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- 58. Depuis 1956, diverses plaintes ont été présentées par la C.I.S.L et la F.S.M contre le gouvernement français au sujet de l'Algérie, et le Comité en a poursuivi régulièrement l'examen et a notamment traité de ces plaintes dans son vingt-septième rapport (octobre 1957), dans son vingt-huitième rapport 3 (février 1958), dans son quarante-deuxième rapport (novembre 1959), dans son quarante-quatrième rapport (février 1960) et dans son cinquante-huitième rapport (novembre 1961). Dans ces deux derniers rapports, le Comité avait soumis au Conseil d'administration ses conclusions définitives en ce qui concerne certaines allégations et il avait recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement français de bien vouloir fournir des informations complémentaires sur un certain nombre d'autres allégations.
- 59. Sur diverses allégations contenues dans les plaintes, le Conseil d'administration a affirmé l'importance de certains principes mis en cause. Il a notamment appelé l'attention du gouvernement français sur l'importance qu'il attache à ce que, lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou de droit commun, que le gouvernement considère comme étant étrangers à leurs activités syndicales, ces syndicalistes, comme toutes autres personnes, soient jugés promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante.
- 60. Les demandes d'informations complémentaires adressées au gouvernement français portaient sur la situation d'un certain nombre de dirigeants syndicaux qui avaient été mentionnés comme étant internés, sur les enquêtes faites au sujet du coup de feu dont aurait été victime M. Rabah Djirmane et sur les sévices qui auraient été infligés à d'autres militants syndicaux ainsi que sur les résultats de ces enquêtes, sur certains points particuliers soulevés dans les allégations relatives au retrait de la représentativité de certaines organisations syndicales, sur l'envoi du texte du jugement du Tribunal permanent des forces armées de la zone Alger-Sud, condamnant M. Ali Yayia Madjid et certaines autres personnes à des peines de prison pour atteinte à la sûreté de l'Etat, sur l'envoi d'extraits des numéros interdits de l'Ouvrier algérien et sur l'envoi des observations du gouvernement français au sujet des allégations relatives aux restrictions apportées à l'activité de dirigeants syndicaux.
- 61. Ces différentes demandes d'informations complémentaires sont restées sans réponse quant au fond. A la date du 29 octobre 1962, le Directeur général a reçu une communication du 27 octobre 1962 du gouvernement français, qui déclarait que « l'Algérie ayant accédé à l'indépendance le 1er juillet 1962, la question de l'exercice de la liberté syndicale en Algérie échappe à la compétence du gouvernement français, qui ne dispose plus des pouvoirs ni des moyens nécessaires pour mener les enquêtes complémentaires qui lui ont été demandées ». Le gouvernement soulignait aussi dans cette communication que « les accords intervenus entre les autorités algériennes et le gouvernement français, tout en opérant une novation des rapports respectifs des parties intéressées, marquent le souci d'assurer en Algérie l'exercice normal des libertés publiques, et notamment de la liberté syndicale ».
- 62. On sait, en effet, que depuis que le Comité a soumis au Conseil d'administration son dernier rapport sur le présent cas, la situation s'est radicalement modifiée. L'Algérie est devenue un Etat indépendant et elle est Membre de l'O.I.T depuis le 19 octobre 1962. La France n'assume, en conséquence, plus de responsabilité en ce qui concerne la situation en Algérie.
- 63. La situation, dans le présent cas, est différente de celle dans laquelle, à l'intérieur d'un même Etat, un gouvernement a succédé a un autre. Dans de tels cas, le Comité a estimé qu'il existe un lien de continuité entre les gouvernements du même Etat et que, si un nouveau gouvernement ne peut évidemment être tenu responsable des faits qui se sont produits sous le régime de son prédécesseur, il n'en a pas moins une responsabilité manifeste quant aux conséquences que ces faits auraient pu continuer à engendrer depuis son arrivée au pouvoir.
- 64. Lorsque, cependant, un nouvel Etat investi de la souveraineté internationale vient à se créer, il est évident que la situation est différente. La procédure d'examen de plaintes relatives à des atteintes prétendument portées à l'exercice des droits syndicaux, telles qu'elle a été établie, prévoit l'examen de plaintes contre des Etats Membres de l'O.I.T, et il n'en découle pas qu'une plainte dirigée contre un Etat donné au sujet d'un de ses territoires et portant sur des faits qui ne rentraient pas dans le cadre de la compétence propre du territoire considéré doive être automatiquement considérée comme maintenue contre un nouvel Etat qui assume dorénavant des responsabilités internationales à l'égard du territoire sur lequel se seraient produits les faits qui étaient à l'origine de la plainte initiale.
- 65. Il est évidemment possible que les conséquences des faits qui ont motivé le dépôt de la plainte initiale puissent subsister après la création d'un nouvel Etat qui est devenu Membre de l'O.I.T, mais, si un tel cas se présentait, les plaignants auraient la possibilité de recourir, vis-à-vis du nouvel Etat, à la procédure établie pour l'examen des plaintes relatives à des atteintes à l'exercice des droits syndicaux.
- 66. Dans le cas présent, un nouvel Etat Membre a assumé des responsabilités internationales en ce qui concerne l'Algérie, sur une matière qui était auparavant du ressort des autorités françaises.
A. A. Conclusions du comité
A. A. Conclusions du comité
- 67. Bien qu'il reste en suspens un certain nombre d'allégations au sujet desquelles, comme il a été indiqué au paragraphe 60 ci-dessus, des précisions avaient été demandées par le Comité, celui-ci, tout en regrettant que les précisions demandées à plusieurs reprises n'aient pas été fournies pendant que le gouvernement français était encore compétent en ce qui concerne la situation en Algérie et que les allégations en cause gardaient encore un caractère d'actualité, constate que les faits sur lesquels portaient les allégations demeurées en suspens paraissent dépassés par l'évolution des événements.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 68. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de noter que l'Algérie est devenue Membre de l'O.I.T le 19 octobre 1962;
- b) de déclarer clos le cas (no 156): Plaintes présentées contre le gouvernement de la France au sujet de l'Algérie.