dans les manifestations, la réponse indique que des éléments de preuve doivent être présentés à l’USDP.
  6. 541. S’agissant des enseignants exerçant des fonctions au bureau de vote lors des élections de novembre 2020, il est précisé que, sur 63 enseignants, 37 électeurs et membres de la commission ont été accusés dans 49 affaires, dont 32 (concernant 45 enseignants) sont classées, 14 autres (concernant 15 enseignants) sont instruites et trois font l’objet d’une enquête. Sur les 14 affaires instruites, seulement 6 enseignants et 11 électeurs ont été poursuivis, dont 2 ont été condamnés à une amende de 30 000 kyats, tandis que les autres sont toujours en procès.
  7. 542. Concernant les accusations de violence généralisée et de meurtres commis par les autorités militaires, il est indiqué que les premières manifestations pacifiques ont fait place à des émeutes dès la troisième semaine de février résultant de tentatives de durcissement du mouvement de désobéissance civile, accompagnées d’actes d’intimidation et de pressions à l’encontre du comité représentant l’Assemblée de l’Union (Committee Representing Pyidaungsu Hluttaw, CRPH), engendrant l’anarchie et, finalement, l’insurrection et des actes terroristes, sous l’impulsion et par les mesures d’intimidation des membres radicaux de la LND. Les forces de sécurité ont donc levé les barrages routiers et arrêté les émeutiers pour assurer la paix et la stabilité de l’État, et la primauté du droit, et pour contrôler les groupes terroristes. Toutes ces mesures ont été prises conformément aux directives du manuel de procédure antiémeutes de Birmanie (1956) et du guide de maîtrise des foules et des émeutes (2015). Les forces de sécurité ont dû intervenir toutefois, les terroristes continuant d’attaquer les postes de police et les membres des forces de sécurité avec des armes artisanales meurtrières. Des terroristes ont été tués, ainsi que 80 militaires, sans compter 117 blessés. Le nombre des victimes parmi les policiers et les civils était de 1 496 et 1 551 respectivement. Des photographies de militaires et de policiers tués en service en divers endroits, y compris à des postes de contrôle COVID-19, et de civils et de fonctionnaires tués à leur retour de centres de vaccination COVID-19 où ils travaillaient comme bénévoles, sont jointes à la communication.
  8. 543. Toutefois, certains médias fournissent des informations erronées pour induire la population en erreur au sujet de l’armée, tandis que des saboteurs propagent ces informations en vue de détruire le mécanisme de l’administration. Des informations erronées concernant le nombre de personnes tuées par les forces de sécurité ont été propagées par l’Association d’aide aux prisonniers politiques, qui n’a aucun caractère officiel et qui n’est pas conforme aux dispositions de la loi sur les associations et de son règlement. La mort de plus de 700 personnes, dont des syndicalistes, qui exerçaient leur droit de manifester contre le coup militaire, n’a pu être confirmée. Selon les fichiers de police, 361 personnes ont perdu la vie, dont 193 ont été tuées par balle par des membres des forces de sécurité occupées à lever des barricades et à se défendre contre des actes terroristes. Les autres cas de décès n’avaient rien à voir avec les forces de sécurité: 95 personnes ont été assassinées par d’autres, 13 ont été tuées lors d’une attaque à la grenade ou à la mine, 5 sont décédées en cours de traitement médical, 10 sont mortes de maladie, 2 sont mortes subitement et 9 autres ont succombé à leurs blessures. Les coupables ont été arrêtés et poursuivis au pénal dans le respect des procédures juridiques et condamnés aux peines prévues par la loi. Enfin, 17 personnes ont été condamnées à mort.
  9. 544. Le MOLIP déclare en outre que, entre le 1er février et le 15 avril, les sympathisants et les membres radicaux de la LND ont incendié et détruit 63 postes de police, 62 administrations locales, 52 bureaux et départements, 16 ponts, 13 banques, 105 bureaux de l’éducation, écoles et autres bâtiments publics. Selon les dépositions des terroristes arrêtés, 13 usines situées dans les zones industrielles de Hlaing Thar Yar et de Shwepyithar et dans la circonscription d’Insein dans la région de Yangon ont été incendiées et détruites dans l’intention de perturber et de stopper la coopération commerciale avec les pays étrangers.
  10. 545. Il est également fait mention de 10 usines de confection, 2 usines de fabrication de machines pour l’industrie textile, 1 usine électronique, 1 usine d’engrais, 1 fabrique de sacs, 1 usine de fabrication de sacs de polyéthylène et 1 usine de fabrication de mousse de polystyrène qui ont été incendiées entre le 14 et le 19 mars 2021 dans la région de Yangon. Des barricades ont été érigées pour bloquer les voitures de pompiers et 5 policiers ont perdu la vie, 163 ont été blessés dans des attaques violentes tandis que 4 membres de la Tatmadaw et 1 parent ont été tués. Les pertes en bâtiments, machines, matières premières et produits finis se chiffrent en millions de dollars, et près de 20 000 possibilités d’emploi se sont volatilisées. Le MOLIP a émis une notification à l’intention des travailleurs assurés pour leur faire bénéficier de prestations de soutien du revenu équivalent à 40 pour cent de leur salaire. Au total, 766 155 kyats ont été répartis entre 13 610 travailleurs. En outre, 884 travailleurs assurés ont reçu au total 62 396 kyats en prestations de sécurité sociale. Pour mettre un terme à ces actes terroristes et pour rétablir un climat de paix et de stabilité dans le pays, des mesures devaient être prises dans le respect de la loi, comme d’enquêter sur les travailleurs impliqués dans les actes de violence et fouiller les suspects dans les circonscriptions où se produisaient ces actes de violence. Pour bien comprendre la situation réelle du Myanmar et pour rétablir la stabilité, la paix et la démocratie, il est suggéré que les organisations internationales ne se fient pas aux fausses informations ni aux accusations partisanes publiées dans les médias, mais qu’elles coopèrent avec le gouvernement en place pour obtenir des informations véridiques.
  11. 546. À ce jour, 1 481 personnes ont été traduites en justice, inculpées et condamnées après qu’il a été établi qu’elles ont commis un crime ou violé les dispositions du Code pénal ou de la loi sur les télécommunications ou d’autres lois. Le MOLIP n’a poursuivi aucun travailleur ou dirigeant syndical pour des infractions aux lois du travail. La dirigeante du STUM a été poursuivie pour avoir perturbé l’ordre public et compromis la stabilité de l’État. Les personnes impliquées dans le soulèvement, mais pas dans les actes terroristes, et qui ne soutenaient pas financièrement ou par d’autres moyens le mouvement de désobéissance civile ou qui n’étaient que de simples sympathisants du mouvement sont libérées conformément à la loi; 5 315 personnes ont été libérées. Des photographies des manifestants qui ont attiré l’attention sur les prisonniers qui ont été libérés après avoir été graciés sont jointes à la communication. En outre, dans le cas des personnes qui se cachent par peur d’être arrêtées et qui se sont présentées de leur plein gré aux autorités, les poursuites ont été abandonnées ou leur affaire a été classée, sous réserve qu’il a été établi qu’elles ne sont impliquées dans aucun crime ou aucune affaire. Au 30 septembre 2021, 742 personnes s’étaient présentées aux autorités et leur affaire a été classée ou les charges qui pesaient contre elles ont été abandonnées. Du 1er février au 3 novembre 2021, un total de 47 869 prisonniers ont été graciés et 4 434 affaires supplémentaires ont été classées.
  12. 547. Concernant le blocage de l’accès aux données mobiles et les atteintes à la liberté de la presse, il est indiqué que l’Internet est utilisé pour propager de fausses informations, ce qui compromet la stabilité du pays et l’état de droit. Les actes de violence et de vandalisme sont également encouragés. En conséquence, conformément à l’article 34(b) de la Constitution de l’Union internationale des télécommunications, le Myanmar a suspendu temporairement tous les types de services Internet dans l’intérêt de la population et conformément à l’article 77 de la loi sur les télécommunications. Le service Internet a donc été interrompu partiellement ou complètement à divers moments entre le 15 mars et le 24 mai 2021. Tous les types de services Internet ont été rétablis, mais certaines pages des réseaux sociaux, les sites Web au contenu illégal et les sites Web incitant aux actes de terrorisme et de sabotage demeurent interdits au nom de la sécurité nationale et de l’intérêt public.
  13. 548. S’agissant des allégations de représailles et de sanctions à l’encontre de fonctionnaires n’ayant pas repris leurs fonctions, il est indiqué que des membres du personnel administratif et universitaire des universités et des collèges relevant du MOE ont été sanctionnés ou remplacés conformément à la réglementation applicable au personnel de la fonction publique, pour manquement à leurs obligations respectives. Des mesures ont été prises individuellement, en fonction des infractions à la loi commises respectivement par 3 membres du personnel enseignant de l’Université de East Yangon, 1 de l’Université de Dagon et 6 directeurs d’école élémentaire d’Ayeyarwady et Monywa. En outre, 33 responsables et 86 employés ont été licenciés pour absence sans autorisation, ce qui constitue un manquement ou un non-respect des ordres. Deux employés ont reçu des avertissements écrits et 1 autre a été suspendue temporairement alors qu’elle était détenue lors d’une absence sans autorisation. Par ailleurs, les allégations de substitution et de nomination de 32 nouveaux recteurs à Mandalay, Yangon, Dawei, Kyaukse et Lashio sont fausses. Les membres du personnel du MOPF ont également été licenciés pour manquement à la loi sur le personnel de la fonction publique. Toutes ces mesures ont été prises, dans le strict respect du Règlement sur le personnel de la fonction publique, par les équipes d’enquête du ministère.
  14. 549. S’agissant des allégations concernant la suspension de 1 293 cheminots et conducteurs de locomotive de l’état Kachin, d’Amarapura, de Pyin Oo Lwin et Mandalay, de l’État shan, de la région de Magway, et de l’atelier Diesel Locomotive Workshop de Ywahtaung (région de Sagaing) relevant de Myanmar Railways, au ministère des Transports et des Communications, ces agents de la fonction publique ont également enfreint la loi sur le personnel de la fonction publique et le Règlement sur le personnel de la fonction publique. Il a été démontré qu’ils avaient commis des infractions disciplinaires; des dispositions ont été prises en conséquence et certains d’entre eux ont été licenciés, qui ont fait appel par la suite. Myanmar Railways a accueilli ces appels, le Règlement sur le personnel de la fonction publique stipulant que les agents de la fonction publique démis de leurs fonctions peuvent introduire un recours dans les six mois suivant la date du licenciement. Après quoi, ces agents sont autorisés à reprendre leurs fonctions. Actuellement, aucun agent de la fonction publique n’est licencié ni suspendu au MTC.
  15. 550. Le MOEE a répondu que les fonctionnaires qui étaient absents sans raison et qui ne revenaient pas sur le lieu de travail, même sur demande, ont été révoqués ou suspendus conformément à la loi sur la fonction publique et à son règlement.
  16. 551. Personne au MIFER n’a été arrêté ni détenu de façon arbitraire. En revanche, les membres de la famille du Directeur général adjoint ont été victimes d’une attaque pour avoir refusé de participer au mouvement de désobéissance civile.
  17. 552. S’agissant des allégations de perquisitions et de fouilles dont auraient été victimes des syndicalistes du secteur de la santé, les forces de sécurité n’ont attaqué aucun centre de santé ni n’ont été autorisées à le faire. Après le 1er février 2021, à l’incitation de membres de l’organisation terroriste exilée NUG et à l’instigation des membres extrémistes et des sympathisants du parti LND, un total de 68 pour cent des fonctionnaires du ministère de la Santé (médecins, personnel infirmier et personnel de nettoyage) ont joint le mouvement de désobéissance civile. En conséquence, 128 hôpitaux publics et privés ont fermé dans tout le pays et 567 patients sont décédés par manque de soins médicaux. Au cours de la période allant du 1er février au 29 septembre 2021, malgré les efforts du SAC, les membres des organisations terroristes NUG et PDF ont ciblé et attaqué des centres de traitement, de contrôle et de prévention COVID-19 dans différentes divisions et différents États, faisant 7 morts et 22 blessés – civils et fonctionnaires innocents – et 3 morts et 5 blessés du côté des forces de sécurité. En outre, 400 membres du personnel du Central Women’s Hospital, à Mandalay, et 19 membres du personnel du Thein Ni Township Hospital, qui ne se sont pas présentés au travail depuis février 2021, font toujours l’objet d’une enquête ministérielle conformément à la loi sur le personnel de la fonction publique et son règlement. Le ministère de la Santé a déclaré n’avoir menacé aucun de ses employés et que les dispositions nécessaires seraient prises pour abandonner les poursuites engagées contre des membres du personnel soignant inculpés au titre de l’article 505A du Code pénal qui manifestent la volonté de retourner de leur plein gré au travail et de fournir des lettres d’engagement et de recommandation y relatives.
  18. 553. S’agissant des allégations d’actes d’intimidation au Pathein General Hospital, il est indiqué que l’hôpital manquait de personnel à cause de rumeurs selon lesquelles les membres du personnel soignant seraient arrêtés s’ils retournaient travailler. Le 28 avril 2021, le Conseil administratif régional d’Ayeyarwady a invité les parents et tuteurs de médecins à expliquer la situation difficile et les épreuves auxquelles était confrontée la population locale. Le président a garanti aux parents qu’aucune procédure judiciaire ne serait engagée si les médecins retournaient travailler. De ce fait, 12 médecins ont repris leurs fonctions. La réunion visait non pas à faire pression sur les parents, mais à donner une garantie et à expliquer les difficultés endurées. Par ailleurs, les fonctionnaires du ministère de la Santé qui ont été inculpés d’avoir enfreint les dispositions de l’article 505A du Code pénal peuvent se présenter au ministère – et demander l’abandon des poursuites s’ils sont disposés à reprendre leurs fonctions au ministère – et fournir des lettres de recommandation émanant des départements compétents et une lettre d’engagement à l’intention du ministère des Affaires intérieures.
  19. 554. Concernant les licenciements dans le secteur privé, il est indiqué que, le 12 mars 2021, la banque B a envoyé à ses employés une notification leur demandant de reprendre le travail. Les employés savaient qu’une absence prolongée serait considérée comme un abandon de poste et que des mesures seraient prises conformément à la loi sur le travail et au contrat de travail. La banque B n’a jamais menacé ses employés ni enfreint les lois du travail et accueille toujours les demandes individuelles présentées par des employés qui sont partis et qui aimeraient reprendre leurs fonctions. La banque A s’est enquise auprès de ses employés au sujet des raisons de leur absence. Au 22 avril 2021, 1 125 employés avaient repris le travail, et 197 autres sont toujours absents et n’ont pas demandé de congé. On est resté sans nouvelles d’eux pendant soixante-quatorze jours consécutifs, alors qu’on leur a demandé à plusieurs reprises de reprendre le travail. Ces 197 employés ont donc été suspendus au 1er avril 2021, conformément aux procédures de la banque en matière de ressources humaines.
  20. 555. Les travailleurs de l’usine de chaussures ont reçu des indemnités en espèces, dont une indemnité de licenciement, les salaires et traitements dus au 15 mai 2021, et l’usine a cessé de fonctionner.
  21. 556. Les travailleurs ont le droit de faire grève et le droit de participer et de discuter, en qualité de représentants des travailleurs, conformément à la loi de 2011 sur l’organisation du travail. Toutefois, les rassemblements en vue de faire grève doivent être conformes aux dispositions de la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques. Des procédures de conciliation sont en cours pour le versement sans retard d’indemnités de licenciement et d’autres sommes dues au titre de la législation en vigueur.
  22. 557. Sur le chapitre de la surveillance et de la prévention des violations des droits des travailleurs, en règle générale, les griefs des travailleurs et des syndicats peuvent être soumis à fin de conciliation au comité de coordination sur le lieu de travail, les conflits d’intérêts sont réglés par la négociation et la conciliation conformément au mécanisme de règlement des différends, et les litiges portant sur les droits sont réglés par les départements compétents. Les travailleurs lésés doivent déposer plainte devant les départements compétents en utilisant le mécanisme de règlement des différends prévu.
  23. 558. En conclusion, il est déclaré que le Conseil d’administration de l’État met en œuvre une feuille de route en cinq points et la Commission électorale de l’Union rétablie passe au crible et émet les listes d’électeurs, qui seront mises en œuvre conformément aux lois existantes, de même que des mesures pour prévenir la propagation de la pandémie de COVID-19 et assurer le relèvement rapide des entreprises. On s’emploiera en priorité à établir une paix durable dans le pays tout entier, dans le respect des dispositions énoncées dans l’accord de cessez-le-feu national. Conformément aux dispositions de la loi sur l’état d’urgence, des élections démocratiques libres et régulières auront lieu dans le respect de la Constitution de 2008, et les fonctions de l’État seront remises au parti vainqueur, conformément aux normes démocratiques.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 559. Le comité rappelle que les graves allégations du présent cas concernent de nombreuses attaques des autorités militaires contre des syndicalistes, des travailleurs et des fonctionnaires qui demandent le retour à un régime civil depuis le coup militaire au Myanmar du 1er février 2021. Ces graves allégations portent sur des meurtres, des actes de torture et autres brutalités commis contre des syndicalistes et des travailleurs qui ont participé au mouvement de désobéissance civile. Par ailleurs, le présent cas concerne de graves allégations d’arrestations, d’emprisonnement et de mise en détention de nombreux travailleurs et syndicalistes pour leur participation à des manifestations pacifiques, et d’actes d’intimidation et de menaces par les forces de sécurité et les autorités militaires à l’encontre de travailleurs et de fonctionnaires qui manifestaient pour qu’ils reprennent le travail et renoncent à leur participation au mouvement de désobéissance civile, notamment par des licenciements, des suspensions, le recours au remplacement des grévistes et le retrait d’avantages sociaux.
  2. 560. Le comité note les allégations supplémentaires de 27 meurtres brutaux perpétrés par des soldats ou des tireurs embusqués. Les victimes auraient été tuées lors de leur participation au mouvement de désobéissance civile ou lors de tirs aveugles par les militaires. En voici la liste: Tin Nwet Yi, Myint Myint Zin, Ko Ko Lay, Htoo Aung Kyaw, Tun Win Han, Zaw Zaw Htwe, Ko Aung Kaung Moe, Nay Lin Thu, Zaw Lin Maung, Ko Zi Lin Aung, Ko Wei Zin, Kyw Win Maung, Dr. Phyo Tant Wai, Dr. Thiha Tun, Chan Myae Kyaw, Thar Zein Hein, Khine Zar Thwe, Su Su Kyi, Maung Yan Aung; 2 travailleurs de de l’usine de chaussures B et membres de l’ALR; 2 travailleurs, membre de l’ALR et membre du syndicat de l’usine Mar Mar Noodle respectivement, tués par balle lors de manifestations ou à l’occasion de la Journée des forces armées en mars et en avril 2021; 2 travailleurs de l’usine de chaussures A auraient été tués par balle alors qu’ils réclamaient des arriérés de salaires à l’usine; Nay Lin Zaw tué par balle par des soldats lors d’une embuscade; Kyaw Moe Kaing serait mort sous la torture alors qu’il était détenu à la prison d’Insein en mars 2021; 1 travailleur de l’usine Fuji aurait été tué par balle lors d’une perquisition au village de Myinge Amarapura (Mandalay).
  3. 561. Le comité note que le MOLIP réitère dans l’ensemble ses déclarations antérieures selon lesquelles les premières manifestations pacifiques ont fait place à des émeutes, engendrant l’anarchie et, finalement, l’insurrection et des actes terroristes. Les forces de sécurité ont dû intervenir, les terroristes continuant d’attaquer les postes de police et les membres des forces de sécurité avec des armes artisanales meurtrières. Le MOLIP indique que 80 militaires sont morts et 117 autres blessés. Le nombre des victimes parmi les policiers et les civils est de 1 496 et 1 551 respectivement. Le MOLIP estime que certains médias fournissent des informations erronées pour induire la population en erreur au sujet de l’armée, tandis que des saboteurs propagent ces informations en vue de détruire le mécanisme de l’administration. La mort de plus de 700 personnes, dont des syndicalistes qui exerçaient leur droit de manifester contre le coup militaire, n’a pu être confirmée. Selon les fichiers de police, 361 personnes ont perdu la vie, dont 193 ont été tuées par balle par des membres des forces de sécurité occupées à lever des barricades et à se défendre contre des actes terroristes. Les autres cas de décès n’avaient rien à voir avec les forces de sécurité: 95 personnes ont été assassinées par d’autres, 13 ont été tuées lors d’une attaque à la grenade ou à la mine, 5 sont décédées en cours de traitement médical, 10 sont mortes de maladie, 2 sont mortes subitement et 9 autres ont succombé à leurs blessures. Les coupables ont été arrêtés et poursuivis au pénal dans le respect des procédures juridiques et condamnés aux peines prévues par la loi; 17 personnes ont été condamnées à mort.
  4. 562. Le comité note par ailleurs la réponse du MOLIP à sa recommandation antérieure concernant l’allégation de torture et de meurtre de Zaw Myat Lynn, selon laquelle l’équipe d’enquête conjointe a effectué une inspection inopinée, et Zaw Myat Lynn a pris l’escalier et a sauté dans le vide, faisant une chute mortelle. La police a mené une enquête, puis a saisi le tribunal de la circonscription de Shwepyithar de l’affaire où elle est jugée. Quant à Tin Nwet Yi, le MOLIP indique qu’elle est décédée d’une crise cardiaque après avoir été blessée au bras gauche alors que les forces de police tentaient de disperser la foule. La police a ouvert un dossier pour un cas de décès ordinaire, d’après le certificat de décès après autopsie. Le comité regrette qu’aucune information ne soit fournie sur la question de savoir si une enquête complète et indépendante avait été menée sur ces cas ou sur les circonstances des deux morts au chantier naval de Mandalay, comme demandé dans ses recommandations antérieures.
  5. 563. Le comité prend bonne note des informations contradictoires fournies par le MOLIP et les organisations plaignantes relativement aux circonstances de ces décès et au nombre de personnes tuées. Alors que le gouvernement affirme qu’il devait vaincre une insurrection, les organisations plaignantes font état d’interventions violentes de l’armée et des forces de sécurité contre les travailleurs et les syndicalistes réclamant le rétablissement de leurs libertés publiques, du régime civil et de la démocratie. Le comité note en outre les affirmations du MOLIP selon lesquelles les informations fournies concernant les décès sont erronées et émanent dans certains cas d’une organisation non enregistrée. Le comité doit rappeler toutefois le message fort de la Résolution adoptée à la 109e session de la Conférence internationale du Travail en faveur d’un rétablissement de la démocratie et du respect des droits fondamentaux au Myanmar, dans laquelle la Conférence déplore la mort de plus de 800 personnes, dont des syndicalistes, qui exerçaient leur droit à la liberté de réunion pacifique pour protester contre le coup militaire et demande le rétablissement de l’ordre démocratique et d’un gouvernement civil ainsi que la fin de toutes les attaques, menaces et intimidations que subissent de la part de l’armée les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives, et la population de manière générale. Le comité note par ailleurs la décision prise par le Conseil d’administration à sa réunion de novembre 2021 sur le suivi des résolutions adoptées par la Conférence concernant le Myanmar à sa 102e (2013) et sa 109e (2021) sessions dans laquelle il se déclare profondément préoccupé par le fait que les autorités militaires continuent d’avoir largement recours à la violence meurtrière et de soumettre les syndicalistes et d’autres personnes à des actes de harcèlement et d’intimidation, à des arrestations et des détentions et il demande au Myanmar de veiller à ce que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs droits dans un climat de liberté et de sécurité, exempt de violence, et à l’abri des arrestations et détentions arbitraires (GB.343/INS/8/Décision).
  6. 564. Le comité rappelle que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 84.] L’assassinat ou la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ou des lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l’ouverture d’enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquelles se sont produits ces faits et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d’empêcher que de tels faits se reproduisent. [Voir Compilation, paragr. 94.] Rappelant sa recommandation antérieure, le comité exhorte les autorités militaires responsables à cesser immédiatement de recourir à la violence contre les manifestants pacifiques et à diligenter des enquêtes indépendantes sur la mort de tous les travailleurs et syndicalistes précités et à fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard ainsi que sur le résultat des enquêtes.
  7. 565. Le comité note les informations fournies par les organisations plaignantes dans leur communication de juin concernant 60 cas d’arrestation et de perquisition visant les syndicats impliquant 116 syndicalistes. Dans leurs allégations actualisées, les organisations plaignantes font état de mandats d’arrêt au titre de l’article 505A du Code pénal ou de l’article 124 du Code de procédure pénale (qui érige en infraction le fait de tenter d’inciter à la haine ou au mépris, ou de susciter un mécontentement à l’égard du gouvernement ou de l’armée, et passible d’une peine d’emprisonnement de sept à vingt ans) et de la détention des personnes suivantes: le président de la BWFM; le vice-président de l’AFFM; 124 membres des fédérations de la CTUM, dont des membres du comité central de la CTUM; 81 employés du secteur de l’enseignement de base et de l’enseignement supérieur ainsi que des recteurs d’université, dont 23 ont été arrêtés et jugés, notamment 1 directeur d’école et 3 enseignants de Myeik qui ont été condamnés à des peines maximales de trois années d’emprisonnement; 241 médecins et 69 infirmières et infirmiers travaillant dans des hôpitaux publics de toutes les régions du pays; 1 travailleur de l’usine Suntime JCK, membre du STUM qui demeure en détention à la prison d’Insein; 1 haut responsable de la BWFM; 1 membre actif de la BWFM responsable des finances du Syndicat des briqueteries de Hmawbe dont on est sans nouvelles; 1 membre du comité central exécutif de l’ABFTU et membre du comité de Sagaing pour le mouvement de désobéissance civile. Les organisations plaignantes mentionnent également une perquisition effectuée les 14 et 15 juin 2021 dans les bureaux de la MICS TUsF à Myint Nge, Amarapura et South Dagon (Yangon) et l’interrogatoire de son responsable. Les organisations plaignantes allèguent en outre que les conflits à l’usine de chaussures B ont mené à l’arrestation de 25 travailleurs, 3 d’entre eux étant détenus à la prison d’Insein depuis le 12 avril. Concernant la situation générale, elles mentionnent l’arrestation de 6 891 manifestants du mouvement de désobéissance civile, dont 1 989 ont été inculpés et 293 condamnés au 28 septembre 2021, et l’Organisation des Nations Unies signale que 600 mandats d’arrêt ont été émis à l’encontre de travailleurs du secteur de la santé.
  8. 566. Les organisations plaignantes allèguent en outre que U Thet Hnin Aung, secrétaire général de la MICS-TUsF et membre de comité de Mandalay pour le mouvement de désobéissance civile, a été arrêté et inculpé au titre de l’article 17(1) de la loi sur les associations illégales, le gouvernement militaire ayant déclaré l’organisation illégale le 26 février 2021. Il a été maintenu en détention pendant des semaines avant d’être transféré le 30 juillet à la prison d’Insein où son état de santé s’est détérioré. Son procès au tribunal de South Dagon a commencé le 23 août 2021 sans la présence d’un avocat et, le jour suivant, il a été admis à l’hôpital de la prison pour une hémorragie digestive. Par ailleurs, les organisations plaignantes allèguent que: le 24 août 2021, à Hlaing Thar Yar, 1 ouvrière du textile a été arrêtée pour avoir affiché dans les réseaux sociaux son soutien au gouvernement d’unité nationale; le 28 août 2021, 1 responsable de la CTUM a été arrêté dans un monastère à Yangon; et le 31 août 2021, 2 syndicalistes indépendants ont été arrêtés à Hlaing Thar Yar (Yangon) pour association présumée à la PDF et sont toujours en détention.
  9. 567. Le comité note également avec préoccupation les allégations concernant les restrictions générales imposées à la liberté d’expression telles que l’annulation de la licence de presse de cinq médias indépendants (le Mizzima, Myanmar Now, 7Day News, Democratic Voice of Burma (DVB) et Khit Thit Media), le blocage de l’accès à Internet et l’arrestation d’au moins 80 journalistes couvrant le coup militaire et le mouvement de désobéissance civile, et les conséquences qui en ont résulté pour les travailleurs et les syndicalistes dans l’exercice de leurs libertés publiques fondamentales.
  10. 568. Enfin, la CSI allègue que l’armée utilise les mesures liées au COVID-19 comme prétexte pour porter atteinte encore davantage à la liberté syndicale et au respect de la dignité et des droits fondamentaux des travailleurs. Ainsi, un confinement en cellule imposé dans les prisons à cause du COVID-19 prive les syndicalistes emprisonnés des services d’aide juridique et de contacts familiaux dans des conditions sanitaires raisonnables. Dans l’intervalle, les enquêtes policières se poursuivent et les décisions judiciaires sont prises sans la présence d’un avocat.
  11. 569. En réponse aux recommandations antérieures du comité, le MOLIP affirme qu’il a été prouvé que Sean Turnell (membre du Syndicat national de l’enseignement tertiaire) recevait, recueillait, enregistrait des éléments, et les communiquait à un tiers en utilisant le mot de passe ou code secret officiel, compromettant ainsi la sécurité nationale ou les intérêts nationaux et qu’il a été poursuivi au titre de la loi sur les secrets d’État du Myanmar. Il a également été inculpé pour infraction à la réglementation en matière de visas relevant de la loi sur l’immigration du Myanmar. Concernant les enseignants exerçant des fonctions au bureau de vote lors des élections de novembre 2020, le gouvernement précise que, sur 63 enseignants, 37 électeurs et membres de la commission ont été accusés dans 49 affaires, dont 32 (concernant 45 enseignants) sont classées, 14 autres (concernant 15 enseignants) sont instruites et 3 font l’objet d’une enquête. Sur les 14 affaires instruites, seulement 6 enseignants et 11 électeurs ont été poursuivis, dont 2 ont été condamnés à une amende de 30 000 kyats, tandis que les autres sont toujours en procès.
  12. 570. De façon plus générale, le MOLIP indique que 1 481 personnes ont été inculpées et condamnées après qu’il a été établi qu’elles ont commis un crime ou violé les dispositions du Code pénal ou de la loi sur les télécommunications ou d’autres lois. Le MOLIP n’a poursuivi aucun travailleur ou dirigeant syndical pour des infractions aux lois du travail. Le MOLIP affirme que les personnes qui étaient impliquées dans le soulèvement, mais pas dans les actes terroristes, et qui ne soutiennent pas le mouvement de désobéissance civile sont libérées conformément à la loi; 5 315 personnes ont été libérées. En outre, au 30 septembre 2021, 742 personnes s’étaient présentées aux autorités et leur affaire a été classée ou les charges qui pesaient contre elles ont été abandonnées. Du 1er février au 3 novembre 2021, un total de 47 869 prisonniers ont été graciés et 4 434 affaires supplémentaires ont été classées. Le comité note en outre la réponse du MOLIP selon laquelle Internet est utilisé pour propager de fausses informations qui compromettent la stabilité du pays et l’état de droit et, bien que tous les types de services Internet qui avaient été bloqués ont été rétablis depuis, certaines pages des réseaux sociaux, les sites Web au contenu illégal et les sites Web incitant aux actes de terrorisme et de sabotage demeurent interdits au nom de la sécurité nationale et de l’intérêt public.
  13. 571. Le comité doit exprimer sa profonde préoccupation face au nombre effarant de syndicalistes, de travailleurs, de fonctionnaires et d’autres personnes qui ont été arrêtés depuis le coup militaire du 1er février 2021. Il constate à regret que la réponse du MOLIP, outre les informations fournies concernant Sean Turnell, ne fournit que des chiffres généraux et une indication selon laquelle les mises en accusation et les poursuites sont toutes liées à des infractions au Code pénal ou à la loi sur les télécommunications et que personne n’a été poursuivi au titre des lois du travail. Le comité doit rappeler à cet égard que, lors de son dernier examen du présent cas, il a exprimé sa profonde préoccupation concernant ces lois et a prié instamment les autorités militaires d’abroger l’article 505A du Code pénal, de modifier l’article 38(c) de la loi sur les transactions électroniques et de retirer les pouvoirs de surveillance qui ont été rétablis dans les circonscriptions et les villages au titre de la version révisée de la loi sur l’administration des circonscriptions et des villages. Le comité note également le recours abusif présumé à l’article 124 du Code de procédure pénale qui semble faire écho aux restrictions générales imposées au titre de l’article 505A du Code pénal en érigeant en infraction le fait de tenter d’inciter à la haine ou au mépris, ou de susciter le mécontentement à l’égard du gouvernement ou de l’armée, infraction passible de vingt ans d’emprisonnement au lieu de sept. Le comité note en outre que le secrétaire général de la MICS-TUsF a été arrêté pour avoir exercé une activité en rapport à une association illégale et rappelle que, lors de son dernier examen du cas, il avait demandé instamment aux autorités militaires de retirer immédiatement leur déclaration du 26 février qui frappait un certain nombre de syndicats d’illégalité. Le comité demande instamment l’abrogation et la modification des lois susmentionnées, et le retrait de la déclaration frappant des syndicats d’illégalité en vue de garantir le plein respect des libertés publiques fondamentales nécessaires à l’exercice des droits syndicaux, notamment la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion, le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement et le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial afin que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités et leurs fonctions sans être exposés à des menaces d’intimidation ou de violence et dans un climat de sécurité totale. Regrettant qu’aucune information spécifique n’ait été fournie concernant les nombreux cas d’arrestation évoqués dans les dernières allégations ni sur les résultats d’enquêtes indépendantes demandées dans l’examen antérieur du présent cas, le comité demande aux autorités militaires de prendre sans délai les mesures nécessaires pour assurer la libération immédiate et l’abandon des charges pesant contre tous ces syndicalistes et travailleurs arrêtés pour avoir réclamé pacifiquement le rétablissement de leurs droits syndicaux et de la démocratie dans le pays, notamment ceux mentionnés dans son examen antérieur (20 dirigeants syndicaux dans la zone industrielle de Hlaing Thar Yar, dont 6 membres du comité central de la CTUM et 7 membres de la Fédération des transports du Myanmar dans la circonscription d’Insein, 1 ingénieur dans la région d’Ayeyarwady et Sean Turnell) et de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard. S’agissant de l’arrestation, le 15 avril 2021, de la directrice du STUM, le comité constate d’après des informations publiquement vérifiables qu’elle a été libérée.
  14. 572. Le comité note les allégations des organisations plaignantes de licenciements, de suspensions et de mesures disciplinaires en grands nombres à l’encontre de fonctionnaires qui ont participé au mouvement de désobéissance civile (3 000 personnes licenciées ou suspendues, dont 638 suspensions et licenciements au MOEE, 69 suspensions à la Banque centrale, 102 cas de suspension, de licenciement, de procédure et d’arrestation à l’encontre d’employés du MOLIP, 35 cas de mesures disciplinaires prises à l’encontre d’employés du GAD, actes d’intimidation et menaces de mesures disciplinaires à l’encontre de 22 employés du MOF et de 77 employés de la DICA relevant du MIFER). Les organisations plaignantes allèguent en outre que le conseil militaire a pris le contrôle du MOE, d’universités et d’écoles et a remplacé des chanceliers d’université, des directeurs d’école et des enseignants, et la Fédération des enseignants du Myanmar signale d’autres licenciements ou suspensions suite au boycott de la réouverture des écoles, portant ainsi le nombre total des enseignants démis de leurs fonctions à environ 20 000. Selon les organisations plaignantes, près de 150 000 professeurs d’université et enseignants du secteur de l’éducation de base ont été suspendus de leurs fonctions. D’autres allégations concernent le licenciement de plus de 2 000 employés de l’entreprise publique MOGE, 645 fonctionnaires et travailleurs des entreprises d’État relevant du MOALI, 331 fonctionnaires et employés de l’entreprise publique MEB relevant du MOPF et 457 membres du personnel hospitalier. Les organisations plaignantes allèguent en outre que des membres du personnel des services de santé passent dans la clandestinité, le conseil militaire ayant retiré leur permis d’exercer à des médecins et des soignants qui ont joint le mouvement de désobéissance civile et annulé le permis d’exploitation des cliniques et hôpitaux dans lesquels ils travaillaient. Selon d’autres allégations, les actes d’intimidation visant à priver les travailleurs de leur droit à la liberté de réunion pacifique se poursuivraient plus généralement par l’utilisation de main d’œuvre de remplacement et, au MRT, par l’expulsion de leur logement de ceux qui refusaient de travailler suite aux perquisitions de l’armée dans les villages où les travailleurs expulsés sont logés temporairement par les comités de bénévoles du mouvement de désobéissance civile.
  15. 573. Selon les organisations plaignantes, de nouvelles mesures d’intimidation auraient été prises notamment par le MOHS qui a ordonné aux travailleurs du secteur de la santé publique qui avaient exprimé leur soutien au mouvement de désobéissance civile de rembourser au conseil militaire les bourses d’État dont ils avaient bénéficié pour aller étudier à l’étranger, et par le MOI qui a envoyé une directive pour exiger de son personnel de rembourser au conseil militaire les prêts consentis par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) au titre de l’aide en période de COVID-19, d’un montant équivalant à deux mois de salaire, ou par le sous-gouverneur de la Banque centrale qui a enjoint à tous les citoyens de déposer leur argent à la banque, à défaut de quoi ils seraient inculpés d’atteinte au bon fonctionnement de l’économie de l’État.
  16. 574. S’agissant des allégations de représailles et de sanctions à l’encontre de fonctionnaires n’ayant pas repris leurs fonctions, la réponse indique que des membres du personnel administratif et universitaire des universités et des collèges relevant du MOE ont été sanctionnés ou remplacés conformément à la réglementation applicable au personnel de la fonction publique, pour manquement à leurs obligations respectives. De même, il est dit que c’est le cas des 1 293 cheminots et conducteurs de locomotive qui, après avoir introduit un recours, ont été autorisés à reprendre leurs fonctions respectives. La réponse affirme qu’aucun agent de la fonction publique n’a été licencié ni suspendu au MTC. Le MOEE indique pour sa part que les fonctionnaires qui étaient absents sans raison et qui ne revenaient pas sur le lieu de travail, même sur demande, ont été également révoqués ou suspendus conformément à la loi sur la fonction publique et à son règlement.
  17. 575. Concernant le secteur de la santé, le MOHS affirme que les forces de sécurités n’ont attaqué aucun centre de santé mais, à l’incitation de membres de l’organisation terroriste exilée NUG, un total de 68 pour cent des fonctionnaires du ministère de la Santé ont joint le mouvement de désobéissance civile, entraînant la fermeture de centaines d’hôpitaux publics et privés et des centaines de décès dus au manque de soins médicaux. Des centaines de membres du personnel hospitalier qui ne se sont pas présentés au travail depuis février 2021 font toujours l’objet d’une enquête ministérielle conformément à la loi sur le personnel de la fonction publique et son règlement. Le MOHS a déclaré qu’il n’a menacé aucun de ses employés et que les dispositions nécessaires seraient prises pour abandonner les poursuites engagées contre des membres du personnel soignant inculpés au titre de l’article 505A du Code pénal qui manifestent la volonté de retourner de leur plein gré au travail et de fournir la documentation y relative.
  18. 576. S’agissant des allégations de pressions et de harcèlement de la part de l’armée à l’encontre de membres de la famille de travailleurs du secteur de la santé, concernant en particulier une réunion convoquée par l’armée des membres de la famille d’employés de l’hôpital Pathein, le comité note la réponse du MOHS selon laquelle la réunion visait non pas à faire pression sur les parents, mais à donner une garantie et à expliquer les difficultés endurées à l’hôpital et que les travailleurs inculpés au titre de l’article 505A du Code pénal peuvent demander l’abandon des poursuites s’ils sont disposés à reprendre leurs fonctions au ministère, et fournir les documents pertinents.
  19. 577. Tout en notant les observations générales formulées par le MOLIP et d’autres ministères et les informations contradictoires fournies dans certains cas concernant la nature pacifique de l’exercice de la liberté de réunion, le comité doit déplorer le chaos manifeste résultant du coup militaire du 1er février 2021 et les innombrables allégations d’actes d’intimidation et de harcèlement, notamment par des licenciements, suspensions et autres mesures disciplinaires à l’encontre de syndicalistes et de travailleurs exerçant leurs libertés publiques pour le retour à un régime civil et à l’ordre démocratique. Le comité rappelle que, pour que la contribution des syndicats et des organisations d’employeurs ait le degré voulu d’utilité et de crédibilité, il est nécessaire que leur activité se déroule dans un climat de liberté et de sécurité. Ceci implique que, dans une situation où ils estimeraient ne pas jouir des libertés essentielles pour mener à bien leur mission, les syndicats et les organisations d’employeurs seraient fondés à demander la reconnaissance et l’exercice de ces libertés et que de telles revendications devraient être considérées comme entrant dans le cadre d’activités syndicales légitimes. [Voir Compilation, paragr. 75.] Le comité demande à nouveau aux autorités responsables de réintégrer les fonctionnaires, les travailleurs du secteur de la santé ou les enseignants licenciés ou suspendus pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile et de rétablir les avantages qui ont pu être supprimés.
  20. 578. Les organisations plaignantes allèguent en outre que certaines entreprises du secteur privé ont profité de la détérioration de la situation en matière de droits humains et de droits du travail pour porter atteinte à la liberté syndicale des travailleurs et ont omis de respecter les droits relatifs aux conditions de service – mesures légales de protection des salaires, prestations, indemnités de départ ou dédommagement en cas de licenciement –, y compris les conditions prévues par les conventions collectives, et n’ont pas consulté les syndicats ni les représentants des travailleurs sur ces questions. Les dirigeants syndicaux et les autres travailleurs qui soutiennent le mouvement de désobéissance civile et qui ont été licenciés sont mis sur liste noire par certains employeurs du secteur de l’habillement. Les travailleurs seraient licenciés de façon arbitraire, sans procédure régulière ni justification ni indemnisation, et seuls des travailleurs non syndiqués ou des travailleurs qui se sont engagés à se désaffilier d’un syndicat seraient réembauchés après la reprise des activités de production. Les emplois permanents auraient été remplacés par des contrats de travail journaliers ou mensuels, et l’effectif restreint serait contraint d’accepter de travailler de plus longues heures et de façon plus intensive, sans bénéficier d’une rémunération supplémentaire ni pour ces plus longues heures ni pour le travail de nuit. Les travailleurs seraient réduits au silence et renonceraient à porter plainte pour diverses violations de leurs droits au travail par peur d’être dénoncés aux autorités par la direction. Selon la CSI, les actes d’intimidation et violentes attaques à l’encontre de syndicalistes du secteur privé se poursuivraient également; les employeurs ne seraient pas tenus responsables des atteintes aux droits des travailleurs sur le lieu de travail et aucune garantie n’existerait quant à la sécurité des travailleurs qui seraient forcés de se rendre au travail, et les dirigeants syndicaux n’auraient aucun moyen de recours à l’encontre des employeurs qui exploitent des conditions de vulnérabilité par des pratiques antisyndicales. Les organisations plaignantes concluent en disant que les dirigeants syndicaux du secteur privé sont immédiatement exposés à des menaces et à des risques pour leur sécurité lorsqu’ils représentent des dizaines de milliers de travailleurs dans des négociations avec les employeurs au sujet des arriérés de salaires dus à de soudaines fermetures d’usine ou à des suspensions résultant de commandes annulées ou d’actes de vandalisme.
  21. 579. Le MOLIP répond en général que les travailleurs ont le droit de faire grève et le droit de participer et de discuter, en qualité de représentants des travailleurs, conformément à la loi de 2011 sur l’organisation du travail, mais que les rassemblements en vue de faire grève doivent être conformes aux dispositions de la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques. Des procédures de conciliation sont en cours pour le versement sans retard d’indemnités de licenciement et d’autres sommes dues au titre de la législation en vigueur. Sur le chapitre de la surveillance et de la prévention des violations des droits des travailleurs, les griefs des travailleurs et des syndicats peuvent être soumis à fin de conciliation au comité de coordination sur le lieu de travail, les conflits d’intérêts sont réglés par la négociation et la conciliation conformément au mécanisme de règlement des différends, et les litiges portant sur les droits sont réglés par les départements compétents. Les travailleurs lésés doivent déposer plainte devant les départements compétents en utilisant le mécanisme de règlement des différends prévu. Quant aux licenciements dans des banques, il est indiqué que les employés ont été pleinement informés du fait qu’ils seraient licenciés s’ils ne reprenaient pas le travail.
  22. 580. Le comité rappelle sa recommandation antérieure selon laquelle les mesures appropriées doivent être prises pour veiller à ce que les syndicalistes et les travailleurs du secteur privé ne soient pas pénalisés pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile pour le rétablissement de leurs droits syndicaux et demande à être tenu informé des mesures concrètes prises à cet égard.
  23. 581. Le comité se doit d’exprimer sa profonde préoccupation face à la grave détérioration de la liberté syndicale et d’autres droits humains au Myanmar. Il prend bonne note de l’indication du MOLIP selon laquelle le Conseil d’administration de l’État met en œuvre une feuille de route en cinq points et que la Commission électorale de l’Union rétablie passe au crible et émet les listes d’électeurs, qui seront mises en œuvre conformément aux lois existantes, de même que des mesures pour prévenir la propagation de la pandémie de COVID-19 et assurer le relèvement rapide des entreprises, en insistant sur la nécessité d’établir une paix durable dans le pays tout entier, dans le respect des dispositions énoncées dans l’accord de cessez-le-feu national. Conformément aux dispositions de la loi sur l’état d’urgence, des élections démocratiques libres et régulières auront lieu dans le respect de la Constitution de 2008, et les fonctions de l’État seront remises au parti vainqueur, conformément aux normes démocratiques.
  24. 582. Le comité regrette profondément les nombreuses mesures prises depuis le 1er février qui ont conduit à un nouveau recul de la protection des libertés publiques fondamentales nécessaires pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer leurs activités syndicales dans un climat de liberté et de sécurité totales. Le comité prie les autorités militaires de reconnaître qu’il est essentiel de garantir ces droits et libertés aux travailleurs et aux employeurs du pays, comme condition nécessaire au rétablissement de la démocratie et à l’exercice des activités syndicales.
  25. 583. Enfin, le comité note que le nombre important de grâces accordées en 2021 témoigne des quantités impressionnantes d’arrestations et de détentions effectuées au cours de l’année depuis le coup militaire du 1er février. Par ailleurs, bien que le MOLIP souligne la légitimité des mesures disciplinaires prises à l’encontre de participants au mouvement de désobéissance civile, il ne conteste pas l’ampleur des licenciements, suspensions et mesures disciplinaires. Observant l’importance de la tâche consistant à examiner tous les cas portés à son attention, et gardant à l’esprit l’indication du MOLIP selon laquelle, pour bien comprendre la situation réelle du Myanmar et pour rétablir la stabilité, la paix et la démocratie, les organisations internationales devraient non pas se fier aux fausses informations ni aux accusations partisanes publiées dans les médias, mais coopérer avec le gouvernement en place pour obtenir des informations véridiques, le comité estime que l’institution d’une autorité d’enquête indépendante serait une mesure nécessaire pour rendre justice aux personnes qui ont exercé pacifiquement leurs droits à la liberté de réunion, d’expression et d’association et demande à être tenu informé des mesures prises à cet égard

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 584. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité exhorte les autorités militaires responsables à cesser immédiatement de recourir à la violence contre les manifestants pacifiques et à diligenter des enquêtes indépendantes sur la mort de tous les travailleurs et syndicalistes susnommés qui ont été tués dans le cadre d’actions de protestation et de l’exercice de leurs libertés publiques fondamentales, y compris leurs droits syndicaux fondamentaux, et de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard ainsi que sur le résultat des enquêtes.
    • b) Le comité demande instamment l’abrogation et la modification de l’article 505A du Code pénal, de l’article 124 du Code de procédure pénale, de l’article 38(c) de la loi sur les transactions électroniques, la révocation des pouvoirs de surveillance qui ont été rétablis dans les circonscriptions et les villages au titre de la version révisée de la loi sur l’administration des circonscriptions et des villages, ainsi que le retrait de la déclaration frappant des syndicats d’illégalité, en vue de garantir le plein respect des libertés publiques fondamentales nécessaires à l’exercice des droits syndicaux, notamment la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion, le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement et le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial, de sorte que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités et leurs fonctions en toute sécurité, sans être exposées à des menaces d’intimidation ou de violence.
    • c) Le comité s’attend à ce que tous les cas de syndicalistes ou de travailleurs arrêtés ou détenus au motif d’actions visant le rétablissement de leurs droits syndicaux et de la démocratie dans le pays fassent l’objet d’une enquête et que des mesures soient prises sans délai pour assurer la libération immédiate des intéressés. II demande à être tenu informé de toutes les mesures prises à cette fin.
    • d) Le comité demande à nouveau aux autorités responsables de réintégrer tous les fonctionnaires, les travailleurs du secteur de la santé ou les enseignants licenciés ou suspendus pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile et de rétablir tous les avantages qui ont pu être supprimés.
    • e) Le comité rappelle sa recommandation antérieure selon laquelle des mesures appropriées devraient être prises pour veiller à ce que les syndicalistes et les travailleurs du secteur privé ne soient pas pénalisés pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile en vue d’obtenir le rétablissement de leurs droits syndicaux et demande à être tenu informé des mesures concrètes prises à cet égard.
    • f) Eu égard à l’ampleur de la tâche à accomplir pour examiner tous les cas portés à son attention, le comité considère que l’institution d’une autorité d’enquête indépendante des militaires serait une mesure nécessaire pour rendre justice aux personnes qui ont exercé pacifiquement leurs droits à la liberté de réunion, d’expression et d’association, et demande à être tenu informé des mesures prises à cet égard.
    • g) Le comité prie instamment les autorités militaires de reconnaître l’importance primordiale de garantir ces droits et libertés aux travailleurs et aux employeurs du pays comme une condition nécessaire à toute démocratie légitime et au développement durable du pays.
    • h) Le comité attire l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.
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