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- 287. Dans des communications des 28 septembre 1982 et 19 janvier 1983, la confédération internationale des syndicats libres (CISL) et la Confédération mondiale du travail (CMT) ont présenté des plaintes en violation des droits syndicaux au Suriname. Par la suite, la CISL a présenté des allégations supplémentaires dans des télégrammes des 9 et 13 décembre 1982. Le gouvernement a répondu dans des communications des 10 novembre 1982, 10 janvier et 19 février 1983.
- 288. Face à la gravité des allégations présentées dans ce cas, le Directeur général, conformément à la procédure en vigueur, a adressé des câbles au gouvernement les 12 janvier et 14 février 1983 pour lui proposer de donner son consentement à une mission de contacts directs dans le pays pour étudier les questions en instance.
- 289. Le Suriname a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il n'a pas ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes
- 290. Dans sa communication du 28 septembre 1982, la CISL a allégué que, le 17 septembre 1982, les locaux de "De Moederbond", syndicat qui lui est affilié, ont été occupés par un groupe de jeunes qui y étaient arrivés en camion. Selon la CISL, certains de ces jeunes étaient armés et il s'agissait de membres de la "section de mobilisation populaire" du ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Sports. Ils auraient procédé au pillage des locaux pendant plusieurs heures et empêché la tenue d'une réunion syndicale qui y était programmée. La CISL a également allégué que leur présence dans les locaux syndicaux ne permettait aucun doute sur les intentions des autorités qui, déjà en plusieurs autres occasions, avaient publiquement laissé entendre qu'elles souhaitaient restreindre les libertés syndicales dans le pays. Dans sa communication du 9 décembre 1982, la CISL a déclaré que le siège du syndicat qui lui est affilié a été détruit et qu'elle n'a toujours pas de nouvelles des dirigeants et des militants de Moederbond. Elle a demandé l'intervention du Directeur général pour obtenir des informations complètes sur le sort des dirigeants du syndicat qui lui est affilié. Enfin, dans son télégramme du 13 décembre 1982, la CISL annonce qu'elle a reçu des informations non confirmées selon lesquelles M. C. Daal, président du syndicat qui lui est affilié, aurait été assassiné et des dirigeants syndicaux détenus.
- 291. Dans sa communication du 19 janvier 1983, la CMT, quant à elle, a allégué l'exécution sans procès de 24 personnes dont le président du syndicat, Cyril Daal. Elle a ajouté que de nombreux prisonniers risquent le même sort. Selon la CMT, les 24 travailleurs (dont elle communique le nom et les professions) ont été assassinés pour avoir souhaité le retour à la démocratie, des élections générales, les droits syndicaux et la fin de la censure de presse, ainsi que le retour des militaires dans leurs casernes. Elle a également souligné que le siège de De Moederbond a été détruit ainsi que celui d'autres syndicats. Elle a enfin allégué que plusieurs syndicalistes ont été contraints de se cacher.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 292. Dans sa communication du 10 novembre 1982, le gouvernement réfute les allégations de la CISL et souligne que ces communications sont fondées sur des informations dont on peut vérifier l'inexactitude. Le gouvernement déclare avoir réagi au télégramme de la CISL du 29 septembre 1982 par un télégramme de retour expliquant les faits. Il transmet une copie de ce télégramme et d'une coupure de presse faisant état des dénégations officielles du Premier ministre du Suriname sur les allégations en cause.
- 293. Le gouvernement déclare que l'occupation illégale des locaux de l'organisation syndicale "De Moederbond" a été le fait d'individus apparemment incités à ce faire parce qu'ils étaient indignés de ce que le syndicat avait récemment déclenché une grève dans un hôpital. Le gouvernement signale que les autorités ne sont pas intervenues et n'ont rien à voir avec l'occupation des locaux du 17 septembre 1982. Il regrette que le syndicat en question n'ait pas corrigé l'information qu'il a transmise, en dépit de l'échange de télégrammes qui avait eu lieu avec le gouvernement.
- 294. Dans une communication du 10 janvier 1983, le gouvernement indique que les autorités militaires ont officiellement annoncé que, le 8 décembre 1982, un certain nombre de personnes détenues pour avoir tenté de renverser le gouvernement par la violence ont été tuées dans un malencontreux accident alors qu'elles tentaient de s'échapper de prison. Le gouvernement déclare qu'il s'efforcera de prendre des mesures pour empêcher de tels faits à l'avenir.
- 295. Le gouvernement, dans sa communication du 19 février 1983, accepte la venue d'un représentant du Directeur général dans le pays pour discuter des questions soulevées par les plaignants.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 296. En premier lieu, le comité doit exprimer sa profonde préoccupation face à la gravité des allégations formulées dans ce cas qui a trait non seulement à la destruction de locaux syndicaux, mais, et cela est plus important, à la mort d'au moins un dirigeant syndical et à l'arrestation ou à la disparition de plusieurs autres. Le comité note que, bien que l'occupation et la destruction du siège du syndicat affilié à la CISL au Suriname ne soient pas déniées, les informations fournies par le gouvernement et les plaignants sont contradictoires. Pour la CISL, les jeunes qui ont occupé les locaux avaient des liens avec les autorités et ont agi pour des motifs antisyndicaux: en revanche, le gouvernement nie catégoriquement ce fait. Le comité doit noter que, bien qu'ils aient été invités à le faire, les plaignants n'ont pas soumis d'informations complémentaires. Le gouvernement, d'autre part, a transmis des éléments de preuves sous forme d'échange de télégrammes et d'une coupure de journal réfutant catégoriquement sa participation dans l'occupation de locaux syndicaux.
- 297. Pour ce qui est de l'assassinat du président du syndicat affilié à la CISL, Cyril Daal, parce qu'il aurait soutenu le retour à la démocratie et aux droits syndicaux, le comité note que le gouvernement déclare qu'il était détenu pour tentative de renversement du gouvernement par la violence et qu'il a été tué accidentellement lorsqu'il a tenté de s'échapper de prison. Le comité souhaite souligner qu'un climat de violence constitue une grave atteinte à l'exercice des droits syndicaux. Il voudrait demander au gouvernement de transmettre des informations précises sur les circonstances qui ont conduit à ce décès, y compris le résultat de toute enquête qui pourrait être faite.
- 298. Le comité note, au sujet des détentions alléguées de syndicalistes, que le gouvernement n'a fourni ni information ni observation.
- 299. Le comité note que le gouvernement a consenti à la proposition du Directeur général d'envoyer une mission de contacts directs au Suriname afin d'élucider l'ensemble de la situation et de permettre ainsi au comité de parvenir à des conclusions en pleine connaissance de cause. Le comité espère qu'à sa prochaine réunion il aura à sa disposition le rapport du représentant du Directeur général sur la situation.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 300. A la lumière des considérations ci-dessus, le comité recommande au conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité exprime sa profonde préoccupation face à la gravité des allégations formulées dans ce cas, qui ont trait à la mort d'un dirigeant syndical, à l'arrestation ou à la disparition de syndicalistes et à l'occupation et à la destruction de locaux syndicaux.
- b) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations détaillées et précises sur les allégations et, notamment, sur les circonstances qui ont conduit à la mort et à l'arrestation de syndicalistes, y compris le résultat de toute enquête qui pourrait être faite.
- c) Le comité note que le gouvernement consent à la proposition du Directeur général d'envoyer une mission de contacts directs au Suriname pour élucider la situation et permettre ainsi au comité de parvenir à des conclusions en pleine connaissance de cause.
- d) Le comité espère qu'il aura à sa disposition à sa prochaine réunion le rapport du représentant du Directeur général sur la situation.