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- 837. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement dans une communication en date du 22 mars 1991. Le Congrès des syndicats de la Zambie (ZCTU) s'est associé à cette plainte dans une lettre datée du 15 mai 1991. La Fédération internationale des mineurs (FIM), au nom de son affilié, le Syndicat des mineurs de Zambie, a présenté une plainte le 3 juin 1991. L'Internationale des services publics (ISP) a déposé une plainte au nom de cinq syndicats nationaux affiliés (le Syndicat uni des travailleurs des collectivités locales de Zambie, le Syndicat national des services publics, le Syndicat des fonctionnaires de Zambie, le Syndicat de Zambie des travailleurs de l'électricité et assimilés et le Syndicat national zambien des travailleurs de la santé et assimilés) dans une communication en date du 25 septembre 1991.
- 838. Le gouvernement a fait parvenir ses observations sur le cas dans des communications datées des 11 et 14 octobre 1991. A la suite d'un changement de gouvernement, le nouveau gouvernement a envoyé des informations dans des lettres datées des 14 novembre 1991, 24 janvier, 13 avril et 16 juillet 1992.
- 839. Le Conseil d'administration, à sa session de mars 1992, a pris note de certaines des informations communiquées sur ce cas dans des lettres datées des 14 novembre 1991 et 24 janvier 1992 (Voir 281e rapport du comité, paragr. 9, approuvé à la 252e session du Conseil d'administration).
- 840. La Zambie n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. En revanche, elle a ratifié la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants
- 841. Dans sa lettre en date du 22 mars 1991, la CISL a protesté contre deux projets de loi, l'un portant sur la Commission des traitements et des conditions d'emploi et l'autre sur les relations professionnelles, qui ont tous deux été adoptés par le Parlement zambien et sanctionnés par le Président le 23 janvier 1991. La date exacte de leur entrée en vigueur restait encore à communiquer par les autorités.
- 842. Selon la CISL, la loi sur la Commission des traitements et des conditions d'emploi contient des dispositions qui, si elles étaient appliquées, violeraient de manière flagrante le droit de négociation collective dans les secteurs public et parapublic. Le secteur public emploie une proportion appréciable de la main-d'oeuvre zambienne, et le fait que l'article 2(b) permet au Président de qualifier d'organisme public toute société, toute association, tout office, toute société ou tout établissement d'enseignement dans lesquels l'Etat possède un intérêt quelconque signifie que les restrictions à la négociation collective prévues par le projet de loi auraient de très vastes conséquences.
- 843. La loi prévoit la création d'une Commission des traitements et des conditions d'emploi. Les conditions de création de la commission et son mandat sont tels qu'elle ne pourrait s'acquitter de ses fonctions d'une façon indépendante mais subirait une forte influence des pouvoirs publics. Les faits suivants le montrent: i) le président et les six membres de la commission doivent être désignés par le Président (article 4(2)); ii) les membres syndicaux sont expressément exclus de la commission (article 4(4)(d)); iii) la commission est tenue de s'acquitter de ses fonctions en étroite collaboration avec le ministère de tutelle ou avec l'organisme parapublic compétent (article 5(4)(a)); et iv) la commission est tenue d'appliquer toute consigne générale ou particulière que le Président pourrait lui donner concernant l'exécution de ses tâches (article 5(7)).
- 844. Le contrôle effectif de la commission par le gouvernement est particulièrement étroit et préjudiciable si l'on se réfère aux fonctions attribuées à la commission par l'article 5(1)(b); non seulement la commission pourrait déterminer et réviser unilatéralement les traitements et les conditions d'emploi de non-syndicalistes, mais encore elle serait habilitée à: "approuver, sans amendement ou avec les amendements qu'elle jugera appropriés, ou refuser d'approuver les conditions de travail des fonctionnaires membres d'un syndicat ou d'une organisation similaire".
- 845. Comme l'énonce clairement l'article 10, la négociation collective pourra encore avoir lieu dans les secteurs public et parapublic, mais à la seule condition que toutes les conventions collectives soient soumises à la commission qui pourra les approuver, les amender ou les rejeter, comme indiqué ci-dessus, et ce avec effet rétroactif. La CISL soutient que le projet de loi aurait pour conséquence que l'autorisation préalable des autorités serait exigée pour la mise en vigueur d'une convention.
- 846. La CISL déclare que la loi sur les relations professionnelles (qui annulerait et remplacerait la loi de 1971 du même nom) cherche à imposer un cadre légal général à la pratique des relations professionnelles en Zambie. La CISL est préoccupée par le fait que la loi enfreint les droits syndicaux fondamentaux à divers égards. En effet, la nature d'un certain nombre de ces violations est telle qu'elle constitue une attaque délibérée contre le Congrès des syndicats de la Zambie, ses dirigeants élus et les syndicats affiliés.
- 847. A titre d'exemple, la CISL se réfère à l'enregistrement et à la dissolution des syndicats. Aux termes de la loi, tous les syndicats doivent être enregistrés. En cas de défaillance ou de refus, un syndicat pourra être dissous dans les six mois. Le fait que la loi envisage des situations dans lesquelles le ministre pourra fixer des conditions légales pour l'enregistrement et que le manquement à ces obligations aboutisse à un refus d'enregistrement (article 8(8)(b)) signifie que les travailleurs pourraient être tenus d'obtenir une autorisation préalable pour créer leurs propres organisations, ce qui contrevient aux principes énoncés dans la convention no 87. En outre, le commissaire au travail pourra refuser l'enregistrement s'il estime qu'un syndicat est incapable de parvenir à l'un quelconque de ses principaux objectifs (article 8(6)(b)), dont certains sont prévus par la loi. Cette disposition accorde aux autorités un autre pouvoir discrétionnaire injustifié quant au droit syndical de base. De même, le commissaire pourra annuler l'enregistrement d'un syndicat s'il estime qu'il a cessé de poursuivre les principaux objectifs pour lesquels il a été créé et enregistré (article 9(1)(b)). Cette disposition est contraire au principe selon lequel les syndicats ne devraient pas pouvoir être dissous par une autorité administrative.
- 848. Pour ce qui est de l'ingérence dans les activités syndicales, la CISL déclare que la loi contient un certain nombre de dispositions qui constituent de graves ingérences dans les affaires internes des syndicats zambiens et du Congrès des syndicats de la Zambie et dans les rapports entre les syndicats individuels et le ZCTU. A cet égard, l'article 14(1) prévoit que tous les syndicats affiliés au ZCTU ne seront plus considérés comme affiliés au moment de son entrée en vigueur. Chacun de ces syndicats devrait alors obtenir une majorité des deux tiers en faveur d'une réaffiliation. Cette disposition constitue une violation du droit des syndicats de s'affilier à des fédérations et à des confédérations et une attaque manifeste contre le ZCTU lui-même.
- 849. La loi prévoit toute une série de dispositions légales devant figurer dans les statuts de tout syndicat (article 15(1)) et du ZCTU (article 29(2)). Ces dispositions vont au-delà de questions de pure forme, dans la mesure où elles exigent, par exemple, que la formation syndicale et l'éducation ouvrière soient un des principaux postes des dépenses des syndicats et du ZCTU. Cette exigence est particulièrement importante compte tenu du risque de dissolution sommaire des syndicats pour manquement à l'un de leurs objectifs principaux et enfreint leur droit d'établir leurs statuts et règlements intérieurs en toute liberté.
- 850. La loi prévoit par ailleurs que certaines décisions doivent être prises au scrutin secret sous un contrôle adéquat. Parmi ces décisions, on trouve l'élection des dirigeants, les décisions de dissolution, de fusion ou d'amendement des statuts des organisations et, dans le cas du ZCTU, "toute proposition d'affiliation à une organisation ou à un organisme quelconque en dehors de la Zambie" (article 29(2)(k)(iii)). Si un scrutin secret n'est pas exigé pour les décisions concernant l'affiliation internationale de syndicats individuels, l'article 35(3) dispose que cette affiliation doit être décidée à la majorité des deux tiers. Le choix de l'affiliation internationale, du fait de cette réglementation exceptionnelle et excessive, constitue ainsi une tentative pour décourager ou contrôler les relations internationales du mouvement syndical zambien, en violation de l'article 5 de la convention no 87. Cette violation est encore aggravée par l'article 35(4) et (5) qui impose aux syndicats d'obtenir une approbation ministérielle préalable pour recevoir une "aide technique et financière extérieure", et par le fait que le ministre ne peut donner son accord que s'il estime que cette aide "n'est pas préjudiciable à la sécurité publique". Il semble donc que l'on part du principe que l'aide syndicale internationale peut être préjudiciable à la sécurité publique.
- 851. La CISL estime qu'en énonçant une série de raisons pour lesquelles des individus pourront être déchus de leurs fonctions syndicales la loi enfreint le droit des syndicats d'élire leurs représentants en toute liberté. C'est ainsi que l'article 17(1)(a) prévoit qu'aucune personne qui n'aura pas été employée pendant au moins un an ou plus dans le métier, l'occupation ou l'industrie ayant un lien direct avec le syndicat en question ne pourra exercer de fonctions syndicales, sauf autorisation spéciale du commissaire au travail; selon l'article 17(1)(b), toute personne réputée avoir contribué en tant que responsable à l'annulation de l'enregistrement d'un syndicat sera déchue de la même façon; l'article 30(1)(a) prévoit la même disqualification pour le ZCTU. D'autres disqualifications sont prévues en ce qui concerne les responsables du ZCTU pour tout candidat qui n'est pas désigné par le syndicat dont il est membre ainsi que par des délégués de neuf autres syndicats et pour toute personne dont la liberté de mouvement est limitée pendant plus de six mois en application d'une quelconque loi zambienne. La dernière disposition vise nettement la direction actuelle du ZCTU.
- 852. Par ailleurs, la loi cherche indûment à réglementer la relation entre le ZCTU et les syndicats affiliés (articles 35 et 36) dans des domaines qui ne devraient concerner que les organisations elles-mêmes. En outre, les articles 17(3) et 30(4) interdisent à tout syndicaliste d'être à la fois dirigeant d'un autre syndicat et permanent du ZCTU.
- 853. Une disposition de la loi qui préoccupe particulièrement la CISL est celle qui permet au commissaire au travail de suspendre tout membre d'un syndicat ou du ZCTU de sa charge s'il constate que la gestion financière d'une organisation syndicale n'est pas assurée conformément à ses statuts ou s'il y a eu une autre violation continue de ses termes (articles 20 et 33). Ces pouvoirs vont bien au-delà des mesures légitimes pouvant être prises pour protéger les fonds du syndicat contre des abus et impliquent le risque d'ingérences graves.
- 854. La CISL déclare que la loi cherche à entraver et à rompre les accords de longue date passés entre les syndicats et les employeurs aux termes desquels les cotisations syndicales pouvaient être directement déduites des salaires. Si l'article 22 reconnaît explicitement la possibilité de conclure de tels accords avec chaque salarié, il précise en outre qu'ils peuvent être annulés après un préavis d'un mois signifié par écrit par l'employeur ou par un salarié.
- 855. La CISL allègue aussi que les dispositions de la loi concernant l'utilisation des fonds syndicaux et de ceux du ZCTU (ainsi que ceux des organisations d'employeurs) imposent de sévères restrictions à l'usage qui peut être fait de ces fonds. L'article 61(1) (désormais article 62(1) depuis que la loi a été adoptée) interdit les dépenses consacrées à "tout ce qui n'est pas directement lié au bien-être des membres" de l'organisation intéressée, rendant ainsi impossible toute une gamme d'activités légitimes telles que les mouvements de sympathie et de solidarité ou les actions humanitaires, ou encore les activités concernant des questions générales pouvant être considérées comme non directement liées aux intérêts des membres. Cette disposition empiète donc sur les droits des syndicats d'organiser et d'administrer leurs activités librement. En outre, la loi impose la création de fonds politiques volontaires pour les organisations syndicales poursuivant des objectifs politiques. L'article 61(3) (désormais article 62(3)) dispose qu'une majorité des deux tiers sera nécessaire pour la constitution de tels fonds, ce que la CISL considère comme excessif.
- 856. S'agissant des conventions collectives, des conflits collectifs et des restrictions au droit de grève, la CISL déclare que la loi définit la juridiction et les procédures du Tribunal du travail à qui sont accordés des pouvoirs généraux d'enquête et de décision, notamment pour interpréter les termes de sentences arbitrales ou d'accords et trancher les conflits collectifs. La composition et les compétences du tribunal sont telles qu'il ne peut agir indépendamment du gouvernement comme son mandat l'exigerait pour être en conformité avec les principes de la liberté syndicale. Le président et le vice-président du tribunal sont nommés par le Président, et ses autres membres par le ministre. Des "assesseurs" travailleurs et employeurs sont aussi prévus, mais ils doivent être également nommés par le ministre sans en référer aux organisations syndicales ou d'employeurs, et le tribunal, bien que tenu de prendre "dûment en considération" les avis des assesseurs, n'est pas lié par ces avis. En outre, l'article 67(5) (désormais article 68(5)) dispose que, lorsqu'il prendra une décision ou rendra une sentence arbitrale concernant les salaires et conditions d'emploi, "le tribunal tiendra compte de la politique officielle du gouvernement à l'égard des prix et revenus". Ceci signifie qu'en application de la loi le tribunal ne pourra pas s'acquitter de manière satisfaisante et impartiale de ses fonctions de conciliation et d'arbitrage qui lui sont attribuées par la loi. Ce problème est d'autant plus grave que les décisions du tribunal sont sans appel et sont obligatoires pour les parties intéressées et que toute grève déclenchée pour s'opposer à l'une quelconque de ces décisions est passible d'une amende pouvant atteindre 1.000 kwacha et/ou d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à douze mois. La CISL s'inquiète en outre de ce que les dispositions de l'article 72 (désormais article 73) concernant la tenue d'audiences du tribunal à huis clos lorsque son président estime qu'une audience publique serait préjudiciable aux intérêts de la justice, de la défense, de la sécurité publique, de l'ordre public ou de la moralité publique impliquent en outre le risque grave que le tribunal ne s'acquitte pas de ses fonctions en toute équité et indépendance.
- 857. La loi prévoit aussi la mise en place de structures et de procédures pour la négociation collective et la conclusion de conventions collectives. Toutefois, l'article 84 (désormais article 85) semble obliger les parties formant une unité de négociation non seulement à entamer des négociations trois mois au moins avant la date d'expiration de la convention collective, mais aussi à conclure et à signer une nouvelle convention pendant cette période de trois mois sous peine d'amende pouvant atteindre 100 kwacha et d'une disqualification au sein de l'unité de négociation pour une période pouvant aller jusqu'à trois mois. La disposition ne semble pas prévoir la possibilité de déclaration d'un conflit collectif découlant de l'impossibilité d'aboutir à un accord dans les trois mois, bien que l'article 88 (désormais article 89) prévoie la possibilité de proroger la validité d'une convention existante en pareille circonstance.
- 858. Lorsqu'une convention collective est conclue, l'article 85 (désormais article 86) dispose qu'elle doit être présentée à la Commission du travail qui pourra refuser de l'enregistrer. Ce refus pourra être fondé soit sur des motifs de forme, soit sur la constatation, par la commission, que la convention contient des clauses "contraires à la politique officielle du gouvernement à l'égard des prix et des revenus". La CISL prétend que ceci revient à exiger l'approbation préalable des autorités avant l'entrée en vigueur d'une convention, ce qui est une violation manifeste des principes de la convention no 98.
- 859. La CISL fait remarquer que les parties X et XII de la loi traitent séparément du règlement des différends dans les services considérés par le gouvernement comme essentiels et dans ceux qui ne le sont pas. Une définition des services essentiels dans lesquels les grèves ne peuvent avoir lieu est donnée à l'article 127(9) et (10) (désormais article 128), mais elle est plus large que celle qu'accepte habituellement le Comité de la liberté syndicale du BIT, à savoir les services dont l'interruption mettrait en péril la vie, la sécurité personnelle ou la santé de l'ensemble ou d'une partie de la population. Une disposition particulièrement préjudiciable au libre exercice du droit de grève figure au paragraphe 10 qui autorise le ministre à recourir au Tribunal du travail pour faire déclarer essentiel tout service menacé par un mouvement de grève.
- 860. La CISL explique que tout conflit surgissant dans un service "essentiel" doit être déféré au Tribunal du travail pour arbitrage obligatoire. Cependant, selon l'explication donnée plus haut, le tribunal ne constitue pas un mécanisme approprié pour dédommager les travailleurs privés des moyens essentiels qui leur permettraient, autrement, de défendre leurs intérêts professionnels, ainsi que l'exige la jurisprudence du comité en matière de restriction du droit de grève dans les services essentiels. En outre, l'article 128 considère toute immixtion dans la fourniture d'un service essentiel comme un délit et permet à un policier d'arrêter sans mandat toute personne qu'il estime agir de la sorte. Cette disposition expose les syndicalistes au risque d'être arrêtés sommairement et détenus d'une manière qui met gravement en péril l'exercice de leurs droits syndicaux fondamentaux.
- 861. Pour les services non essentiels, la loi prévoit des procédures de conciliation et la possibilité de porter le conflit devant le tribunal. La CISL croit comprendre qu'aucune de ces possibilités ne porte atteinte à celle qu'a un syndicat de procéder à un vote sur la grève ainsi que le mentionne l'article 93(1)(b) (désormais article 94). Il n'en demeure pas moins que l'exigence prévue à l'alinéa (3)(a) d'une majorité des deux tiers des votants en faveur d'un mouvement de grève constitue un sérieux obstacle à l'exercice légitime du droit de grève. Qui plus est, l'alinéa (3)(b) permet au ministre de demander au tribunal de déclarer que la poursuite d'une grève de sept jours est contraire à l'intérêt public et prévoit que lorsqu'une telle déclaration est faite le conflit doit être porté devant le tribunal pour arbitrage obligatoire. La CISL estime que cette disposition limite gravement et arbitrairement le droit de grève. De plus, l'article 122(2)(d) (désormais article 123) impose des restrictions indues à la justification d'un mouvement de grève, en ce sens qu'il interdit les grèves qui "n'ont pas lieu en prévision d'un différend du travail ou en vue de faciliter le règlement d'un différend du travail auquel l'employeur ou le syndicat est partie". Cette disposition élimine effectivement les grèves de sympathie ou les grèves motivées par des problèmes socio-économiques généraux.
- 862. Enfin, la CISL déclare que l'article 123 (désormais article 124) interdit à toute personne agissant au nom d'une organisation syndicale dans le cadre d'un différend du travail de se trouver à proximité d'une habitation, d'un lieu de travail ou d'un autre lieu pour communiquer des informations ou pousser ou inciter des personnes à prendre part à une grève ou à une manifestation si cette présence risque d'intimider, de faire obstruction ou de provoquer le désordre. Les personnes contrevenant à cet article sont passibles d'une amende pouvant atteindre 2.000 kwacha et d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à six mois. Lorsque, dans des circonstances similaires, un individu se rend au domicile d'un tiers dans l'intention de le pousser à participer à une grève ou à une manifestation, même lorsque cette présence n'est pas jugée intimidante, il s'agit, là aussi, d'une infraction passible d'une amende et d'une suspension de la fonction syndicale. La CISL estime que, compte tenu de la latitude dont disposent les autorités pour définir les actes qu'elles jugent intimidants, gênants ou susceptibles de provoquer un désordre, et compte tenu des obstacles qu'elles mettent à la communication de l'information par les syndicalistes dans le cadre d'un différend du travail, ces restrictions constituent une violation du droit de mettre en place des piquets de grève et d'inciter pacifiquement les travailleurs à prendre part à une action de grève.
- 863. Dans sa plainte, la FIM mentionne les deux projets de loi, et plus particulièrement les articles 127 (désormais 128) et 123 (désormais 124) du projet de loi sur les relations professionnelles. Elle rappelle que, aux termes de l'article 127(9), est considéré comme service essentiel tout service visant à assurer la sécurité des installations souterraines des mines servant à l'exploitation et au drainage, ainsi que des puits et installations annexes, des machines et du matériel. La FIM estime que cette définition peut s'appliquer à l'ensemble des opérations d'extraction, dont l'interruption, note-t-elle, ne menacerait pas la vie, la sécurité ou la santé des citoyens. En outre, ajoute la fédération, l'article 127(5) confère à la police le pouvoir discrétionnaire d'arrêter toute personne dont elle a des raisons valables de croire qu'elle contrevient à l'article 127, autrement dit d'arrêter tout mineur syndicaliste qui exerce ses droits syndicaux fondamentaux, en particulier le droit de grève. C'est ce que confirme d'ailleurs le paragraphe (3) aux termes duquel nul - travailleur, membre d'un syndicat ou autre - n'est autorisé à participer à une grève qui risque d'entraver le fonctionnement des services publics essentiels. La FIM considère que cette formulation donne au gouvernement les moyens d'interdire à volonté toute action de revendication dans les mines.
- 864. La FIM déclare par ailleurs que l'article 123 interdit à toute personne agissant au nom d'un syndicat dans le cadre d'un conflit collectif du travail d'être présente en tout lieu ou à proximité de tout lieu d'habitation, de travail ou autre en vue de communiquer des informations à d'autres personnes au sujet d'une grève ou d'une manifestation, ou d'inciter ces personnes à participer à cette grève ou à cette manifestation, si cette présence risque d'intimider, de provoquer une gêne ou de troubler l'ordre public. Les personnes qui contreviennent à cette disposition sont passibles d'une lourde amende et d'une peine de prison. La principale entreprise minière de Zambie, la ZCCM, offre aux membres de son personnel des logements qui sont généralement situés à proximité immédiate des mines. La FIM estime donc que cette disposition constitue une violation manifeste du droit de se syndiquer, de constituer des piquets de grève et d'inciter pacifiquement les travailleurs à participer à une action de revendication.
- 865. L'ISP joint à sa plainte un exemplaire d'une requête du ZCTU demandant à la Haute Cour de Zambie de procéder à une révision judiciaire de la loi de 1990 sur les relations professionnelles. Selon cette requête, la loi est contraire à l'article 23 de la Constitution zambienne, aux termes duquel nul ne peut être privé du droit à la liberté de réunion et d'association, c'est-à-dire du droit de se réunir librement et de s'associer avec d'autres, et en particulier de constituer des syndicats ou autres associations visant à la défense de ses intérêts ou d'adhérer à ces syndicats et associations, ainsi qu'à l'article 22, aux termes duquel nul ne peut être privé de la liberté d'expression, c'est-à-dire de la liberté d'émettre des opinions, de recevoir et de communiquer des idées et des informations (que celles-ci concernent l'intérêt public, un individu ou une catégorie d'individus) et de correspondre.
- 866. La requête rappelle la résolution de 1952 de l'OIT concernant l'indépendance du mouvement syndical et affirme que la loi de 1990 vise à permettre à l'Etat d'entraver le bon fonctionnement du ZCTU et de ses syndicats affiliés pour répondre au fait que le ZCTU a librement décidé de ne pas s'associer au programme politique du Parti uni de l'indépendance nationale, le parti qui était au pouvoir lors du dépôt de la déclaration.
- 867. Cette requête conteste les dispositions suivantes de la loi: l'article 2(2), qui permet au ministre d'exempter toute personne des dispositions obligatoires de cette loi, dont celles qui concernent le droit des citoyens d'adhérer ou non à un syndicat; l'article 3(1), qui restreint les activités syndicales en déclarant certains services essentiels et en interdisant la grève dans ces services; l'article 14(1), qui met fin à l'affiliation des syndicats au ZCTU et subordonne leur réaffiliation à un vote à la majorité des deux tiers de l'ensemble des membres; l'article 14(2), qui applique au ZCTU des dispositions similaires en matière de désaffiliation; l'article 15, qui porte atteinte à la liberté et à l'indépendance des syndicats en disposant que les décisions syndicales doivent être prises obligatoirement à bulletins secrets et que le scrutin doit être contrôlé par un inspecteur du travail, ainsi qu'en décidant la création d'un fonds syndical affecté aux dépenses politiques, qui aura pour conséquence d'empêcher les syndicats de mener librement leurs activités politiques; l'article 20, qui donne pouvoir au Commissaire au travail de suspendre les responsables syndicaux soupçonnés de mauvaise gestion financière ou d'irrégularités, alors que tous les syndicats enregistrés disposent déjà d'une procédure propre visant à destituer leurs responsables ou à leur infliger des sanctions; l'article 22(2), qui permet aux employeurs, moyennant préavis d'un mois, de mettre fin à un accord visant à déduire les cotisations syndicales; l'article 29(2), qui prévoit la création par le ZCTU d'un fonds facultatif affecté aux dépenses politiques, fonds soumis au contrôle du gouvernement conformément à l'article 61 de la loi; l'article 30, qui interdit aux personnes dont la liberté de mouvement a été limitée pour une période supérieure à six mois par une loi zambienne d'exercer un poste de responsabilité au ZCTU (il s'agit là d'une grave restriction, car les détentions administratives ont été monnaie courante durant la période où la Zambie a été gouvernée par le Parti uni de l'indépendance nationale); l'article 35, qui subordonne l'aide technique et financière extérieure à l'approbation préalable du ministre.
B. Réponse du précédent gouvernement
B. Réponse du précédent gouvernement
- 868. Dans une lettre du 11 octobre 1991, le précédent gouvernement a répondu aux allégations de la FIM en soutenant que, par rapport à la loi de 1971, la loi de 1990 a considérablement restreint la notion de service essentiel pour se conformer à l'avis exprimé depuis longtemps par l'OIT, à savoir que la définition précédente était trop large pour pouvoir être appliquée efficacement et équitablement. C'est pourquoi, dans la loi de 1990, la notion de service essentiel s'applique aux domaines où une interruption d'activité aurait de graves conséquences pour la vie, la sécurité ou la santé de tout ou partie de la population. Le gouvernement a ajouté qu'en 1989 une mission consultative de l'OIT en Zambie avait examiné la définition des services essentiels qui figurait dans le projet de loi provisoire. La version finale de la définition - celle de la loi de 1990 - s'inspire donc principalement des suggestions faites par la mission de l'OIT. Par ailleurs, il a été décidé, lors d'une réunion consultative tripartite tenue le 18 septembre 1989, de créer une commission spéciale tripartite chargée d'examiner la définition des services essentiels et de faire les recommandations voulues. La direction de la société Zambia Consolidated Copper Mines Limited a participé directement aux travaux de cette commission, de même que celle du Syndicat des mineurs de Zambie, en la personne de son président national en exercice. La commission a délégué l'examen des aspects de la question qui concernaient les mines aux deux représentants du secteur, qui ont recommandé de considérer comme services essentiels les activités suivantes: extraction, opérations métallurgiques, ingénierie, aérage, études géologiques et achats. Cette recommandation a été ensuite adoptée par l'ensemble de la commission spéciale. On voit ainsi tout d'abord que le Syndicat des mineurs de Zambie, qui est l'organisation plaignante, a participé au débat sur la définition des services essentiels, ensuite que la définition finalement adoptée pour les mines est beaucoup plus étroite que celle qui avait été recommandée par un organe aux travaux duquel le syndicat avait participé très activement.
- 869. Plus précisément, le gouvernement réfutait l'affirmation de la FIM selon laquelle, en raison de la nature des activités minières, la définition des services essentiels dans les mines englobait l'ensemble des opérations d'extraction. Selon le gouvernement, de très nombreuses activités liées à l'exploitation minière échappaient à la définition de l'article 128(9)(f) de la loi de 1990. S'agissant de l'assertion selon laquelle une interruption des services visés par cet article ne menacerait pas la vie, la sécurité personnelle et la santé de tout ou partie de la population, le gouvernement a déclaré qu'au contraire une telle interruption serait catastrophique. L'allégation du plaignant semble témoigner d'une méconnaissance de la nature des activités minières souterraines en Zambie. Pour prendre un exemple, la mine de Chililabombwe est l'une des plus humides du monde: on doit y pomper l'eau en permanence à raison de 400.000 m3 par jour. Une interruption du drainage due à un arrêt de travail des préposés aux pompes et des autres travailleurs participant au pompage aurait pour conséquence non seulement de provoquer l'inondation immédiate de la mine, mais aussi, ce qui est encore pire, de menacer très gravement la vie des autres mineurs, au fond ou ailleurs.
- 870. S'agissant de l'exercice des droits syndicaux fondamentaux dans le secteur minier, le gouvernement fait remarquer que les mineurs sont placés sur un pied d'égalité avec l'ensemble des autres travailleurs zambiens. Pour ce qui est du droit de grève, il reconnaît qu'il s'agit là pour les travailleurs d'un moyen légitime de défense de leurs intérêts qui fait partie intégrante des relations professionnelles. Cependant, le gouvernement considère en même temps que la grève ne peut être autorisée dans certains services en raison des dangers qu'elle présente. C'est pourquoi les travailleurs qui sont occupés dans ces services, définis par la loi, n'ont pas le droit de faire grève en tout temps comme ils le souhaitent; c'est pourquoi aussi il a été mis à la disposition des parties des procédures rapides de règlement des différends, dont un système d'arbitrage confié à une instance impartiale. Lorsque les travailleurs des services essentiels bravent ces dispositions, ils commettent une grave infraction passible de prison. Il importe d'insister sur le fait que, contrairement à ce qu'affirme la FIM, le pouvoir dévolu à la police de procéder à des arrestations sans mandat en vertu de l'article 128(5) de la loi ne vaut que pour les travailleurs des services essentiels et pour les personnes qui en incitent d'autres à commettre des infractions visées par cet article, et non pour l'ensemble des travailleurs des mines.
- 871. En ce qui concerne les piquets de grève et activités connexes, qui sont régis par l'article 124 de la loi de 1990, le gouvernement a déclaré qu'aucune disposition de cette loi ne s'opposait à ces activités lorsqu'elles étaient menées pacifiquement et qu'elles ne se déroulaient pas dans un lieu d'habitation ou à proximité d'un tel lieu. En revanche, les piquets de grève non pacifiques étaient interdits. Cette disposition visait essentiellement à empêcher les manoeuvres d'intimidation et les actes de violence liés aux conflits du travail. Le gouvernement a refusé également que les activités syndicales et les piquets de grève aient lieu dans les lieux d'habitation ou à proximité, le sens de cette dernière expression étant évident. Cette disposition visait à protéger la vie privée des citoyens chez eux, conformément à la Constitution de la Zambie.
- 872. Le gouvernement a répondu aux allégations de la CISL dans sa lettre du 14 octobre 1991. Au sujet de la loi de 1990 sur la Commission des traitements et des conditions d'emploi, il a déclaré que l'article 10 de cette loi garantissait le droit à la négociation collective des syndicats de la fonction publique et de ceux qui représentaient les travailleurs syndiqués des entreprises parapubliques qui remplissaient les conditions voulues. Ce qui était nouveau par rapport à l'ancien système où les syndicats de la fonction publique et le gouvernement enregistraient les conventions collectives auprès de la Commission des prix et des revenus, c'était que, désormais, en vertu de l'article 5 de la loi, les conventions étaient soumises à la nouvelle commission qui était habilitée à en modifier les dispositions pour tenir compte de l'intérêt public, de la capacité de paiement de l'Etat et des entreprises parapubliques et de l'aptitude de l'économie à faire face aux charges qu'elles impliquaient. Les nouveaux pouvoirs de la commission tenaient compte des enseignements tirés par le gouvernement de la dernière convention collective qu'il avait conclue avec les quatre syndicats de la fonction publique. Cette convention garantissait aux fonctionnaires une indemnité de logement qui a eu des effets inflationnistes et a introduit de graves ambiguïtés dans la structure nationale des rémunérations. La nouvelle formule était rendue nécessaire par la situation particulière de la Zambie; or les conventions de l'OIT reconnaissent qu'il y a là un motif acceptable de modifier l'application de leurs dispositions.
- 873. Le gouvernement a souligné que les membres de la commission tripartite avaient été nommés récemment et qu'ils comptaient dans leurs rangs un ancien syndicaliste et un représentant des employeurs; loin d'affaiblir la négociation collective dans le secteur public et parapublic, les décisions de la commission devaient la renforcer.
- 874. En ce qui concerne la loi de 1990 sur les relations professionnelles, le gouvernement a précisé que cette loi avait été votée par le Parlement à la fin de 1990, promulguée par le Président de la République le 31 janvier 1991 et mise en oeuvre par le ministre le 1er juin 1991 au moyen du règlement d'application no 66 de 1991. La nouvelle loi avait récemment fait l'objet d'un réexamen, au cours duquel un certain nombre d'amendements avaient été proposés. Un projet de loi visant à adopter ces amendements devait être soumis au Parlement peu après l'élection présidentielle et les élections générales prévues pour le 31 octobre 1991.
- 875. Répondant à l'allégation concernant plus particulièrement l'enregistrement et la dissolution des syndicats, le gouvernement a déclaré que la loi de 1990 imposait à toute organisation prétendant au statut de syndicat de se faire enregistrer dans les six mois suivant la date de sa constitution; si cet enregistrement était refusé, l'organisation devait se dissoudre après que notification lui eut été donnée de ce refus. Ces dispositions ne sont pas nouvelles; elles figuraient déjà dans la loi sur les syndicats et les différends du travail, désormais abrogée, et dans la loi de 1971 sur les relations professionnelles. Le gouvernement a déclaré également que le ministre était habilité à réglementer l'enregistrement des syndicats; c'est ainsi qu'il avait pris le règlement no 67 de 1991 (exemplaire joint), qui ne portait que sur des questions de forme et de procédure, et dont l'on ne pouvait donc dire qu'il imposait une autorisation préalable à la constitution des syndicats ou qu'il y mettait des obstacles. S'agissant du droit du Commissaire au travail de refuser d'enregistrer un syndicat, le gouvernement a rappelé les articles 10 et 77 de la loi, qui autorisaient toute personne s'estimant lésée par un tel refus ou par la décision du commissaire d'annuler l'enregistrement d'un syndicat à faire appel en première instance devant le Tribunal du travail, puis devant la Cour suprême. Cette possibilité d'appel témoignait des limites qui avaient été imposées aux pouvoirs du Commissaire au travail.
- 876. En ce qui concerne l'allégation relative à des ingérences dans les activités syndicales, le gouvernement niait que le fait d'exiger des syndicats qu'ils décident démocratiquement de leur affiliation éventuelle au ZCTU constituât une ingérence préjudiciable à la liberté syndicale. Il estimait que les dispositions de la nouvelle loi en la matière renforçaient les droits démocratiques des syndicats et de leurs membres. La loi de 1971 sur les relations professionnelles, désormais abrogée, rendait l'affiliation des syndicats au ZCTU obligatoire; outre qu'elle a rendu cette affiliation facultative, la loi de 1990 a donné aux syndicats la possibilité de décider démocratiquement de leur affiliation au ZCTU.
- 877. Par ailleurs, le gouvernement a souligné que les syndicats étaient libres d'élaborer leurs propres statuts. Le fait que la loi de 1990 leur imposait de se conformer à certaines exigences légales ne contrevenait pas au principe de la liberté syndicale ni au droit des syndicats d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, garantis par la convention no 87. Le gouvernement a ajouté que ce droit n'est pas absolu: il devait respecter la législation du pays et les conditions locales.
- 878. En vertu des articles 15 et 35 de la loi de 1990, certaines décisions syndicales devaient être prises au scrutin secret sous le contrôle d'un inspecteur du travail. Les décisions relatives à l'affiliation à des organisations internationales de travailleurs exigeaient l'approbation des deux tiers des membres du syndicat. Après la promulgation de la loi, le ZCTU a obtenu que ces articles, ainsi d'ailleurs que d'autres, soient modifiés le moment venu. Les nouvelles dispositions devaient permettre aux syndicats de demander à des personnes indépendantes de contrôler les scrutins, sauf pour les votes de grève, qui resteraient sous le contrôle de l'inspection du travail. Ces dispositions témoignaient suffisamment que l'on n'envisageait nullement d'empêcher les syndicats de nouer des relations internationales.
- 879. S'agissant de l'aide technique et financière extérieure dont bénéficiaient les syndicats, le gouvernement a noté que, en vertu de la loi de 1971, les syndicats, le ZCTU, les associations d'employeurs et la Fédération des employeurs étaient tenus de demander l'autorisation du ministre avant d'accepter ne serait-ce que des billets d'avion et de petits cadeaux personnels. La loi de 1990 a limité le pouvoir du ministre d'autoriser les aides techniques et financières. Selon le gouvernement, il fallait éviter que le mouvement du travail zambien ne fasse l'objet de manipulations extérieures qui menaceraient la sécurité du pays par le biais d'offres extérieures faites à des membres de syndicats et d'associations insufisamment sur leurs gardes. Il était donc souhaitable que le gouvernement en place soit tenu informé des mouvements d'entrée dans le pays et connaisse la valeur de l'aide provenant de toutes les sources extérieures.
- 880. S'agissant de l'article 17 de la loi, qui précisait les qualités requises pour être élu à une charge syndicale, le gouvernement considérait que les dispositions de cet article ne restreignaient pas le droit des travailleurs d'élire librement ceux de leurs représentants qui étaient qualifiés. L'obligation de n'élire que des personnes ayant exercé des fonctions ou une activité professionnelle dans la branche d'activité dont s'occupait directement le syndicat visait à garantir que les personnes élues connaissaient bien la situation des travailleurs intéressés et, partant, étaient à même de les représenter pleinement et efficacement. Quant à la récusation de candidatures à l'exercice de fonctions au ZCTU, cette question avait été examinée et un amendement à la loi devait être introduit en temps utile. Le gouvernement soulignait qu'aucune des dispositions de la nouvelle loi ne visait, comme le prétendait la CISL, des membres précis du mouvement syndical.
- 881. En ce qui concerne la relation entre le ZCTU et les syndicats qui lui étaient affiliés, le gouvernement a expliqué que, dans une décision de la Cour suprême dans l'affaire Syndicat national des travailleurs du bâtiment, des industries mécaniques et autres travailleurs (NUBEGW) c. ZCTU (1988), la Cour avait reconnu que les syndicats, en Zambie, étaient des entités légales autonomes et non des appendices ou des antennes du ZCTU, notamment pour ce qui est de la gestion interne. La Cour avait recommandé que la relation entre le ZCTU et les syndicats qui lui étaient affiliés soit bien précisée. C'est pourquoi l'article 35(2) de la loi de 1990 clarifiait cette relation ainsi que l'étendue du pouvoir que le ZCTU exerce sur les organismes qui lui étaient affiliés.
- 882. Au sujet de l'interdiction faite par l'article 30(4) à toute personne exerçant à plein temps des responsabilités au ZCTU d'exercer parallèlement un mandat à la direction d'un autre syndicat quel qu'il soit, le gouvernement a souligné que cette mesure se justifie par le désir de promouvoir et de maintenir l'impartialité de ces responsables lorsque les intérêts du ZCTU et ceux de ses affiliés divergeaient. Dans le cas NUBEGW c. ZCTU (1988) évoqué plus haut, il y avait eu manifestement un conflit d'intérêt.
- 883. Note a été prise de la préoccupation exprimée par la CISL au sujet de la faculté du Commissaire au travail de démettre de ses fonctions tout responsable d'un syndicat ou d'un congrès ayant commis une faute. Le gouvernement estimait cependant que c'était là une faculté légitime dont les autorités pouvaient user lorsque les règles continuaient d'être violées. Elle ne pouvait et n'avait pas lieu d'être considérée comme une suspension administrative.
- 884. En ce qui concerne les nouvelles règles régissant les accords sur la retenue à la source des cotisations syndicales, le gouvernement a déclaré qu'il n'acceptait pas l'allégation selon laquelle le prélèvement des cotisations syndicales avec le consentement des intéressés était entravé par les dispositions de la nouvelle loi. Si l'on comparait les dispositions de l'article 22 de la nouvelle loi à l'article 19 de la loi abrogée, on ne constatait aucun changement important. Le gouvernement considérait que, puisque les accords relatifs à la déduction et au prélèvement des cotisations avaient un caractère facultatif, les parties devaient avoir la possibilité de choisir de ne pas participer à ce système. Le gouvernement soutenait que le droit d'association impliquait le droit de dissociation. Pour la majorité des personnes syndiquées, le système de cotisation obligatoire n'était pas démocratique, aussi avait-il été remplacé dans la nouvelle loi.
- 885. A propos de la réglementation de l'emploi des fonds syndicaux, le gouvernement indiquait que la loi visait à protéger ces ressources contre tout abus et à garantir leur utilisation conforme aux objectifs déclarés ou aux activités légitimes des organisations. La prescription selon laquelle les membres des syndicats devaient être consultés au sujet de la création de fonds destinés à servir des fins politiques devait s'entendre comme une norme propre à renforcer la procédure de décision démocratique au sein des syndicats.
- 886. S'agissant des conventions collectives, des conflits collectifs et des grèves, le gouvernement précisait que le Tribunal du travail était une institution judiciaire. Bien qu'il relevât du ministre du Travail, le tribunal fonctionnait de manière indépendante et, ainsi qu'il ressortait de l'article 64(4) de la loi, son principal objet était de dire le droit sur les cas dont il était saisi. Le gouvernement refusait d'admettre que, par sa composition, le tribunal ne pût agir en toute indépendance: bien que les assesseurs fussent nommés par le ministre, leur nom était proposé par les syndicats et les organisations d'employeurs. La fonction des assesseurs était d'associer directement les représentants des employeurs et des travailleurs aux travaux du tribunal. L'intention n'était pas que les assesseurs assument le rôle et les fonctions du tribunal. Comme c'est le cas dans d'autres institutions judiciaires, le rôle des assesseurs était consultatif. Il était inexact de donner à entendre que les décisions du Tribunal du travail étaient sans appel: les parties qui s'estimaient lésées pouvaient faire appel de toute décision du Tribunal du travail auprès de la Cour suprême. Le gouvernement renvoyait à l'article 77 de la loi de 1990, qui ne figurait pas dans la loi de 1971. Comme pour l'article 73 de la loi de 1990, le gouvernement a indiqué qu'il n'admettait pas les inquiétudes exprimées par la CISL au sujet des incidences négatives auxquelles seraient soumises l'équité et l'indépendance du tribunal lorsque les procès se tiendraient à huis clos. De l'avis du gouvernement, cette disposition n'était nullement incompatible avec les garanties offertes par la convention de l'OIT sur la liberté syndicale.
- 887. Le gouvernement avait pris note des allégations relatives aux structures et aux procédures de la négociation collective, mais avait fait valoir que l'un des principes qui sous-tendaient la loi de 1990 était que la négociation collective devait constituer la principale base de détermination des conditions d'emploi du gros de la main-d'oeuvre. Les dispositions de la loi touchant la constitution des syndicats et des associations d'employeurs, la conclusion d'accords de reconnaissance entre les employeurs et les syndicats et la création de conseils professionnels paritaires visaient toutes à faire en sorte que la négociation collective joue un rôle croissant dans le système de relations professionnelles. L'article 85 de la loi, qui exigeait expressément des employeurs et des syndicats qu'ils engagent des négociations en vue de conclure des conventions collectives, devait être considéré comme une disposition positive de nature à promouvoir la négociation collective. Le gouvernement a expliqué qu'en Zambie les conventions collectives ont habituellement une durée de validité précise à l'issue de laquelle elles n'étaient plus valables, à moins que les parties aux négociations ne les reconduisent délibérément. Par conséquent, lorsqu'une convention n'était pas validée par reconduction ou remplacée par un nouveau texte, les travailleurs intéressés devaient assurer leur service sans que des conditions d'emploi précises soient prévues pour eux. C'est pour cette raison qu'il était demandé aux parties aux négociations d'entamer et de conclure les négociations trois mois avant l'expiration de la convention en vigueur. Si les parties ne parvenaient pas à faire aboutir leurs négociations, elles étaient alors censées proroger la convention en vigueur. On ne saurait lire l'article 85 isolément et conclure qu'aucun conflit découlant de l'incapacité de conclure des conventions collectives n'est envisagé. Il était clair que l'article 91 de la loi prévoyait la possibilité de conflits en cas d'incapacité de parvenir à un accord sur les conditions d'emploi, et une telle incapacité serait une cause ou une excuse raisonnable aux fins de l'article 85.
- 888. L'article 86 de la loi exigeait que les conventions collectives soient soumises pour enregistrement à la Commission des prix et des revenus avant leur mise en oeuvre. La commission avait été créée en application des dispositions de l'article 4 de la loi de 1981 sur la Commission des prix et des revenus, et avait pour fonction: a) d'élaborer et de recommander au gouvernement pour approbation une politique générale des prix et des revenus; b) de surveiller l'application et la mise en oeuvre de la politique des prix et des revenus telle qu'elle a été approuvée par le gouvernement; et c) d'examiner et d'enregistrer les conventions collectives. Le gouvernement a expliqué que les principaux groupes d'intérêts, dont les organisations d'employeurs et de travailleurs, étaient représentés à la commission et prenaient part à ses délibérations. La politique des prix et des revenus qui était définitivement adoptée n'était donc pas imposée par le gouvernement, mais était le fruit de délibérations tripartites sérieuses et d'un accord de toutes les parties, et il convenait qu'à certains moments elle soit en accord avec les plans et les programmes généraux du gouvernement. Lorsque la commission n'était pas en mesure d'enregistrer une convention collective, elle la renvoyait pour renégociation aux parties intéressées. Le gouvernement a souligné qu'il adoptait de temps à autre des plans et des programmes de développement généraux qui, par leur nature même, imposaient au gouvernement de sauvegarder l'intérêt général. Bien entendu, le gouvernement ne pouvait déléguer entièrement cette responsabilité aux syndicats et aux employeurs et à leurs organisations. Il incombait au gouvernement de faire en sorte que les activités soient conformes à l'orientation de la politique nationale de développement dans les domaines de la vie publique et de l'ordre public, notamment en ce qui regarde les relatins professionnelles.
- 889. Pour ce qui est de la définition des services essentiels qui figure à l'article 127, le gouvernement considérait qu'elle était bien plus étroite que celle de la loi de 1971 et qu'elle était conforme à la définition internationale: il s'agissait des services dont l'interruption risquait de mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne. Le gouvernement a répété que la définition qui figurait dans la la loi de 1990 avait été élaborée en collaboration avec une mission consultative de l'OIT qui s'était rendue en Zambie en 1989. Il a souligné également que le Tribunal du travail n'avait pas compétence pour déclarer "essentiels" tous les services pouvant être touchés par un mouvement de grève. Le tribunal ne pouvait le faire que dans les cas où, par un contrôle objectif, il était convaincu qu'une grève ou une menace de grève dans le service en question constituait ou constituerait un danger immédiat et réel pour la vie, la sécurité ou la santé d'une partie ou de l'ensemble de la population. La crainte exprimée par la CISL ne paraissait donc pas fondée. Après tout, la loi de 1971 conférait au ministre des pouvoirs discrétionnaires lui permettant de déclarer "essentiel" n'importe quel service, alors que la loi de 1990 reportait ces pouvoirs sur un tribunal indépendant. Le ministre ne pouvait que recommander au tribunal une déclaration.
- 890. Quant au règlement des conflits relatifs aux services essentiels, le gouvernement a indiqué que la raison d'être des dispositions y relatives était que ces conflits devaient être traités dans les plus brefs délais. C'est pourquoi il était prévu que les conflits impliquant des services essentiels devaient être directement soumis à l'arbitrage. L'allégation calomnieuse relative à l'impartialité du Tribunal du travail était sans aucun fondement. S'agissant du pouvoir de la police d'arrêter sans mandat tout gréviste appartenant à un service essentiel ou toute personne incitant un travailleur d'un tel service à commettre une infraction, le gouvernement ne pensait pas que ce pouvoir porte atteinte à l'exercice des droits syndicaux fondamentaux. Le fait de priver les usagers, par une grève, d'un service essentiel n'était pas un droit syndical fondamental. Quoi qu'il en soit, de tels cas seraient portés devant le tribunal et l'action en justice suivrait son cours normal. En ce qui concerne les actions de grève déclenchées par des travailleurs assurant des services non essentiels, le gouvernement a déclaré que la loi de 1971 n'indiquait pas expressément que les grèves étaient illégales et ne précisait pas à quelle étape de la procédure de règlement du conflit une grève légale pouvait être déclenchée. La loi de 1990 n'avait pas expressément retenu le droit de grève mais précisait sans équivoque le moment auquel une grève légale pouvait être menée, à savoir lorsqu'un conflit collectif avait été déclaré par les parties et que la grève avait été votée. Note avait été prise de l'observation de la CISL selon laquelle l'exigence d'une majorité des deux tiers des personnes habilitées à voter en faveur d'une action de grève constituait une obstruction à l'exercice du droit de grève. Toutefois, s'il reconnaissait que la grève était un moyen légitime auquel les travailleurs pouvaient recourir, le gouvernement reconnaissait aussi les inconvénients qui pouvaient résulter - et résultaient habituellement - de l'effet perturbateur des grèves tant pour l'employeur que pour les travailleurs, ainsi que pour le public en général. C'est pourquoi il convenait de ne recourir aux grèves que lorsque les autres voies de règlement possibles des conflits avaient échoué. Le fait de se mettre en grève était une décision si importante qu'elle devait être fermement appuyée par les travailleurs intéressés, et le gouvernement considérait qu'une proportion des deux tiers traduisait un tel appui.
- 891. Comme tout gouvernement conscient de ses responsabilités, le gouvernement zambien avait non seulement le devoir d'établir des règles, des institutions et des procédures pour organiser les relations professionnelles, mais il était aussi investi - en tant que protecteur de l'intérêt général - de lourdes responsabilités. Le gouvernement ne pouvait demeurer passif lorsque l'intérêt général était sérieusement menacé. L'article 94(3)(b) de la loi visait à permettre au gouvernement de prendre des mesures pour assurer la protection de l'intérêt général par le moyen d'une déclaration de justice.
- 892. En ce qui concerne l'interdiction alléguée des grèves de solidarité, le gouvernement appelait l'attention sur la définition du "conflit collectif" contenue dans l'article 3, qui était à rapprocher de l'article 91 de la loi: un conflit collectif était réputé exister lorsqu'un conflit avait lieu entre un employeur ou une organisation représentant les employeurs et les travailleurs ou une organisation représentant les travailleurs à propos de leurs conditions d'emploi. Par conséquent, si une grève était déclenchée dans le cadre d'un conflit du travail, elle ne devait impliquer que les travailleurs directement touchés par l'objet du conflit.
- 893. Quant aux piquets de grève et aux activités connexes dont traite l'article 124 de la loi, rien n'empêchait, selon le gouvernement, l'organisation pacifique de piquets de grève, pourvu que ce ne soit pas dans un lieu d'habitation ou à proximité. Lorsque les piquets de grève étaient organisés autrement que de manière pacifique, ils étaient interdits. Le but de cette disposition était de préserver la vie privée, comme le prévoyait la Constitution nationale, et d'empêcher les mesurs d'intimidation et les actes de violence lors de conflits du travail. Le gouvernement ne pensait pas que le droit d'association soit violé par l'interdiction des mesures d'intimidation ou des actes de violence lors de l'organisation de piquets de grève. Il ne reconnaissait pas non plus jouir d'un pouvoir discrétionnaire lui permettant d'identifier les actes d'intimidation ou les actes risquant, au sens de l'article 124, de provoquer des troubles de l'ordre public. Les autorités devaient prouver les faits devant une instance judiciaire.
C. Réponse du nouveau gouvernement
C. Réponse du nouveau gouvernement
- 894. Dans sa lettre du 14 novembre 1991, le nouveau gouvernement répond aux allégations de l'ISP, en notant que la Haute Cour est toujours saisie de la requête. Il souligne qu'il a la ferme intention de réviser très prochainement la loi de 1990 sur les relations professionnelles afin de garantir et promouvoir les droits syndicaux et les droits des travailleurs. Il ajoute que la révision prochaine sera précédée d'un examen tripartite de la loi.
- 895. Dans sa lettre du 29 janvier 1992, le gouvernement indique qu'une réunion consultative tripartite s'est tenue avec succès du 22 au 24 janvier 1992 avec la participation de représentants du nouveau gouvernement, du ZCTU et de la Fédération des employeurs de Zambie. Il a été procédé à une révision complète de la loi de 1990, qui donnera lieu à plusieurs modifications des dispositions faisant l'objet de la plainte.
- 896. Dans sa lettre du 13 avril 1992, le gouvernement annonce que le Parlement sera saisi, probablement à sa prochaine session, d'un projet de loi prenant en compte les modifications proposées par la consultation tripartite susmentionnée.
- 897. Dans sa lettre du 16 juillet 1992, le gouvernement déclare que la loi sur la Commission des traitements et des conditions d'emploi sera abrogée en temps opportun. La rédaction du projet de loi portant modification de la loi de 1990 sur les relations professionnelles est en cours et la procédure de modification devrait être rapidement menée à bien.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité
- 898. Le comité note que le présent cas concerne des allégations relatives: 1) à la loi de 1990 sur la Commission des traitements et des conditions d'emploi qui ferait obstruction au droit de négociation collective des travailleurs des secteurs public et parapublic; 2) à la loi de 1990 sur les relations professionnelles, dans une série de dispositions, qui permettrait à l'Etat d'intervenir dans le droit des travailleurs de constituer des syndicats et de s'y affilier, le droit des organisations de travailleurs de fonctionner librement, le droit de ces organisations de faire grève, leur droit de s'affilier et leur droit de négocier collectivement.
- 899. Tout d'abord, le comité note qu'un changement de gouvernement est intervenu en Zambie après le dépôt de ces plaintes, et que le nouveau gouvernement a récemment annoncé qu'à la suite d'utiles consultations tripartites le Parlement va être saisi, à sa prochaine session, d'un projet de loi portant modification de la loi de 1990 sur les relations professionnelles. Il note également que la loi sur la Commission des traitements et des conditions d'emploi doit être prochainement abrogée.
- 900. Le comité n'estime pas que des commentaires sur la loi qui doit être abrogée à bref délai présenteraient une utilité à ce stade. Toutefois, étant donné qu'une série d'amendements à la loi de 1990 sur les relations professionnelles sont en cours de préparation, le comité considère opportun d'indiquer les problèmes particuliers ressortissant à la liberté syndicale posés par la loi de 1990 et auxquels le projet de loi modificatrice devrait remédier.
- 901. S'agissant du droit de constituer des organisations, les organisations plaignantes soulignent que l'enregistrement est obligatoire mais que les conditions d'enregistrement (article 8) et les larges pouvoirs dont jouit le Commissaire au travail - qui lui permettent de refuser ou d'annuler l'enregistrement (article 9) - reviennent à exiger une autorisation préalable et, en cas d'annulation, constituent une sorte de dissolution par voie administrative. Le comité note que certaines des conditions requises sont en réalité extrêmement difficiles à remplir, comme le seuil de 100 membres fixé pour le nombre minimum de membres, dont tous doivent signer le formulaire de demande d'enregistrement (article 8(1) et (2)). Dans des cas antérieurs, le comité a considéré que la création d'un syndicat peut être considérablement gênée ou même rendue impossible lorsque la législation fixe le nombre minimum des membres d'un syndicat à un niveau manifestement trop élevé, par exemple à 50 fondateurs (Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 256). En outre, le comité a souligné que l'annulation par le greffier des syndicats de l'enregistrement d'une organisation équivaut à la suspension ou à la dissolution de ladite organisation par voie administrative (Ibid., paragr. 489).
- 902. Concernant la désaffiliation automatique des syndicats au ZCTU et la nécessité d'une majorité des deux tiers pour la réaffiliation, prévues par l'article 14(1), le comité considère qu'il s'agit d'une violation manifeste du droit des organisations de s'affilier à des fédérations et des confédérations.
- 903. A propos du droit des organisations de travailleurs de fonctionner sans ingérence du gouvernement, les organisations plaignantes font valoir que les articles 15 et 29 prescrivent dans le détail les questions à inclure respectivement dans les statuts des syndicats et dans ceux du ZCTU, au lieu de laisser les organisations arrêter elles-mêmes le contenu de leurs statuts. Le comité considère que certaines de ces prescriptions devraient être traitées dans le cadre des statuts des organisations de travailleurs et ne devraient pas faire l'objet d'une disposition juridique contraignante: on peut citer, par exemple, la nécessité d'énoncer dans les statuts les fins auxquelles les fonds du syndicat peuvent être employés (Recueil, paragr. 289). Le comité considère également que l'obligation, qui ne doit figurer que dans les statuts du ZCTU, de recourir à un scrutin à bulletin secret pour régler la question de l'affiliation à un organisme sis hors de Zambie (article 29(2)(k)(iii)), devrait également être traitée dans le cadre des statuts syndicaux.
- 904. Les organisations plaignantes font également valoir que les nouvelles conditions requises pour pouvoir exercer une charge syndicale sont contraires au droit des organisations de travailleurs d'élire librement leurs dirigeants, en particulier l'obligation d'avoir exercé pendant douze mois dans la branche (article 17(1)(a)), l'absence de responsabilité dans l'annulation d'un enregistrement (article 17(1)(b)) et la déchéance des fonctions de direction du ZCTU associée à des restrictions de la liberté de mouvement (article 30(1)(e)). Le comité a déclaré à maintes reprises par le passé que des dispositions exigeant que tous les dirigeants exercent depuis plus d'un an la profession au moment où ils sont élus ne sont pas en harmonie avec les principes de la liberté syndicale (Recueil, paragr. 304). En outre, le comité se félicite de l'engagement pris par le gouvernement de modifier la condition exigée pour être qualifiée qui est associée à des restrictions de la liberté de mouvement, particulièrement sévères, semble-t-il, et non associées au fait d'avoir été accusé ou retenu coupable d'un délit précis pouvant influer sur l'aptitude de la personne en cause à être nommée à un poste de confiance et à assumer des responsabilités au sein d'une organisation de travailleurs (Recueil, paragr. 315).
- 905. En ce qui concerne l'interdiction du cumul de fonctions (articles 17(3) et 30(4)), le comité estime que l'interdiction d'exercer des fonctions dans plusieurs organisations de travailleurs contrevient au droit des travailleurs de choisir les personnes qu'ils considèrent les mieux à même de les représenter (Recueil, paragr. 293).
- 906. Les plaignants allèguent que les nouvelles dispositions relatives aux finances syndicales et au pouvoir discrétionnaire du gouvernement de suspendre les dirigeants syndicaux ayant commis des irrégularités financières (articles 20 et 33) enfreignent le droit des organisations de travailleurs de gérer leurs affaires et de déployer leurs activités sans ingérence extérieure. Le comité est conscient de la nécessité de prendre des mesures pour protéger les fonds syndicaux contre le mauvais usage qui pourrait en être fait et pour empêcher les fraudes, et il considère que certaines exigences telles que les vérifications annuelles des comptes sont acceptables (Recueil, paragr. 328, 330, 331 et 332). Cependant, il a toujours été soucieux d'éviter que ces mesures soient appliquées d'une manière telle qu'elles portent atteinte à l'autonomie de l'organisation syndicale et il a clairement affirmé que le contrôle exercé par les autorités sur les finances syndicales ne devait normalement pas aller au-delà de l'obligation de soumettre des rapports périodiques (Recueil, paragr. 333). Dans le cas présent, les dispositions de la loi de 1990 confèrent des pouvoirs discrétionnaires au greffier des syndicats pour ordonner la suspension administrative du responsable syndical en cause - la loi disposant implicitement qu'il ne peut pas être fait appel de cette suspension devant le Tribunal du travail - sans qu'une enquête préalable soit nécessaire. Le comité estime donc que ces dispositions sont contraires au principe selon lequel le contrôle administratif devrait être limité aux cas exceptionnels, par exemple en cas d'irrégularités présumées dans les rapports financiers annuels ou à la suite de plaintes émanant d'adhérents (Recueil, paragr. 334), et que la destitution de responsables syndicaux ne devrait se faire que par voie judiciaire (Etude d'ensemble, 1983, paragr. 177).
- 907. S'agissant des allégations des plaignants selon lesquelles les nouvelles dispositions relatives à la retenue à la source vont à l'encontre du système pratiqué de vieille date par les syndicats et les employeurs, le gouvernement précédent avait répondu que l'article 22 de la loi de 1990 ne modifiait pas substantiellement l'ancienne disposition, mais se contentait de supprimer le système de la cotisation obligatoire en permettant aux adhérents de ne pas y participer. Il apparaît donc que le système de retenue à la source demeure en vigueur, mais que l'employeur ou le salarié ont le droit de cesser d'y participer moyennant un préavis écrit d'un mois. Dans des cas antérieurs, le comité a estimé que le retrait de la possibilité de retenir les cotisations à la source, qui pourrait déboucher sur des difficultés financières pour les organisations syndicales, étant donné les difficultés pratiques qu'entraîne le recouvrement de ces cotisations, n'est pas propice à l'instauration de relations professionnelles harmonieuses et devrait donc être évitée (Recueil, paragr. 325), et il considère que les nouvelles dispositions ne sont pas contraires à ce principe.
- 908. Sur ce point, les plaignants mentionnent également les restrictions apportées à l'emploi des fonds syndicaux par l'article 62(1) (interdiction des dépenses non consacrées au bien-être des membres) et la création d'un fonds facultatif affecté aux "dépenses politiques volontaires" dans les cas où les organisations de travailleurs et d'employeurs poursuivent des objectifs politiques (articles 15(1)(d), 29(2)(b) et 62(2) et (3)), fonds qui sera géré conformément aux règles fixées par le ministre. Ici encore, le comité ne peut que noter que ce type de contrôle exercé sur les affaires des organisations de travailleurs (et d'employeurs) va au-delà de la simple vérification de conformité avec les lois et les règles financières en vigueur. Il rappelle en effet que, sur le plan des principes, l'interdiction générale de toute activité politique des syndicats serait non seulement incompatible avec les principes de la liberté syndicale, mais aussi qu'elle ne serait guère applicable pratiquement; en effet, les organisations syndicales peuvent souhaiter s'exprimer publiquement, par exemple sur la politique économique et sociale du gouvernement; or si la frontière entre ce qui est politique et ce qui est proprement syndical est difficile à tracer avec netteté, le comité n'en estime pas moins que le type de contrôle extérieur sur l'emploi des fonds qui apparaît dans les nouvelles dispositions est contraire au droit des organisations de travailleurs de gérer leurs propres affaires (Recueil, paragr. 356 et 359).
- 909. Les plaignants allèguent que le droit des organisations de travailleurs de faire grève est limité par la disposition exigeant à cet effet un vote des deux tiers des membres remplissant les conditions voulues (article 93(3)(a)), par l'interdiction des grèves non liées à un différend de travail (article 123(2)(b)), par l'imprécision de la définition des services essentiels (article 128(9)(f) et (g)), qui englobe "tout service visant à assurer la sécurité des installations souterraines minières servant à l'exploitation et au drainage, ainsi que des puits et installations annexes ou des machines et du matériel", et tout autre service déclaré essentiel par le ministre au motif qu'une interruption mettrait en danger la vie, la sécurité ou la santé de tout ou partie de la population, par les limitations aux piquets de grève (article 124) et par le pouvoir donné à la police d'arrêter sans mandat les personnes soupçonnées de contrevenir à l'interdiction de la grève dans les services essentiels (article 128(5)).
- 910. En ce qui concerne les dispositions de l'article 93 relatives au scrutin de grève, le comité prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle on ne doit recourir à la grève qu'en dernier ressort, quand toutes les autres voies de règlement du différend ont été épuisées et que cette décision importante bénéficie d'un appui manifeste des membres, en l'occurrence les deux tiers d'entre eux. Le comité rappelle qu'il a déclaré dans le passé qu'une disposition tendant à exiger une majorité des deux tiers pour le déclenchement d'une grève constituait une ingérence des autorités dans l'activité des syndicats qui risquait de limiter leur droit de gérer leurs affaires sans intervention extérieure (Recueil, paragr. 379); dans le présent cas, il considère donc que cette disposition n'est pas conforme aux principes de la liberté syndicale.
- 911. En ce qui concerne l'interdiction, par l'article 123(2)(b), des grèves non liées à un conflit collectif auquel les travailleurs ou le syndicat seraient parties, le comité rappelle la déclaration de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations selon laquelle une interdiction générale des grèves de solidarité risquerait d'être abusive, et les travailleurs devraient avoir la possibilité de recourir à de telles actions pour autant que la grève initiale qu'ils soutiennent soit elle-même légale (Etude d'ensemble, 1983, paragr. 217). Le comité considère donc que la disposition en question est contraire aux principes de la liberté syndicale.
- 912. En ce qui concerne l'énumération faite par l'article 128(9)(f) des activités minières considérées comme essentielles, le comité rappelle qu'il a estimé dans le passé que les restrictions au droit de grève dans certains secteurs visant à ce que soient respectées des prescriptions statutaires de sécurité constituent des restrictions normales (Recueil, paragr. 413); dans d'autres cas où la présence constante de personnel était nécessaire pour assurer la sécurité des machines et la prévention des accidents, il a considéré qu'on pouvait légitimement exiger un service minimum à condition que les organisations de travailleurs intéressées puissent participer, si elles le souhaitaient, à la définition de ce service minimum tout comme les employeurs et les autorités (Recueil, paragr. 414 et 415). Il considère donc que, plutôt que de déclarer essentielles ces activités liées à la sécurité et d'interdire ainsi toute grève, la législation pourrait rendre obligatoire l'établissement d'un service minimum - s'il est fixé conformément au principe énoncé ci-dessus - qui assurerait le fonctionnement des installations de drainage, des puits et des machines dans les mines.
- 913. En ce qui concerne les restrictions au droit d'établir des piquets de grève près des lieux d'habitation, le comité rappelle la déclaration de la commission d'experts selon laquelle les restrictions dans ce domaine ne se justifieraient que si la grève perdait son caractère pacifique (Etude d'ensemble, 1983, paragr. 218). Notant que, dans le présent cas, il est allégué que de nombreux travailleurs habitent et travaillent au même endroit, le comité appelle particulièrement l'attention du gouvernement sur le fait que l'interdiction en vigueur constitue une ingérence inacceptable des autorités dans les activités des organisations de travailleurs puisque celles-ci ne peuvent établir de piquet de grève sur les lieux de travail sans être en même temps à proximité d'un lieu d'habitation.
- 914. En ce qui concerne le pouvoir conféré à la police par l'article 128(5) d'arrêter sans mandat les personnes ayant contrevenu à l'interdiction de faire grève dans les services essentiels, le comité rappelle que, vu l'importance qu'il attache à l'exercice du syndicalisme dans un climat libre de toute insécurité et de toute crainte, les syndicalistes emprisonnés doivent toujours bénéficier d'une procédure judiciaire régulière (Recueil, paragr. 110, et 277e rapport, cas no 1444 (Philippines), paragr. 332).
- 915. En ce qui concerne les atteintes alléguées à l'exercice du droit d'affiliation internationale conformément au nouvel article 35(4) et (5), qui subordonne à une approbation ministérielle préalable, fondée sur l'intérêt général, l'acceptation d'aides techniques et financières extérieures, le comité rappelle que le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs implique le droit, pour les représentants des syndicats nationaux, de se tenir en contact avec les organisations extérieures et de bénéficier des services et des avantages provenant de leur adhésion. Une législation interdisant l'acceptation par un syndicat national d'une aide pécuniaire venant d'une organisation internationale à laquelle il est affilié mettrait en cause les principes relatifs au droit de s'affilier (Recueil, paragr. 529 et 527). Dans le présent cas, le comité estime que, dans la mesure où la disposition incriminée fait obstacle à l'acceptation d'aides venant d'organisations internationales de travailleurs auxquelles les syndicats adhèrent librement, elle n'est pas compatible avec les principes de la liberté syndicale.
- 916. Au sujet de l'allégation selon laquelle l'obligation faite par l'article 85 d'entamer les négociations en vue d'une nouvelle convention collective trois mois au moins avant l'expiration de la convention en vigueur impose aux parties de conclure et de signer une convention dans ce délai, le comité note que, en vertu de la loi, la négociation collective représente le fondement essentiel de la détermination des conditions d'emploi et que la disposition incriminée prévoit bien que les négociations doivent être entamées et conclues dans un délai de trois mois, mais qu'elle autorise en même temps les parties soit à proroger la convention en vigueur si les négociations ne peuvent aboutir, soit à soumettre la question au tribunal du travail en vertu de l'article 91 de la loi. Le comité n'estime pas que ces règles soient contraires aux principes de la négociation collective.
- 917. En revanche, le comité exprime ses préoccupations au sujet des allégations selon lesquelles les conventions collectives négociées doivent être soumises à la Commission des prix et des revenus (article 86), qui peut les refuser non seulement pour des questions de forme, mais aussi lorsqu'elles contiennent des clauses contraires à la politique officielle du gouvernement en matière de prix et de revenus (article 87(2)(b)). Le comité rappelle son affirmation maintes fois répétée selon laquelle, plutôt que de subordonner la validité des conventions collectives à l'approbation gouvernementale, il conviendrait de prendre des mesures visant à inciter les parties aux négociations collectives à tenir compte volontairement dans leurs négociations des considérations relatives à la politique économique et sociale du gouvernement et à la sauvegarde de l'intérêt général (Recueil, paragr. 644). Dans le cas présent, on ne voit pas clairement si la commission est pleinement tripartite et si elle offre donc un cadre à l'examen volontaire de la politique gouvernementale; le comité estime donc qu'il devrait être clairement établi dans la législation que la décision finale appartient aux parties à chaque accord.
- 918. Au sujet des allégations des plaignants concernant la composition et le fonctionnement du Tribunal du travail créé en vertu de la loi de 1990 avec pour mission de régler les différends collectifs, le comité, notant que les membres du tribunal qui sont nommés par le ministre doivent être qualifiés et que les autres membres proposés sont choisis en nombre égal par le président du tribunal parmi les représentants des travailleurs et des employeurs, ne considère pas ce mode de composition contraire aux principes de la liberté syndicale. En ce qui concerne l'obligation faite au tribunal par l'article 68(5) de prendre en considération la politique officielle du gouvernement en matière de prix et de revenus, le comité note que le tribunal est tenu seulement de prendre en considération cette politique et n'apparaît pas contraint de l'appliquer.
- 919. Enfin, le comité fait observer au gouvernement qu'une législation qui réglemente minutieusement plusieurs aspects de l'activité syndicale est incompatible avec les principes de la liberté syndicale.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 920. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Notant que le nouveau gouvernement prépare des modifications à la loi de 1990 sur les relations professionnelles, dont de nombreux articles sont contraires aux principes de la liberté syndicale, à savoir ceux qui régissent le droit de constituer des organisations de travailleurs et le droit de ces organisations de rédiger leurs propres statuts, d'élire leurs dirigeants, de gérer leurs affaires et leurs finances, de faire grève, de s'affilier, d'accepter les avantages d'une telle affiliation et de négocier librement, le comité demande instamment au gouvernement de tenir compte dans la rédaction de son projet des commentaires qu'il a formulés dans ses conclusions et de lui communiquer un exemplaire du texte modifié dès que possible.
- b) Le comité rappelle au gouvernement que l'assistance du BIT est à sa disposition pour préparer son projet de loi en vue d'assurer sa pleine conformité avec les principes de la liberté syndicale.
- c) Le comité demande au gouvernement de confirmer que la loi de 1990 sur la Commission des traitements et des conditions d'emploi a été abrogée.
- d) Il demande au gouvernement de le tenir informé de la décision relative à la constitutionnalité de la loi de 1990 sur les relations professionnelles, décision qui, selon la réponse du nouveau gouvernement en date du 14 novembre 1991, était toujours à cette date en instance devant la Haute Cour de Zambie.