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Interim Report - Report No 323, November 2000

Case No 1888 (Ethiopia) - Complaint date: 06-JUN-96 - Closed

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176. Le comité a examiné antérieurement ce cas quant au fond à ses réunions de novembre 1997, juin 1998, juin 1999 et mai-juin 2000, où il a chaque fois présenté au Conseil d'administration un rapport intérimaire. (Voir 308e rapport, paragr. 327-347; 310e rapport, paragr. 368-392; 316e rapport, paragr. 465-504; 321e rapport, paragr. 220-236.)

  1. 176. Le comité a examiné antérieurement ce cas quant au fond à ses réunions de novembre 1997, juin 1998, juin 1999 et mai-juin 2000, où il a chaque fois présenté au Conseil d'administration un rapport intérimaire. (Voir 308e rapport, paragr. 327-347; 310e rapport, paragr. 368-392; 316e rapport, paragr. 465-504; 321e rapport, paragr. 220-236.)
  2. 177. Le gouvernement a fourni des informations dans une communication en date du 16 mai 2000, dont le comité n'a pu tenir compte à sa session de juin en raison de sa réception tardive, et un complément d'informations dans une communication en date du 24 octobre 2000.
  3. 178. L'Ethiopie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 179. Lors des examens antérieurs de ce cas, le comité s'est penché sur de très graves allégations de violations de la liberté syndicale, notamment le refus du gouvernement de continuer à reconnaître l'Association des enseignants éthiopiens (ETA), le gel des avoirs de cette organisation ainsi que le meurtre, l'arrestation, la détention, le harcèlement, le licenciement et la mutation de membres et responsables de l'ETA. Le comité a exprimé à plusieurs occasions sa profonde préoccupation quant à l'extrême gravité de ce cas et a instamment prié le gouvernement de coopérer en fournissant une réponse détaillée à toutes les questions qu'il avait posées.
  2. 180. Lors de sa session de juin 2000, au vu des conclusions intérimaires du comité, le Conseil d'administration a approuvé les recommandations suivantes:
  3. a) Notant avec une profonde préoccupation que le Dr Taye Woldesmiate n'a pas bénéficié d'une procédure judiciaire régulière, le comité invite le gouvernement à lui communiquer sans délai le texte du jugement prononcé contre lui, y compris les raisons précises pour lesquelles il a été jugé, de même que les preuves sur lesquelles il a été condamné, d'indiquer si un appel a été interjeté et de le tenir informé de l'évolution de la situation, notamment de toutes mesures prises pour libérer le Dr Taye Woldesmiate.
  4. b) Le comité demande donc à nouveau instamment au gouvernement de fournir des informations précises sur toutes les allégations en instance. Ces informations devraient couvrir les points suivants:
  5. i) des informations sur tout appel qui serait éventuellement interjeté en ce qui concerne la direction de l'ETA, à lui faire parvenir tout jugement ou décision rendu à cet égard; à fournir toute autre information concernant le rôle qu'il a joué à l'égard de l'ETA avant que le tribunal ne rende sa décision en 1994;
  6. ii) des informations quant à sa participation au gel des avoirs de l'ETA avant que le tribunal ne rende sa décision en juin 1998, et en ce qui concerne le délai qui sépare la date de la décision relative au dégel du compte bancaire de l'ETA et celle de la communication de cette décision à la banque pertinente; à fournir des informations concernant l'allégation selon laquelle le gouvernement a informé les locataires du bâtiment de l'ETA qu'ils devaient désormais verser le montant de leur loyer au gouvernement;
  7. iii) des réponses aux allégations spécifiques concernant l'occupation et la mise sous scellés des locaux de l'ETA, ainsi que la fermeture par les forces de sécurité d'un atelier ETA/EI;
  8. iv) en ce qui concerne le harcèlement à l'encontre des dirigeants et des membres de l'ETA et leur détention, des informations précises concernant toues les personnes figurant dans la liste à l'annexe 2, ainsi que Abate Angore, Awoke Mulugeta et Shimalis Zewdie, en particulier les dates de leur arrestation, le lieu et les motifs de leur détention, le cas échéant, les chefs d'inculpation retenus contre eux, les conditions de leur détention et les procédures juridiques qui ont été appliquées, ainsi que toute décision ou tout jugement qui en découlerait.
  9. c) Le comité demande à nouveau instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que tous les dirigeants et membres de l'ETA qui seront détenus ou inculpés seront libérés et que tous les chefs d'inculpation seront abandonnés, et de garantir qu'à l'avenir les travailleurs ne seront pas victimes de harcèlement ou ne seront pas arrêtés à cause de leur appartenance à un syndicat ou de leurs activités syndicales.
  10. d) Concernant les licenciements des dirigeants et membres de l'ETA (voir annexe 1), le comité une fois encore prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que ceux qui ont été licenciés soient réintégrés dans leur emploi, s'ils le désirent, et que leur soient versées des compensations pour perte de salaire et d'indemnités, et prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  11. e) Déplorant qu'en dépit de la nature extrêmement grave de l'allégation le gouvernement a clairement indiqué qu'il n'a aucune intention de diligenter une enquête judiciaire indépendante sur le meurtre de M. Assefa Maru, le comité une fois encore prie instamment le gouvernement d'ouvrir une telle enquête immédiatement, afin d'établir les faits, de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables, le cas échéant. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l'ouverture et de l'issue de l'enquête.
  12. f) Le comité demande une fois encore au gouvernement d'entreprendre des consultations avec l'ETA sur l'introduction unilatérale d'un système d'évaluation pour les enseignants afin de s'assurer que ce système ne servira pas de prétexte à une discrimination antisyndicale, et de l'informer des progrès réalisés en la matière.
  13. g) Le comité prie à nouveau le gouvernement de répondre à l'allégation selon laquelle il aurait répondu négativement aux tentatives de l'ETA d'établir avec lui une relation de travail constructive.
  14. B. Nouvelles observations du gouvernement
  15. 181. Dans sa communication du 16 mai 2000, le gouvernement explique le contexte historique de la syndicalisation des enseignants en Ethiopie, depuis la fondation du Syndicat des enseignants en 1949, puis de l'Association des enseignants éthiopiens (ETA) en 1964, qui a obtenu sa reconnaissance légale (enregistrement no 25) le 20 décembre 1968 pour une période indéterminée et fonctionnait en tant que telle au niveau national. A la suite du renversement du gouvernement Derg et afin de réorganiser l'association, un nouveau comité de coordination de l'ETA regroupant tous les enseignants résidant à Addis-Abeba et dans les environs a été créé. En février 1993, le Dr Taye Woldesmiate a été élu chef du comité exécutif de l'ETA. Au cours de cette période, l'appareil gouvernemental a été restructuré en fonction des schémas d'établissement des nationalités, réforme à laquelle quelques membres, mais pas la totalité, du comité exécutif de l'ETA se sont opposés. De ce fait, les relations au sein de l'association, d'une part, et entre l'association et le gouvernement, d'autre part, ont commencé à se dégrader, des divergences apparaissant tant sur les droits et avantages des enseignants que sur les orientations politiques. Ces différences qui n'ont cessé de s'accentuer entre les "libéraux" (c'est-à-dire, pour simplifier, les enseignants et leurs représentants qui résident et travaillent en région et qui ont approuvé la nouvelle structure adoptée par le gouvernement) et ceux qu'il est convenu d'appeler les "conservateurs" (c'est-à-dire, pour simplifier, le comité exécutif conduit par le Dr Woldesmiate). Ce sont ces différences qui sont à l'origine des conflits entre les factions rivales, conduisant finalement à l'institution de procédures judiciaires.
  16. 182. Dans ce contexte général, les "libéraux" se sont organisés dans chaque région en comités spéciaux régionaux et ont élu, en juin 1993, un nouveau comité exécutif. Ce nouveau comité exécutif a été enregistré et légalement reconnu en tant que nouvelle Association des enseignants éthiopiens par le ministère de l'Intérieur qui a, de ce fait, révoqué l'enregistrement antérieur, considérant que l'association avait été dissoute et remplacée par une nouvelle. Le tribunal saisi de l'affaire a décidé en décembre 1994 que le règlement de ce problème incombait à l'assemblée générale de l'association, ainsi que le prévoyaient ses statuts. Sur cette base, les "libéraux" ont élu un nouveau comité exécutif (sous la direction de M. Ato Yeshivwas Admassu) lors d'une assemblée générale en octobre 1995, à la suite de quoi le nouveau comité exécutif s'est adressé au tribunal fédéral pour obtenir le transfert des biens et des avoirs du syndicat.
  17. 183. A la suite d'une série de décisions de justice sur la question du transfert des biens et des avoirs (les diverses procédures judiciaires avaient été initiées en 1993), le tribunal fédéral a ordonné à la Commercial Bank of Ethiopia, en août 1997, de transférer les avoirs bancaires au nouveau comité exécutif en tant que seul organe légalement reconnu, ordre auquel la banque a obtempéré. Les deux comités exécutifs ayant interjeté appel respectivement en août 1997 et mai 1998 contre la décision du tribunal fédéral, cette affaire, qui met en cause des aspects factuels et juridiques complexes (exposés de manière assez détaillée dans les réponses du gouvernement) est toujours en instance devant la Haute Cour fédérale. Il est donc erroné de conclure, comme l'a fait le Comité de la liberté syndicale, que le compte bancaire a été transféré au profit du nouveau comité exécutif sur les instructions du gouvernement.
  18. 184. S'agissant des enseignants prétendument licenciés de l'Université d'Abbis-Abeba, le gouvernement indique que l'université a été restructurée en application du Règlement ministériel no 113/85 et qu'un nouveau conseil universitaire a été nommé. Le conseil a adopté quelques mesures: il a notamment nommé le recteur et le vice-recteur de l'université, institué l'obligation pour le personnel universitaire de signer un contrat d'emploi, renouvelable tous les deux ans. De ce fait:
  19. - les contrats de 40 enseignants n'ont pas été renouvelés;
  20. - les contrats de huit autres enseignants ayant atteint l'âge de la retraite ont été renouvelés pour diverses périodes, puis ils ont été mis à la retraite, avec effet au 9 avril 1993. Sont concernées les personnes suivantes: MM. Worku Tefera Damtew, Tadesse Beyene Hiwot, Sheferaw Agonafir Zerfu, Asrat Woldeyes Altaye, Seifu Metaferia Firew, Taye Mekuria Betamno, Asfaw Desta Mersha, Hailu Araia Woldegebriel);
  21. - un autre groupe de 32 enseignants a engagé des poursuites contre l'université pour licenciement illégal, demandant une réintégration dans leur emploi, une indemnisation, ou les deux. Le tribunal de la Région 14 a rejeté les demandes de réintégration mais a accordé les compensations demandées, soit neuf mois de salaire à chaque plaignant. Cette décision a été confirmée par le tribunal fédéral de première instance le 8 janvier 1997 et mise en oeuvre. Les personnes concernées sont MM. Ayenew Edjigu, Ayele Tirfe, Mekonnen Bishaw, Messay Kebede, Taye Assefa, Alemeyehu Haile, Befekadu Degfe, Mekonnen Delgassa, Sebhat Mersetsehazen, Admassu Gebeyehu, Taye Wolde Semayat, Tsehay Berhaneselassie, Tesfaye Shewaye, Mukuria Mamo, Aklilu Tadesse, Fekadu Shewakena, Berhanu Bankashe, Hulunante Abatye, Lelaem Berhane, Ayele Tarekegne, Mindaralew Zewde, Fisseha Zewide, Aynalem Ashebir. L'université a indiqué que la question de l'appartenance à l'ETA n'a jamais été soulevée durant la procédure. Le gouvernement soutient donc que les informations figurant dans les annexes I et II de la décision précédente du comité sont infondées.
  22. 185. En ce qui concerne les autres enseignants prétendument licenciés en raison de leur appartenance à l'ETA, le gouvernement affirme que les informations présentées à cet égard par le Comité de la liberté syndicale ne sont pas fondées, d'autant que certains des enseignants concernés sont toujours en activité, certains ont été mis à la retraite et d'autres sont décédés, ainsi que le montre la liste ci-dessous:
  23. ================================================================= Nom Zone du domicile Situation actuelle habituel ================================================================= 1. Ato Muligetta E/Shewa Nazareth Mis à la retraite W/Kirkos
  24. 2. Ato Alula Abegaz E/Shewa Nazareth Décédé
  25. 3. Ato Solomon Addis-Abeba Travaille à la Wondwossen Commercial Bank, où il a été muté
  26. 4. Ato Befekadu Firde Addis-Abeba Mis à la retraite; décédé; sa famille a bénéficié de la mutuelle de l'association
  27. 5. Ato Mohammed Seid Nazareth Enseigne toujours
  28. 6. Ato Bekele Bale Goba Enseigne au lycée Mengistu polyvalent de Batu Mountain
  29. 7. Ato Thomas Egzi Jimma Occupe le poste de directeur du Département culturel de la zone de Bench Maji
  30. 8. Ato Solomon Girma Jimma Enseigne au lycée polyvalent d'Agaro
  31. 9. Genene H/Selassie Asosa Enseigne au lycée polyvalent d'Assela
  32. 10. Ato Moges Tadesse Asela Enseigne au lycée polyvalent d'Assela
  33. 11. Ato Mohammed Asela Enseigne au lycée Hussein polyvalent d'Assela
  34. 12. Ato Ashenafi Asela Travaille dans Legebo l'administration nationale des populations de la région du Sud, où il a été muté
  35. 13. Ato Endalkachew Dessie Travaille dans une Molla maison de commerce privée d'Addis-Abeba
  36. 14. Ato Melese Taye Goba A travaillé à Nazareth, où il avait été muté, puis mis à la retraite
  37. 15. Ato Demeke Seifu Asebe Teferi Enseigne au lycée d'Asebe Teferi
  38. 16. Ato Womdimu Asebe Teferi Enseigne dans la région Bekele d'Amhara, où il a été muté
  39. 17. Ato Solomon Asebe Teferi Travaille à Dire Dawa, Tesfaye où il a été muté
  40. 18. Ato Zewdu Teshome Asebe Teferi Toujours en activité
  41. 19. Ato Girma Tolossa Asebe Teferi Travaille à la municipalité de Meisso
  42. 20. Ato Tesfaye Daba Ambo Toujours en activité
  43. 21. Ato Workneh Dinsa Nekempte Toujours en activité
  44. 22. Ato Duana Kefege Ambo Mis à la retraite. Travaille actuellement au village des enfants d'Abebech Gobena
  45. 23. Ato Woldeyesus Ambo Mis à la retraite. Mengesh Travaille actuellement au village des enfants d'Abebech Gobena
  46. 24. Ato Tamrat Daba Ambo Travaille au lycée d'Addis-Alem
  47. 25. Ato Fata Sori Ambo Toujours en activité
  48. 26. Ato Legesse Ambo Toujours en activité Lechisa
  49. 27. Ato Admassu Bale/Robi Mis à la retraite W/Yesus
  50. 28. Ato Mohammed Umer Dessie A quitté son travail de plein gré
  51. 29. Ato Solomon Dessie Toujours en activité H/Selassie
  52. 30. Ato Mekonnen Dawud Dessie Travaille toujours au lycée de Hote
  53. 31. Ato Sisay Mitiku Dessie Directeur du collège d'enseignement secondaire de Kombolcha
  54. 32. Ato Shuke Jimma Enseigne encore au Desalegn lycée polyvalent de Jimma =================================================================
  55. 186. S'agissant de l'introduction du nouveau système d'évaluation, le gouvernement fait valoir que l'ancien système s'est avéré être, avec les méthodes de recrutement, la formation, le déploiement et la gestion du corps enseignant, l'une des principales causes du faible niveau de l'éducation en Ethiopie. Ce nouveau système d'évaluation pour les enseignants est fondé sur les critères suivants: aptitude à l'enseignement et qualifications requises; aptitude à évaluer et à élaborer un programme d'étude; aptitude à suivre et à former la personnalité des élèves; relations de travail et esprit de coopération manifesté à l'école, avec les parents et la communauté; efforts entrepris pour relever leur niveau de qualification, faire partager leur expérience à d'autres et apprendre de ceux-ci; avoir la vocation d'enseignant, participation aux activités visant le développement des principes démocratiques. Les enseignants participent à un système d'évaluation mutuelle avec les étudiants, les parents et la communauté, cette procédure présentant l'avantage de la transparence. Le fait d'appartenir à l'ETA n'est pas pris en compte dans l'évaluation. Les commentaires formulés à cet égard par le Comité de la liberté syndicale ne sont donc pas vraiment fondés.
  56. 187. S'agissant du refus allégué d'établir une relation de travail constructive avec l'ETA, le gouvernement déclare qu'il n'avait d'autre choix que d'accepter la décision de l'assemblée générale de l'ETA, qui a élu un nouveau comité exécutif, le seul organe représentatif légitime de l'ETA, avec lequel il a de fait établi une relation constructive.
  57. 188. En ce qui concerne le harcèlement et la détention des dirigeants et membres de l'ETA, le gouvernement indique que l'incident mettant en cause MM. Abate Angore, Awoke Mullugeta et Shimalis Zewdie s'est produit en septembre 1998, lorsque la haute Cour Fédérale a ordonné la mise sous séquestre de l'immeuble et des autres biens de l'ETA. Ces personnes ayant refusé de coopérer, la police a demandé au tribunal de lancer contre eux un mandat d'arrêt pour entrave à l'exécution d'une ordonnance judiciaire et outrage à magistrat. ils ont été arrêtés et détenus durant un mois, non pas en raison de leur appartenance à l'ETA, mais pour avoir fait obstruction à l'exécution d'un jugement.
  58. 189. En ce qui concerne le Dr Taye Woldesmiate, le gouvernement fait savoir que ce dernier et ses cinq co-inculpés ont été reconnus coupables par le tribunal fédéral de conspiration tendant à renverser le gouvernement, sur la base des faits suivants: création du Front patriotique national éthiopien; élaboration de projets à court et à long terme de renversement du gouvernement; établissement de listes de personnes (hauts fonctionnaires) et d'organisations (institutions économiques, militaires, de sécurité et de police) qu'ils considéraient comme des cibles; recrutement de personnes ayant reçu une formation militaire; achat d'armes. Les preuves à charge sont des dépositions de témoins, des documents, des pièces à conviction et des informations techniques, et les inculpés ont été reconnus coupables conformément au Code de procédure pénale (une copie du jugement est jointe à la communication du 24 octobre 2000) et condamnés comme suit:
  59. - Dr Taye Woldesmiate: quinze ans de réclusion en régime sévère (il n'a pas interjeté appel dans les délais prescrits et purge actuellement sa peine),
  60. - M. Ato Tsadik Mariam: treize ans de réclusion en régime sévère,
  61. - Lieutenant Chane Tale: dix ans de réclusion en régime sévère,
  62. - M. Talegeta Leul (Dagne) Mariam: huit ans de réclusion en régime sévère,
  63. - Capitaine Moges Assefa: huit ans de réclusion en régime sévère.
  64. Le sixième accusé, M. Ato kebede Desta, est décédé entre-temps.
  65. 190. Le gouvernement indique qu'il n'a pas le droit de s'ingérer dans la procédure et les décisions judiciaires. Il déclare en outre que les recommandations faites à cet égard par le Comité de la liberté syndicale, notamment la libération de personnes comme le Dr Taye, qui s'est livré à des activités terroristes, portant gravement atteinte à la sécurité du pays et de ses citoyens, ne sont acceptables ni du point de vue du droit ni du point de vue de la morale. Cette position du comité ternit assurément son action.
  66. 191. A la communication du 24 octobre est joint un document contenant les observations connexes du gouvernement sur les recommandations et commentaires faits en juin 2000 par la Commission de la Conférence sur l'application des normes. Le gouvernement y indique en substance que, compte tenu de l'évolution résultant de la globalisation, le besoin s'est fait sentir dans le pays de réviser les lois et règlements, y compris la Proclamation du Travail no42/93, afin qu'elle reflète plus adéquatement l'évolution récente. Après discussions tripartites, de nombreux amendements ont donc été présentés au Conseil des Ministres, qui a toutefois opté pour une refonte complète de la législation. En conséquence, le ministère organise actuellement un atelier tripartite, avec la participation du bureau du BIT à Addis-Abeba, pour procéder à un examen approfondi de toutes les questions en suspens, y compris les recommandations de la Commission de la Conférence, par exemple sur le droit de syndicalisation des fonctionnaires.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 192. Le comité rappelle une fois de plus que ce cas concerne de très graves allégations relatives à la liberté syndicale, en particulier l'ingérence du gouvernement dans l'administration interne de l'ETA, le meurtre de syndicalistes, l'arrestation, la détention, le harcèlement, le licenciement et la mutation de membres et de responsables de l'ETA. Le comité souligne également que ces faits sont survenus dans un contexte d'âpre rivalité intersyndicale, ce qui a compliqué la situation et incontestablement exacerbé les tensions, dont l'un des effets aura été que de nombreuses procédures judiciaires ont été engagées par les deux comités exécutifs, chacun prétendant être l'organisation véritablement représentative des enseignants éthiopiens. En pareille situation, le comité a toujours rappelé l'importance qu'il attache à la Résolution de 1952 concernant l'indépendance du mouvement syndical, a prié instamment le gouvernement de s'abstenir de tout favoritisme ou de toute discrimination à l'égard de tout syndicat, et leur a demandé d'adopter une attitude neutre dans ses tractations avec ces organisations, qui doivent toutes être placées sur un pied d'égalité. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 305.)
    • Procès et condamnation du Dr Woldesmiate et de ses co-inculpés
  2. 193. Le comité exprime à nouveau sa profonde préoccupation devant le fait que le Dr Woldesmiate et ses co-inculpés ont été reconnus coupables de conspiration tendant à renverser le gouvernement et frappés de peines extrêmement lourdes, comprises entre huit et quinze ans de "réclusion en régime sévère". Le comité rappelle à nouveau que, si des personnes menant des activités syndicales ou exerçant des fonctions syndicales ne peuvent prétendre à l'immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire, les activités syndicales ne devraient pas en elles-mêmes servir de prétexte aux pouvoirs publics pour arrêter ou détenir arbitrairement des syndicalistes. De plus, les syndicalistes détenus doivent, à l'instar des autres personnes, bénéficier d'une procédure judiciaire régulière et avoir le droit à une bonne administration de la justice, à savoir notamment être informés des accusations qui pèsent contre eux, disposer du temps nécessaire à la préparation de leur défense, communiquer sans entrave avec le conseil de leur choix et être jugés sans retard par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 102.) Tout en notant le jugement de la Haute Cour fédérale, et l'explication du gouvernement selon laquelle les inculpés ont été reconnus coupables conformément au Code de procédure pénale, le comité considère, compte tenu de tous les éléments disponibles, que des doutes sérieux subsistent quant à la régularité du procès et des poursuites qui l'ont précédé, irrégularités sur lesquelles la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail s'est de nouveau penchée à sa réunion de juin 2000; le comité note à cet égard l'allégation non réfutée, formulée lors de ce débat, à savoir qu'un juge éthiopien qui avait remis en cause l'indépendance du système judiciaire a été destitué.
    • Transfert des biens et avoirs
  3. 194. Le comité note les informations fournies par le gouvernement à ce sujet, et plus particulièrement le fait que plusieurs procédures ont été instituées par les deux comités exécutifs concernant la propriété desdits avoirs, dans un contexte qui présente des aspects juridiques et factuels nombreux et complexes. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation et de lui communiquer le texte du jugement définitif de la Haute Cour fédérale dès qu'il aura été prononcé.
    • Introduction du système d'évaluation
  4. 195. Le comité prend note des réponses du gouvernement à sa précédente requête sur le sujet. Tout en notant les explications fournies sur les raisons justifiant l'introduction d'un nouveau système d'évaluation et sur la décision du gouvernement d'établir une relation de travail avec le nouveau comité exécutif de l'ETA, le comité invite instamment le gouvernement à faire en sorte que l'introduction du système d'évaluation pour les enseignants ne servira pas de prétexte à la discrimination antisyndicale, et à l'informer des progrès réalisés en la matière.
    • Mesures (licenciements et détentions) prises à l'encontre de membres de l'ETA
  5. 196. Le comité prend note des informations partielles fournies à cet égard, y compris la déclaration du gouvernement selon laquelle les informations figurant à l'annexe I (membres de l'ETA prétendument licenciés) et à l'annexe II (membres de l'ETA prétendument détenus en raison de leur participation active aux activités de cette organisation) sur laquelle se fondait sa décision antérieure sont erronées. Le comité, tout en réitérant ses précédentes conclusions et recommandations sur ces aspects du cas - à savoir réintégrer dans leur emploi, s'ils le désirent, les travailleurs et responsables syndicaux licenciés et s'assurer que tous les membres de l'ETA qui sont détenus ou inculpés seront libérés et que tous les chefs d'inculpation seront abandonnés - est conscient que la mise en oeuvre de ses conclusions et recommandations est de nature à poser de sérieuses difficultés dans la mesure où il y a des contradictions entre les informations fournies par les organisations plaignantes et celles du gouvernement en ce qui concerne aussi bien les noms que la situation actuelle des membres de l'ETA. Cela tient peut-être en partie au fait que la plupart des événements remontent à longtemps mais, de ce fait, le comité n'est pas en mesure, sur la base des informations fournies, d'identifier les personnes que les organisations plaignantes considèrent, à ce stade, comme lésées par les mesures gouvernementales. Le comité invite les organisations plaignantes, à savoir l'Internationale de l'éducation et l'ETA, à lui fournir une liste de ces personnes.
  6. 197. Le comité prend note des renseignements fournis par le gouvernement concernant l'arrestation et la détention de MM. Abate Angore, Awoke Mulugeta et Shimalis Zewdie, en relation avec la mise sous séquestre de l'immeuble et des autres biens de l'ETA.
    • Absence de réponse sur les autres questions en instance
  7. 198. Le comité note que le gouvernement n'a communiqué ni informations ni observations sur le meurtre de M. Assefa Maru (voir paragr. 225 i) du 321e rapport),et lui demande à nouveau de lui communiquer lesdites informations et observations.
    • Conclusions générales du comité
  8. 199. Dans une perspective plus vaste, le comité souhaite souligner que la situation générale des syndicats en Ethiopie a été examinée plusieurs fois au cours des huit dernières années par la Commission de l'application des normes de la Conférence, et que le cas concernant les enseignants, et plus particulièrement celui de l'ETA, a été examiné trois années de suite par la Commission de la Conférence, qui s'est déclarée profondément préoccupée par la situation des syndicats en Ethiopie (CIT 1998, Compte rendu provisoire no 18, pp. 99-101; CIT 1999, Compte rendu provisoire no 23, pp. 117-119; CIT 2000; Compte rendu provisoire no 23, pp. 79-82). Compte tenu du temps écoulé depuis l'introduction de la plainte, de la gravité des allégations et du sérieux de la situation, comme l'attestent les diverses interventions des organes de contrôle, et de la volonté déclarée du gouvernement de faire avancer les choses, y compris dans le cadre de la dernière initiative concernant une révision globale de la législation du travail, le comité prie instamment celui-ci de réexaminer globalement la situation, afin d'oeuvrer à un règlement rapide de toutes les questions en instance. Sur un point connexe, au vu des critiques formulées par le gouvernement contre ses conclusions et recommandations antérieures, le comité souligne que la procédure spéciale sur la liberté syndicale n'a pas pour objet de blâmer ni de sanctionner quiconque, mais d'engager un dialogue tripartite constructif afin de promouvoir le respect des droits syndicaux dans la loi et la pratique. Le comité rappelle à cet égard au gouvernement qu'il peut se prévaloir à cette fin de l'assistance technique du BIT.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 200. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Considérant que des doutes sérieux persistent quant à la question de savoir si des garanties de procédure ont été accordées au Dr Woldesmiate et à ses cinq co-inculpés, le comité, une fois de plus, demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation, notamment de toutes mesures prises pour les libérer.
    • b) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation concernant le transfert des biens et avoirs de l'ETA et de lui communiquer le texte du jugement définitif de la Haute Cour fédérale dès qu'il aura été prononcé.
    • c) Le comité, invite instamment le gouvernement à faire en sorte que l'introduction du système d'évaluation pour les enseignants ne serve pas de prétexte à la discrimination antisyndicale, et de l'informer des progrès réalisés en la matière.
    • d) Le comité demande à nouveau au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que tous les dirigeants et membres de l'ETA qui sont détenus ou inculpés seront libérés et que tous les chefs d'inculpation seront abandonnés, et de garantir qu'à l'avenir les travailleurs ne seront pas victimes de harcèlement ou ne seront pas arrêtés à cause de leur appartenance à un syndicat ou de leurs activités syndicales. Le comité invite les organisations plaignantes à fournir des informations à jour sur les travailleurs qu'il considère encore comme lésés par les mesures gouvernementales.
    • e) Le comité demande à nouveau instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que les responsables et adhérents de l'ETA qui ont été licenciés seront réintégrés dans leur emploi s'ils le désirent, et que leur seront versées des compensations pour perte de salaire et d'indemnités, et de le tenir informé des progrès réalisés en la matière. Le comité invite les organisations plaignantes à leur fournir des informations à jour sur les travailleurs toujours concernés par ces mesures.
    • f) Déplorant qu'en dépit de la nature extrêmement grave de l'allégation le gouvernement a clairement indiqué qu'il n'a aucune intention de diligenter une enquête judiciaire indépendante sur le meurtre de M. Assefa Maru, le comité une fois de plus prie instamment le gouvernement d'ouvrir une telle enquête immédiatement afin d'établir les faits, de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables, le cas échéant. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l'ouverture et de l'issue de l'enquête.
    • g) Compte tenu du temps écoulé depuis l'introduction de la plainte, de l'extrême gravité de la situation, comme l'attestent les interventions répétées des divers organes de contrôle, ainsi que de la volonté déclarée du gouvernement de faire avancer les choses, le comité prie instamment celui-ci de réexaminer globalement la situation, afin d'oeuvrer à un règlement rapide de toutes les questions en instance, et lui rappelle qu'il peut se prévaloir à cette fin de l'assistance technique du BIT.
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