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Definitive Report - Report No 335, November 2004

Case No 2307 (Chile) - Complaint date: 27-OCT-03 - Closed

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  1. 536. La plainte figure dans une communication de l’Ordre des enseignants du Chili A.G. datée du 27 octobre 2003. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 30 avril 2004.
  2. 537. Le Chili a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 538. Dans sa communication du 27 octobre 2003, l’Ordre des enseignants du Chili A.G. (CPCAG), organisme affilié à la Centrale unitaire des travailleurs du Chili (CUT), explique que, depuis 1990, en même temps que l’avènement du régime démocratique, est engagé un processus de rétablissement des droits que les travailleurs chiliens, notamment les enseignants, ont perdus pendant la dictature militaire. Depuis des années, l’organisation plaignante, comme d’autres organisations du secteur public, participe à des négociations portant, entre autres choses, sur les salaires. Ces négociations sont menées avec l’administration représentée en l’espèce par le ministère de l’Education, selon des procédures «de fait» dans un climat d’incertitude, engendré, s’agissant des professeurs, par le recours permanent à des procédures, délais et autres modalités des négociations qui sont imposés d’une manière unilatérale et arbitraire par l’administration.
  2. 539. L’organisation plaignante allègue que, le 9 avril 2003, elle a remis au ministre de l’Education une demande dans laquelle elle exposait les exigences et revendications des enseignants, tant sur le plan des aspects professionnels et pédagogiques que des salaires, demande qui a marqué le début du processus de négociation correspondant à l’année 2003, à laquelle la Direction nationale et tous les présidents régionaux ont souscrit. S’il est vrai que l’administration a accepté de négocier avec l’organisation plaignante, en constituant diverses commissions de travail bipartites, afin de traiter les points abordés dans la demande susmentionnée, en revanche, fondamentalement, à la date de dépôt de la présente plainte, elle n’a officiellement répondu à aucune des questions soulevées dans la demande, notamment à la question concernant l’augmentation de salaires sollicitée par la profession.
  3. 540. Selon l’organisation plaignante, cette attitude montre à l’évidence que l’administration n’a pas réellement l’intention de négocier et d’aboutir à un accord sur les salaires, entre autres choses; l’administration s’est contentée de disqualifier la demande aux yeux de l’opinion publique sans jamais se préoccuper de présenter une contre-proposition formelle, sérieuse et chiffrée, assortie d’une formule de distribution concrète des augmentations de salaires promises.
  4. 541. L’organisation plaignante ajoute que ce refus de négocier, qui témoigne d’un abus de pouvoir illicite de la part de l’administration, a conduit à l’appel de deux grèves, conformément aux dispositions arrêtées par l’Assemblée nationale. Une première grève a été organisée pour le 30 septembre 2003; l’administration n’ayant toujours pas donné de réponse, une seconde grève a été organisée pour les 23 et 24 octobre de la même année. Ces mouvements ont été exclusivement motivés par les intérêts économiques et professionnels des enseignants, indépendamment de toute considération politique ou d’un autre ordre, de sorte qu’ils entrent dans le cadre de protection institutionnel établi par l’Organisation internationale du Travail.
  5. 542. L’organisation plaignante indique que le secteur de l’éducation est actuellement géré par les municipalités directement ou par l’intermédiaire d’entités municipales; toutefois, il est toujours financé en totalité par les fonds publics, sous la forme de subventions de l’Etat fédéral ou de crédits des municipalités. De manière générale, la part de ces derniers ne dépasse pas 10 pour cent du total.
  6. 543. Par ailleurs, l’organisation plaignante allègue une volonté de porter atteinte au droit de grève; l’administration centrale comme ses services décentralisés ont menacé les professeurs ayant répondu à l’appel à la grève de leur organisation syndicale, de licenciements, de poursuites, de retenues sur les salaires en contrepartie des heures non travaillées, et d’autres mesures punitives qu’il est indigne pour un Etat démocratique d’appliquer à des personnes dont la seule faute a été de faire valoir des revendications justes et légitimes. L’application de n’importe quelle mesure punitive, du type de celles décrites précédemment, à l’encontre des professeurs qui ont participé aux grèves déclenchées par l’organisation plaignante constitue une pratique antisyndicale qui doit être sans effet ipso jure, compte tenu notamment du fait que, après avoir été ratifiées par le Chili, les conventions nos 87, 98 et 151 de l’OIT ont été promulguées sous la forme de lois de la République. En conséquence, les négociations en matière salariale ou autre menées par l’Ordre des enseignants du Chili A.G. avec l’administration s’inscrivent désormais dans un cadre institutionnel, qui participe de l’intégration desdites conventions internationales à la législation de la République, conventions dont la constitutionnalité est même établie à l’alinéa 2 de l’article 5 de la Constitution.
  7. 544. S’il est vrai que les conventions mentionnées ne traitent pas explicitement de l’exercice du droit de grève, ce dernier a été reconnu aux termes de la jurisprudence bien établie du Comité de la liberté syndicale.
  8. 545. En conséquence, devant le refus du gouvernement d’appliquer les conventions nos 87, 98 et 151, l’organisation plaignante a exercé légitimement le droit de grève légale, raison pour laquelle a été brandie la menace de graves sanctions, qui s’avèrent non fondées, puisque l’exercice d’un droit ne peut en aucun cas être punissable, directement ou indirectement, que ce soit par des procédures sommaires, un licenciement ou par une retenue des heures non travaillées. D’autre part, il est paradoxal que les menaces de sanctions, c’est-à-dire de mesures contraires au droit, viennent de l’Etat lui-même, dont les organes ont pour mandat, en vertu de la Constitution, de respecter et défendre l’application et le respect des lois, en particulier de celles qui sont fondées sur des traités internationaux ratifiés par le Chili et qui sont en vigueur, selon l’alinéa 2 déjà mentionné de l’article 5 de la Constitution.
  9. 546. Par ailleurs, il n’est pas justifié de refuser d’appliquer les lois fondées sur les conventions de l’OIT en invoquant le fait que les règlements de leur application n’ont pas été adoptés, parce que cette condition n’est exprimée dans aucun texte juridique, et l’administration ne peut se réfugier derrière le principe de légalité propre à un Etat de droit pour s’arroger d’elle-même plus de pouvoirs que ceux qui lui sont reconnus par la Constitution et la loi. Si l’on suit un tel raisonnement, n’importe quel traité international ratifié par le Chili peut devenir lettre morte, ad eternum, tant qu’une loi qui en régisse l’application n’aura pas été promulguée, thèse indéfendable et contraire à la conscience morale et juridique de tous ceux qui souscrivent à la nécessité qu’un ordre public, tant international que mondial, soit pleinement en vigueur dans le domaine du travail et qui, pour l’essentiel, favorise le respect et le développement des droits économiques, sociaux et culturels des personnes et de leurs associations.
  10. B. Réponse du gouvernement
  11. 547. Dans sa communication du 30 avril 2004, le gouvernement déclare que, au Chili, aucun enseignant n’a, à titre professionnel, comme interlocuteur patronal le gouvernement central ni le ministre de l’Education. Les contrats de travail et, par conséquent, les avantages socio-économiques qui y sont attachés, sont établis entre chacun des enseignants et son employeur privé ou subventionné, ou la municipalité qui les emploie, sans aucune intervention du gouvernement central.
  12. 548. Pour les enseignants qui exercent dans le secteur privé, y compris celui qui est subventionné, il existe la procédure de négociation collective, régie par le Code du travail (loi à caractère général), dont ils peuvent se prévaloir et dont ils se prévalent dans les faits à l’égard de leurs employeurs, sans autres limites que celles de leur représentativité.
  13. 549. S’agissant des enseignants au service des municipalités et qui peuvent se considérer, au sens large, comme des fonctionnaires, les conditions d’emploi et de rémunération sont fixées librement entre les parties de la relation de travail (l’enseignant et la municipalité), pour chaque cas particulier, dans le cadre du dénommé «Statut des professionnels de l’éducation», qui est la norme juridique protégeant les travailleurs de ce secteur. Nonobstant ce qui précède, ce statut ne prévoit pas de mécanisme qui régisse la négociation entre ces fonctionnaires municipaux et le gouvernement ou entre celui-ci et l’Ordre des enseignants du Chili A.G., qui est une association à vocation professionnelle plus qu’un syndicat représentatif d’intérêts. Cette situation est parfaitement conforme aux normes internationales, car il faut garder à l’esprit que, à la différence de ce qui se passe avec la convention no 87, qui inclut tous les travailleurs, une catégorie déterminée peut être exclue du champ d’application de la convention no 98.
  14. 550. En effet, l’article 6 de la convention no 98 indique que ce texte «ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics», ce qui n’a pas empêché le gouvernement chilien – comme l’a indiqué l’organisation plaignante dans sa plainte –, dès le retour à la démocratie et avant même d’avoir ratifié ladite convention no 98, d’entrer en négociation avec cette organisation professionnelle afin de proposer au Congrès national de fixer ou modifier les cadres juridiques et financiers nationaux pouvant influer sur les contrats passés entre les employeurs municipaux et les enseignants qui relèvent d’eux. Les normes qui ont une incidence sur les conditions d’emploi et qui sont arrêtées sous une forme décentralisée consistent principalement en des lois nationales à l’élaboration et à la promulgation desquelles participent, conformément à la Constitution, le Congrès national et le pouvoir exécutif.
  15. 551. Le Président de la République a la faculté exclusive de proposer les lois qui fixent ou modifient les dépenses publiques, ce qui est capital dans un système où le plus gros des ressources dont disposent les municipalités pour financer l’éducation provient de subventions ou de transferts du budget national. Des propositions de ce type ont été élaborées et exécutées dans le passé, et constituent à ce jour dans le secteur une procédure de négociation consacrée dans la pratique et qui obéit au principe de bonne foi ayant présidé à l’élaboration et l’exécution desdites propositions, ce dont a pris note le Comité de la liberté syndicale en reconnaissant l’existence de cette forme de négociation dans le cas no 1946 de 1998 dans lequel l’organisation plaignante a présenté une plainte à propos de la procédure de négociation.
  16. 552. En conséquence, en dépit des limites de la situation et de l’absence d’un cadre réglementaire explicite, le gouvernement a négocié les conditions d’emploi du secteur et exécuté les accords souscrits, ce qu’il continue de faire aujourd’hui.
  17. 553. Concernant le supposé refus de l’administration de négocier avec l’organisation plaignante, le gouvernement rappelle que, dans la plainte même présentée par l’Ordre des enseignants, on peut lire: «S’il est vrai que l’administration a accepté de négocier avec notre organisation, en constituant diverses commissions de travail bipartites, afin de traiter les points abordés dans la demande mentionnée …»; de ce fait, la demande présentée elle-même affaiblit le raisonnement suivi par ses auteurs, parce qu’elle semble restreindre la teneur de la plainte au moment de la négociation ou, plus exactement, à la date de sa conclusion, puisque les plaignants reconnaissent que des négociations ont lieu mais se plaignent de ce que l’on n’aboutisse pas à un accord.
  18. 554. Le gouvernement ajoute que les délais et procédures d’une négociation autoréglementée ne peuvent être unilatéralement établis par une des parties, comme semble le croire l’organisation plaignante, mais doivent être établis d’un commun accord entre les deux parties, une interprétation de bonne foi de ces délais et procédures dépendant essentiellement de ce qui se pratique habituellement et du contexte dans lequel s’inscrit la négociation.
  19. 555. Comme il est de notoriété publique au Chili, depuis 1990, le gouvernement négocie périodiquement le cadre juridique et financier des conditions d’emploi des personnels enseignants municipaux, qui s’établissent entre ces derniers et leurs employeurs respectifs, négociation indissolublement liée au débat de la loi générale sur le budget et à l’évaluation, par l’autorité financière, d’une possibilité d’augmentation des traitements de la fonction publique, ce qui, en vertu de dispositions légales découlant de préceptes constitutionnels, s’effectue dans le pays au cours des derniers mois de l’année.
  20. 556. Le gouvernement souligne que le Comité de la liberté syndicale a soutenu, confirmant les observations de la commission d’experts, que «si le principe de l’autonomie des partenaires à la négociation collective reste valable en ce qui concerne les fonctionnaires couverts par la convention no 151, les particularités de la fonction publique décrites ci-dessus appellent une certaine souplesse dans son application» [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 899, Bureau international du Travail, Genève] et que «la négociation collective dans le secteur public exige la vérification des ressources disponibles» (infra, paragr. 898).
  21. 557. Il découle de ce qui précède que le gouvernement n’a pas refusé de négocier mais qu’il s’en est tenu aux délais et modalités habituellement suivis de concert avec l’organisation plaignante, de bonne foi, et qu’il est parvenu avec ladite organisation à un accord qui prévoit, entre autres choses, les avantages socio-économiques suivants pour les travailleurs de l’enseignement:
  22. - augmentation des rémunérations des enseignants pour les années 2004, 2005 et 2006, dont un réajustement général des rémunérations de la fonction publique égal à 3 pour cent pour 2004, puis 5,5 pour cent pour 2005 et 6,5 pour cent pour 2006, plus une augmentation pour le secteur subventionné;
  23. - versement d’une prime aux enseignants pour les années 2004 et 2006;
  24. - relèvement des normes du travail pour le personnel enseignant;
  25. - révision de la réglementation sur l’autorisation et l’agrément du personnel enseignant;
  26. - application du régime de l’année scolaire dans les services municipaux;
  27. - amélioration des normes de droit administratif appliquées au personnel enseignant relevant de l’administration municipale;
  28. - introduction d’heures de conseil pédagogique dans les établissements d’enseignement;
  29. - normes sur les maladies professionnelles;
  30. - prestations versées aux enseignants des services municipaux qui prennent leur retraite;
  31. - apport d’un soutien spécial aux enseignants des établissements exposés à une situation sociale difficile;
  32. - versement d’une prime aux enseignants d’écoles rurales;
  33. - soutien à la création obligatoire de formations en pédagogie;
  34. - modification de l’allocation de perfectionnement;
  35. - traitement variable selon le rendement individuel et lié au système d’évaluation de l’enseignant;
  36. - augmentation de la prime de responsabilité pour les fonctions de direction, techniques et pédagogiques.
  37. 558. Par conséquent, il n’y a pas eu refus de négocier mais, au contraire, l’une des négociations les plus complètes et les plus avantageuses pour les enseignants des dernières années a été menée à bien, ce qui a évidemment exigé que l’on suive un rythme plus soutenu et que l’on mène des tractations plus étendues et plus détaillées que ce qui se fait habituellement, et que l’on parvienne à une conclusion propre à cette négociation compte tenu de son envergure.
  38. 559. Un autre point de la plainte formulée concerne l’existence supposée de pratiques antisyndicales de la part de l’administration centrale comme de ses services décentralisés, et qui consisteraient «à menacer les professeurs qui avaient répondu à l’appel à la grève de leur organisation nationale de licenciements, de poursuites, de retenues sur les salaires en dédommagement des heures non travaillées, et d’autres mesures punitives». A cet égard, le gouvernement signale qu’aucun enseignant n’a, à titre professionnel, comme interlocuteur patronal le gouvernement central ni le ministre de l’Education. Les contrats de travail sont passés entre chacun des enseignants et l’entreprise privée ou la municipalité qui l’emploie, sans l’intervention du gouvernement central, de sorte que, en l’occurrence, le gouvernement visé par la plainte n’a aucune possibilité ni aucun pouvoir de commettre l’un quelconque des actes évoqués par le plaignant.
  39. 560. Aucune dénonciation n’a été reçue par les organes compétents concernant des cas concrets ou des situations particulières qui témoigneraient de telles pratiques, pas plus qu’il n’y est fait mention dans la plainte proprement dite, dont l’auteur se contente d’une allusion générale à des «menaces» sans en donner d’exemple précis. Sans préjudice de ce qui précède, conformément à la doctrine même du Comité de la liberté syndicale, «les déductions de salaire pour les jours de grève ne soulèvent pas d’objections du point de vue des principes de la liberté syndicale». [Voir 230e rapport, cas no 1171, paragr. 170, et 297e rapport, cas no 1779, paragr. 75, et Recueil, op. cit., 1996, paragr. 588.]
  40. 561. S’agissant de l’allégation selon laquelle on essaierait de porter atteinte au droit de grève en dépit des conventions ratifiées par le Chili, le gouvernement déclare que le système juridique du Chili garantit, en vertu de la Constitution, «le droit de s’associer sans autorisation préalable» (art. 19, no 15 de la Constitution politique de la République du Chili) et a élevé au rang de droit constitutionnel «le droit de se syndiquer dans les cas et dans les formes prévus par la loi» (art. 19, no 19 de la Constitution). D’autre part, l’article 212 du Code du travail reconnaît «aux travailleurs du secteur privé et des entreprises publiques, quelle que soit leur forme juridique», le droit de constituer «les organisations syndicales qu’ils jugent appropriées». Un droit équivalent, même s’il est désigné d’une autre façon, est reconnu aux travailleurs de l’administration de l’Etat à l’article 1 de la loi no 19296 sur les associations de fonctionnaires, qui reconnaît aux travailleurs de l’administration de l’Etat, y compris des municipalités, «le droit de constituer les associations de fonctionnaires qu’ils jugent appropriées». De leur côté, les employeurs peuvent créer des organisations «dans le but de faciliter la rationalisation, le développement et la préservation des activités qui leur sont communes, en raison de leur profession, de leurs fonctions ou de leur branche de production ou de services», en se fondant à cette fin sur les normes contenues dans le décret-loi no 2757 de 1979.
  41. 562. De même sont garantis, par le système juridique et de facto, les droits consacrés par les conventions nos 87 et 98, ainsi que le droit de grève. Bien qu’aucune convention ou recommandation de l’OIT ne réglemente le droit de grève, sauf le paragraphe 7 de la recommandation (nº 92) sur la conciliation et l’arbitrage volontaires, 1951, où il est précisé qu’aucune de ses dispositions «ne pourra être interprétée comme limitant d’une manière quelconque le droit de grève», il ne fait aucun doute pour le gouvernement chilien que ce droit est intégré à des instruments comme le Pacte international des droits économiques, sociaux et culturels (1966) et la Charte internationale américaine de garanties sociales (1948), et le gouvernement considère pour cette raison que le droit de grève, comme l’indique le Comité de la liberté syndicale, est «un corollaire indispensable du droit syndical garanti par la convention no 87» et ne peut être séparé, en conséquence, de l’ensemble des droits syndicaux, de sorte qu’il est considéré comme étant un des droits fondamentaux des travailleurs et de leurs organisations dans la mesure où il constitue un moyen de défense de leurs intérêts économiques. Le gouvernement se réfère aux principes du Comité de la liberté syndicale. En l’espèce, le gouvernement indique qu’il n’a commis aucun acte impliquant une atteinte à l’exercice du droit de grève, bien qu’il soit convaincu de l’illégitimité des grèves en question vu que ces dernières ont empêché d’assurer le service minimum et ont porté clairement préjudice aux secteurs socialement les plus vulnérables du pays, comme les étudiants relevant des services municipaux, dont le droit à l’éducation a été bafoué à cause d’une action qui ne s’imposait en aucune manière compte tenu de l’époque et du contexte dans lesquels elle a été menée.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 563. Le comité observe que, dans le cas présent, selon l’organisation plaignante, il a été porté atteinte au droit de négociation collective et de grève des enseignants. Plus précisément, cette organisation prétend que, après qu’elle eut présenté au ministre de l’Education les demandes et revendications des professeurs, il a été procédé au lancement du processus de négociation correspondant à 2003 et que, à la date de dépôt de la plainte (octobre 2003), l’autorité compétente, qui avait accepté de négocier en constituant diverses commissions bipartites, n’avait pas donné de réponse officielle aux questions soulevées dans la demande, attitude qui, de l’avis de l’organisation plaignante, montre à l’évidence que l’autorité compétente ne souhaite pas véritablement négocier et conclure un accord sur les salaires, entre autres choses, et ne se préoccupe pas de présenter une contre-proposition formelle et sérieuse. L’organisation plaignante ajoute que ce refus de négocier l’a conduite à déclencher une grève le 30 septembre 2003 et une seconde grève les 23 et 24 octobre de la même année.
  2. 564. Le comité prend note de ce que le gouvernement, malgré l’absence d’un cadre réglementaire explicite, négocie depuis 1990 les conditions d’emploi du secteur enseignant et a exécuté les accords souscrits mais que, en l’espèce, conformément à la coutume et en toute bonne foi, les délais et procédures ne peuvent être unilatéralement établis par une des parties, surtout compte tenu du fait que le cadre juridique et financier des conditions d’emploi des enseignants municipaux est lié au débat de la loi générale sur le budget et aux évaluations de l’autorité financière. Enfin, le comité prend note avec intérêt de ce que le gouvernement a conclu avec l’organisation plaignante un accord qui prévoit, entre autres choses, des augmentations de salaires des enseignants pour les années 2004, 2005 et 2006, ce qui montre que le gouvernement n’a pas refusé de négocier mais qu’il s’en est tenu aux délais et modalités habituellement suivis avec l’organisation plaignante, de bonne foi.
  3. 565. En ce qui concerne les menaces alléguées de l’administration centrale et de ses services décentralisés (licenciements sommaires, retenues sur les salaires en dédommagement des heures non travaillées et autres mesures punitives à l’encontre des travailleurs qui ont répondu à l’appel à la grève lancé par l’organisation plaignante), le comité note que le gouvernement: 1) nie avoir commis un acte quelconque impliquant une atteinte au droit de grève; 2) rappelle les principes du comité selon lesquels la retenue des jours de grève sur le salaire ne soulève pas d’objections; 3) souligne que l’organisation plaignante n’a fait allusion à aucun fait précis impliquant une atteinte au droit de grève et qu’aucune dénonciation en ce sens n’a été présentée; et 4) souligne que, telles qu’elles ont été menées, les grèves en question n’ont pas permis de garantir un service minimum. Dans ces conditions, étant donné que le conflit à l’origine de cette affaire s’est terminé par la signature d’un accord collectif et que l’organisation plaignante n’a pas apporté de précisions sur les menaces alléguées, le comité n’ira pas plus avant avec l’examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 566. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à décider que ce cas n’appelle pas un examen plus approfondi.
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