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- 72. La plainte de la Confédération des travailleurs du Pérou est contenue dans une communication en date du 16 juin 1964. Cette communication ayant été transmise au gouvernement, celui-ci a envoyé ses observations, en date du 6 octobre 1964.
- 73. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 74. Les plaignants mentionnent trois décrets pris par le gouvernement en raison d'une série de conflits qui s'étaient produits dans le secteur bancaire. D'après la plainte, ces décrets avaient violé la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, portant également atteinte à la protection des dirigeants syndicaux et au droit de grève.
- 75. Les plaignants ont envoyé le texte des décrets mentionnés en l'accompagnant de leurs commentaires. Le décret présidentiel no 007, du 5 mai 1964, établit l'horaire de travail des employés de banque et déclare que l'inobservation de cet horaire de la part des employés permettra la résiliation du contrat de travail. D'après les plaignants, ces dispositions constituent une atteinte aux principes de la stabilité de l'emploi et aux règles en vigueur dans le pays à cet égard. Par ailleurs, elles portent atteinte aux droits syndicaux en raison de l'extrême variété des causes de résiliation des contrats, permettant aux entreprises de décider de la représentation syndicale. Le décret no 008, du 22 mai 1964, établit aussi un horaire de travail pour le personnel des banques et dispose également que l'inobservation de cet horaire constituera un motif de résiliation des contrats de travail. D'après les plaignants, ce décret est contraire aux règles de la convention (no 29) sur le travail forcé.
- 76. Finalement, le décret no 009, du 23 mai 1964, déclare illégale la grève décidée par la Fédération des employés de banque du Pérou et autorise les banques à dénoncer les contrats de travail des employés qui ne reprennent pas leurs tâches dans un délai déterminé. Dans les considérants de ce décret, il est fait mention de la grève ordonnée par la Fédération pour le 25 mai 1964 et il est déclaré que cette grève constitue le point culminant d'une série de mesures prises par la Fédération, invoquant l'existence de problèmes relatifs au travail, pour la solution desquels existe une procédure légale adéquate, à laquelle il est nécessaire de se soumettre. Selon les plaignants, ce décret, en déclarant que la grève est illégale, viole également la convention no 29.
- 77. Dans sa réponse du 6 octobre 1964, le gouvernement expose le différend qui oppose la Fédération des employés de banque aux employeurs au sujet de l'horaire de travail. La Fédération avait décidé un changement unilatéral de la journée de travail, mesure qui ne fut pas acceptée par les banques. Après plusieurs réunions de conciliation, sans qu'un accord pût être réalisé, le gouvernement a rendu la décision no 065, du 7 avril 1964, fixant un horaire déterminé qui, toutefois, ne fut pas accepté par la Fédération. En conséquence, les employés de banque abandonnèrent le travail avant la fin de la journée de travail établie, ce qui fut cause que les banques à leur tour fermèrent leurs bureaux.
- 78. Dans ces circonstances a été pris le décret présidentiel no 007, de 1964, quia complété le précédent en établissant des sanctions (le congédiement des travailleurs) pour le cas d'inexécution. Les employés ont riposté en recourant à certaines mesures telles que la « grève perlée » et l'exécution de l'horaire strict qui excluait tout recours à des heures supplémentaires. En conséquence, le gouvernement est intervenu en prenant un décret présidentiel no 008 qui maintenait la journée de travail existante, mais établissait un repos de quarante-cinq minutes, réglant en outre la question des heures supplémentaires. Toutefois, les employés ont persisté dans leur attitude et décidé une grève d'une durée illimitée, cette fois pour obtenir la réintégration du personnel congédié, ce qui constitue un défi à l'autorité, qui avait déterminé la situation légale des parties et établi leurs droits et obligations respectifs. En conséquence, a été pris le décret présidentiel no 009, qui déclarait illégale la grève, celle-ci sortant nettement du cadre strictement syndical.
- 79. Le gouvernement fait aussi remarquer que la déclaration de l'illégalité de la grève avait un caractère temporaire et ne constituait pas actuellement un problème. En effet, d'après la documentation fournie par le gouvernement, la Fédération des employés de banque a mis fin à la grève le 1er juillet 1964 et négocié avec les employeurs la réintégration de tous les employés congédiés.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 80. Le Comité observe que, même si les plaignants mentionnent la violation de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, leurs plaintes portent en réalité sur deux décrets du gouvernement permettant le congédiement des employés de banque qui ne prêteraient pas leurs services selon les conditions de travail fixées et sur un décret qui déclare illégale une grève et dispose que les employés qui ne reprendront pas leur travail peuvent être congédiés par l'employeur. D'autre part, les plaignants mentionnent aussi la violation des droits syndicaux, notamment en ce qui concerne la protection des dirigeants syndicaux et le droit de grève. Le Comité a donc examiné la plainte dans le cadre de sa compétence, qui consiste à examiner les allégations relatives à la violation de l'exercice du droit syndical.
- 81. Quant aux deux premiers décrets, le Comité considère qu'ils établissent un certain horaire pour l'exécution des tâches à exécuter dans les banques et constituent un élément des conditions de travail des employés de celles-ci. Le congédiement autorisé par ces décrets est fondé sur l'inobservation de ces conditions de travail. Le fait que le motif de congédiement pourrait s'appliquer aux dirigeants syndicaux au cas où ils ne se conformeraient pas aux horaires de travail établis ne constituait certainement pas une violation des règles et principes en matière de liberté syndicale.
- 82. En ce qui concerne le troisième décret, le Comité observe qu'il qualifie d'illégale la grève déclarée par la Fédération des employés de banque en vue d'obtenir la réintégration d'employés congédiés. Cet acte, est-il dit dans les considérants du décret no 009, constituerait le point culminant d'une série de mesures prises par la Fédération, invoquant des problèmes de travail pour la solution desquels existent cependant des dispositions législatives qui doivent être respectées.
- 83. Le Comité a toujours affirmé le principe selon lequel les allégations relatives au droit de grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure où elles affectent l'exercice des droits syndicaux. Il a aussi considéré que le droit de grève est un moyen légitime de défense des intérêts professionnels, droit généralement reconnu à condition que l'on respecte, en l'exerçant, les restrictions temporaires dont il peut faire l'objet (par exemple, suspension des grèves durant les procédures de conciliation et d'arbitrage, et, dans le cas de services essentiels, notification préalable exigée normalement lorsqu'il s'agit de ces services).
- 84. Le Comité observe que sont applicables au Pérou, dans le cas de différends du travail, le décret présidentiel du 23 mars 1936 et autres décrets complémentaires établissant une série de procédures en vue de la solution de ces différends; ces procédures commencent par un contact direct entre employeurs et travailleurs et, après avoir passé par un stade de conciliation où interviennent les autorités, aboutit à l'arbitrage. Il ne résulte pas des éléments dont dispose le Comité que cette procédure ait été suivie, c'est plutôt le contraire qui semblerait résulter de la réponse du gouvernement, ainsi que des considérants du décret no 009. D'autre part, il semblerait que la grève ait été déclarée contre les mesures de congédiement prises par les employeurs, comme ils y étaient autorisés par les décrets nos 007 et 008 en raison de la non-observation de certaines conditions de travail en vigueur dans les banques.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 85. D'autre part, le Comité observe que le décret déclarant illégale la grève dans le secteur bancaire a constitué une mesure temporaire et que la Fédération des employés de banque a décidé entre-temps de mettre fin à la grève, la réintégration des employés congédiés faisant actuellement l'objet de négociations. Dans ces conditions, le Comité estime qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de ce cas et recommande au Conseil d'administration de décider en conséquence que le cas n'exige pas un examen plus approfondi de sa part.