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- 47. La plainte de la Fédération internationale syndicale de l'enseignement (FISE) est contenue dans une communication du 22 novembre 1985. Le gouvernement a répondu aux allégations formulées dans cette affaire par des communications des 22 janvier et 24 avril 1986.
- 48. Le Sénégal a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de la fédération plaignante
A. Allégations de la fédération plaignante
- 49. La FISE allègue des mesures répressives qui auraient été prises par le gouvernement à l'encontre des militants d'un syndicat qui lui est affilié, le Syndicat unique et démocratique des enseignants du Sénégal (SUDES).
- 50. La fédération plaignante joint à sa plainte une copie de la lettre qu'elle a adressée au ministre de l'Education du Sénégal contenant les griefs qu'elle formule à l'égard des sanctions prises contre M. Mamadou N'Doye et d'autres militants du SUDES.
- 51. D'après cette lettre, par un ordre de service du 24 septembre 1985, le ministre de l'Education a annulé l'affectation de M. N'Doye à l'Ecole normale supérieure de Dakar et l'intéressé s'est trouvé sans travail. Il lui aurait été reproché sa participation à la treizième Conférence statutaire de la FISE à Sofia ainsi que ses activités syndicales. Par ailleurs, d'autres militants de ce syndicat auraient été sanctionnés pour leurs activités syndicales dans une branche du SUDES divisée par une scission dont l'orientation déplairait au gouvernement. La FISE précise que M. Mamadou N'Doye est secrétaire général du SUDES et vice-président de la FISE.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 52. Dans une première réponse du 22 février 1986, le gouvernement transmet une lettre que le ministre de l'Education nationale adresse au BIT sur cette affaire, d'où il ressort que l'intéressé n'est officiellement plus membre du SUDES et que le syndicat dont il se prévaut n'est pas actuellement reconnu par le gouvernement du Sénégal. Le ministre indique dans cette lettre que l'intéressé a quitté son poste pour aller à la Conférence de la FISE sans y avoir été autorisé, qu'il s'est mis en porte-à-faux avec la réglementation et que, sans le suspendre, il l'a muté à 26 kilomètres de son travail alors qu'il lui était loisible de sévir avec la dernière rigueur. Selon le ministre, l'intéressé a refusé de rejoindre son poste d'affectation et de répondre à une demande d'explication qui lui a été adressée par voie d'huissier requis à cet effet par un agent judiciaire. Les allégations présentées par M. N'Doye sont donc dénuées de fondement et relèvent de la pure fabulation. Par ailleurs, le ministre promet d'adresser un dossier complet sur cette affaire.
- 53. Dans une seconde réponse très détaillée du 24 avril 1986, le gouvernement explique que le cas de M. N'Doye se résume comme suit:
- Du 22 mai au 4 juin 1985, M. N'Doye, inspecteur de l'enseignement élémentaire mis à la disposition de l'Ecole normale supérieure en qualité de formateur, s'est absenté de son service pendant 13 jours sans autorisation préalable pour se rendre à Sofia, en Bulgarie, où devait se tenir, du 24 au 29 mai, la treizième Conférence statutaire de la FISE. Pour justifier son absence future, M. N'Doye avait déposé, le 18 mai, une lettre de demande d'autorisation mais, sans en attendre la suite, il prit l'avion le 21 mai au soir. Dès son retour de Sofia, il reçut, du recteur de l'Université de Dakar de qui relève l'Ecole normale supérieure, une lettre datée du 4 juin 1985 par laquelle ce dernier lui demandait les raisons de son absence non autorisée et les pièces justifiant ce voyage. Dans sa réponse, M. N'Doye s'est contenté de dire qu'après avoir déposé une demande d'autorisation d'absence le 18 mai 1985 il a aussitôt pris son avion le 21 mai. Il ne s'est pas enquis de la suite réservée à sa demande d'autorisation d'absence. Et pour justifier son attitude, il a produit un document de la FISE intitulé "Invitation", document qui ne portait ni son propre nom ni même celui de son organisation syndicale.
- 54. Le gouvernement estime que, compte tenu du fait que les rencontres internationales sont programmées des mois à l'avance, l'intéressé avait suffisamment de temps pour manifester son intention de voyager et pour recevoir dans les délais une réponse de la part de ses supérieurs hiérarchiques. Aussi, en n'optant pas pour cette dernière attitude, M. N'Doye s'est mis délibérément en porte-à-faux avec les textes qui régissent l'Université de Dakar et aux termes desquels "toute demande d'autorisation d'absence ou de mission devra dorénavant parvenir trois semaines avant la date prévue de départ" (circulaire no 4712/4 du 25 octobre 1983). Le gouvernement ajoute qu'il convient de souligner que l'absence de M. N'Doye a eu lieu durant la période des examens de sortie des inspecteurs et inspecteurs adjoints stagiaires de l'Ecole normale supérieure que l'intéressé avait justement la charge d'encadrer, de surveiller et d'interroger. Cette période est d'autant plus sensible que toute défaillance imputable à un examinateur crée des perturbations aux conséquences graves. M. N'Doye a donc volontairement commis une faute administrative flagrante et ses supérieurs hiérarchiques ont estimé qu'un formateur qui quitte son poste, abandonne ses élèves sans autorisation et viole délibérément la réglementation ne répond pas aux critères qui font un formateur modèle. Ils ont donc décidé de le remettre à la disposition de son ministère d'origine pour qu'il y exerce les fonctions d'inspecteur de l'enseignement élémentaire.
- 55. Le ministère de l'Education nationale pouvait l'affecter dans n'importe laquelle des dix régions du Sénégal, dont certaines sont à plus de 400 kilomètres de la capitale et il pouvait prendre immédiatement des sanctions à son encontre. Cependant, même une simple mise en demeure n'a pas été adressée à l'intéressé. Au contraire, compte tenu, d'une part, de ses charges de famille et du fait qu'il est depuis longtemps installé à Dakar, d'autre part, de l'absence de poste vacant à Dakar même, le ministre l'a affecté à Ruffisque (26 kilomètres de Dakar), cette localité étant desservie par autobus, trains et autocars. Or, à la notification de l'ordre de service no 6626/MEN du 24 septembre 1985 qu'il reçut le 28 octobre 1985, l'intéressé a d'abord prétendu qu'il y avait une erreur de matricule alors qu'il n'en était rien. Il a par la suite refusé de rejoindre son nouveau poste d'affectation et a même refusé de prendre la décision no 013807/MEN du 17 novembre 1985 l'affectant à Ruffisque qui lui a été pourtant remise en main propre à son domicile par un agent administratif. Ce refus de rejoindre son nouveau poste d'affectation n'a pas empêché M. N'Doye de continuer à percevoir son salaire jusqu'à la fin de l'année 1985, ce salaire continuant de lui être versé par l'Université de Dakar. A partir de décembre 1985, le ministère de l'Economie et des Finances devait prendre la succession de l'Université de Dakar, poursuit le gouvernement.
- 56. Par ailleurs, le gouvernement indique que M. N'Doye n'est plus secrétaire général du SUDES depuis décembre 1981, date à laquelle M. Madior Diouf a été élu à la tête de ce syndicat. Il ajoute que l'intéressé a été exclu du SUDES, le 29 avril 1984, par une résolution du bureau national de cette organisation, résolution entérinée par la commission administrative du 10 juin 1984 et par le quatrième Congrès ordinaire du SUDES tenu du 27 au 30 décembre 1985. Le gouvernement joint la copie des décisions syndicales prises en ce sens et affirme qu'il est loisible à l'intéressé de créer un nouveau syndicat en se conformant aux dispositions réglementaires en vigueur s'il le désire.
- 57. Enfin, le gouvernement estime que la FISE est largement responsable de la situation qui prévaut actuellement dans le SUDES. Sa décision de télégraphier à M. N'Doye pour lui annoncer l'arrivée d'un billet d'avion à son nom, afin de se rendre à Sofia, n'est pas innocente. Son secrétariat a décidé de faire élire les instances dirigeantes de la FISE dès l'ouverture de la session de la treizième Conférence statutaire pour mettre le délégué authentique du SUDES (qui lui ne pouvait arriver à Sofia que bien après M. N'Doye parce qu'il n'avait pas reçu le billet de voyage payé par la FISE) devant le fait accompli. Selon le gouvernement, la FISE a délibérément choisi, pour des raisons qu'il est légitime de qualifier de politiques, une des tendances.
- 58. Pour conclure, le gouvernement estime que personne n'est au-dessus des lois et que la circulaire du 21 mai 1963 régissant l'abandon de poste est appliquée à tous les agents de la fonction publique convaincus d'abandon de poste.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 59. La présente affaire concerne des mesures qui auraient été prises par un gouvernement à l'encontre d'un dirigeant syndical qui a assisté à une réunion syndicale internationale. Les versions de l'organisation plaignante et du gouvernement sont largement contradictoires. Pour l'organisation plaignante, l'intéressé aurait vu son affectation à l'Ecole normale supérieure de Dakar annulée et se serait trouvé sans travail parce qu'on lui aurait reproché sa participation à la treizième Conférence statutaire de la FISE à Sofia. En revanche, selon le gouvernement, l'intéressé qui à l'origine est inspecteur d'enseignement élémentaire a quitté son poste de formateur à l'Ecole normale supérieure sans y avoir été autorisé du 22 mai au 4 juin 1985 pour aller assister à la conférence de la FISE. Il a donc été muté à 26 kilomètres de son lieu de travail dans les fonctions d'inspecteur et il a refusé de rejoindre son poste d'affectation et de répondre à une demande d'explication d'absence qui lui était adressée par voie judiciaire. En outre, l'intéressé, contrairement à ce qu'indique l'organisation plaignante, a été payé par l'Université de Dakar jusqu'au 31 décembre 1985.
- 60. Quand il a été saisi de cas de cette nature, le comité a indiqué, d'une manière générale, que le refus d'un Etat d'accorder à l'un de ses fonctionnaires qui exerce des tâches syndicales un congé pour participer à une réunion syndicale ne constitue pas en soi une atteinte aux principes de la liberté syndicale, à moins que la raison du refus ne soit fondée sur les activités ou les fonctions syndicales de l'intéressé. (Voir 177e rapport, cas no 853, paragr. 85 (Tchad).)
- 61. En l'occurrence, le gouvernement a fait valoir que l'intéressé n'a pas attendu l'autorisation de ses supérieurs pour se rendre à une réunion syndicale à l'étranger et s'est absenté pendant 13 jours, perturbant ainsi les examens de sortie des inspecteurs et des inspecteurs adjoints stagiaires de l'Ecole normale supérieure dont il avait la charge. Dans ces conditions, le comité considère que, si les autorités publiques doivent s'efforcer de faciliter le déplacement des dirigeants syndicaux pour leur permettre d'assister à des réunions syndicales internationales, ces mêmes dirigeants, à l'instar des autres fonctionnaires, quand ils exercent des fonctions professionnelles dans la fonction publique, doivent respecter les règles concernant les demandes d'autorisation d'absence ou de missions en vigueur dans leur pays. Le comité estime que l'intéressé n'ayant pas respecté la règle de préavis de trois semaines s'est mis en porte-à-faux avec la réglementation, et que les principes de la liberté syndicale n'ont pas été mis en cause. Il décide que ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
- 62. En l'absence de précisions sur les mesures qui auraient frappé d'autres syndicalistes du SUDES, fournis par la Fédération plaignante, le comité n'est pas à même de poursuivre cet aspect du cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 63. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que le présent cas n'appelle pas un examen plus approfondi.