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Observation (CEACR) - adopted 2021, published 110th ILC session (2022)

Indigenous and Tribal Peoples Convention, 1989 (No. 169) - Honduras (Ratification: 1995)

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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2021. Elle prend note également des observations du Conseil hondurien de l’entreprise privée (COHEP), reçues le 31 août 2021, ainsi que de la réponse du gouvernement à cet égard.
Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du travail, 109e session, mai-juin 2021)
La commission prend note de la discussion qui a eu lieu devant la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2021 qui, dans ses conclusions, a en particulier demandé au gouvernement de faire appel à l’assistance technique du BIT et l’a exhorté à accepter une mission de contacts directs du BIT. À cet égard, la commission prend note que, par voie de communication du 24 août 2021, le gouvernement a confirmé accepter la visite dans le pays de la mission de contacts directs et a proposé qu’elle ait lieu dans les premiers mois de 2022. La commission salue la volonté manifestée par le gouvernement en la matière et elle espère que cette mission contribuera à trouver des solutions aux difficultés rencontrées dans l’application de la convention.
Article 3 de la convention. Droits de l’homme. À diverses reprises, tant cette commission que la Commission de la Conférence dans ses conclusions de 2016 et 2021 ont exprimé leur profonde préoccupation quant aux allégations d’assassinats, de menaces, de disparitions forcées et de violences dont sont victimes des représentants et membres des peuples indigènes et afro-honduriens (PIAH), et elles ont demandé au gouvernement de diligenter sans délai des enquêtes et des procédures indépendantes au sujet de ces allégations et d’indiquer les mesures de protection prises à la suite des crimes et menaces dont font l’objet les membres des PIAH.
Dans son rapport, le gouvernement indique que: 1) entre 2018 et 2020, le parquet spécial de protection des ethnies et du patrimoine culturel a reçu 255 plaintes pour des actes de violence et menaces contre des membres des PIAH, dont 64 portaient sur des menaces, 4 pour des tentatives d’homicide, 3 pour homicides et 13 pour assassinats; 2) à la demande du parquet spécial de protection des ethnies et du patrimoine culturel, 15 mesures de protection ont été prises en faveur de membres et de dirigeants de communautés indigènes ou de dirigeants d’organisations représentatives de peuples indigènes; 3) dans le cadre du système national de protection, entre 2018 et février 2021, l’Unité de prévention et d’analyse du contexte a développé 14 plans de prévention et de garantie de non récidive, conjointement avec les communautés bénéficiaires, et a mené à bien des activités de formation sur la loi de protection pour les défenseurs des droits humains, journalistes, communicants sociaux et praticiens de la justice; et 4) en avril 2021 a démarré le procès pénal contre le présumé instigateur de l’assassinat de Berta Cáceres (ex-présidente du Conseil civique des organisations populaires et indigènes du Honduras, COPINH), commis en 2014, tandis que le ministère public poursuit son enquête pour identifier d’autres instigateurs impliqués dans cet assassinat.
La commission observe que la CSI allègue que les défenseurs de l’environnement et des droits humains sont toujours dans une situation critique, évoquant pour cela les assassinats de dirigeants indigènes commis en 2018, 2019 et 2020. La CSI cite en particulier l’enlèvement et la disparition de quatre membres de la communauté garifuna de El Triunfo de la Cruz, le 18 juillet 2020, et les assassinats, en décembre 2020, de José Adan Medina, membre de la communauté indigène tolupan, et de Félix Vasquez, militant environnemental de la communauté lenca, pour lesquels le parquet spécial de protection des ethnies et du patrimoine culturel et le Commissaire national des droits de l’homme avaient demandé des mesures de protection. La CSI dénonce le manque de mesures de protection et de prévention face aux actes de violence dirigés contre les défenseurs de l’environnement et des droits humains, ainsi que la timidité, la lenteur et l’inconsistance des procédures d’instruction et d’inculpation des auteurs et instigateurs de ces actes.
La commission observe également que, le 2 septembre 2020, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a adopté une résolution ordonnant l’adoption de mesures d’urgence dans le cas de la disparition des quatre membres de la communauté garifuna (cas mentionné par la CSI), demandant à l’État d’adopter les mesures nécessaires et adéquates pour connaître le sort de ces personnes et pour protéger efficacement les droits à la vie et à l’intégrité personnelle des chefs et dirigeants communautaires des communautés garifunas de El Triunfo de la Cruz et de Punta Piedra qui menaient ensemble des actions pour la défense des droits du peuple garifuna.
S’agissant du procès de l’auteur présumé de l’assassinat de Berta Cáceres, la commission prend dûment note, d’après les informations disponibles sur le site Web officiel du ministère public, que le tribunal de dernière instance ayant juridiction nationale a rendu un jugement de culpabilité contre le président exécutif de l’entreprise Desarrollos Energéticos S.A. (DESA), constatant que ce dernier avait ordonné la mort de Berta Cáceres dans le cadre d’un plan consistant à éliminer tout obstacle qui interférerait avec les activités de DESA sur le fleuve Gualcarque, territoire ancestral du peuple indigène lenca.
La commission observe avec une profonde préoccupation que, selon les informations communiquées par la CSI et les plaintes déposées au parquet spécial de protection des ethnies et du patrimoine culturel, les membres et dirigeants de communautés indigènes et afro-honduriennes sont toujours confrontés à un climat de violence et leur intégrité physique et psychologique reste sous la menace. La commission espère que, tout comme les auteurs matériels, les instigateurs de l’homicide de Berta Cáceres seront finalement sanctionnés. La commission rappelle que, pour que les populations indigènes et tribales puissent faire valoir les droits prévus dans la convention et les exercer, les gouvernements doivent adopter les mesures adéquates pour garantir un climat exempt de violence, de pressions, de craintes et de menaces de toute nature. La commission prie instamment et fermement le gouvernement de continuer à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la vie et l’intégrité physique et psychologique des PIAH, leurs représentants et dirigeants; garantir le plein et effectif exercice de leurs droits humains; et pour que soient établies les responsabilités et sanctionnés les auteurs matériels et les instigateurs des crimes commis contre ces personnes dans le cadre de la revendication pacifique de leurs droits (y compris s’agissant des nouveaux cas dénoncés par la CSI). La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées à ce sujet, en particulier sur les mesures de protection demandées par le parquet spécial de protection des ethnies et du patrimoine culturel, les enquêtes menées à partir des plaintes reçues, ainsi que sur les procédures judiciaires en cours.
Articles 6 et 7. Procédures appropriées de consultation et de participation. La commission avait pris note de l’élaboration d’un projet de cadre normatif pour la consultation préalable, libre et éclairée des peuples indigènes, et du dépôt par le gouvernement d’un avant-projet de loi devant le Congrès national, lequel a ensuite constitué une commission spéciale devant remettre un avis sur le projet de loi sur la consultation. La commission a demandé au gouvernement de veiller à ce que les peuples couverts par la convention soient consultés et puissent participer de manière appropriée à l’élaboration de ce cadre normatif de consultation.
Le gouvernement explique qu’en raison de l’état d’urgence décrété suite à la pandémie de COVID-19 qui frappe l’ensemble du territoire, il n’a pu entamer le processus de consultation de tous les PIAH. La commission note néanmoins que le gouvernement réitère qu’afin de relancer les activités de la commission spéciale du Congrès ont eu lieu des réunions préliminaires par plateformes numériques et conférences vidéo avec quelques représentants de peuples indigènes, sans que tous aient pu participer à ces réunions.
La commission observe que la CSI réitère que certains représentants des PIAH ont rejeté l’action menée par le gouvernement s’agissant de l’avant-projet de loi sur une consultation préalable, libre et éclairée tant pour ce qui est des ateliers de socialisation réalisés en 2016 (en raison de l’inadéquation de la représentation indigène et des communautés afro-honduriennes) que de l’élaboration du nouveau projet soumis au Congrès qui n’a pas été communiqué aux communautés ni fait l’objet de consultation.
La commission considère qu’il est d’une importance capitale que le cadre normatif de la consultation préalable qui est proposé fasse l’objet d’un processus de consultation pleine, libre et éclairée avec tous les PIAH. Elle prie par conséquent instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les PIAH puissent participer à ce processus de consultation d’une manière appropriée aux circonstances et à travers leurs institutions représentatives, de sorte qu’ils puissent exprimer leurs opinions et influer sur le résultat final du processus. En attendant l’adoption de la loi, la commission rappelle au gouvernement son obligation de consulter les peuples couverts par la convention sur toute mesure législative ou administrative susceptible de les toucher directement et elle le prie à nouveau de fournir des informations sur les processus de consultation réalisés et leurs résultats.
Articles 20, 24 et 25. Protection des droits du peuple miskito. La commission a précédemment salué l’approche intégrée des mesures adoptées pour octroyer une réparation complète aux victimes de la pêche sous-marine et à leurs familles et améliorer les conditions de vie et de travail des membres de la communauté miskito. La commission tout comme la Commission de la Conférence en 2021 ont demandé au gouvernement de continuer à prendre des mesures efficaces en la matière.
À cet égard, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement au sujet de 1) l’adoption en octobre 2020 du règlement de sécurité et santé professionnelles de la pêche sous-marine et d’un plan d’action pour sa mise en application. Ce règlement a pour objet l’élaboration et la mise en oeuvre de mécanismes juridiques, techniques et administratifs pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles sur les embarcations de pêche et dans les travaux dérivés de l’activité de pêche sous-marine; et 2) l’actualisation du plan stratégique de la Commission interinstitutions pour le traitement et la prévention des problèmes de la pêche sous-marine (CIAPEB) pour la période 2020-2025 et les activités réalisées avec la participation du peuple miskito entre 2015 et 2019 aux fins d’application et d’évaluation du plan. La commission observe que le plan stratégique 2020-2025 compte parmi ses objectifs l’amélioration de la mise en valeur du capital humain et le développement social de la population de la Moskitia; une contribution à l’amélioration des moyens d’existence des familles des plongeurs handicapés et des plongeurs en activité; l’amélioration des conditions d’accès du peuple miskito à la justice; et le renforcement des capacités des organisations locales et des institutions de l’État à promouvoir le respect des droits de l’homme et des droits des populations indigènes.
La commission observe que le COHEP considère que ces mesures témoignent d’avancées importantes et qu’il incombe au Secrétariat au travail et à la sécurité sociale, par l’intermédiaire de la Direction de l’inspection du travail, ainsi qu’aux autres institutions gouvernementales concernées de veiller à la mise en application stricte du règlement comme du plan stratégique et, de ce fait, de garantir des conditions décentes d’embauche et d’emploi pour les plongeurs miskitos. Pour sa part, la CSI, tout en reconnaissant que le gouvernement a pris des mesures pour la santé et l’indemnisation des plongeurs miskitos, exprime sa préoccupation devant la situation déplorable qu’ils continuent de subir, avec des conditions de travail précaires et sans mesures adéquates de sécurité au travail.
La commission observe que, dans sa décision du 31 août 2021 sur le cas des plongeurs miskitos (Lemoth Morris et al.) contre le Honduras, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a homologué le règlement à l’amiable conclu entre les parties et dans lequel l’État et les représentants des victimes se sont mis d’accord pour octroyer une réparation totale aux victimes à travers une série de mesures (mesures de restitution et satisfaction; mesures pécuniaires; garanties de non-récidive; etc.).
La commission encourage le gouvernement à continuer de prendre des mesures afin d’améliorer les conditions de travail des plongeurs miskitos, notamment à travers la réalisation d’activités de prévention et de formation, et afin que l’inspection du travail veille à l’application effective du cadre légal réglementant la pêche sous-marine. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises dans le cadre de la mise en œuvre du plan stratégique 2020-2025, et en particulier pour ce qui a trait à l’amélioration de la mise en valeur du capital humain et du développement social de la population de la Moskitia.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2023.]
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