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- 342. Les plaintes faisant l'objet du présent cas figurent dans une communication de l'Organisation démocratique syndicale des travailleurs africains (ODSTA) en date du 10 septembre 1999.
- 343. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 2 mars 2000.
- 344. Le Maroc a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; il n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante- 345. Dans sa communication du 10 septembre 1999, l'ODSTA allègue, d'une part, que la Société nationale de transports aériens Royal Air Maroc (RAM) s'est rendue coupable d'actes systématiques de discrimination et de marginalisation à l'encontre des travailleurs membres du Syndicat des travailleurs du transport aérien (STTA) affilié à l'Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM) et, d'autre part, que les travailleurs de la Compagnie de transport urbain de Casablanca (SALAMA) ont été victimes de plusieurs actes de violation de la liberté syndicale: licenciements, arrestations, emprisonnement.
- 346. S'agissant de la situation au sein de la compagnie Royal Air Maroc, l'ODSTA indique que, suite à sa constitution le 30 octobre 1997, le STTA a formulé le 13 novembre 1997 une demande d'audience au président directeur général de la société pour la présentation du nouveau bureau syndical. N'obtenant pas de réponse, le STTA a présenté des demandes semblables le 25 février 1998 au directeur des ressources humaines et au directeur du "Pôle clients sol", toujours sans résultat. Dans le même temps, la direction a cautionné des associations de travailleurs qui jouent le rôle dévolu aux organisations syndicales; il existe à la RAM quatre associations (représentant le personnel navigant commercial, le personnel navigant technique, les techniciens aéronautiques, et les cadres) affiliées à l'Union marocaine du travail (UMT) et à la Confédération démocratique du travail (CDT), qui sont les interlocuteurs privilégiés de la direction dans les négociations, dont l'UGTM est totalement exclue.
- 347. Dès sa création, le STTA a demandé à la direction de prélever les cotisations syndicales à la source pour ses membres, avec leur accord préalable, comme c'est le cas pour les membres des autres centrales syndicales. La direction n'a pas répondu et les travailleurs concernés ne bénéficient toujours pas de la retenue à la source des cotisations, qui constituent la principale, voire la seule, ressource des organisations syndicales. Selon l'organisation plaignante, en refusant d'effectuer ces prélèvements comme elle le fait pour les autres syndicats, la direction exerce une discrimination, empêche le STTA de mener à bien ses activités et instaure un climat peu propice à des relations professionnelles harmonieuses.
- 348. Par ailleurs, en vue de la fête du 1er mai 1998, le STTA a demandé à la direction d'autoriser les membres de son bureau syndical à s'absenter du 27 avril au 5 mai pour les préparatifs des festivités, et de mettre un moyen de transport à sa disposition. Selon le plaignant, il s'agit d'une pratique bien établie et ces facilités ont d'ailleurs été accordées cette année-là aux membres de l'UMT et de la CDT.
- 349. Quant à la société SALAMA, après que les travailleurs de cette entreprise eurent adhéré à l'UGTM le 24 mai 1998, la direction a licencié 35 travailleurs, y compris les membres du bureau syndical, ce qui a déclenché une grève de protestation le 28 mai 1998. La direction ayant engagé d'autres personnes pour remplir les fonctions des grévistes, cela a provoqué une grève illimitée à partir du 24 février 1999. La direction a engagé des poursuites pénales contre les responsables syndicaux El Khatib El Maati, Boulouz Lahcen et Hanoun Mahjouba, qui ont été condamnés à six mois de prison ferme et 500 dirhams d'amende par le tribunal de première instance d'Aïn Sba.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 350. Dans sa communication du 2 mars, le gouvernement indique qu'il fera parvenir au comité toutes les informations relatives au conflit collectif au sein de la Royal Air Maroc dès qu'il les aura reçues.
- 351. En ce qui concerne les événements survenus en rapport avec la société SALAMA, le gouvernement déclare que, suite aux licenciements de mai 1998, les employés affiliés à l'UGTM ont entrepris des mouvements de protestation, dont le dernier remonte au 17 février 1999, accompagnés d'occupations des lieux de travail et de la séquestration de bus pour empêcher les non-grévistes d'exercer leur droit au travail. La direction a donc saisi le juge des référés pour obtenir l'évacuation des lieux et lever la séquestration des bus; le tribunal a rendu une décision judiciaire en ce sens et certains employés qui ont refusé à plusieurs reprises d'y obtempérer ont été poursuivis pour désobéissance et obstruction de justice.
- 352. Dans le but de résoudre le litige, plusieurs rencontres se sont tenues entre les parties, en présence des autorités compétentes: inspection du travail de Casablanca, Commission régionale d'investigation et de conciliation, Administration centrale et Direction du travail du ministère. Ces différentes démarches ont abouti à la tenue, le 22 mai 1999, d'une réunion de conciliation au siège de la Délégation de l'emploi de Casablanca, à laquelle ont pris part toutes les parties, qui ont accepté un arrangement, consigné par procès-verbal, et prévoyant ce qui suit:
- -- réembaucher graduellement, dans un délai maximum de quatre mois, tous les salariés y compris les grévistes, en leur permettant de bénéficier de leur salaire correspondant à la période de grève;
- -- maintenir en vigueur tous les contrats de travail, ainsi que les droits et avantages acquis en découlant, conformément à l'article 754 du Code des obligations et contrats;
- -- mettre fin à la grève à la date de signature du procès-verbal.
- 353. Selon le gouvernement, les activités ont repris dans un climat social normal à la SALAMA, une fois tous les employés réintégrés en application de cet accord.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 354. Le comité note que la présente plainte concerne deux situations distinctes, bien que concernant la même organisation faîtière syndicale. En ce qui concerne les diverses allégations de discrimination et d'inégalité de traitement des organisations syndicales au sein de la compagnie aérienne nationale, le comité prend note des indications fournies par le gouvernement. Etant donné que la constitution du STTA remonte à octobre 1997 et que les activités légitimes de ce syndicat risquent d'être compromises par le simple écoulement du temps, le comité invite le gouvernement à inciter Royal Air Maroc à fournir rapidement toutes les informations pertinentes, et à les lui transmettre dès qu'il les aura reçues.
- 355. S'agissant des événements au sein de la société SALAMA, tout en prenant note qu'un règlement extrajudiciaire est ultimement intervenu entre les parties avec l'aide des services de conciliation du ministère compétent, le comité ne peut que constater, sur la base des quelques éléments dont il dispose, la concomitance de la constitution du syndicat affilié à l'UGTM et les licenciements de travailleurs et de membres du bureau syndical. Le comité rappelle que nul ne doit être licencié ou faire l'objet d'autres mesures préjudiciables en matière d'emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 696.) Notant par ailleurs que la plainte date de septembre 1999, alors que les réintégrations de travailleurs de la SALAMA étaient censées intervenir au plus tard quatre mois après l'accord du 22 mai 1999, le comité demande à l'organisation plaignante de confirmer que les modalités du protocole de règlement ont effectivement été observées.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 356. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Prenant note qu'un règlement extrajudiciaire est intervenu entre les parties dans la Compagnie des transports urbains de Casablanca, le comité rappelle que nul ne doit être licencié ou faire l'objet d'autres mesures préjudiciables en matière d'emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, et demande à l'organisation plaignante de confirmer que les modalités dudit règlement ont effectivement été observées.
- b) Le comité invite le gouvernement à inciter Royal Air Maroc à fournir rapidement toutes les informations pertinentes concernant le différend collectif mettant en cause l'UGTM, et à les lui transmettre dès qu'il les aura reçues.