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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 96. Le comité a examiné pour la dernière fois ce cas, qui porte sur des allégations de violation des droits syndicaux et d’actes de discrimination antisyndicale dans deux entreprises et sur le double seuil de représentativité prévu par la loi pour qu’un syndicat soit reconnu à des fins de négociation collective ainsi que sur la disposition exigeant l’intervention d’un officier assermenté pour l’adhésion ou la résiliation de l’adhésion à un syndicat, à sa réunion de mars 2012. [Voir 363e rapport, paragr. 1098 à 1132.] A cette occasion, il a prié le gouvernement de le tenir informé de l’issue des procédures judiciaires relatives aux allégations de licenciement dans l’entreprise a), de diligenter une enquête sur les autres allégations de discrimination antisyndicale dans cette entreprise et de refus de l’employeur de rencontrer le syndicat pour discuter des réductions d’effectifs, et de prendre les mesures nécessaires afin que la direction de l’entreprise reconnaisse le syndicat. Pour ce qui est des allégations concernant l’entreprise b), le comité a prié le gouvernement et l’organisation plaignante de communiquer d’autres informations sur le nombre de travailleurs concernés et de le tenir informé de la situation quant aux deux cas de licenciement dans lesquels l’employeur avait fait appel de la décision. Il a en outre prié le gouvernement de veiller à l’exécution des décisions de justice ordonnant la réintégration des travailleurs licenciés et le versement d’une indemnité à ces travailleurs, d’indiquer si un conseil paritaire des travailleurs avait été créé dans l’entreprise et y exerçait ses activités et de donner des informations sur l’enquête diligentée sur les allégations de harcèlement des travailleurs. Il a de plus indiqué qu’il s’attendait à ce que le gouvernement mette sa législation et ses pratiques en conformité avec les principes de la liberté syndicale et a appelé l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
- 97. Le gouvernement a donné des informations sur les aspects législatifs de ce cas et la situation dans les entreprises a) et b) dans des communications en date du 6 septembre 2013, du 5 septembre 2014 et du 16 octobre 2017. En ce qui concerne la disposition exigeant l’intervention d’un officier assermenté pour l’adhésion ou la résiliation de l’adhésion à un syndicat, il indique dans sa communication de 2014 que le paragraphe 5 de l’article 17 de la loi no 6356 sur les syndicats et les conventions collectives du travail a supprimé l’obligation du recours à un tel officier en prévoyant que la demande d’adhésion à un syndicat est déposée via le portail électronique de l’Etat au moyen du système électronique mis en place par le ministère du Travail. En ce qui concerne le double seuil de représentativité prévu par la loi, le gouvernement donne des informations actualisées dans sa communication de 2017, indiquant que l’article 41 de la loi no 6356 a été modifié de manière à abaisser à 1 pour cent le seuil par branche d’activité et que, selon la disposition modifiée, «un syndicat doit représenter au moins 1 pour cent des travailleurs d’une branche d’activité donnée et plus de 50 pour cent des travailleurs employés sur un lieu de travail et 40 pour cent des travailleurs d’une entreprise couverts par la convention collective pour être habilité à conclure une convention collective applicable au lieu de travail ou à l’entreprise en question».
- 98. En ce qui concerne la situation de l’entreprise a), le gouvernement indique dans sa communication de 2014 que le syndicat Teksif, opérant dans la branche d’activité du textile, de l’habillement et du cuir no 5 conformément à l’annexe 1) mentionnée au premier paragraphe de l’article 4 de la loi no 6356, n’a pas engagé le processus juridique prévu par la loi pour organiser les travailleurs sur le lieu de travail en question. En outre, le Teksif n’a signé de convention collective de travail dans l’entreprise a) qu’en 1989-1991 et il n’y a eu aucun processus de convention collective de travail par la suite. Le gouvernement réitère ensuite les conclusions du rapport établi par les inspecteurs du ministère du Travail à l’issue d’une inspection menée dans l’entreprise en 2011, dont le comité avait pris note lors de son précédent examen de ce cas. En particulier, le gouvernement réitère que, bien que les procédures concernant certaines des plaintes déposées par les travailleurs soient toujours en cours, le jugement rendu par des tribunaux locaux, qui ont déclaré que «la résiliation des contrats de service ne peut pas être considérée comme constituant la preuve d’un obstacle à la liberté syndicale», montre que les allégations de licenciement antisyndical ne sont pas fondées, que, selon la législation turque, un syndicat qui n’a pas été accrédité pour conclure une convention collective ne peut pas représenter des travailleurs face à un employeur et, partant, que le refus par l’employeur de travailler avec le Teksif ne saurait être critiqué ni considéré comme un motif de plainte.
- 99. En ce qui concerne la situation dans l’entreprise b), le gouvernement indique dans sa communication de 2017 que des inspections ont été menées en 2011 dans trois usines de l’entreprise, à savoir Düzce OSB, Çorlu/Tekirdaǧ et Sefaköy/İstanbul. En ce qui concerne la première usine, il indique que, après le début des campagnes syndicales engagées en juin 2008, l’employeur a mis fin aux contrats de plusieurs travailleurs et que des tribunaux ont constaté dans des décisions finales que ces licenciements étaient fondés sur des motifs antisyndicaux, de sorte que sept travailleurs licenciés ont été réintégrés, dont six ont déclaré travailler encore dans l’entreprise au moment de l’inspection. Pour ce qui est de la deuxième usine, le gouvernement fait savoir que des témoins ont déclaré en toute confidentialité qu’aucune pression n’avait été exercée sur eux en relation avec leur activité ou leur affiliation syndicale et que l’employeur affirme avoir créé un conseil paritaire des travailleurs en vue de motiver davantage les travailleurs et de faciliter la communication à la direction des problèmes et des suggestions pour améliorer la situation. Les membres de ce conseil avaient été élus par les travailleurs au scrutin secret pour un mandat de trois ans et les inspecteurs ont eu accès au procès-verbal de l’élection. Quant à la troisième usine, le gouvernement indique que le tribunal du travail a conclu que le licenciement de Mme Emine Arsalan était fondé sur des motifs antisyndicaux et la cour d’appel a confirmé cette décision le 13 avril 2009. Toutefois, l’employeur a refusé de réintégrer l’intéressée et a préféré lui verser une indemnité. Le gouvernement fait aussi référence au cas d’un autre travailleur, M. Nevzat Ülkü, licencié le 17 janvier 2011, qui a intenté une action en justice contre l’employeur au motif que son licenciement était fondé sur des motifs antisyndicaux. Selon le rapport d’inspection, l’affaire n’est pas encore close. Le gouvernement indique en outre que, au cours de l’inspection menée dans la troisième usine, le représentant de l’employeur a nié tout recours aux pressions ou à la coercition contre des travailleurs en raison de leur affiliation ou de leur activité syndicale. Les déclarations des travailleurs sont cependant contrastées: si certains ont dit n’avoir subi ni pression ni traitement différencié, d’autres étaient convaincus que l’affiliation syndicale pouvait entraîner un licenciement et ont affirmé avoir démissionné du syndicat parce qu’ils approchaient de l’âge de la retraite. Le gouvernement conclut que la commission d’inspection n’a pas pu parvenir à une décision concrète en ce qui concerne les allégations de pressions antisyndicales ou de création d’un conseil paritaire des travailleurs en vue d’empêcher l’organisation syndicale.
- 100. Le comité prend note des informations communiquées par le gouvernement. En ce qui concerne la situation dans l’entreprise a), il note que le gouvernement ne donne aucune information sur l’issue finale des procédures de licenciement et ne mentionne aucune enquête sur l’allégation générale de discrimination antisyndicale. Le gouvernement souligne toutefois que le fait que les tribunaux de première instance n’ont constaté l’existence d’aucun licenciement antisyndical montre que les allégations étaient infondées. En ce qui concerne la reconnaissance du syndicat Teksif, le comité note que, d’après le gouvernement, le syndicat n’a pas engagé la procédure légale requise pour organiser les travailleurs dans l’entreprise et, étant donné que ce syndicat n’est pas habilité à conclure des conventions collectives dans l’entreprise a), l’employeur ne peut être tenu de travailler avec le Teksif. Compte tenu du nombre d’années qui se sont écoulées depuis que les faits à l’origine de ce cas se sont produits et de l’absence d’information de la part de l’organisation plaignante, qui a entre-temps été remplacée par un nouveau syndicat international – la Fédération internationale des travailleurs du textile, de l’habillement et du cuir (FITTHC), ainsi que deux autres fédérations internationales de travailleurs, a été dissoute en juin 2012 et remplacée par le syndicat mondial IndustriALL dont le Teksif est membre –, le comité rappelle que les organisations plaignantes avaient indiqué que le Teksif était le seul syndicat présent dans l’entreprise a) et note que, malgré cela, le gouvernement indique que le refus de l’employeur de travailler avec un syndicat qui n’était pas reconnu comme agent exclusif de négociation est justifié. Le comité rappelle que l’octroi de droits exclusifs à l’organisation la plus représentative ne devrait pas cependant signifier que l’existence d’autres syndicats auxquels certains travailleurs concernés souhaiteraient s’affilier soit interdite. Les organisations minoritaires devraient être autorisées à exercer leurs activités et à avoir au moins le droit de se faire les porte-parole de leurs membres et de les représenter. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1388.] Le comité veut croire que le gouvernement veillera au respect de ce principe.
- 101. En ce qui concerne l’entreprise b), le comité note que les informations communiquées par le gouvernement proviennent de rapports d’inspection datant de 2011 et que l’organisation plaignante n’a pas fourni les renseignements demandés dans les recommandations formulées par le comité au cours de son dernier examen du présent cas. Il note que, selon le gouvernement, sept travailleurs licenciés pour des motifs antisyndicaux ont été réintégrés, et il rappelle les précédentes indications du gouvernement, selon qui les tribunaux avaient constaté que 28 travailleurs avaient été licenciés pour des motifs antisyndicaux, l’employeur ayant toutefois préféré verser une indemnité à 14 d’entre eux plutôt que de les réintégrer. Le comité note que le nombre exact de travailleurs concernés et l’issue des cas de licenciement faisant l’objet d’un recours formé par l’employeur restent incertains en l’absence de précisions de la part du gouvernement et de l’organisation plaignante. Il note en outre que la commission d’inspection n’a pas pu se prononcer sur la question des pressions et de la coercition antisyndicales dans la troisième usine, bien que certains travailleurs se soient dits convaincus que l’affiliation syndicale pouvait entraîner un licenciement. Compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis les faits à l’origine du présent cas et à défaut de nouvelles informations sur la situation dans l’entreprise, le comité ne peut que rappeler le principe selon lequel le respect des principes de la liberté syndicale exige que les travailleurs qui estiment avoir subi des préjudices en raison de leurs activités syndicales disposent de moyens de recours expéditifs, peu coûteux et tout à fait impartiaux. [Voir Compilation, op. cit, paragr. 1142.]
- 102. En ce qui concerne les aspects législatifs de l’affaire, le comité prend note des informations communiquées par le gouvernement et rappelle que la commission d’experts, à laquelle il a renvoyé les aspects législatifs de ce cas, suit de près la réforme relative au seuil de représentativité aux fins de la négociation collective et son incidence sur l’ensemble des mécanismes de négociation collective. Compte tenu des conclusions qui précèdent, le comité ne poursuivra pas l’examen de ce cas.