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- 412. Le comité a examiné ce cas à deux occasions (voir 281e et 284e rapports du comité, paragr. 463 à 479 et 962 à 971, approuvés par le Conseil d'administration à ses 252e et 254e sessions (mars et novembre 1992)), au cours desquelles il a formulé des conclusions intérimaires. Le gouvernement a fait parvenir de nouvelles observations dans une communication du 11 décembre 1992.
- 413. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 414. Les allégations en instance depuis la session de novembre 1992 du comité portent sur les faits suivants survenus au cours d'une grève ayant duré plusieurs mois en 1991: arrestation par l'armée, le 17 mai 1991, de sept enseignants de la province d'Ayacucho, et découverte par la suite des cadavres de cinq d'entre eux dans une fosse commune; disparition de Marcelino Navarro Pezo, Leopoldo Navarro Diaz et Luis Torres Camilo (enseignants) dans la province de Ucayali-Pucallpay, de Ardon Pariona (enseignant) dans la province de Huncavelica; lancement dans le vide, depuis un hélicoptère, de Betty Panaifo, Nicolás Lavajo et Moisés Teneiro (enseignants), l'un des survivants ayant dénoncé ce fait; assassinat de Porfirio Suni (le 13 mai 1991), de Pablo Mamani Marchena et de Germán Maceda (le 24 mai 1991) dans la province de Pucará Puno; sauvage agression de la police perpétrée contre des dirigeants du SUTEP, le 30 mai 1991, alors qu'ils se dirigeaient vers la présidence de la République où ils avaient l'intention de demander audience à l'épouse du Président Fujimori, afin qu'elle prenne position à propos des revendications des enseignants. Concernant cette dernière allégation, l'organisation plaignante signale que, par suite de l'intervention policière, José Ramos Bosmediano (secrétaire général du SUTEP), Soledad Lozano Costa (sous-secrétaire générale du SUTEP) et Auris Melgar (responsable chargé des relations internationales) ont été victimes de brutalités, puis arrêtés (M. Melgar a perdu connaissance sous l'effet des coups de la police et des gaz lacrymogènes).
- 415. Le gouvernement n'ayant pas fourni d'observations suffisamment détaillées sur les allégations en instance, le comité, dans son examen précédent du cas, a formulé les recommandations suivantes (voir 284e rapport du comité, paragr. 971):
- - Le comité exprime sa profonde préoccupation devant la gravité des allégations faisant état d'un grand nombre d'assassinats, de disparitions et d'atteintes à l'intégrité physique de syndicalistes enseignants durant une grève. Le comité demande instamment au gouvernement d'ouvrir une enquête judiciaire pour déterminer les responsabilités et sanctionner les coupables, et de le tenir informé à cet égard.
- - Le comité demande instamment au gouvernement de faire tous les efforts possibles pour retrouver les quatre syndicalistes disparus (MM. Navarro Pezo, Leopoldo Navarro Diaz, Luis Torres Camilo et Ardon Pariona) et de le tenir informé de façon suffisamment détaillée sur les mesures prises à cet égard. Il demande également au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l'exercice des droits syndicaux ait lieu dans un climat de totale sécurité.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 416. Dans sa communication du 11 décembre 1992, le gouvernement déclare que, conformément à l'article 277 de la Constitution, la police a pour mission de maintenir l'ordre interne, de préserver l'ordre public, de garantir le respect des lois, la sécurité des personnes et des biens de l'Etat et des particuliers, ainsi que de prévenir la délinquance et de la combattre. Il déclare par ailleurs que ces dispositions constitutionnelles sont conformes à l'article 10 du décret-loi no 371 (portant loi fondamentale sur les forces de police). Il ajoute que, dans leurs interventions, les forces de police doivent agir avec la fermeté nécessaire compte tenu du comportement des manifestants.
- 417. Le gouvernement signale que, dans le présent cas, les enseignants membres du SUTEP, à l'issue de leurs réunions, sortaient dans les rues de Lima afin de créer le chaos et d'importuner la population, organisant des manifestations violentes non autorisées par les autorités compétentes, portant atteinte à l'ordre public et à la tranquillité des particuliers, interrompant la circulation, s'efforçant de prendre par la force le siège d'organismes de l'Etat et affrontant ouvertement les forces de police. Il ajoute que beaucoup de blessures peuvent avoir été occasionnées lors de la fuite de membres du SUTEP. Par ailleurs, le gouvernement souligne que pendant les manifestations plusieurs enseignants possédant des antécédents terroristes ont été arrêtés et placés à la disposition du pouvoir judiciaire. Le gouvernement souligne aussi que les plaignants ne sont pas des victimes des forces de police, mais que ce sont leurs propres excès qui ont contraint celles-ci à intervenir.
- 418. Plus concrètement, le gouvernement déclare que Betty Panaifo, Nicolás Lavajo et Moisés Teneiro, enseignants, n'ont pas été arrêtés et qu'aucune plainte n'a été déposée concernant leur prétendue disparition; l'enseignant José Ramos Bosmediano (secrétaire général du SUTEP) a été arêté parce qu'il portait atteinte à l'ordre public; l'arrestation présumée de l'enseignant Leopoldo Navarro Diaz ne figure pas dans les registres; le professeur Abdón Félix Pariona Garcia serait décédé par suite d'une intervention militaire dans la zone d'urgence de Huancavelica, comme il ressort de la plainte déposée pour abus de pouvoir contre un militaire de la base de lutte contre la subversion de Quichuak, plainte qui suit son cours devant le bureau provincial mixte du ministère public de Huancavelica. Le gouvernement signale que des informations ont été demandées au Procureur général concernant le cours de cette plainte et que, le cas échéant, la démarche sera renouvelée devant le tribunal qui appliquera la sanction qui s'impose.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 419. En premier lieu, le comité exprime une fois de plus sa profonde préoccupation devant la gravité des allégations en instance faisant état de l'assassinat, de la disparition et de l'atteinte à l'intégrité physique de syndicalistes enseignants. Le comité reconnaît que la police et les forces de sécurité ont pour mission de maintenir l'ordre public, mais il doit attirer l'attention du gouvernement sur le fait que l'intervention de ces forces mentionnée dans les allégations va bien au-delà de ce qui peut être considéré comme justifié.
- 420. A cet égard, le comité déplore profondément que le gouvernement n'ait pas répondu aux allégations relatives à l'arrestation par l'armée de sept enseignants le 17 mai 1991 dans la province d'Ayacucho, à la découverte des cadavres de cinq d'entre eux dans une fosse commune, à la disparition des enseignants Marcelino Navarro Pezo et Luis Torres Camilo dans la province d'Ucayali-Pucallpay et à l'assassinat des enseignants Porfirio Suni (le 13 mai 1991), Pablo Mamani Marchena et Germán Maceda (le 24 mai 1991) dans la province de Pucará Puno. En conséquence, le comité insiste de nouveau pour que le gouvernement ouvre une enquête judiciaire sur ces assassinats et ces disparitions afin de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables.
- 421. En ce qui concerne l'allégation relative à l'agression sauvage et à l'arrestation par la police des dirigeants syndicaux José Ramos Bosmediano (secrétaire général du SUTEP), Soledad Lozano Costa (sous-secrétaire générale du SUTEP) et Auris Melgar (chargé des relations internationales) le 30 mai 1991, alors qu'ils se dirigeaient vers la présidence de la République afin de demander audience à l'épouse du Président Fujimori afin qu'elle prenne position à propos des revendications des enseignants, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles José Ramos Bosmediano (secrétaire général du SUTEP) a été arrêté parce qu'il portait atteinte à l'ordre public. De la même manière, le comité note que le gouvernement, après avoir décrit la mission et les fonctions de la police, indique qu'en l'occurrence les enseignants membres du SUTEP, à l'issue de leurs réunions, sortaient dans les rues de Lima afin de créer le chaos et d'importuner la population (manifestations violentes non autorisées, atteintes à l'ordre public et à la tranquillité des particuliers, interruption de la circulation, etc.) et affrontaient ouvertement les forces de police. Le comité note que, selon le gouvernement, beaucoup de blessures peuvent avoir été occasionnées par la fuite de membres du SUTEP.
- 422. Le comité déplore que le gouvernement se borne à présenter des hypothèses sans fournir d'observations sur les faits concrets dénoncés par les plaignants concernant l'arrestation de trois dirigeants syndicaux et l'agression perpétrée contre eux. Par conséquent, il demande au gouvernement de lui indiquer si José Ramos Bosmediano (secrétaire général du SUTEP) a été jugé pour le délit dont il est accusé (atteinte à l'ordre public), s'il se trouve en liberté ou s'il est encore détenu, et de lui signaler également si Soledad Lozano Costa (sous-secrétaire générale du SUTEP) et Auris Melgar (chargé des relations internationales du SUTEP) sont détenus ou en liberté.
- 423. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle Betty Panaifo, Nicolás Lavajo et Moisés Teneiro, enseignants, auraient été précipités d'un hélicoptère, le comité note que le gouvernement nie qu'ils aient été arrêtés et affirme qu'aucune plainte n'a été déposée concernant leur prétendue disparition. Par ailleurs, le comité note que, selon le gouvernement, la prétendue détention de l'enseignant Leopoldo Navarro Diaz n'est pas enregistrée (il aurait disparu selon les plaignants), et que le professeur Abdón Félix Pariona Garcia (disparu également, selon les plaignants) serait décédé par suite de l'intervention de militaires dans la zone d'urgence de Huancavelica, et que ladite plainte suit son cours.
- 424. Dans ces conditions, le comité insiste pour que le gouvernement procède à des enquêtes pour retrouver les syndicalistes disparus (Betty Panaifo, Nicolás Lavajo, Moisés Teneiro et Leopoldo Navarro Diaz) et le tienne informé à cet égard, de même que sur les suites données à la plainte relative à l'assassinat de Abdón Félix Pariona.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 425. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Extrêmement préoccupé par la gravité de ce cas, le comité déplore profondément que le gouvernement n'ait pas répondu aux allégations relatives à:
- - l'arrestation par l'armée de sept enseignants le 17 mai 1991 dans la province d'Ayacucho, les cadavres de cinq d'entre eux ayant été découverts par la suite dans une fosse commune;
- - la disparition des enseignants Marcelino Navarro Pezo et Luis Torres Camilo dans la province de Ucayali-Pucallpay;
- - l'assassinat des enseignants Porfirio Suni (le 13 mai 1991), Pablo Mamani Marchena et Germán Maceda (le 24 mai 1991) dans la province de Pucará Puno. Le comité demande instamment à nouveau au gouvernement d'ouvrir une enquête judiciaire sur ces assassinats et ces disparitions afin de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables.
- b) Le comité insiste auprès du gouvernement pour qu'il effectue des recherches afin de retrouver les enseignants disparus (Betty Panaifo, Nicolás Lavajo, Moisés Teneiro et Leopoldo Navarro Diaz), et qu'il le tienne informé à cet égard, ainsi que sur les suites données à la plainte déposée concernant l'assassinat de Abdón Félix Pariona.
- c) Le comité demande au gouvernement qu'il lui indique si le dirigeant syndical José Ramos Bosmediano (secrétaire général du SUTEP) a été poursuivi pour le délit dont il est accusé (atteinte à l'ordre public) et s'il se trouve en liberté ou s'il est encore détenu, et qu'il lui indique aussi si Soledad Lozano Costa (sous-secrétaire générale du SUTEP) et Auris Melgar (chargé des relations internationales) se trouvent en prison ou en liberté.
- d) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l'exercice des droits syndicaux puisse avoir lieu dans un climat normal, et il signale une fois de plus à l'attention du gouvernement qu'un climat de violence, qui donne lieu à l'assassinat ou à la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, constitue un grave obstacle pour l'exercice des droits syndicaux et que de tels actes exigent des autorités qu'elles prennent des mesures rapides et efficaces pour remédier à une telle situation.