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Interim Report - Report No 382, June 2017

Case No 2609 (Guatemala) - Complaint date: 24-OCT-07 - Active

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Allégations: les organisations plaignantes allèguent un grand nombre d’assassinats et d’actes de violence à l’encontre de syndicalistes ainsi que des lacunes structurelles qui débouchent sur une situation d’impunité sur le plan pénal et en matière de travail

  1. 315. Le comité a examiné le présent cas pour la dernière fois à sa réunion de juin 2016 et, à cette occasion, a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 378e rapport approuvé par le Conseil d’administration à sa 327e session (juin 2016), paragr. 272 à 325.]
  2. 316. Le Mouvement syndical, indigène et paysan guatémaltèque (MSICG) a fait parvenir de nouvelles allégations dans une communication en date du 31 janvier 2017.
  3. 317. Le gouvernement a fait parvenir des observations dans une communication en date du 3 mai 2017.
  4. 318. Le Guatemala a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949 et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 319. A sa réunion de juin 2016, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 378e rapport, paragr. 325]:
    • a) Le comité exprime de nouveau sa profonde et croissante préoccupation face à la gravité de ce cas qui fait état de nombreux assassinats, tentatives d’assassinat, agressions et menaces de mort et face au climat d’impunité qui prévaut.
    • b) Le comité exprime le ferme espoir que les engagements pris par le gouvernement dans le cadre de la feuille de route d’octobre 2013, engagements réaffirmés par le Président de la République en mars 2016, en ce qui concerne la condamnation des auteurs matériels et des commanditaires des meurtres de syndicalistes et les mesures de protection à appliquer aux membres des syndicats et aux dirigeants syndicaux contre la violence et les menaces, se traduiront en actions et en résultats concrets. Le comité prie instamment le gouvernement de l’informer sans délai des mesures prises à cet égard ainsi que des résultats obtenus.
    • c) Le comité encourage la poursuite de la collaboration entre le ministère public et la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) et souligne l’importance qu’il y a à ce que les organisations syndicales concernées soient consultées à propos de l’examen des cas d’homicide par cette institution. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de ladite collaboration en ce qui concerne les 12 cas d’homicides sélectionnés en juin 2015.
    • d) Le comité prie instamment le gouvernement, suivant les directives suggérées par la CICIG, de prendre d’urgence toutes les mesures nécessaires pour garantir que les enquêtes en cours ciblent à la fois les auteurs matériels et les commanditaires des faits et que, dans la conception et le déroulement de celles-ci, l’éventuelle nature antisyndicale des homicides soit pleinement et systématiquement considérée. Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé sans délai des initiatives prises en ce sens et des résultats obtenus.
    • e) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour doter l’Unité spéciale du ministère public chargée des enquêtes sur les délits commis contre les syndicalistes de ressources économiques et humaines supplémentaires. Le comité prie le gouvernement de l’informer dès que possible des initiatives prises et des résultats obtenus à cet égard.
    • f) Le comité prie instamment le gouvernement de continuer à renforcer la collaboration interinstitutionnelle entre le ministère du Travail, le ministère de l’Intérieur, le ministère public et le pouvoir judiciaire en ce qui concerne les meurtres de dirigeants syndicaux et de syndicalistes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • g) Le comité encourage le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour constituer des tribunaux spécialisés afin de traiter plus rapidement les crimes et délits commis contre les membres du mouvement syndical. Le comité prie le gouvernement de l’informer des initiatives concrètes prises à cet égard.
    • h) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement d’envisager et d’appliquer des mesures de protection efficaces à l’endroit des personnes qui acceptent de collaborer avec les enquêtes pénales relatives aux actes de violence antisyndicale. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé dans les plus brefs délais des mesures prises à cet égard.
    • i) Le comité prie le gouvernement de lui fournir de plus amples informations sur les motifs avancés pour demander l’extinction de la poursuite pénale en ce qui concerne le meurtre de M. Jorge Ricardo Barrera Barco et prononcer un non-lieu dans le cas de M. Carlos Antonio Hernández Mendoza.
    • j) Le comité prie instamment le gouvernement de lui faire parvenir sans délais des informations sur les enquêtes en vue d’identifier et de sanctionner tant les auteurs matériels que les commanditaires des meurtres de MM. Jerónimo Sol Ajcot, Gerardo de Jesús Carrillo Navas, William Retana Carias, Manuel de Jesús Ortiz Jiménez, Genar Efrén Estrada Navas, Edwin Giovanni De La Cruz Aguilar, Luis Arnoldo López Esteban et Marlon Velázquez.
    • k) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de mener une recherche complète dans les archives du ministère public pour déterminer l’existence de la plainte de Mme Lesvia Morales, et le MSICG de collaborer de bonne foi à la recherche en question. Le comité prie le gouvernement et l’organisation plaignante de le tenir informé à cet égard.
    • l) Le comité réitère sa demande aux organisations plaignantes de fournir de plus amples informations quant aux allégations de menaces de mort proférées contre Mme Selfa Sandoval Carranza, dirigeante du SITRABI ainsi que sur les allégations de détention illégale de membres du SITRAPETEN dans plusieurs hôtels du pays et les mesures d’intimidation dont ils ont fait l’objet. Le comité signale que, au cas où il ne recevrait pas ces éléments pour son prochain examen du cas, il ne poursuivra pas l’analyse des allégations en question.
    • m) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de tentatives d’exécution extrajudiciaire et de menaces de mort dont ont été victimes des membres du Syndicat de travailleurs du commerce de Coatepeque. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de manière détaillée sur ladite enquête et sur les procédures pénales engagées en conséquence.
    • n) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de l’informer sur les mesures prises pour retrouver María Antonia Dolores López, mineure d’âge au moment des faits. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • o) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour assurer une protection adéquate à M. Jorge Byron Valencia Martínez. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • p) Le comité prie instamment le gouvernement d’augmenter le budget alloué aux dispositifs de protection destinés aux membres du mouvement syndical de sorte que les personnes protégées ne doivent personnellement contribuer à aucune dépense qui en découlerait. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • q) Le comité attire de nouveau spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.

B. Nouvelles allégations

B. Nouvelles allégations
  1. 320. Dans sa communication en date du 31 janvier 2017, présentée dans le cadre du cas no 3251, le MSICG dénonce l’assassinat, le 9 novembre 2016, de M. Eliseo Villatoro Cardona, secrétaire de l’organisation et de la propagande et membre du comité exécutif du Syndicat des employés municipaux organisés de Tiquisate, Escuintla (SEMOT). A cet égard, l’organisation plaignante déclare en particulier que: i) elle a dénoncé devant le Comité de la liberté syndicale, dans le cadre du cas no 3251, les nombreux actes antisyndicaux perpétrés par le maire de Tiquisate, M. Héctor Portillo Coronado, à l’encontre des membres du SEMOT, dès la constitution dudit syndicat en octobre 2015; ii) ces actes, notamment le non paiement de leurs salaires aux travailleurs syndiqués, pour les pousser à renoncer à leur affiliation, et le licenciement des travailleurs qui n’avaient pas cédé aux pressions, ont conduit le MSICG à introduire des actions en justice; iii) M. Eliseo Villatoro Cardona a été tué par deux individus qui l’ont pourchassé sur la route et, auparavant, des menaces de mort avaient été proférées à son encontre par la mairie; iv) les menaces de mort, proférées également à l’encontre d’autres membres du syndicat, ont été dénoncées devant le ministère public qui a tardé à prendre des mesures; et v) les menaces de mort proférées en public par le maire contre Mme Sara Abigail Lemus Rubio de León, membre du syndicat, sont particulièrement alarmantes. Conformément à sa décision de regrouper les nombreuses allégations d’assassinats de membres du mouvement syndical guatémaltèque et autres actes de violence antisyndicale dans le cadre du cas no 2609, le comité examinera l’assassinat de M. Villatoro Cardona ainsi que les menaces de mort proférées contre les membres du SEMOT dans le présent cas.

C. Réponse du gouvernement

C. Réponse du gouvernement

    Homicides déjà examinés par le comité

  1. 321. Par une communication du 3 mai 2017, le gouvernement fournit ses observations sur les différents éléments du présent cas toujours soumis à examen. Le gouvernement se réfère en premier lieu aux initiatives institutionnelles ayant pour but d’accélérer les enquêtes et procédures judiciaires en cours concernant les homicides de membres du mouvement syndical guatémaltèque. A cet égard, le gouvernement indique que: i) la collaboration entre le ministère public et la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) se poursuit vis-à-vis des enquêtes relatives à une liste de 12 homicides sélectionnée par le mouvement syndical, 12 réunions de travail conjointes ayant été réalisées en 2016, la dernière en date ayant été réalisée le 30 novembre 2016; ii) dans le cadre du groupe de travail syndical du ministère public, la collaboration avec les organisations syndicales se poursuit pour élucider les homicides ayant frappé des membres du mouvement syndical; iii) afin d’améliorer l’effectivité et la productivité de son travail, la structure de l’Unité spéciale du ministère public chargée des enquêtes sur les délits commis contre les syndicalistes a été renforcée, celle-ci comptant désormais en son sein deux bureaux consacrés aux délits de désobéissance aux décisions judiciaires et un bureau consacré aux atteintes à la vie et à la sécurité des personnes; iv) l’Unité spéciale du ministère public est actuellement composée de: 1 chef d’unité, 3 agents d’enquête principaux, 8 auxiliaires d’enquête de niveau I, 2 auxiliaires d’enquête de niveau II; 3 autres fonctionnaires du ministère public et 1 enquêteur de la direction des enquêtes criminelles; v) en janvier 2017, a été réalisée une réunion de travail avec la division spéciale de la police nationale civile spécialisée à l’issue de laquelle il a été décidé de prendre les mesures nécessaires pour mener des «poursuites pénales stratégiques» dans 10 affaires d’homicide, afin de pouvoir identifier les auteurs matériels et intellectuels de ces crimes et de rendre effectifs les mandats d’arrêt prononcés; vi) dans le cadre de la convention de collaboration, le pouvoir judiciaire, le ministère public, le ministère de l’Intérieur et le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale réalisent depuis 2014 des réunions régulières à propos des homicides de dirigeants et membres d’organisations syndicales et de la mise en œuvre de la feuille de route en général; vii) pour faire face au grand nombre de litiges du travail, le pouvoir judiciaire a inauguré en janvier 2017 le tribunal pluripersonnel de première instance en matière d’infractions du travail et le tribunal de première instance du travail et de la prévoyance sociale de Chimaltenango; et viii) le pouvoir judiciaire a entamé l’élaboration d’un règlement intérieur des tribunaux et juridictions du travail et de la prévoyance sociale.
  2. 322. Concernant les motifs ayant conduit à demander l’extinction des poursuites pénales relatives à l’homicide de M. Jorge Ricardo Barrera Barco, membre de la CGTG, perpétré le 22 mars 2012, le gouvernement indique que: i) cette demande est consécutive à la constatation de la mort de la personne accusée de cet homicide, M. Rómulo Emanuel Peña, décédé au Centre pénitentiaire de Fraijanes 1 où il était détenu dans l’attente de son jugement; ii) M. Rómulo Emanuel Peña était accusé d’être le commanditaire de cet homicide, dans le cadre d’un mécanisme d’extorsion de fonds aux dépens de chauffeurs de transports collectifs; et iii) l’enquête relative aux auteurs matériels de l’homicide poursuit son cours normal.
  3. 323. Concernant les motifs ayant conduit à l’abandon des poursuites pénales contre les personnes accusées de l’homicide de M. Carlos Antonio Hernández Mendoza, dirigeant du Syndicat national des travailleurs de la santé, perpétré le 8 mars 2013, le gouvernement indique que: i) l’abandon des poursuites en faveur des accusés a pour origine les contradictions des déclarations des témoins A et B; ii) le ministère public a dans un premier temps fait appel de cette décision; iii) au cours de la procédure, les témoins A et B manifestèrent qu’ils avaient effectué de faux témoignages et qu’en réalité ils n’avaient pas assisté à l’homicide de M. Hernández Mendoza, raison pour laquelle le ministère public a renoncé à son appel; et iv) les témoins A et B font l’objet d’un procès pénal pour faux témoignage et le ministère public examinera de nouveau le résultat des enquêtes effectuées afin de pouvoir identifier les auteurs matériels et les commanditaires de cet homicide.
  4. 324. Concernant les informations demandées par le comité à propos des homicides de MM. Jerónimo Sol Ajcot, Gerardo De Jesús Carrillo Navas, William Retana Carias, Manuel De Jesús Ortiz Jiménez, Genar Efrén Estrada Navas, Edwin Giovanni De La Cruz Aguilar, Luis Arnoldo López Esteban et Marlon Velázquez, le gouvernement manifeste en premier lieu que: i) il n’existe pas de registre d’homicide de personnes dénommées Jerónimo Sol Ajcot, Genar Efrén Estrada Navas, Edwin Giovanni De La Cruz Aguilar et Marlón Velásquez; et ii) des confusions pourraient s’être produites entre certains noms, le cas de M. Marlón Velásquez pouvant par exemple correspondre à celui de M. Marlón Dagoberto López Vásquez, dont l’homicide a donné lieu, le 1er juillet 2014, à une condamnation de la part des tribunaux pour homicide accompagné de vol. Le gouvernement fournit ensuite des informations sur les trois cas suivants d’homicides: i) concernant M. Gerardo De Jesús Carrillo Navas, membre du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, le ministère public signale que l’enquête est en cours, que le comité exécutif du syndicat n’a pas considéré que cet homicide était lié aux activités syndicales de la victime, qu’il n’y a ni témoin oculaire des faits ni coïncidence balistique avec d’autres homicides et que la famille de la victime indique que ce dernier n’avait pas fait l’objet de menaces; ii) concernant M. William Retana Carias, également membre du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, le ministère public indique que deux personnes ont été mises en causes et que les deux accusés ont été condamnés le 10 mars 2017 à une peine incompressible de cinquante ans de prison par la première chambre du tribunal pénal de première instance, de trafic de stupéfiants et de délits contre l’environnement pour les procédures de haut risque; iii) concernant M. Manuel De Jesús Ortiz Jiménez, également membre du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, le ministère public indique que la première chambre du tribunal pénal de première instance, de trafic de stupéfiants et de délits contre l’environnement pour les procédures de haut risque a condamné, le 10 mars 2017, l’un des auteurs du crime à vingt-cinq ans de prison incompressible.
  5. 325. Le gouvernement communique ensuite des informations actualisées du ministère public sur l’état des enquêtes et procédures judiciaires relatives à 20 homicides de dirigeants et membres de syndicats à propos desquels le comité avait observé dans son dernier examen de ce cas qu’il paraissait exister de possibles indices de motifs antisyndicaux. Le gouvernement signale en particulier que: i) un mandat d’arrêt , non encore exécuté, a été émis à l’encontre de M. León Pacheco, un des auteurs présumé de l’homicide de MM. Oscar Humberto González Vásquez et Miguel Angel González Ramírez, tous deux appartenant au Syndicat des travailleurs de bananeraies d’Izabal; ii) la première chambre du tribunal pénal de première instance, de trafic de stupéfiants et de délits contre l’environnement de Coatepeque a, le 27 mai 2016, condamné à dix-huit ans de prison l’auteur matériel de l’homicide de M. Diego Chiti Pú, membre du Syndicat des travailleurs de Coatepeque; et iii) un mandat d’arrêt a été émis contre le possible commanditaire des homicides de MM. Roberto Oswaldo Ramos Gómez (du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Coatepeque) et Wilder Hugo Barrios López (du Syndicat des minibus urbains du secteur Camposanto Magnolia de la municipalité de Coatepeque).

    Nouvel homicide

  1. 326. Dans sa communication en date du 3 mai 2017, le gouvernement fournit également des informations sur les enquêtes relatives à l’assassinat de M. Eliseo Villatoro Cardona, dirigeant de l’organisation syndicale SEMOT, perpétré le 9 novembre 2016. A cet égard, le gouvernement indique que: i) la police nationale civile de Tiquisate et la division spéciale chargée des enquêtes criminelles d’Escuintla ont conduit des enquêtes préliminaires, respectivement les 9 et 10 novembre 2016; ii) les institutions compétentes ont procédé aux expertises et analyses scientifiques pertinentes; iii) entre le 10 novembre 2016 et le 9 février 2017, 11 personnes ont été entendues, parmi lesquelles des membres de la famille, d’anciens collègues de travail de la victime, ainsi que des dirigeants et membres du SEMOT; iv) le 31 janvier 2017, M. Jorge Amílcar Jiménez Conreras, secrétaire général du SEMOT, a complété sa déposition en demandant des mesures de protection pour tous les dirigeants du SEMOT, ces derniers se sentant menacés par le maire de Tiquisate qui aurait l’intention de dissoudre le syndicat; v) le comité directeur du SEMOT a transmis un rapport non daté concernant les activités engendrées par la création du syndicat; vi) le 3 février 2017, une audience a eu lieu au tribunal de première instance en charge des affaires pénales de Santa Lucia Cotzumalguapa concernant le contrôle juridictionnel et l’autorisation de solliciter des informations auprès des entreprises de téléphonie du pays pour localiser les puces téléphoniques; et vii) les démarches restantes visent à compléter la déposition de la mère du défunt et à demander au secrétariat général de vérifier la concordance des données balistiques avec les preuves recueillies.

    Autres allégations de violence

  1. 327. S’agissant de la recherche complète dans les archives du ministère public pour déterminer l’existence de la plainte de Mme Lesbia Morales, le gouvernement indique que le ministère public a fait une nouvelle recherche et qu’il s’avère que les registres manuel et électronique du système SICOMP ne comportent aucune trace de plainte. En ce qui concerne les allégations présentées par l’une des organisations plaignantes au sujet de Mme Selfa Sandoval Carranza et de membres du SITRAPETEN, le gouvernement fait savoir que le ministère public a également fait la recherche correspondante en utilisant les registres manuel et électronique du système SICOMP, ce qui a permis d’établir qu’il n’existait pas non plus de plainte portant sur les faits allégués.
  2. 328. S’agissant des menaces de mort proférées à l’encontre de M. Jorge Byron Valencia Martínez, secrétaire général du Syndicat du personnel administratif et d’appui de l’éducation du Guatemala (STAYSEG) et des mesures visant à assurer sa protection, le gouvernement indique que: i) le 27 décembre 2013, il a été demandé à la direction générale de la police nationale civile de prêter immédiatement assistance à l’intéressé, en renforçant les patrouilles sur ses lieux de résidence et de travail; ii) les menaces reçues ont donné lieu à une enquête de la part des autorités, laquelle pour l’heure n’a pas identifié d’autres éléments susceptibles d’avancer une piste; iii) M. Byron Valencia n’a pas fourni d’autres éléments de preuve; et iv) M. Valencia Martínez n’a pas fait l’objet de nouvelles menaces.
  3. 329. Au sujet de la disparition de Mme María Dolores López, appartenant à la famille d’un témoin de l’assassinat d’un membre du mouvement syndical et mineure au moment des faits, le gouvernement indique que cette personne a pu être repérée et interrogée le 21 avril 2017. Mme María Dolores López a fait savoir à cette occasion qu’elle n’avait pas été victime d’enlèvement, mais qu’elle avait fait une fugue pour vivre avec son fiancé qu’elle a épousé par la suite, et avec lequel elle vit sous le même toit que les parents de ce dernier.
  4. 330. En ce qui concerne les mesures de caractère général prises pour assurer la protection des membres du mouvement syndical, le gouvernement souligne l’entrée en vigueur du protocole de mise en œuvre de mesures de sécurité immédiates et préventives en faveur des travailleurs syndiqués et des dirigeants syndicaux, des dirigeants, des cadres, des militants, des leaders syndicaux et des personnes liées à la défense des droits des travailleurs, ainsi qu’en ce qui concerne les lieux d’exercice de leurs activités; le protocole a été formellement adopté le 20 janvier 2017 et publié le 22 mars 2017 au Diario de Centroamérica, bulletin officiel du pays.
  5. 331. Le gouvernement ajoute que, afin de garantir que les frais de logement et de nourriture des fonctionnaires de police ne soient pas pris en charge par les personnes qui font l’objet de menaces et bénéficient d’une mesure de sécurité personnelle, le ministère de l’Intérieur a augmenté, en juin 2016, pour un montant de 700 quetzales, l’allocation spéciale versée aux fonctionnaires de la police nationale civile, portant celle-ci à 1 800 quetzales, la mesure étant effective depuis le 1er juillet 2016.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 332. Le comité rappelle que, dans le présent cas, les organisations plaignantes dénoncent un grand nombre d’assassinats et d’actes de violence perpétrés à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ainsi que la situation d’impunité qui en découle.
  2. 333. Le comité observe que, depuis son dernier examen du cas en juin 2016, le Conseil d’administration du BIT a examiné à deux reprises la plainte relative au non-respect par le Guatemala de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, plainte déposée par plusieurs délégués travailleurs en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, à la 101e session (2012) de la Conférence internationale du Travail. Le comité rappelle que cette plainte dénonce, entre autres, les assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ainsi que l’impunité qui prévaudrait à cet égard. Le comité rappelle tout particulièrement que: i) dans le cadre du suivi de la plainte déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, le gouvernement a adopté en octobre 2013, en consultation avec les partenaires sociaux, une feuille de route par laquelle il s’engageait à juger et condamner rapidement les auteurs matériels et les commanditaires des crimes commis contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes ainsi qu’à renforcer les mécanismes de prévention et de protection face aux menaces et aux attentats perpétrés contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes; et ii) le Conseil d’administration a décidé, à sa 331e session (mars 2017) de reporter sa décision d’éventuellement constituer une commission d’enquête à sa session de novembre 2017.
  3. 334. Le comité prend note des observations envoyées par le gouvernement par le biais d’une communication du 3 mai 2017. Le comité observe également que, dans le cadre du suivi de la plainte déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, le gouvernement, ainsi que les organisations plaignantes dans le présent cas, ont soumis, de façon régulière des informations détaillées au Conseil d’administration du BIT. Le comité se référera à leur contenu lorsqu’elles pourront contribuer à l’examen des allégations du cas.
  4. 335. Le comité regrette profondément, et pour la septième fois, le grand nombre d’actes de violence contenus dans la plainte et se dit gravement préoccupé face au nombre élevé de dirigeants syndicaux et de syndicalistes assassinés. Le comité attire de nouveau l’attention du gouvernement sur le fait que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 44.]

    Allégations d’homicides déjà examinées

  1. 336. Le comité prend note que, par le biais des observations envoyées dans le cadre du présent cas et des éléments fournis en octobre 2016 et février 2017, dans le cadre du suivi de la plainte déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, le gouvernement a envoyé des informations sur l’état d’avancement des enquêtes et des procédures pénales relatives à 84 homicides (74 cas dénoncés précédemment devant l’OIT par le mouvement syndical et dix autres dénoncés au niveau national). Le gouvernement observe qu’il ressort de la lecture conjointe de ces informations que, vis-à-vis des 84 homicides mentionnés: i) 13 condamnations, 3 acquittements et 1 décision d’internement en hôpital psychiatrique ont été prononcés; ii) 1 affaire a été mise en délibéré; iii) 7 affaires ont donné lieu à des mandats d’arrêt; iv) la procédure intermédiaire est en cours dans 3 affaires; v) les poursuites pénales engagées dans 4 affaires sont éteintes; vi) les poursuites pénales ont été abandonnées dans une affaire; et vii) 51 affaires sont en cours d’instruction.
  2. 337. Par ailleurs, le comité note que le gouvernement se réfère à une série d’initiatives institutionnelles visant à rendre plus efficaces les enquêtes relatives aux assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, notamment: i) la mise en place d’un groupe de travail qui réunit le ministère public et la division spéciale de la police nationale civile spécialisée dans les enquêtes pénales, qui a débouché sur l’ouverture de procédures qui permettent d’engager des poursuites conformément à la politique de la «poursuite pénale stratégique» dans dix affaires d’homicide, de façon à pouvoir identifier les auteurs matériels et les commanditaires des faits délictueux commis contre des syndicalistes et de donner effet aux mandats d’arrêt en cours; ii) la réorganisation de l’Unité spéciale d’enquête sur les délits commis contre des syndicalistes, en affectant en son sein deux bureaux aux délits de désobéissance aux décisions judiciaires, et un bureau aux atteintes à la vie et à l’intégrité des personnes; iii) la poursuite des activités régulières et continues du groupe de travail syndical du ministère public, qui réunit régulièrement les syndicats, le ministère public, le ministère du Travail et le représentant du Directeur général du BIT au Guatemala; et iv) la poursuite de la collaboration établie avec la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) afin d’enquêter sur 12 homicides, dont la liste a été arrêtée par le mouvement syndical, la dernière réunion de travail ayant eu lieu le 30 novembre 2016.
  3. 338. Le comité prend bonne note de l’initiative prise pour renforcer la collaboration entre le ministère public et la police nationale civile dans l’enquête portant sur dix assassinats de membres du mouvement syndical. Le comité s’attend à ce que cette collaboration soit encore développée et institutionnalisée et prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard. Le comité note également avec intérêt l’indication du gouvernement incluse dans les informations fournies au Conseil d’administration dans le cadre du suivi de la plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, selon laquelle la mise en application de l’instruction générale no 1/2015 a permis d’identifier rapidement les responsables d’homicides récents, en particulier celui de Mme Estrada. En dépit de ce qui précède, le comité observe néanmoins avec regret que la plupart des motifs de profonde préoccupation qu’il avait exprimés dans son dernier examen du cas subsistent toujours: i) le nombre encore fort bas d’affaires d’homicides ayant donné lieu à une condamnation (11 sur 84, plus une décision d’internement en hôpital psychiatrique) en dépit du temps écoulé depuis le moment des faits; ii) le nombre encore plus réduit de cas de condamnation des commanditaires (2); iii) le nombre élevé de mandats d’arrêt qui ne sont toujours pas exécutés; et iv) le nombre encore plus élevé de cas d’enquêtes pour lesquelles, selon la documentation fournie par le ministère public, aucune possibilité d’identification des auteurs matériels et des commanditaires des faits n’est entrevue à court terme. A cet égard, le comité rappelle que l’absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d’insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 52.]
  4. 339. Par ailleurs, lors de son examen antérieur du cas, le comité avait observé avec une préoccupation particulière l’absence de progrès dans les enquêtes relatives aux assassinats pour lesquels des indices d’un mobile antisyndical possible ont été identifiés (soit parce que de nombreux membres d’un même syndicat avaient été tués, soit parce que la CICIG ou le ministère public lui-même avaient déjà identifié expressément un éventuel mobile antisyndical, ou encore parce que les victimes faisaient partie de syndicats pour lesquels le comité sait fort bien qu’au moment des faits ils faisaient l’objet d’actes antisyndicaux). Le comité faisait référence à cet égard à 20 victimes membres du Syndicat des travailleurs des bananeraies d’Izabal, du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Coatepeque, du Syndicat des travailleurs du commerce de Coatepeque, du Syndicat de microbus urbains du secteur Camposanto Magnolia, du Syndicat national des travailleurs de la santé du Guatemala, du Syndicat des travailleurs municipaux de Malacatán, San Marcos, du Syndicat des travailleurs de l’assistance technique et administrative à l’Institut de défense publique pénale et du Syndicat de l’Union des employés des services des migrations. [Voir 378e rapport, paragr. 310.] Tout en prenant note des éléments fournis par le gouvernement, le comité note de nouveau avec regret, concernant les 20 homicides mentionnés, que: i) une seule condamnation a été prononcée jusqu’ici; ii) hormis deux mandats d’arrêt en attente d’être mis en œuvre, chacun d’eux concernant deux homicides commis à Coatepeque, aucune avancée n’est signalée dans les enquêtes; iii) les documents du ministère public fournis par le gouvernement ne rapportent pas la réalisation de mesures d’enquêtes liées aux activités syndicales des victimes; iv) si le ministère public se réfère, vis-à-vis de plusieurs cas, à la nécessité de réorienter les enquêtes, à l’exception d’un homicide (celui de M. Pedro Antonio García, du Syndicat des travailleurs municipaux de Malacatán à propos duquel il est indiqué que les membres du syndicat seront contactés), les activités syndicales de la victime ne sont pas mentionnées comme faisant partie des axes d’enquêtes à explorer; et v) hormis dans les cas du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Coatepeque et de l’homicide de deux membres du Syndicat des travailleurs de la santé du Guatemala, les documents du ministère public n’établissent aucun lien entre les enquêtes sur les différents assassinats de membres d’une même organisation syndicale. Compte tenu de ce qui précède, et rappelant l’adoption de l’instruction générale no 1/2015 du ministère public, le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre de toute urgence toutes les mesures nécessaires pour assurer que, dans la conception et le déroulement des enquêtes, l’éventuelle nature antisyndicale des assassinats de membres du mouvement syndical soit pleinement et systématiquement prise en considération et que les enquêtes ciblent à la fois les auteurs matériels et les commanditaires des faits. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé, dans les plus brefs délais, des initiatives prises et des résultats obtenus à cet égard, tout particulièrement en ce qui concerne les cas signalés pour lesquels des mobiles antisyndicaux possibles ont déjà été identifiés. A cet égard, le comité souligne l’importance d’une collaboration substantielle du ministère public avec la CICIG ainsi que des contacts avec les organisations syndicales au groupe de travail syndical du ministère public. Le comité prie le gouvernement de prendre, avec l’appui du représentant spécial du Directeur général du BIT au Guatemala, toutes les mesures qui s’imposent pour renforcer les espaces de collaboration mentionnés.
  5. 340. De manière générale, tout en étant conscient que certaines initiatives ont été prises depuis l’adoption de la feuille de route en 2013, le comité se voit dans l’obligation de réaffirmer que le haut niveau d’impunité qui continue à prévaloir ainsi que le nombre très élevé d’homicides à élucider et à condamner requièrent de manière urgente l’octroi de ressources économiques et humaines supplémentaires au profit de l’Unité spéciale d’enquête sur les délits commis contre des syndicalistes. Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de l’informer dans les plus brefs délais des initiatives prises et des résultats obtenus à cet égard. De même, rappelant les commentaires contenus dans le rapport de 2014 de la CICIG sur l’inaction des organes chargés d’administrer la justice et observant que, dans le cadre du suivi de la plainte en vertu de l’article 26, le gouvernement avait fait savoir, en février 2016, que la Cour suprême avait élaboré un projet à cet égard, le comité encourage le gouvernement à prendre les mesures nécessaires à la création de tribunaux spéciaux destinés à traiter plus rapidement les crimes et délits commis contre des membres du mouvement syndical. Observant que les informations fournies par le gouvernement à propos de la création de deux nouveaux tribunaux concernent des juridictions du travail qui ne sont pas compétentes en matière pénale, le comité prie le gouvernement de l’informer des initiatives concrètes prises à propos de la création de juridictions pénales spéciales. D’autre part, de même que dans ses examens antérieurs du cas, le comité continue à observer que les informations fournies par le ministère public font état, dans plusieurs cas, de l’impossibilité de compter dans les enquêtes sur la collaboration des témoins par crainte de représailles. Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement d’envisager et d’appliquer des mesures de protection efficaces à l’endroit des personnes qui acceptent de collaborer avec les enquêtes pénales relatives aux actes de violence antisyndicale. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé dans les plus brefs délais des initiatives prises à cet égard.
  6. 341. Dans son examen antérieur du cas, le comité avait prié le gouvernement de lui fournir de plus amples informations sur les motifs avancés pour demander l’extinction de la poursuite pénale en ce qui concerne le meurtre, le 22 mars 2012, de M. Jorge Ricardo Barrera Barco, membre de la CGTG. A cet égard, le comité note que le gouvernement fait parvenir une information fournie par le ministère public qui signale que, suite à la constatation du décès du commanditaire de l’assassinat de M. Barrera Barco, il a été décidé d’éteindre la poursuite pénale à son égard tandis que l’enquête se poursuit afin d’identifier les auteurs matériels de l’homicide. Le comité observe également qu’il ressort des documents du ministère public que M. Barrera Barco, chauffeur d’un autobus public, aurait refusé de se soumettre au racket de l’auteur du crime et de la bande à laquelle appartenait l’accusé. Tout en prenant note de ces informations, le comité prie le gouvernement de le tenir informé du déroulement des enquêtes relatives aux auteurs matériels de l’homicide ainsi que sur les liens éventuels entre l’activité syndicale de la victime et son refus de s’acquitter de l’extorsion exigée par une bande criminelle.
  7. 342. En ce qui concerne le prononcé du non-lieu dans le cas de M. Carlos Antonio Hernández Mendoza, dirigeant du Syndicat national des travailleurs de la santé, assassiné le 8 mars 2013, le comité prend note de l’information du ministère public fournie par le gouvernement qui indique que: i) la décision de non-lieu s’est fondée sur les contradictions des deux témoins, lesquels ont fini par reconnaître qu’ils n’avaient pas assisté à l’homicide de M. Hernández Mendoza; ii) en conséquence de ces déclarations, le ministère public a abandonné le recours qu’il avait formé contre la décision de non-lieu; et iii) les témoins font l’objet d’un procès pénal pour faux témoignage et le ministère public examinera de nouveau le résultat des enquêtes effectuées afin de pouvoir identifier les auteurs matériels et les commanditaires de cet homicide. Tout en prenant note de ces informations et tout en observant que les faux témoignages mentionnés pourraient indiquer l’existence d’une tentative de faire échapper à la justice les vrais auteurs de l’homicide, le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats des enquêtes en cours ainsi que des initiatives prises pour déterminer les liens éventuels qui existeraient entre l’assassinat du dirigeant syndical et ses activités syndicales.
  8. 343. Dans son examen antérieur du cas, le comité avait instamment prié le gouvernement de lui transmettre dans les plus brefs délais des informations sur les enquêtes concernant huit homicides commis en 2013 et 2014 (assassinats de MM. Jerónimo Sol Ajcot, Gerardo De Jesús Carrillo Navas, William Retana Carias, Manuel De Jesús Ortiz Jiménez, Genar Efrén Estrada Navas, Edwin Giovanni De La Cruz Aguilar, Luis Arnoldo López Esteban et Marlon Velázquez), de manière à en identifier tant les auteurs matériels que les commanditaires et à les sanctionner. A cet égard, le comité note les informations fournies par le gouvernement vis-à-vis des cinq de ces huit cas: i) pour M. Gerardo De Jesús Carrillo Navas, membre du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, le ministère public déclare que l’affaire est en cours d’instruction, que le comité exécutif du syndicat n’a pas considéré que son décès était dû à son activité syndicale, qu’il n’y a aucun témoin oculaire, qu’il n’y a pas de concordance balistique et que la famille de la victime déclare qu’il n’avait pas reçu de menaces; ii) en ce qui concerne M. William Leonel Retana Carias, lui aussi membre du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, le ministère public fait savoir que deux personnes sont liées à cet assassinat et que, le 10 mars 2017, les prévenus ont été condamnés à une peine incompressible de cinquante ans de prison par la première chambre du tribunal pénal de première instance, de trafic de stupéfiants et de délits contre l’environnement pour les procédures de haut risque; iii) quant à M. Manuel De Jesús Ortiz Jiménez, lui aussi membre du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, le ministère public, signale que la première chambre du tribunal pénal de première instance, de trafic de stupéfiants et de délits contre l’environnement pour les procédures de haut risque a condamné, le 10 mars 2017, l’un des auteurs de l’homicide à une peine incompressible de vingt-cinq ans de prison. Tout en prenant dûment note de ces informations au sujet des trois assassinats de membres du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, et en particulier de l’imposition de deux condamnations, le comité prie le gouvernement de lui fournir des informations quant aux mobiles possibles des assassinats de MM. Retana Carias et Ortiz Jiménez ainsi que sur les enquêtes menées en vue de déterminer le lien éventuel entre les homicides et l’activité syndicale des victimes; iv) en ce qui concerne M. Luis Arnoldo López Esteban, membre du Syndicat des travailleurs du transport public de Ciudad Pedro de Alvarado et de la CGTG, le ministère public signale que le cas est en cours d’instruction et que, dans un rapport d’enquête du bureau des droits de l’homme, parquet de la section des atteintes à la vie, du 9 janvier 2017, Mme Dora Alicia Soto González de López, interrogée, écarte le mobile d’une extorsion; les enfants du défunt ont également été auditionnés; et v) le ministère public signale que, le 1er juillet 2014, une condamnation a été prononcée contre l’auteur de l’assassinat de M. Marlón Dagoberto Vázquez López, commis le 6 janvier 2014; la personne condamnée étant mineure et le mobile du crime un vol. A cause de la date de l’assassinat, du prénom de la victime et d’une certaine similitude dans le nom de famille, le comité note que le gouvernement considère que ce cas pourrait correspondre à la plainte déposée par l’une des organisations plaignantes sur l’assassinat d’une personne présentée comme Marlón Velásquez et prie les organisations plaignantes de bien vouloir le confirmer.
  9. 344. Concernant les meurtres de MM. Jerónimo Sol Ajcot, Genar Efrén Estrada Navas et Edwin Giovanni De La Cruz Aguilar, le comité observe avec préoccupation que, presque trois ans après la dénonciation de ces homicides par le mouvement syndical, le gouvernement indique que les registres officiels ne font pas état de l’homicide de personnes ainsi dénommées, une imprécision ayant pu se produire dans les noms fournis par les organisations plaignantes. Rappelant que le groupe de travail syndical du ministère public a été institué afin de permettre un échange fluide d’informations entre le ministère public et les organisations syndicales vis-à-vis des homicides et actes de violence affectant les membres du mouvement syndical, le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour, en collaboration avec les organisations syndicales, clarifier l’identité des personnes mentionnées et de le tenir informé des enquêtes menées afin d’identifier et sanctionner les auteurs matériels et commanditaires desdits faits.

    Nouvelles allégations d’assassinats

  1. 345. Le comité note avec une profonde préoccupation que le MSICG dénonce l’assassinat, le 9 novembre 2016, de M. Eliseo Villatoria Cardona, secrétaire de l’organisation et de la propagande et membre du comité exécutif du Syndicat des employés municipaux organisés de Tiquisate, Escuintla (SEMOT). Le comité note avec une grande préoccupation que l’organisation plaignante allègue que cet homicide a été précédé de nombreux actes antisyndicaux commis par le maire de Tiquisate, actes dénoncés devant le Comité de la liberté syndicale, dans le cadre du cas no 3251, et de menaces de mort proférées contre plusieurs membres du SEMOT, menaces qui ont été dénoncées devant le ministère public. Le comité regrette profondément ce nouvel assassinat. Le Comité note par ailleurs les éléments fournis par le gouvernement quant au cours de l’enquête relative à l’homicide en question, et notamment que: i) 11 personnes ont été entendues, parmi lesquelles des membres de la famille, d’anciens collègues de travail de la victime, ainsi que des dirigeants et membres du SEMOT; ii) le 31 janvier 2017, M. Jorge Amílcar Jiménez Conreras, secrétaire général du SEMOT, a complété sa déposition en demandant des mesures de protection pour tous les dirigeants du SEMOT, ces derniers se sentant menacés par le maire de Tiquisate qui aurait l’intention de dissoudre le syndicat; et iii) un rapport remis par le SEMOT fait partie des éléments de l’enquête.
  2. 346. Rappelant les principes déjà énoncés sur la lutte contre l’impunité et la nécessité d’accélérer les enquêtes et les procédures judiciaires en cas d’actes de violence antisyndicale, le comité prie instamment le gouvernement, en application de l’instruction générale no 1/2015, de continuer à prendre avec la plus grande diligence toutes les mesures qui s’imposent pour identifier les auteurs matériels ainsi que les commanditaires de ce crime et les sanctionner dans les délais les plus brefs, de s’assurer que les plaintes pour menaces de mort déposées devant le ministère public sont examinées avec la rapidité requise et de garantir immédiatement aux membres du SEMOT qui font l’objet de menaces les mesures de protection qui s’imposent. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.

    Autres allégations d’actes de violence

  1. 347. Le comité note que, dans ses observations, le gouvernement fait état d’initiatives d’ordre général prises pour améliorer la protection des membres du mouvement syndical, notamment: i) la mise en place d’un comité chargé de l’analyse de risque auquel prennent part diverses institutions telles que la police nationale civile, le ministère public, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale et l’Unité des journalistes et des militants; ii) l’adoption, en collaboration avec le mouvement syndical, d’un protocole de mise en œuvre de mesures de sécurité immédiates et préventives en faveur des travailleurs syndiqués et des dirigeants syndicaux, des dirigeants, des cadres, des militants, des leaders syndicaux et des personnes liées à la défense des droits des travailleurs, ainsi qu’en ce qui concerne les lieux d’exercice de leurs activités; iii) l’octroi, en juin 2016, d’une allocation spéciale de 700 quetzales par mois aux fonctionnaires de la police nationale civile pour garantir que les frais de logement et de nourriture des fonctionnaires de police ne sont pas pris en charge par les personnes qui font l’objet de menaces et bénéficient d’une mesure de sécurité personnelle. Le comité note en outre que, dans les informations fournies en octobre 2016 et février 2017 dans le cadre du suivi de la plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, le gouvernement ajoute que, entre octobre 2016 et le 20 janvier 2017, le ministère de l’Intérieur a reçu 14 demandes de mise en place de mesures de sécurité donnant lieu à la réalisation de 14 études de risque concernant des syndicalistes, aux termes desquelles 2 mesures de sécurité personnelle et 12 mesures établissant un périmètre de sécurité ont été accordées.
  2. 348. Le comité note qu’il n’a pas reçu des organisations plaignantes les informations demandées au sujet des allégations de menaces de mort proférées contre Mme Selfa Sandoval Carranza, dirigeante du SITRABI, ainsi que sur les allégations de détention illégale de membres du SITRAPETEN dans plusieurs hôtels du pays et les mesures d’intimidation dont ils ont fait l’objet. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
  3. 349. En ce qui concerne la demande de mener une recherche complète dans les archives du ministère public pour déterminer l’existence de la plainte de Mme Lesbia Morales, au sujet des faits survenus en 2009, le comité, d’une part, note que, d’après les informations fournies par le gouvernement, le ministère public a fait une nouvelle recherche et qu’il s’est avéré que les registres manuel et électronique du système SICOMP ne comportent aucune trace de plainte et, d’autre part, observe que le MSICG ne semble pas avoir fourni d’autres éléments concernant l’identification de la plainte. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  4. 350. En ce qui concerne la disparition de Mme María Antonia Dolores López, appartenant à la famille d’un témoin de l’assassinat d’un membre du mouvement syndical et mineure au moment de la disparition alléguée, le comité note les indications du gouvernement selon lesquelles: i) les services compétents ont interrogé l’intéressée en avril 2017; et ii) Mme María Dolores López a fait savoir qu’elle n’avait pas été victime d’enlèvement mais qu’elle avait fait une fugue pour vivre avec son fiancé avec lequel elle est aujourd’hui mariée. Le comité prend note de ces informations et ne poursuivra donc pas l’examen de cette allégation.
  5. 351. S’agissant de la situation du dirigeant syndical Jorge Byron Valencia Martínez, objet de menaces de mort et à l’égard duquel il avait demandé que soient prises des mesures de protection, le comité note les informations du gouvernement selon lesquelles: i) le 27 décembre 2013, il a été demandé à la direction générale de la police nationale civile de prêter immédiatement assistance à l’intéressé, en renforçant les patrouilles sur ses lieux de résidence et de travail; ii) l’enquête sur les menaces reçues est toujours en cours, sans qu’une piste claire n’ait été avancée; et iii) M. Byron Valencia n’a pas fourni d’autres éléments en lien avec sa plainte. Le comité prend note de ces éléments et veut croire que, dans le cas où de nouvelles menaces seraient proférées à l’encontre de M. Valencia Martínez, ce dernier bénéficie immédiatement des mesures qui s’imposent.
  6. 352. Tout en notant les informations du gouvernement sur l’état des enquêtes relatives aux meurtres de plusieurs membres du Syndicat des travailleurs du commerce de Coatepeque, le comité observe que le gouvernement n’a toujours pas fourni d’éléments sur la réalisation d’une enquête concernant les tentatives d’exécution extrajudiciaire et les menaces de mort ayant affecté d’autres membres de ce syndicat.
  7. 353. Soulignant la gravité de ces allégations et rappelant que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe [voir Recueil, op. cit., paragr. 44], le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour qu’une enquête judiciaire indépendante soit menée vis-à-vis de ces allégations. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de manière détaillée sur cette enquête ainsi que sur les éventuelles procédures pénales initiées suite à cette dernière.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 354. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité exprime de nouveau sa vive et croissante préoccupation face à la gravité de ce cas, dans lequel il est fait état d’un grand nombre d’assassinats, de tentatives d’assassinat, d’agressions, de menaces de mort, et face à l’existence d’un climat d’impunité totale.
    • b) Le comité s’attend à ce que la collaboration entre le ministère public et la police nationale civile concernant les enquêtes sur les homicides commis contre des membres du mouvement syndical se poursuive et s’institutionnalise et prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • c) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre de toute urgence toutes les mesures qui s’imposent pour garantir que, dans la conception et le déroulement des enquêtes, l’éventuelle nature antisyndicale des homicides de membres du mouvement syndical est pleinement et systématiquement prise en considération et que les enquêtes ciblent à la fois les auteurs matériels et les commanditaires des faits. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé dans les délais les plus brefs des initiatives prises et des résultats obtenus à cet égard, tout particulièrement en ce qui concerne les cas pour lesquels des indices signalant un possible mobile antisyndical ont été identifiés.
    • d) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de l’informer dans les meilleurs délais des initiatives prises au sujet de l’octroi urgent de ressources économiques et humaines complémentaires à l’Unité spéciale d’enquête sur les délits commis contre des syndicalistes, ainsi que des résultats obtenus.
    • e) Le comité encourage le gouvernement à prendre les mesures qui s’imposent en vue de créer des tribunaux spéciaux, qui permettraient de traiter plus rapidement les crimes et délits commis contre les membres du mouvement syndical. Le comité prie le gouvernement de l’informer des initiatives concrètes prises à cet égard.
    • f) Le comité prie le gouvernement de prendre, avec l’appui du représentant spécial du Directeur général du BIT au Guatemala, les mesures qui s’imposent pour renforcer la collaboration institutionnelle avec la CICIG ainsi qu’avec le groupe de travail syndical du ministère public.
    • g) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement d’élaborer et mettre en œuvre des mesures de protection efficaces à l’endroit des personnes qui acceptent de collaborer avec les enquêtes pénales relatives aux actes de violence antisyndicale. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé dans les meilleurs délais des initiatives prises à cet égard.
    • h) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du déroulement des enquêtes relatives aux auteurs matériels de l’homicide de M. Barrera Barco ainsi que celles concernant des liens éventuels entre l’activité syndicale de la victime et son refus de se soumettre au racket d’une bande de criminels.
    • i) En ce qui concerne l’assassinat de M. Carlos Antonio Hernández Mendoza, le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats des enquêtes en cours, ainsi que des recherches mises en œuvre en vue de déterminer les liens éventuels entre l’homicide du dirigeant syndical et ses activités syndicales.
    • j) Le comité prie le gouvernement de lui fournir des informations sur les mobiles possibles des assassinats de MM. Retana Carias et Ortiz Jiménez, du Syndicat des travailleurs de la municipalité de Jalapa, ainsi que sur les enquêtes diligentées dans le but de déterminer le lien éventuel entre les homicides et l’activité syndicale des victimes.
    • k) Le comité prie les organisations plaignantes de confirmer que les informations fournies par le gouvernement concernant l’assassinat de M. Marlón Dagoberto Vásquez López, perpétré le 6 janvier 2014, correspondent à la plainte pour homicide, à la même date, d’une personne présentée comme Marlón Velásquez.
    • l) Concernant les homicides de MM. Jerónimo Sol Ajcot, Genar Efrén Estrada Navas et Edwin Giovanni De la Cruz Aguilar, le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour, en collaboration avec les organisations syndicales, clarifier l’identité des personnes mentionnées et de le tenir informé des enquêtes menées afin d’identifier et sanctionner les auteurs matériels et commanditaires desdits faits.
    • m) Le comité prie instamment le gouvernement de continuer à prendre, en application de la mesure d’instruction générale no 1/2015, et dans les plus brefs délais, toutes les mesures qui s’imposent pour identifier les auteurs matériels et les commanditaires de l’homicide de M. Eliseo Villatoro Cardona et les sanctionner, de s’assurer que les plaintes pour menaces de mort déposées devant le ministère public sont examinées avec la rapidité requise, et d’octroyer immédiatement aux membres du SEMOT qui font l’objet de menaces les mesures de protection qui s’imposent. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • n) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de tentatives d’exécution extrajudiciaire et de menaces de mort dont ont été victimes des membres du Syndicat de travailleurs du commerce de Coatepeque. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de manière détaillée sur ladite enquête et sur les procédures pénales engagées en conséquence.
    • o) Le comité attire de nouveau spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.
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