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- 278. Le comité a examiné le présent cas au cours de sa session de novembre 2002 et a adopté un rapport intérimaire. [Voir 329e rapport, paragr. 316 à 356, approuvé par le Conseil d’administration au cours de sa 285e session (novembre 2002).]
- 279. Le gouvernement a transmis le 5 mai 2003 les commentaires de la Confédération de l’industrie et du commerce, datés de février 2003, et a envoyé de nouvelles observations dans une communication du 12 janvier 2004.
- 280. Le Chili a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas - 281. Au cours de sa session de novembre 2002, le comité a pris note des déclarations du gouvernement dans lesquelles celui-ci affirme que [voir 329e rapport, paragr. 349]:
- – l’action de la «grève du zèle» entreprise par le syndicat consiste à respecter au pied de la lettre les dispositions réglementaires aéronautiques, ce qui n’implique pas, à l’évidence, que l’on enfreigne les normes imposées; ni les normes contractuelles ni les normes légales n’ont donc été violées;
- – entre le 14 septembre et le 4 octobre 2001, l’entreprise a licencié 108 membres du syndicat; dans 23 cas, elle a invoqué des «impératifs de l’entreprise» et dans 85 «un manquement grave aux obligations du contrat» sans qu’apparaisse clairement dans ces 85 cas la relation de cause à effet entre les retards et le non-respect des contrats ou de la réglementation interne; par la suite, sur ces 85 travailleurs, la compagnie en a réembauché 40; parmi ceux qui n’ont pas été réembauchés figurent huit ex-dirigeants syndicaux et des travailleurs qui avaient participé à la grève légale de 1995. Cette mesure a donc été hautement discriminatoire, puisqu’en définitive elle a affecté les membres les plus actifs de l’organisation, qui ont été congédiés pour avoir respecté un accord syndical qui consistait à faire la «grève du zèle», sans violer les normes contractuelles ni légales. Trois des cinq membres du comité exécutif du syndicat ont abandonné l’entreprise après une action en justice (avec conciliation ou avec des négociations extrajudiciaires). Trente-sept pilotes affectés ont intenté une action en nullité des licenciements devant le 5e Tribunal de première instance de Santiago;
- – les licenciements ont sapé le pouvoir de négociation des travailleurs (les participants ont diminué de 200 pour cent par rapport à la négociation antérieure) et, en même temps qu’on signait une nouvelle convention collective, l’entreprise a conclu un accord avec trois groupes de pilotes qui auparavant faisaient partie du syndicat; la convention collective avec le syndicat a été signée pour quatre ans (48 mois) avec une diminution de 56 pour cent du réajustement possible du montant nominal des rémunérations, tandis que les conventions collectives conclues avec les groupes de travailleurs étaient signées pour 62 mois, avec un réajustement inférieur; de cette façon, les pilotes ne pourront plus négocier ensemble dans une même période et, dans ce contexte, une grève serait très difficile à soutenir;
- – on a pu établir que les pilotes et techniciens syndiqués ont subi de fortes pressions destinées à obtenir leur retrait du syndicat; cela apparaît clairement dans des documents et des communications émanant de l’employeur, par lesquels on offrait de meilleures conditions de travail incompatibles avec le fait de rester affilié au syndicat; cette attitude apparaît aussi clairement dans la menace implicite de perte de l’emploi exercée par l’intermédiaire de certains superviseurs, et reconnue par certains travailleurs au cours de conversations avec le contrôleur de l’inspection du travail. Le syndicat peut légalement saisir les tribunaux en dénonçant ces faits et obtenir qu’une amende soit infligée à l’entreprise;
- – selon les informations recueillies lors des contrôles effectués dans l’entreprise, celle-ci a exclu les membres du syndicat de la formation au pilotage des nouveaux avions de la compagnie;
- – 40 pilotes licenciés quand ils avaient participé à la «grève du zèle» ont été réembauchés à condition d’écrire une lettre dans laquelle ils devaient reconnaître leur responsabilité dans les éventuels dommages que cette action de revendication aurait pu causer, et devaient en plus imputer cette soi-disant transgression à une mesure imposée par le syndicat; ces pilotes, dans leurs nouveaux contrats individuels, n’ont pas récupéré les bénéfices collectifs dont ils jouissaient antérieurement;
- – l’autorité administrative a infligé deux amendes à la compagnie pour ne pas avoir attribué le travail convenu dans le contrat de travail ou ne pas avoir présenté les «rôles d’équipage» à quatre dirigeants syndicaux (pour conserver leur licence, les pilotes doivent justifier d’un certain nombre d’heures de vol, et ne pas pouvoir le faire revient, dans la pratique, à leur interdire l’exercice de leur profession).
- 282. Le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 329e rapport, paragr. 356]:
- a) Le comité a décidé de présenter un rapport intérimaire sur ce cas, considérant qu’il lui manquait des informations. Le comité demande notamment au gouvernement de solliciter des informations auprès des organisations d’employeurs concernées, en vue de pouvoir disposer de leurs vues et de celles de l’entreprise en cause sur les questions en instance. Le comité réexaminera alors le cas.
- b) Le comité souligne la gravité des faits allégués, qui ont été confirmés par le gouvernement, et exprime sa profonde préoccupation quant au nombre et à la nature des pratiques antisyndicales discriminatoires ou contraires à la négociation collective qui ont eu cours et qui ont eu pour effet que le syndicat est passé de 400 à 71 membres.
- c) En ce qui concerne les allégations relatives aux actes de discrimination antisyndicale (licenciements massifs à cause de l’exercice d’activités syndicales, pressions sur les pilotes et leurs familles pour qu’ils renoncent à leur affiliation syndicale, exclusion des membres du syndicat de la formation au pilotage des nouveaux avions, non-attribution du travail convenu dans le contrat de travail aux dirigeants syndicaux, réembauche de plus de la moitié des personnes licenciées à des conditions antisyndicales), le comité déplore profondément ces pratiques antisyndicales et souligne qu’il importe de réparer et sanctionner sans délai les pratiques discriminatoires qu’ont subies l’organisation plaignante et ses adhérents.
- d) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des procès en cours ou qui seraient intentés en raison des licenciements et des pratiques antisyndicales mentionnés plus haut et s’attend à ce que soient imposées sans délai, outre les mesures de réparation, des sanctions efficaces et dissuasives qui mettront à l’avenir un frein aux pratiques antisyndicales de l’entreprise. Le comité demande au gouvernement d’engager des discussions en vue d’une éventuelle réintégration des 37 pilotes qui ont formé un recours contre leur licenciement.
- e) Quant aux allégations de l’organisation plaignante et aux déclarations du gouvernement relatives à la négociation de l’entreprise avec des pilotes individuels ou avec des groupes de pilotes à des fins antisyndicales et pour empêcher que la négociation de l’ensemble des pilotes puisse se faire de manière simultanée dans le futur, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour éviter que l’entreprise Lan Chile SA négocie à des fins antisyndicales avec des pilotes individuels ou avec des groupes de pilotes en marge du syndicat et de le tenir informé des actions en justice qui seraient engagées en raison de telles pratiques.
B. Informations de la Confédération de l’industrie et du commerce (février 2003) transmises par le gouvernement
B. Informations de la Confédération de l’industrie et du commerce (février 2003) transmises par le gouvernement - 283. La Confédération de l’industrie et du commerce (CPC) déclare que, de manière injustifiée, la compagnie Lan Chile n’a pas été informée ni consultée par le gouvernement au sujet de la présente plainte devant le Comité de la liberté syndicale. Il est surprenant que le gouvernement, en dehors de ses attributions légales, parle de manière unilatérale et arbitraire de «pratiques antisyndicales» de l’entreprise Lan Chile; ceci constitue une grave infraction à la législation, étant donné que la connaissance et le jugement des infractions pour pratiques déloyales ou antisyndicales présumées sont du ressort exclusif des tribunaux du travail (art. 292 du Code du travail). Plus encore, l’inspection du travail a le devoir de dénoncer ces pratiques au tribunal mais elle ne l’a pas fait et le syndicat non plus d’ailleurs; il n’y a auprès de l’autorité judiciaire qu’une requête ayant pour but d’établir si le licenciement de certains travailleurs était nul et non avenu, ou indu parce que basé sur de prétendues pratiques antisyndicales. La CPC indique en outre que le gouvernement a ajouté aux dénonciations de l’organisation plaignante de nouveaux faits.
- 284. La CPC souligne au sujet de la plainte et des licenciements de pilotes que, entre le 26 août et le 5 septembre 2001, a été enregistrée une augmentation moyenne de 22 heures d’opération en vol des avions (7,6 pour cent de plus que les heures d’opération de vol standard).
- 285. Les retards dans les vols ont engendré des perturbations dans le contrôle de la circulation aérienne de l’aéroport de Santiago du Chili (changements fréquents dans le planning des arrivées, perturbations dans les séquences d’estimation, admission d’autres usagers dans des circuits d’attente, etc.), et les clients ont manqué des connexions, ont subi de longues attentes et même parfois annulé des vols.
- 286. D’autres actions délibérées ont consisté à voler à des altitudes plus basses que celles recommandées pour provoquer une plus grande consommation de combustible. La moyenne journalière de certificats médicaux a augmenté, elle aussi, de 3,5 à 4 par jour à une moyenne de 100 par jour, ce qui a obligé la compagnie à annuler des vols quand les alternatives de remplacement n’étaient pas suffisantes.
- 287. C’est pour ces raisons que les licenciements ont eu lieu et pour mettre un terme aux préjudices indûment causés, et non parce que le processus de négociation collective approchait ou en raison de l’affiliation des pilotes au syndicat. De fait, après les licenciements, il y a eu une assemblée syndicale dans laquelle a été décidée la suspension du mouvement mis en marche en vue de réunions avec l’administration de l’entreprise et, au cours de ces réunions, un accord complet en ce qui concerne la négociation collective mise en œuvre a été trouvé, négociation qui a été menée précisément avec les dirigeants mêmes qui s’étaient plaints dans le présent cas; ceci a abouti à la signature d’un contrat collectif avec l’organisation syndicale le 26 novembre 2001.
- 288. Les licenciements sont dus à un «manquement grave aux obligations imposées par le contrat de travail» (art. 161, 7, du Code du travail) et, concrètement, les licenciés se sont rendus coupables de différents agissements qui constituent des anomalies en dehors des standards techniques propres à leurs fonctions et qui ont entraîné d’énormes préjudices pour l’entreprise et ses clients, tant au niveau opérationnel que de l’image de marque (ils ont détruit une année de travail), et économiques. Ils ont aussi gravement enfreint le règlement interne de l’entreprise.
- 289. La compagnie Lan Chile était au premier rang dans l’alliance One World pour ses vols internationaux et au deuxième pour les vols intérieurs. A présent, suite à la stratégie mise en place par un groupe de pilotes («opération escargot»), l’entreprise est passée au dernier rang de la statistique de ponctualité entre le 26 août 2001 et le 5 septembre 2001; les moyennes indiquent une chute de 82,2 pour cent à 39,3 pour cent sur les vols intérieurs et de 82,1 pour cent à 35,2 pour cent sur les vols internationaux. Les mécanismes utilisés ont été une série d’actions délibérées et concertées de retards injustifiés dans les vols, au point que la direction générale de l’Aéronautique civile a émis un jugement interdisant les retards injustifiés. Ces actions incluaient: plus de temps pour autoriser la fermeture de la porte de l’avion, plus de temps de «roulage» au sol dans les aéroports, tant au décollage qu’à l’atterrissage, une utilisation abusive des certificats médicaux, et des vols à une altitude plus basse que la normale, ainsi que des manœuvres clairement dilatoires. A partir des licenciements rendus par l’entreprise, les paramètres de ces thèmes sont revenus à la normale.
- 290. Les licenciés ont en outre transgressé les obligations contractuelles consistant en devoir de fidélité et de loyauté.
- 291. Jusqu’en février 2003, un tiers des 42 travailleurs (soit 12) qui ont intenté une action en justice contre l’entreprise pour licenciement abusif s’étaient désistés de leur plainte en parvenant à un accord total avec l’entreprise et en mettant fin au conflit qu’ils avaient avec elle.
- 292. Lan Chile nie absolument toute «pression» pour que les pilotes et techniciens renoncent au syndicat; le gouvernement n’a donné aucune précision sur ces pressions et il s’agit d’un mensonge total et absolu. Une grande partie des travailleurs est affiliée à des syndicats sans que pour autant ils aient des problèmes, et l’entreprise a avec eux une relation normale, la politique de l’entreprise étant le plein respect des droits syndicaux et du travail. Il est également totalement faux que l’entreprise ait fait pression sur les familles des pilotes pour qu’ils renoncent à leur affiliation. Cependant, de nombreux membres du syndicat de pilotes ont considéré l’«opération escargot» comme indue et disproportionnée, surtout si l’on tient compte du fait que cela coïncidait avec les lamentables événements du 11 septembre 2001, et ils ont librement opté pour un retrait du syndicat des pilotes sans aucune ingérence de l’entreprise. Personne n’a dénoncé auprès des tribunaux de telles pressions prétendument constatées par le gouvernement chilien, bien que la législation prévoie de graves sanctions lorsque des obstacles sont mis à l’affiliation à un syndicat.
- 293. L’affirmation du gouvernement selon laquelle il «a constaté» que l’entreprise a exclu de la formation de pilotage sur les avions de la compagnie les pilotes ou copilotes membres du syndicat plaignant est totalement fausse (ci-joint la documentation qui confirme que tous les pilotes ont pu suivre les cours réglementaires de perfectionnement et d’entraînement). A titre d’exemple, dans la période incriminée, trois membres du syndicat ont obtenu une promotion à la qualité de pilotes Airbus 320.
- 294. Il est faux que les licenciements aient sapé le pouvoir de négociation des travailleurs ou que ceux qui ont négocié l’aient fait de façon fragmentaire, leurs privilèges étant inférieurs à ceux dont ils jouissaient auparavant. Au contraire, bien que les pilotes aient négocié au milieu de la plus grande crise subie par l’aviation commerciale dans toute son histoire, et dans le contexte de la grave situation économique qui affectait un pays voisin – l’Argentine (ce qui a généré des pertes de 57 millions de dollars au quatrième trimestre 2001) –, les pilotes non seulement n’ont pas subi de perte de privilèges ou de rémunérations, mais en plus une augmentation selon la variation expérimentée par l’indice des prix à la consommation a été décidée ainsi qu’une augmentation réelle des rémunérations équivalant à 2 pour cent par période annuelle.
- 295. Selon le gouvernement, en négociant de façon séparée, trois groupes ont signé des instruments pour 62 mois, alors que le syndicat l’a fait pour 48 mois, ce qui fait que, dans la perspective d’une future négociation, les pilotes ne pourront pas renégocier ensemble par voie réglementée et dans une même période, et exercer un pouvoir de négociation en équilibre avec leur contrepartie. Dans la plainte et dans le rapport du gouvernement chilien, il est affirmé que les délais décidés pour chacun des contrats et des conventions collectives font en sorte que les pilotes ne pourront pas, dans la pratique, renégocier ensemble, par voie réglementaire et dans une même période, et exercer un pouvoir de négociation en équilibre avec leur interlocuteur. Cette affirmation est inexacte.
- 296. En premier lieu, Lan Chile informe que les différentes conventions et contrats collectifs ont été signés librement par les parties contractantes, en plein exercice de l’autonomie de leur volonté. Les représentants des pilotes et des copilotes ont établi eux-mêmes, en accord avec l’entreprise, les délais des différents instruments collectifs qui les unissent, qui garantissaient non seulement d’assurer leur niveau de salaires en vigueur pour des périodes de temps prolongées dans une situation de marché aéronautique très instable, mais encore de les augmenter en termes réels pendant toute cette période. Le délai ainsi décidé bénéficie clairement aux travailleurs dépendant de ces instruments, et impose une inflexibilité très importante à la compagnie, étant donné qu’elle ne peut tenter de diminuer le coût des rémunérations concernant ces instruments, vu qu’ils sont protégés par des normes légales qui empêchent la négociation individuelle du niveau de salaires établis en instruments collectifs.
- 297. En second lieu, il faut souligner que le contrat collectif signé par l’entreprise et l’organisation plaignante est daté du 26 novembre 2001, c’est-à-dire après les principales conventions collectives de travail dont les délais font l’objet d’objections maintenant.
- 298. Dans le cas de Lan Chile, les travailleurs occupant un poste de pilotes ou copilotes pourront toujours se réunir quand ils le jugeront nécessaire et négocier ensemble ou séparément à la date d’expiration du dernier des contrats ou conventions collectives, ou avant, si l’entreprise accepte une telle procédure. Donc, il n’y a pas d’empêchement absolu rendant impossible l’union en un seul projet de contrat collectif de tous les travailleurs occupant un poste de pilotes ou copilotes de Lan Chile s’ils le désirent.
- 299. Dans ce qui est mentionné, si le rapport du gouvernement pouvait bien laisser entendre, de son propre point de vue particulier, que les délais convenus dans les conventions et contrats collectifs portent préjudice aux pilotes et copilotes de Lan Chile, en réalité ce sont eux-mêmes qui ont opté pour des périodes telles qu’elles ont été décidées, et en le faisant ils ont estimé que cela était tout bénéfice pour eux.
- 300. En ce qui concerne une soi-disant campagne orchestrée par l’entreprise Lan Chile à l’encontre du syndicat plaignant, son comité exécutif ou ses membres, Lan Chile ne reconnaît pas l’existence d’un quelconque type de campagne orchestrée à l’encontre du syndicat, son comité exécutif ou ses membres, à laquelle se référerait l’accusation du syndicat, et ceci tant dans sa forme que dans son fond. De même, Lan Chile affirme catégoriquement ne pas avoir financé, ni directement ni indirectement, des avis, des publications, des études journalistiques ou d’autres formes de publicité qui auraient eu comme objectif de nuire ou porter préjudice à l’image des syndicats de la compagnie.
- 301. Qui plus est, les pilotes et copilotes sont l’image publique de l’entreprise auprès de ses clients et l’autorité suprême dans les avions de l’entreprise qui, en tant que compagnie, est intéressée à maintenir son prestige et sa bonne réputation, et non à renvoyer dans les médias quelque manifestation de doute que ce soit sur leur capacité professionnelle qui, selon l’entreprise, est d’une qualité et d’une rigueur exceptionnelles.
- 302. Lan Chile a montré qu’elle était fière de ses pilotes, de leur capacité professionnelle et de leur adresse, raison pour laquelle il serait tout simplement irrationnel de déclencher une campagne, à partir de la compagnie elle-même, visant à les discréditer, vu que ceci va directement causer préjudice à l’entreprise qui, puisqu’il s’agit d’aéronautique, doit, entre autres, garantir la compétence de ses pilotes et copilotes aux commandes de leurs différents avions.
- 303. Comme il est logique, tous les articles de presse n’ont pas été du goût des parties dont il est question, mais de là à soutenir que c’est l’entreprise qui a organisé et financé une campagne de ce genre il y a un grand pas. Lan Chile cite, coupures de presse à l’appui, une série de déclarations du secrétaire du syndicat de pilotes clairement critiques et préjudiciables pour l’entreprise et qui ne correspondaient pas à la réalité. Il est probable que de nombreuses déclarations ont pu ou dû être omises par les parties dans une atmosphère si tendue à cause de l’opération nommée «opération escargot», mais il n’est pas juste ni vrai de soutenir qu’il y a eu une «campagne de Lan Chile» visant à discréditer le Syndicat de pilotes et techniciens de Lan Chile.
- 304. Il est signalé dans le rapport du gouvernement que 40 des pilotes licenciés pour raisons disciplinaires ont été réembauchés par l’employeur à condition qu’ils écrivent une lettre par laquelle ils devaient reconnaître leur responsabilité dans les éventuels dommages que l’action aurait pu causer, et devaient en outre imputer cette soi-disant transgression à une mesure imposée par le syndicat. De plus, il est dit que les pilotes, dans leurs nouveaux contrats individuels, n’avaient pas récupéré les privilèges collectifs dont ils jouissaient antérieurement. En ce qui concerne ce thème, l’entreprise Lan Chile en a finalement réintégré 51 à Lan Chile, dans l’entreprise LanCargo (ex-Ladeco) et dans l’entreprise LanExpress. Les privilèges relatifs au travail et les rémunérations dont jouissent ces travailleurs sont identiques dans tous les cas à ceux qui reviennent au reste du corps de pilotes Lan Chile, il n’est donc pas exact et complètement faux qu’ils aient subi une discrimination en cette matière. Font exception à ce qui est dit antérieurement quatre cas de pilotes qui ont été embauchés de manière temporaire avec un contrat à durée déterminée et une rémunération variable.
- 305. D’autre part, en ce qui concerne une prétendue déclaration écrite sollicitée par l’entreprise, dans laquelle les travailleurs devaient, pour être réembauchés, «reconnaître leur responsabilité dans les éventuels dommages que l’action syndicale aurait pu causer, et devaient en outre imputer la soi-disant transgression à une mesure imposée par le syndicat», cela n’est pas vrai.
- 306. S’il est vrai que de nombreux pilotes et copilotes licenciés ont demandé leur réintégration par écrit à l’entreprise, le contenu et la teneur de la lettre ont été ce que chacun estimait pertinent et il n’y a eu aucune exigence de l’entreprise à ce sujet. Par ailleurs, on ne voit pas en quoi le fait de solliciter par écrit une réintégration dans l’entreprise pourrait affecter de quelque manière que ce soit la liberté syndicale ou les droits des travailleurs, puisque ces notes n’avaient d’autre but que de faciliter la réintégration dans la compagnie; de plus, ces lettres n’ont jamais été rendues publiques.
- 307. Dans le rapport, il est dit que l’entreprise Lan Chile a envoyé différentes menaces de licenciement à des pilotes de la compagnie. A ce sujet, Lan Chile nie l’existence de prétendues menaces de licenciement à ses travailleurs, menaces auxquelles se réfère l’accusation du syndicat plaignant. Elle ne connaît pas non plus les motifs de leur origine, ni même à qui elles auraient été adressées ou qui en particulier aurait menacé de licenciement un pilote de Lan Chile. Toute cette information n’a pas été fournie par le gouvernement qui dit avoir établi l’existence de menaces. Il faut signaler que dans la plainte il est paradoxalement dit en même temps que l’entreprise a «désespérément besoin de pilotes» ou qu’elle fait «des efforts pour s’assurer une main-d’œuvre suffisante pour la prochaine haute saison».
- 308. Si, comme l’affirme le plaignant, le nombre de membres du syndicat de pilotes est passé de 400 à 71, il faut souligner que les actions décidées par le comité exécutif du syndicat ont causé un grave mal-être et de l’inquiétude parmi de nombreux affiliés qui ont considéré ces mesures syndicales comme indues et disproportionnées surtout dans le contexte des événements du 11 septembre 2001. L’entreprise n’a pas poussé à quitter le syndicat. D’autre part, si le nombre des membres du comité exécutif du syndicat est passé de cinq à trois, cela est dû à une décision du syndicat.
- 309. Dans trois cas, les dirigeants syndicaux eux-mêmes ont demandé à être détachés de l’entreprise, disant que leur situation face aux autres membres était insoutenable et que leur représentativité était minime, c’est pourquoi ils ont préféré abandonner leurs charges syndicales.
- 310. Quant à la diminution du patrimoine du syndicat suite au fait qu’il perçoit moins de ressources en cotisations syndicales, l’entreprise n’a rien à voir.
C. Nouvelles informations reçues du gouvernement
C. Nouvelles informations reçues du gouvernement - 311. Dans sa communication du 12 janvier 2004, le gouvernement transmet les informations suivantes, communiquées par la société Lan Chile SA: 35 des 42 travailleurs qui avaient déposé plainte contre leur licenciement en septembre 2001 ont signé un protocole d’accord avec la société, aux termes duquel ils se désistent de leur demande; par conséquent seuls sept cas restent en suspens. Le document de retrait (dont le gouvernement joint copie) mentionne que «… la société Lan Chile en sa capacité d’employeur a maintenu une attitude appropriée, conforme à la loi et aux normes du travail, durant toute la relation d’emploi liant les parties…».
- 312. S’agissant des pratiques antisyndicales qu’aurait commises Lan Chile SA, le gouvernement ajoute que, le 29 septembre 2003, un ancien membre du syndicat a déposé plainte devant la 5e Chambre de la juridiction du travail compétente qui, après s’être renseignée auprès de la Direction régionale métropolitaine du travail, a décidé que cette dernière devrait être déclarée partie à l’instance, conformément à l’article 292 du Code du travail. A l’audience du 30 octobre 2003, la société a opposé la prescription prévue à l’article 480 du Code de procédure civile et plaidé litispendance, l’affaire étant déjà en suspens devant le tribunal en rapport avec les licenciements de pilotes.
- 313. En ce qui concerne les négociations menées individuellement par Lan Chile SA avec certains pilotes ou avec des petits groupes de pilotes afin de faire obstacle à la négociation collective, le gouvernement indique avoir fermement averti la société que les autorités du travail ne toléreraient pas la commission d’actes antisyndicaux et que les sanctions prévues à cet égard dans la loi seraient appliquées.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité - 314. Dans le présent cas, l’organisation plaignante avait fait principalement état d’une campagne mise en œuvre par l’entreprise Lan Chile SA à partir de 2001 pour la détruire, campagne qui s’est concrétisée par une série de pratiques illégales de discrimination antisyndicale, principalement suite aux négociations ayant pour but la conclusion d’une nouvelle convention collective. Ces pratiques incluaient, selon le plaignant, une campagne orchestrée contre le syndicat, le licenciement massif de pilotes syndiqués, des menaces de licenciement, des pressions sur les pilotes et leurs familles pour qu’ils renoncent à leur affiliation, des discriminations en matière de formation à l’encontre des membres du syndicat, l’engagement de pilotes licenciés dans des filiales à des conditions antisyndicales (ils devaient accepter une responsabilité individuelle pour l’action de la «grève du zèle», et affirmer par écrit que le syndicat leur avait ordonné de participer à cette action et accepter de ne pas être couverts par le contrat collectif mais par des contrats de travail individuels).
- 315. Le comité prend note des informations fournies par la Confédération de l’industrie et du commerce (CPC) selon lesquelles celle-ci présente le point de vue de Lan Chile et réfute les allégations de l’organisation plaignante pour la violation des droits syndicaux et les déclarations du gouvernement dans lesquelles des pratiques antisyndicales sont imputées à Lan Chile. Selon l’entreprise, avant la négociation collective, le syndicat plaignant avait mis en œuvre une série d’actions délibérées et concertées des pilotes pour porter préjudice à l’entreprise. Les informations de la CPC pointent une combinaison entre grève du zèle ou opération escargot et des retards délibérés dans les vols, des certificats médicaux en trop grand nombre et des mesures pour augmenter les coûts (voler à des altitudes plus basses que celles recommandées) qui ont causé des préjudices économiques, nui à l’image de l’entreprise et causé du tort aux clients en même temps qu’ils perturbaient le contrôle du trafic aérien selon l’entreprise; c’est pour mettre fin à cette situation que l’entreprise a procédé aux licenciements. Selon la CPC, une nouvelle convention collective a été signée le 26 novembre 2001 et seuls 30 des pilotes licenciés poursuivaient un procès contre l’entreprise pour leur licenciement en septembre et octobre 2001. Le comité souligne la contradiction existant entre le point de vue de l’entreprise Lan Chile et celui du gouvernement en ce qui concerne l’existence de pratiques antisyndicales, mais observe que, selon le gouvernement, un ancien membre du syndicat a déposé en septembre 2003 une plainte de pratiques antisyndicales auprès de la juridiction compétente, qui a décidé que la Direction régionale métropolitaine du travail devrait être déclarée partie à l’instance. Le comité note également que 35 des 42 travailleurs qui avaient présenté un recours contre leur licenciement se sont désistés de leur demande, déclarant que la société avait maintenu durant toute la période visée une attitude appropriée, conforme à la loi et aux normes du travail, et que seuls sept cas restent en suspens.
- 316. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de lui communiquer le jugement prononcé au sujet du licenciement des sept pilotes et de le tenir informé des résultats de la plainte de pratiques déloyales du travail intentée par un ancien membre du syndicat.
- 317. Indépendamment du jugement qui sera rendu sur les pratiques antisyndicales alléguées, le comité souligne que, dans le présent cas, le nombre initial de licenciements était de 108 pilotes syndiqués, même si par la suite l’entreprise en a réintégré un nombre important et est parvenue à un accord avec d’autres, de sorte qu’il reste actuellement seulement sept cas de licenciement en instance devant les tribunaux.
- 318. Le comité note enfin, en ce qui concerne les négociations menées individuellement par Lan Chile SA avec certains pilotes ou avec des petits groupes de pilotes afin de faire obstacle à la négociation collective, que le gouvernement indique avoir fermement averti la société que les autorités du travail ne toléreraient pas la commission d’actes antisyndicaux et que les sanctions prévues à cet égard dans la loi seraient appliquées. Le comité rappelle que des mesures devraient être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 781.]
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 319. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
- Le comité demande au gouvernement de lui communiquer le jugement prononcé au sujet du licenciement des sept pilotes et de le tenir informé du résultat des poursuites judiciaires pour pratiques antisyndicales intentées contre la société Lan Chile par un ancien membre du syndicat.