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Afin de fournir une vue d’ensemble des questions relatives à l’application des conventions ratifiées en matière de sécurité sociale, la commission estime qu’il convient d’examiner les conventions nos 12 (réparation des accidents au travail (agriculture), 17 (réparation des accidents du travail), 18 (maladies professionnelles) et 102 (norme minimum) dans un même commentaire.
La commission prend note des observations de la Confédération générale des travailleurs portugais - Intersyndicale nationale (CGTP-IN) et de l’Union générale des travailleurs (UGT) communiquées avec les rapports du gouvernement.
Partie V (Pension de vieillesse), article 26 de la convention no 102. Age de la retraite. La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport sur la réforme du régime des pensions entreprise au cours des dernières décennies en vue de renforcer la viabilité financière. Parmi les modifications introduites figure l’établissement d’un lien entre l’âge de la retraite et l’espérance de vie moyenne. En conséquence, l’âge normal de la retraite a été progressivement relevé au cours des dernières années jusqu’à 66 ans et 5 mois en 2019 et 2020, comme le prévoit le décret no 25/2018 du 8 janvier 2018. La commission prend note des observations formulées par la CGTP-IN et de son allégation selon laquelle cette modification n’est pas conforme à l’article 26, paragraphe 2, de la convention, qui n’autorise un relèvement de l’âge de la retraite au-delà de 65 ans que dans le respect de la capacité de travail des personnes âgées dans le pays concerné. En outre, la CGTP-IN souligne que l’établissement d’un lien entre l’âge de la retraite et l’espérance de vie moyenne entraînera des variations de l’âge de la retraite d’une année à l’autre. La CGTP-IN indique en outre que cela crée de l’incertitude pour les futurs retraités qui ne sont plus en mesure d’anticiper l’âge auquel ils pourront toucher une pension complète. La commission prend également note des préoccupations exprimées par l’UGT dans ses observations concernant l’impact préjudiciable qu’une détermination annuelle de l’âge de la retraite, fondée sur des critères de durabilité, aura sur les retraités, et l’absence d’accord des partenaires sociaux sur la mise en œuvre de cette mesure. La commission prend également note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport de 2019 sur l’application du Code européen de sécurité sociale et de son Protocole (Code), qui contient une disposition similaire à l’article 26 de la convention, lequel précise que le nombre de personnes âgées de 65 ans par rapport au nombre de personnes en âge de travailler (de 15 à 64 ans) a atteint 33,6 pour cent en 2018 contre 20,3 pour cent en 1990. Le rapport de 2019 fournit également des statistiques montrant que non seulement l’espérance de vie générale, mais aussi l’espérance de vie sans incapacité (DFLE) ont augmenté au cours des dernières années. La commission prend note de ces informations et prie le gouvernement de continuer à fournir des statistiques sur la capacité de travail des personnes âgées et notamment sur l’espérance de vie sans incapacité, l’espérance de vie à 65 ans et l’employabilité des personnes âgées de 65 ans et plus.
Partie VI (Prestations en cas d’accidents du travail et de maladies professionnelles), article 35. Réadaptation et réinsertion. La commission prend note des informations fournies par le gouvernement en réponse à sa précédente demande concernant les services de réadaptation et de réinsertion.
Article 36. Paiement d’une indemnité sous la forme d’une somme forfaitaire. Dans ses précédents commentaires, la commission a prié le gouvernement de fournir des informations sur la manière dont les compagnies d’assurance privées vérifient qu’une somme forfaitaire versée au lieu d’une pension périodique sera utilisée correctement, comme l’exige l’article 36 de la convention. Le gouvernement répond que, en cas d’incapacité de travail inférieure à 30 pour cent, la conversion d’une pension périodique en une somme forfaitaire est autorisée si le montant de la pension ne dépasse pas six fois la référence d’indexation de l’aide sociale (IAS) (Indexante dos apoios sociais). Le gouvernement indique en outre que, en cas d’incapacité de travail supérieure à 30 pour cent, la conversion de la pension périodique en une somme forfaitaire n’est autorisée que partiellement et à la demande du bénéficiaire. Selon l’UGT, le versement d’une somme forfaitaire est avantageux pour les compagnies d’assurance, mais préjudiciable aux travailleurs victimes d’accidents du travail. La commission rappelle que, conformément au paragraphe 3 de l’article 36 de la convention, le paiement périodique ne peut être converti en une somme forfaitaire que si le degré d’incapacité est faible ou si l’autorité compétente a l’assurance que la somme forfaitaire sera utilisée correctement. La commission prie donc le gouvernement de veiller à ce qu’en cas d’incapacité de travail supérieure à 30 pour cent, l’autorité compétente s’assure que la partie de la prestation qui peut être versée en une somme forfaitaire sera correctement utilisée.
Partie XI (Normes auxquelles doivent satisfaire les paiements périodiques), article 65, paragraphe 10.
  • a) Examen des taux des pensions pour accidents du travail et maladies professionnelles. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté le retard pris dans la publication des taux de pension revalorisés pour accidents du travail et maladies professionnelles et avait exprimé l’espoir que le gouvernement publierait à l’avenir les taux révisés en même temps que ceux des autres pensions de sécurité sociale. La commission prend note de l’indication de la CGTP-IN selon laquelle la mise à jour des prestations pour accidents du travail et maladies professionnelles continue d’être effectuée avec des retards considérables et injustifiés. La commission prie le gouvernement de lui faire part de ses observations à cet égard.
  • b) Examen des taux des prestations de vieillesse, d’accidents du travail et de maladies professionnelles, d’invalidité et de survivants. La commission prend note des statistiques fournies par le gouvernement sur la révision des taux de prestations pour la période 2014-15. Elle note que, contrairement aux pensions minima, les prestations perçues par un bénéficiaire ordinaire n’ont pas été ajustées en fonction de l’augmentation du taux de l’indice des prix (IPC). La commission note en outre les allégations de la CGTP-IN selon lesquelles le pouvoir d’achat des pensions n’a pas été garanti, comme l’exige le paragraphe 10 de l’article 65 de la convention, et que certaines pensions n’ont pas été indexées pour la période 2009-2015, bien que le taux d’inflation cumulé ait atteint 9 pour cent en 2015. La commission note également dans le rapport de 2019 sur le Code que, depuis 2017, l’ajustement des pensions à l’IPC dépend du montant de la pension et du taux de croissance du produit intérieur brut (PIB): si la croissance du PIB est inférieure à 2 pour cent, seules les pensions dont le montant est inférieur à 1,5 fois l’IAS sont indexées sur le taux plein de l’IPC; si le PIB est passé de 2 pour cent à 3 pour cent, l’indexation sur le taux plein de l’IPC est étendue aux pensions comprises entre 1,5 et 6 x IAS; et si le PIB a augmenté de plus de 3 pour cent, le taux plein de l’IPC est également appliqué à l’ajustement des pensions égales à plus de 6 x IAS. Selon le rapport de 2019, l’IPC de l’année précédente a atteint 1,03 pour cent et le taux de croissance moyen du PIB au cours des deux dernières années a été de 2,58 pour cent. Les pensions ont donc été ajustées en 2019 comme suit: 1,6 pour cent pour les pensions jusqu’à 871,52 euros (2 x IAS), 1,03 pour cent pour les pensions comprises entre 871,52 euros et 2 614,56 euros (entre 2 et 6 x IAS) et 0,78 pour cent pour les pensions supérieures à 2 614,56 euros (au-delà de 6 x IAS). La commission observe que le nouveau mécanisme dissocie l’ajustement des pensions de l’évolution du niveau général des gains dans le pays, ce qui est préconisé par la convention no 102, et le lie plutôt à l’évolution des taux du PIB. La commission observe en outre que, si la croissance du PIB réel est inférieure à 2 pour cent, l’ajustement de toutes les pensions supérieures à 1,5 x IAS conformément aux nouvelles règles ne permettra pas le maintien de leur pouvoir d’achat face à l’inflation, ce qui est l’objectif principal de l’article 65, paragraphe 10, de la convention. Afin de déterminer dans quelle mesure les ajustements des pensions ont effectivement permis de maintenir le pouvoir d’achat de toutes les pensions en cours de paiement, la commission prie le gouvernement de fournir des données sur l’évolution de l’indice des salaires, du coût de la vie, du montant des prestations de vieillesse, d’accidents du travail et de maladies professionnelles, et d’invalidité et de survivants ainsi que sur l’évolution du PIB depuis 2010, conformément au Point VI du formulaire du rapport pour la convention.
Partie XIII (Dispositions communes), article 69. Suspension des prestations d’accidents du travail et de maladies professionnelles. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, en vertu des articles 14 à 17 de la loi no 98/2009, la responsabilité des employeurs en matière d’indemnisation des accidents du travail ne serait pas engagée, entre autres, en cas de négligence grave, de force majeure ou lorsque l’accident est dû à un autre travailleur ou un tiers. Elle a en outre noté que ces cas étaient pris en charge par les compagnies d’assurance, étant donné que l’assurance contractée par les employeurs en cas d’accidents du travail vise à transférer à l’assureur les obligations de l’employeur. Compte tenu de ce qui précède, la commission avait exprimé l’espoir que, en élaborant le règlement d’application de la loi, le gouvernement tiendrait compte du fait que les motifs établis pour la suspension des prestations peuvent aller au delà de ce qui est permis par la convention et avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que, en appliquant les articles 14-17 de la loi no 98/2009, les autorités compétentes tiendraient compte des dispositions de la convention, laquelle limite, dans son article 69, les causes de suspension des prestations. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise à cet effet.
Sécurité sociale et réduction de la pauvreté. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que les mesures d’austérité avaient eu pour effet de réduire les dépenses sociales, d’accroître la précarité et la pauvreté et elle avait prié le gouvernement de fournir des informations sur la dynamique de la pauvreté dans le pays, notamment des données sur le nombre de bénéficiaires et les montants minima des prestations sociales par rapport au seuil de pauvreté. La commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle, parallèlement à l’amélioration générale de l’économie portugaise, des mesures ciblées de politique sociale ont élargi la couverture des régimes de revenu minimum et contribué à améliorer les conditions de vie des ménages dont le revenu était nettement inférieur au seuil de pauvreté. La commission note, à la lecture du rapport de 2019 sur le Code, que le nombre de résidents exposés au risque de pauvreté a diminué (1 pour cent de moins qu’en 2016 et 2,2 pour cent de moins qu’en 2013). Le rapport de 2019 indique en outre que le revenu tiré des pensions de retraite et de survivants a contribué à une diminution de 21 pour cent du taux de risque de pauvreté. La commission prend note des observations de la CGTP-IN indiquant une détérioration de la couverture et du niveau des prestations non contributives, notamment en ce qui concerne les allocations familiales, les allocations de chômage, le revenu d’intégration sociale (RSI) et le complément de solidarité pour les personnes âgées (CSI). La commission espère que le gouvernement continuera de prendre des mesures pour réduire durablement la pauvreté et étendre la couverture des prestations minima de sécurité sociale et elle le prie de continuer à fournir des statistiques à cet égard.
Partie XIII (Dispositions communes), article 71. Financement du système de sécurité sociale. Le gouvernement indique que, dans le cadre du Programme d’ajustement économique UE/FMI pour le Portugal, les pensions, subventions et autres avantages monétaires similaires ont été soumis à la contribution extraordinaire de solidarité (Contribuiçao Extraordinâria de Solidariedade) pendant la période 2012-2016. La commission prend note à cet égard des observations de la CGTP-IN, qui allèguent que les cotisations extraordinaires au régime de pension font partie des mesures restrictives mises en place par le gouvernement, ce qui soulève des questions de respect de l’article 71 de la convention. Rappelant que, en vertu de l’article 71 de la convention, le coût des prestations servies conformément à la convention et le coût de l’administration de ces prestations sont pris en charge collectivement, la commission prie le gouvernement de fournir des statistiques sur la part des cotisations d’assurance supportée par les salariés dans le total des ressources financières allouées à la protection des salariés et des personnes à leur charge, conformément au formulaire de rapport pour la convention.
Article 1 de la convention no 12 (couverture de tous les salariés de l’agriculture) et application de la convention dans la pratique. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la législation portugaise sur l’indemnisation des accidents du travail est applicable à tous les travailleurs, y compris dans le secteur agricole. Elle note également, d’après les données fournies par le gouvernement, une augmentation du nombre d’accidents du travail dans l’agriculture, l’élevage, la chasse, la sylviculture et la pêche. A cet égard, la commission note que, selon l’UGT, les mesures prises pour prévenir les accidents du travail dans le secteur agricole, l’un des secteurs présentant le taux d’accidents du travail le plus élevé, ne sont pas suffisantes. L’UGT s’inquiète également du taux élevé de travail non déclaré dans le secteur agricole, que l’Autorité des conditions de travail (Autoridade para as Condições de Trabalho (ACT)) a du mal à détecter. A cet égard, l’UGT se réfère à la Campagne nationale contre le travail non déclaré lancée par l’ACT en 2014-15 pour lutter contre le travail non déclaré et assurer la couverture des travailleurs concernés par l’assurance contre les accidents professionnels. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour prévenir les accidents du travail dans le secteur agricole et de se référer à ses observations au titre de la convention (no 184) sur la sécurité et la santé dans l’agriculture, 2001, à cet égard. Elle le prie de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour faire en sorte que tous les salariés agricoles soient effectivement couverts en cas d’accident du travail, conformément à l’article 1 de la convention.
Article 1 de la convention no 17 et article 71, paragraphe 3, de la convention no 102. Responsabilité de l’Etat pour le versement en bonne et due forme de la prestation pour accidents du travail et maladies professionnelles. Dans sa réponse à la précédente demande de la commission, le gouvernement fournit des statistiques sur le nombre d’inspections effectuées et de sanctions imposées. Sur cette base, la commission note que le nombre de visites d’inspection a diminué au cours de la période 2011-2015. La commission prend également note de l’allégation de l’UGT selon laquelle les assureurs seraient lents à verser les indemnités et les sous-traitants ne concluraient pas les polices d’assurance requises, ce qui rendrait plus difficile, voire impossible, l’indemnisation des travailleurs. La commission rappelle que l’article 1 de la convention no 17 et le paragraphe 3 de l’article 71 de la convention no 102 établissent la responsabilité de l’Etat en ce qui concerne le versement des prestations pour accidents du travail et maladies professionnelles et que l’Etat doit prendre toutes les mesures nécessaires à cette fin, y compris les mesures appropriées d’application et de respect. La commission prie donc le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour améliorer le respect par les parties concernées de leurs obligations en matière d’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles et d’assurer le paiement effectif des indemnités dues aux travailleurs victimes d’accidents du travail ou aux personnes à leur charge en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. La commission prie également le gouvernement de se référer à ses observations au titre de la convention (nº 81) sur l’inspection du travail, 1947, concernant le maintien d’un nombre suffisant d’inspecteurs du travail.
Application de la convention no 18 dans la pratique. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur la sous-notification des maladies professionnelles et d’expliquer la manière dont les médecins interviennent dans la reconnaissance clinique des maladies professionnelles. La commission prend note de la réponse du gouvernement qui se réfère au décret-loi no 2/82 du 5 janvier 1982 relatif au traitement obligatoire d’un cas présumé ou aggravé de maladie professionnelle et qui explique les étapes de la procédure de certification d’une maladie professionnelle. Le gouvernement se réfère également aux directives publiées par la Direction générale de la santé en application de l’article 2, paragraphe 2 a), du décret réglementaire no 14/2012 du 26 janvier 2012 et du deuxième Programme national de santé au travail (2013-2017), qui réglementent la participation des médecins au diagnostic clinique des maladies professionnelles. La commission prend note des observations formulées par l’UGT et la CGTP-IN, qui indiquent que la plupart des maladies professionnelles ne sont pas diagnostiquées en tant que telles, que les maladies professionnelles sont sous-déclarées et que, par conséquent, les données statistiques nécessaires et les études pertinentes sur l’incidence et la prévalence des maladies professionnelles font défaut. L’UGT et la CGTP-IN soulignent également la nécessité d’une prise de conscience accrue au sein de la profession médicale des liens de causalité entre une pathologie et les activités professionnelles. La commission prie le gouvernement de se référer à ses observations au titre de la convention (nº 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, en ce qui concerne les mesures visant à améliorer la notification des accidents et maladies professionnelles. Elle le prie également de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour améliorer la collecte de statistiques sur l’incidence et la prévalence des maladies professionnelles.
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