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- 353. Le comité a déjà examiné ce cas lors de sa session de février 1993 lors de laquelle il a présenté au Conseil d'administration un rapport intérimaire. (Voir 286e rapport du comité, paragr. 591 à 611, approuvé par le Conseil d'administration à sa 255e session (mars 1993).)
- 354. A sa réunion de novembre 1993 (voir 291e rapport, paragr. 12), le comité a observé que, en dépit du temps écoulé depuis le dernier examen de ce cas, il n'avait toujours pas reçu du gouvernement les observations et informations sollicitées. Le comité a attiré l'attention du gouvernement sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l'affaire en instance, même si les informations et observations du gouvernement n'étaient pas reçues à temps. Depuis cet appel pressant, le comité n'a reçu aucune réponse complémentaire du gouvernement sur cette affaire.
- 355. Le Malawi n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 356. Les allégations restées en instance lors de la session de février 1993 du comité sont les suivantes: l'arrestation de M. Chakufwa Chihana, secrétaire général du Conseil de coordination syndicale d'Afrique australe (SATUCC), à son retour au Malawi après avoir assisté à des réunions syndicales en Zambie; l'arrestation de six salariés du SATUCC; le saccage des bureaux du SATUCC à Lilongwe; le licenciement de l'épouse de M. Chihana; la crainte d'autres salariés du SATUCC d'être arrêtés; le refus de permettre à un avocat de s'entretenir avec M. Chihana; et les menaces contre des membres des familles des personnes arrêtées.
- 357. Lors de cette session, le comité avait formulé les recommandations suivantes (voir 286e rapport du comité, paragr. 611):
- a) Le comité exprime sa profonde préoccupation devant la gravité des allégations présentées et rappelle qu'un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que si les droits fondamentaux de l'homme sont pleinement respectés et garantis.
- b) Regrettant que M. Chihana ait été détenu pendant plus de trois mois sans inculpations et sans être autorisé à voir le conseil de son choix, le comité condamne ces faits, non conformes aux principes fondamentaux d'une bonne administration de la justice.
- c) Le comité demande au gouvernement de libérer immédiatement M. Chihana.
- d) Le comité demande au gouvernement de fournir des renseignements détaillés sur les allégations relatives au saccage des bureaux du SATUCC, à l'arrestation et à la détention de six salariés, aux menaces formulées contre d'autres salariés et au licenciement de l'épouse de M. Chihana.
- e) Le comité veut croire que le gouvernement autorisera rapidement la réouverture et le libre fonctionnement des bureaux du SATUCC. Il invite le gouvernement à le tenir informé de toutes mesures prises à cet égard.
B. Conclusions du comité
B. Conclusions du comité
- 358. Le comité regrette que le gouvernement, malgré le temps écoulé depuis le dernier examen de ce cas, et bien qu'il y ait été invité à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant, n'ait pas communiqué les renseignements sollicités.
- 359. Dans ces conditions, et conformément à la règle de procédure applicable (voir paragr. 17 du 127e rapport du comité, approuvé par le Conseil d'administration à sa 184e session), le comité se voit contraint de présenter un rapport sur le fond de cette affaire en l'absence des informations qu'il espérait recevoir du gouvernement.
- 360. Le comité rappelle tout d'abord au gouvernement que le but de l'ensemble de la procédure instituée à l'OIT pour l'examen des allégations faisant état d'atteintes à la liberté syndicale est d'assurer le respect de celle-ci, en droit comme en fait. Si cette procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître de leur côté qu'il importe, pour leur propre réputation, qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre. (Voir premier rapport du comité, paragr. 31.)
- 361. Tout d'abord, le comité a été informé - notamment par des communiqués d'organisations de droits de l'homme - de la remise en liberté de M. Chihana, le 12 juin 1993. Il a également appris qu'en mars 1993 la Haute Cour de Malawi avait réduit sa peine à neuf mois de prison. Le comité rappelle que le gouvernement avait indiqué que M. Chihana, après avoir été mis en détention et remis en liberté à deux reprises, avait finalement été condamné, le 14 décembre 1992, respectivement à dix-huit et à vingt-quatre mois de prison avec travail forcé pour importation et détention illégale de publications subversives, les deux sentences étant concomitantes.
- 362. Tout en se félicitant de la libération de M. Chihana, le comité attire l'attention du gouvernement sur les conclusions qu'il a formulées lors de sa session de février 1993 (voir 286e rapport, paragr. 606 à 608), et il insiste sur l'importance qu'il attache à ce qu'a signalé la Conférence internationale du Travail, à savoir que le droit de réunion, la liberté d'opinion et d'expression et, en particulier, le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit, constituaient des libertés civiles qui sont essentielles à l'exercice normal des droits syndicaux (Résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée à la 54e session (1970)). (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 74.) Le comité demande instamment au gouvernement d'assurer qu'à l'avenir les dirigeants syndicaux ne soient plus arrêtés dans l'exercice d'activités syndicales légitimes.
- 363. En ce qui concerne les allégations d'après lesquelles, le 6 avril 1992, les forces de sécurité ont saccagé les bureaux du SATUCC à Lilongwe et y ont apposé des scellés, le comité a indiqué à maintes reprises que l'occupation des locaux syndicaux risque de constituer une grave ingérence des autorités dans les activités syndicales et que l'inviolabilité des locaux syndicaux a comme corrolaire que les autorités ne peuvent exiger de pénétrer dans ces locaux sans être en possession d'un mandat judiciaire les y autorisant. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 202 et 203.) Estimant également que la mesure de mise sous scellés des locaux syndicaux risque de paralyser les activités syndicales, le comité demande au gouvernement d'assurer que le SATUCC puisse à nouveau disposer librement de ses locaux à Lilongwe, sans aucune ingérence de la part des autorités. Il lui demande de le tenir informé à cet égard.
- 364. Pour ce qui est des allégations relatives à l'arrestation et l'incarcération sans inculpation, le 6 avril 1992, de six salariés du SATUCC (William Chisimba, Yared Mgwira, Florence Lungu, Malitowe, Frank Mkandawire et Loyd Tembo) en raison de leurs activités syndicales, le comité souligne qu'un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans le respect des droits fondamentaux de l'homme. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 68.) Il rappelle également que la détention de dirigeants pour activités liées à l'exercice de leurs droits syndicaux est contraire aux principes de la liberté syndicale; en plus, l'arrestation de dirigeants syndicaux sans qu'aucun délit spécifique soit retenu contre eux entraîne des entraves à l'exercice des droits syndicaux. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 87 et 89.) Compte tenu de ces principes auxquels il attache une grande importance, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation des personnes susmentionnées qui ont été arrêtées en indiquant si elles ont été remises en liberté et si elles ont pu reprendre leurs activités syndicales.
- 365. En ce qui concerne les menaces qui auraient été proférées à l'encontre d'autres salariés du SATUCC et des membres de la famille de certaines des personnes incarcérées, le comité ne peut que rappeler que les droits syndicaux ne peuvent s'exercer que dans un climat dénué de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des syndicalistes et qu'il appartient aux gouvernements d'assurer le respect de ce principe. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 70.) Le comité demande en conséquence au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin que ce principe soit effectivement garanti dans la pratique.
- 366. Enfin, pour ce qui est de l'allégation concernant le licenciement de l'épouse de M. Chihana, le comité souligne l'importance qu'il attache à ce que nul ne fasse l'objet de discrimination dans son emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales légitimes. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 538.) Il demande au gouvernement qu'une enquête soit menée en vue d'établir les véritables raisons de ce licenciement et, au cas où il serait prouvé que la personne en question a été licenciée en raison de ses activités syndicales, qu'elle soit réintégrée dans son emploi. Il prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de cette enquête.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 367. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Tout en se félicitant de la libération de M. Chihana en date du 12 juin 1993, le comité insiste sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel le droit de réunion, la liberté d'opinion et d'expression et, en particulier, le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit, constituent des libertés civiles qui sont essentielles à l'exercice normal des droits syndicaux, le comité demande instamment au gouvernement d'assurer qu'à l'avenir les dirigeants syndicaux ne soient plus arrêtés dans l'exercice d'activités syndicales légitimes.
- b) Rappelant que l'occupation des locaux syndicaux risque de constituer une grave ingérence des autorités dans les activités syndicales et que l'inviolabilité des locaux syndicaux a comme corrolaire que les autorités ne peuvent exiger de pénétrer dans ces locaux sans être en possession d'un mandat judiciaire les y autorisant, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d'assurer que le SATUCC puisse à nouveau disposer librement de ses locaux à Lilongwe, sans aucune ingérence de la part des autorités. Il lui demande de le tenir informé à cet égard.
- c) Soulignant que la détention de dirigeants pour activités liées à l'exercice de leurs droits syndicaux est contraire aux principes de la liberté syndicale et l'arrestation de dirigeants syndicaux sans qu'aucun délit spécifique soit retenu contre eux entraîne des entraves à l'exercice des droits syndicaux, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation de William Chisimba, Yared Mgwira, Florence Lungu, Malitowe, Frank Mkandawire et Loyd Tembo, salariés du SATUCC arrêtés le 6 avril 1992, en indiquant s'ils ont été remis en liberté et si elles ont pu reprendre leurs activités syndicales.
- d) Le comité rappelle à nouveau que les droits syndicaux ne peuvent s'exercer que dans un climat dénué de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des syndicalistes. Il demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin que ce principe soit effectivement garanti dans la pratique.
- e) Soulignant l'importance qu'il attache à ce que nul ne fasse l'objet de discrimination dans son emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales légitimes, le comité demande au gouvernement qu'une enquête soit menée en vue d'établir les véritables raisons du licenciement de l'épouse de M. Chihana et, au cas où il serait prouvé que la personne en question a été licenciée en raison de ses activités syndicales, qu'elle soit réintégrée dans son emploi. Il prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de cette enquête.