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A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 149. Dans sa plainte contenue dans deux communications adressées directement à l'O.I.T les 15 juin et 3 août 1956, la Calcutta Port Commissioners Workers Union formule les allégations suivantes:
- Allégations relatives à la non-reconnaissance de l'organisation plaignante
- 150. Il est allégué que l'organisation plaignante est le syndicat numériquement le plus important du port de Calcutta et qu'en dépit de cette circonstance, l'administration portuaire aurait refusé de la reconnaître alors que certains autres syndicats auraient été reconnus et bien que cette administration, à la suite d'une grève de la faim déclenchée par les membres de l'organisation plaignante, ait promis d'examiner la question de sa reconnaissance. Revendiquant un total de plus de 5.000 adhérents sur un ensemble de 24.000 employés réguliers auxquels s'ajouteraient quelque 6.000 travailleurs temporaires, l'organisation plaignante prétend que la reconnaissance aurait dû également lui être accordée ; elle fonde cette opinion sur la teneur d'une circulaire distribuée en 1950 par le ministère du Travail et destinée aux autres ministères ; aux termes de cette circulaire, toute organisation groupant 15 pour cent au moins des travailleurs de la catégorie intéressée devrait être reconnue. Déclarant grouper plus de 15 pour cent des travailleurs du port, l'organisation plaignante considère qu'elle aurait dû être reconnue en application de la règle posée par la circulaire. Le plaignant allègue en outre que cette non-reconnaissance est en contradiction avec les dispositions de la Constitution de l'Inde.
- Allégation relative au refus de la part des autorités portuaires de Calcutta de constituer un syndicat unique
- 151. L'organisation plaignante allègue avoir proposé comme solution intermédiaire aux autorités portuaires la constitution par ces dernières d'un syndicat unique à la suite d'un vote des travailleurs ; cette proposition aurait été rejetée par les autorités, lesquelles auraient invoqué leur impossibilité de contraindre les travailleurs à constituer un syndicat.
- Allégations relatives aux pressions qui auraient été exercées sur les travailleurs dans le dessein de leur faire quitter l'organisation plaignante
- 152. Il est allégué que les autorités portuaires de Calcutta exerceraient des pressions sur les travailleurs en vue de leur faire quitter l'organisation plaignante pour adhérer, contre leur gré, à d'autres syndicats.
- Allégations relatives aux mesures antisyndicales prises par les autorités portuaires de Calcutta
- 153. Il est allégué que le gouvernement a négligé de contraindre les autorités portuaires de Calcutta à cesser leurs activités antisyndicales et à mettre un terme aux atteintes portées aux droits démocratiques des travailleurs.
- 154. Dans sa réponse en date du 6 septembre 1956, le gouvernement présente les observations suivantes:
- Allégations relatives à la non-reconnaissance de l'organisation plaignante
- 155. En ce qui concerne la prétendue règle établie par la circulaire de 1950 selon laquelle la reconnaissance devrait être accordée aux organisations groupant au moins 15 pour cent des travailleurs d'une catégorie déterminée, le gouvernement précise qu'il ne s'agit pas là d'une véritable règle, mais d'un simple critère dont les services gouvernementaux peuvent s'inspirer lorsqu'ils examinent des demandes de reconnaissance présentées par les syndicats groupant leurs employés. Il n'est dit nulle part dans la circulaire - dont une copie figurait en annexe a la réponse gouvernementale - que le fait pour un syndicat de grouper 15 pour cent des travailleurs d'une catégorie donnée implique pour ce syndicat le droit à une reconnaissance automatique, alors même qu'il existe d'autres syndicats plus représentatifs. Quoi qu'il en soit, le gouvernement signale que les travailleurs du port de Calcutta n'étant pas au service du gouvernement, la circulaire invoquée par les plaignants ne leur est pas applicable.
- 156. Le gouvernement fournit des statistiques qui tendent à réfuter l'affirmation de l'organisation plaignante selon laquelle, d'une part, elle grouperait 15 pour cent des travailleurs du port, d'autre part, elle représenterait le syndicat numérique ment le plus important. D'après le gouvernement, lorsque l'organisation plaignante s'est adressée à lui après que les autorités portuaires eurent refusé la reconnaissance en 1954 en se fondant sur le fait que d'autres syndicats plus représentatifs avaient déjà été reconnus, le Bureau central des relations professionnelles a entrepris de vérifier l'importance de l'organisation plaignante. Le gouvernement déclare qu'alors que cette organisation annonçait 5.887 membres, son rapport annuel n'en laissait apparaître, pour 1952-53, que 2.229 ; de plus, en mars 1955, les livres de l'organisation révélaient seulement 1.597 adhérents régulièrement inscrits et en règle avec leurs cotisations. Le gouvernement ajoute qu'ayant procédé à une enquête analogue en ce qui concerne la Calcutta Port Employees Association et la National Union of Port Trust Employees, toutes deux reconnues par les autorités portuaires, le nombre des membres de ces organisations serait respectivement de 17.634 et 4.404; dans ces conditions, le gouvernement indique que l'organisation plaignante n'a pas été reconnue en raison de son importance relativement modeste.
- Allégation relative au refus de la part des autorités portuaires de Calcutta de constituer un syndical unique
- 157. Le gouvernement déclare qu'il appartient aux travailleurs eux-mêmes, et non pas aux autorités portuaires, de prendre l'initiative de la constitution d'un syndicat unique groupant tous les travailleurs du port de Calcutta.
- Allégations relatives aux pressions qui auraient été exercées sur les travailleurs dans le dessein de leur faire quitter l'organisation plaignante
- 158. Le gouvernement déclare que cette allégation est totalement dénuée de fondement ; en effet, les autorités portuaires se sont bornées à distribuer une circulaire en janvier 1955 attirant l'attention des travailleurs sur les revendications de l'organisation plaignante et sur les mesures prises à l'égard de ces revendications. Le gouvernement précise que ladite circulaire ne saurait être interprétée comme constituant une tentative en vue d'inciter les travailleurs à adhérer à un syndicat plutôt qu'à un autre. Une copie de la circulaire en question figurait en annexe à la réponse du gouvernement.
- 159. La seule allusion directe qui soit faite dans cette circulaire à l'organisation plaignante est une déclaration selon laquelle le commissaire régional au Travail avait procédé récemment à une enquête sur l'importance respective des syndicats du port et, bien qu'invitée à le faire, l'organisation plaignante avait négligé de fournir au commissaire les registres dont il avait besoin pour procéder aux vérifications indispensables. Par ailleurs, la circulaire traite des suites qui ont été données à un rapport de la Central Pay Commission (commission centrale des salaires) et conclut en conseillant aux travailleurs « de bien réfléchir avant de faire quoi que ce soit qui aurait pour effet de désorganiser le travail dans le port », car aucune action ayant cette conséquence ne serait tolérée. Nulle part il n'est fait allusion au fait que les travailleurs devraient ou ne devraient pas adhérer à tel ou tel syndicat.
- Allégations relatives aux mesures antisyndicales prises par les autorités portuaires de Calcutta
- 160. Le gouvernement ne présente aucune observation sur cette allégation de caractère général.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- Allégations relatives à la non-reconnaissance de l'organisation plaignante
- 161 Les plaignants allèguent que les autorités portuaires refuseraient de reconnaître leur syndicat, alors que, pour deux raisons, cette reconnaissance leur serait due : d'une part, l'organisation plaignante grouperait 15 pour cent des travailleurs du port, ce qui, aux termes d'une circulaire distribuée en 1950 par le ministère du Travail, l'habiliterait à être reconnue, d'autre part, elle constituerait l'organisation numériquement la plus importante de la catégorie de travailleurs intéressés et d'autres syndicats auraient déjà été reconnus. Le terme « reconnaissance » doit être entendu ici comme signifiant que l'employeur accepte de négocier collectivement avec le syndicat.
- 162 En ce qui concerne le premier argument invoqué par l'organisation plaignante, le gouvernement indique très clairement que le critère des 15 pour cent posé par la circulaire ne doit être entendu que comme une indication donnée aux ministères lorsqu'ils envisagent la reconnaissance de syndicats groupant des travailleurs à leur service et non pas comme une règle stricte ; le gouvernement ajoute que, du reste, la circulaire en question n'est pas applicable en l'occurrence aux travailleurs du port de Calcutta, ceux-ci n'étant pas employés par le gouvernement. Dans ces conditions, le Comité estime que le critère de la représentativité applicable à la reconnaissance syndicale contenu dans la circulaire ministérielle de 1950 ne saurait être pris en considération dans le cas d'espèce et que le seul point à retenir en ce qui concerne cette partie de la plainte est l'affirmation du plaignant selon laquelle la reconnaissance lui est refusée, alors qu'elle est accordée à d'autres syndicats et alors que l'organisation plaignante est numériquement la plus importante parmi les organisations groupant les travailleurs de la catégorie intéressée.
- 163 A cet égard, le Comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle, bien que l'organisation plaignante prétende compter 5.000 membres sur un total de quelque 30.000 travailleurs, elle a omis jusqu'au mois de mars 1955, alors qu'une enquête sur la question avait été entreprise en septembre 1954, de communiquer ses registres, qui ne révélaient d'ailleurs que 1.597 adhérents. De plus, dans son rapport annuel pour 1953, l'organisation plaignante elle-même ne faisait état que de 2.229 adhérents. Par ailleurs, le gouvernement indique que le nombre vérifié des adhérents de deux autres organisations - reconnues celles-là - serait respectivement de 17.634 et 4.404 et laisse entendre que l'unique raison pour laquelle l'organisation plaignante n'aurait pas été reconnue résiderait dans le fait de son importance numérique relativement faible. Etant donné la précision des informations fournies par le gouvernement, le Comité estime que l'exactitude de l'affirmation du plaignant, qui se dit être l'organisation la plus importante, n'a pas pu être établie.
- 164 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la non-reconnaissance de l'organisation plaignante irait à l'encontre des dispositions de la Constitution indienne, le Comité notera que le plaignant s'abstient de se référer auxdites dispositions. Il convient de faire remarquer, cependant, qu'alors que l'article 19 de la Constitution du 26 janvier 1950 accorde aux citoyens le droit de constituer des syndicats, il ne fait pas allusion à une reconnaissance obligatoire de ce syndicats par les employeurs.
- 165 Dans le cas no 57, relatif à la Guyane britannique, où les employeurs de l'industrie sucrière avaient déjà reconnu cinq syndicats et refusaient d'en reconnaître un sixième, estimant qu'aux fins des négociations collectives, la catégorie de travailleurs intéressée était déjà représentée de façon adéquate, le Comité, notant que le sixième syndicat avait été enregistré conformément à la législation et qu'il se trouvait par suite habilité à conclure librement des conventions collectives, mais qu'aucune disposition législative n'obligeait le gouvernement à donner effet au principe des négociations collectives en ayant recours à des mesures de contrainte, a estimé que le plaignant n'avait pas apporté les preuves nécessaires pour lui permettre de conclure qu'une atteinte aurait été portée au libre exercice des droits syndicaux. Dans le cas no 52, relatif au territoire de Trieste et dans lequel les faits essentiels étaient sensiblement analogues, le Comité a formulé une conclusion similaire.
- 166 Dans le cas d'espèce, où l'organisation plaignante n'allègue pas que le droit d'exister lui aurait été refusé et ne montre pas que le gouvernement est tenu par la législation de contraindre les employeurs à reconnaître les syndicats aux fins des négociations collectives, le Comité estime également que les plaignants n'ont pas apporté les preuves nécessaires pour lui permettre de conclure qu'une atteinte aurait été portée à l'exercice des droits syndicaux et recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
- Allégation relative au refus de la part des autorités portuaires de Calcutta de constituer un syndicat unique
- 167 Il est allégué que les employeurs auraient refusé de constituer un syndicat unique groupant les travailleurs à leur service et fondé sur un vote majoritaire de ces travailleurs. Le gouvernement fait valoir que c'est aux travailleurs eux-mêmes qu'il appartient de prendre les mesures appropriées en vue de la création d'un semblable syndicat et non pas aux autorités portuaires.
- 168 Le Comité estime que, si dans des circonstances de cet ordre, les employeurs devraient s'abstenir d'essayer d'empêcher les travailleurs de constituer un syndicat unique, non seulement ils ne sont pas tenus de prendre l'initiative d'une telle fusion, mais ils s'exposeraient, en la prenant, à se voir accusés d'un acte tendant à provoquer la création d'une organisation de travailleurs dominée par l'employeur, ce qui serait contraire au principe introduit par la Conférence internationale du Travail dans l'article 2 2) de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, dans le but précisément de protéger les organisations contre les actes d'ingérence.
- 169 Compte tenu de ce principe et étant donné qu'il n'est pas allégué qu'il ait été mis obstacle à ce que les travailleurs eux-mêmes constituent un syndicat unique, le Comité estime que le plaignant n'a pas apporté la preuve qu'il y ait eu en cette circonstance atteinte aux droits syndicaux et par suite recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect de la plainte n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
- Allégations relatives aux pressions qui auraient été exercées sur les travailleurs dans le dessein de leur faire quitter l'organisation plaignante
- 170 Le plaignant n'apporte aucune preuve à l'appui de l'allégation qu'il formule selon laquelle les autorités portuaires se seraient efforcées d'inciter les travailleurs à devenir membres d'organisations autres que l'organisation plaignante. C'est le gouvernement lui-même, qui, supposant qu'elle pourrait être à l'origine de l'impression donnée au plaignant, fournit le texte d'une note-circulaire émise par les autorités portuaires, note qui informe les travailleurs de l'abstention de l'organisation plaignante de mettre ses livres à la disposition du commissaire régional au Travail à l'occasion de l'enquête effectuée par ce dernier sur l'importance respective des syndicats du port de Calcutta, traite des mesures prises en ce qui concerne les demandes présentées par l'organisation plaignante et indique qu'aucune action tendant à entraver l'activité du port ne sera tolérée, mais ne fait aucune allusion au fait que les travailleurs devraient adhérer à tel syndicat plutôt qu'à tel autre.
- 171 Dans ces conditions, le Comité estime que l'allégation en question est trop vague pour lui permettre de l'examiner quant au fond et recommande donc au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
- Allégations relatives aux mesures antisyndicales prises par les autorités portuaires de Calcutta
- 172 Le plaignant allègue en termes généraux que le gouvernement a négligé de contraindre les autorités portuaires à mettre un terme à leurs activités antisyndicales et aux atteintes portées aux droits démocratiques des travailleurs, ou tout au moins n'y a pas réussi. Le plaignant s'abstient de préciser à quelles activités et à quels droits il entend faire allusion. Dans ces conditions, le Comité considère qu'il s'agit ici d'une simple déclaration de caractère général trop vague pour lui permettre de l'examiner quant au fond et recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect de la plainte n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 173. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que le cas dans son ensemble n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.