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Observation (CEACR) - adopted 2017, published 107th ILC session (2018)

Abolition of Forced Labour Convention, 1957 (No. 105) - Cambodia (Ratification: 1999)

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Article 1 a) de la convention. Peines comportant une obligation de travail sanctionnant l’expression de certaines opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission a précédemment noté que, en vertu de l’article 41 de la loi sur les partis politiques de 1997, diverses infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal ou dont l’enregistrement a été refusé sont passibles de peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an, peines qui comportent une obligation de travailler en vertu de l’article 68 de la loi sur les prisons de 2011. La commission a également noté que, en vertu du Code pénal de 2009, les délits de diffamation et d’insultes (art. 305-309) ne sont plus passibles que de peines d’amende. Elle a également pris note de l’adoption de la loi de 2009 sur les manifestations pacifiques et de l’arrestation de sept opposants parlementaires en juillet 2014 alors qu’ils manifestaient contre l’interdiction des manifestations imposées par le gouvernement en janvier 2014, suite aux nombreuses manifestations qui s’étaient multipliées à la fin de l’année 2013.
La commission prend note de l’information communiquée par le gouvernement dans son rapport, selon laquelle aucun parti politique n’a été dissous par décision du tribunal en application de la loi de 2007 sur les partis politiques. Le gouvernement indique aussi que les manifestations ne peuvent avoir lieu quand elles mettent en danger ou portent atteinte de quelque manière que ce soit à l’ordre, à la sûreté et à la sécurité publics. De plus, des personnes ayant participé à des émeutes ou ayant dirigé des émeutes ont été arrêtées dans le cadre des délits prévus dans le Code pénal.
La commission note également que la loi de 2007 sur les partis politiques a été modifiée en 2017, mais que l’article 42 de la version amendée conserve les dispositions de l’article 41 de la version précédente. De plus, plusieurs articles du Code pénal de 2009 prévoyant une peine d’emprisonnement peuvent encore être utilisés dans des situations relevant de l’article 1 a) de la convention, notamment les articles 494 et 495 sur l’incitation à troubler la sécurité publique par des discours, des écrits, des images ou toute autre communication audiovisuelle en public ou pour le public; l’article 522 sur la publication de commentaires visant à exercer une coercition illégale sur les autorités judiciaires; et l’article 523 sur le discrédit porté aux décisions de justice. La commission note également l’adoption en 2015 de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales et, en 2016, de la loi sur les syndicats. En outre, la législation sur le cybercrime est en cours d’élaboration.
La commission note que, selon le rapport de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge, daté du 5 septembre 2016, pour nombre de lois, le niveau de conformité au droit international des droits de l’homme dépend de l’interprétation et de l’application qui sont faites de la loi par les forces de l’ordre et le corps judiciaire (A/HRC/33/62, paragr. 29). Dans son rapport du 27 juillet 2017, la Rapporteuse spéciale exprime sa préoccupation face aux multiples lois (relatives aux associations et aux ONG, à l’élection des membres de l’Assemblée nationale, aux syndicats, aux manifestations pacifiques) qui peuvent être utilisées pour limiter l’exercice de la liberté de réunion et d’association et de la liberté d’expression (A/HRC/36/61, paragr. 47).
La commission note également qu’il est indiqué, dans le rapport de 2017 de la Rapporteuse spéciale, que plusieurs hauts responsables du Parti du sauvetage national du Cambodge (PSNC), principal parti d’opposition, ont été reconnus coupables et ont été condamnés (paragr. 6). Le sénateur Hong Sok Hour a été condamné à sept ans d’emprisonnement le 9 novembre 2016 pour falsification de documents et incitation à commettre une infraction après un message posté sur Facebook. Le sénateur Thak Lany, actuellement en exil, a été condamné par contumace à dix-huit mois d’emprisonnement pour diffamation et incitation à commettre une infraction en lien avec la diffusion d’un clip vidéo sur Facebook, qui aurait contenu un discours commentant le décès d’un activiste politique, Kem Ley (paragr. 7). De plus le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, dans une déclaration du 4 septembre 2017, s’est déclaré gravement préoccupé par l’arrestation de Kem Sokha, président actuel du PSNC. Kem Sokha est accusé de trahison et risque une peine d’emprisonnement de quinze à trente ans s’il est condamné, pour une vidéo d’un discours qu’il avait prononcé en 2013, et qui a depuis été rendu public.
La commission note en outre que, selon le rapport de 2017 de la Rapporteuse spéciale, beaucoup de représentants d’ONG, de membres de syndicats et de défenseurs des droits de l’homme sont toujours victimes de menaces et de harcèlement et continuent d’être arrêtés, placés en détention provisoire et poursuivis (paragr. 45). En particulier, en 2016, cinq membres de l’Association pour les droits de l’homme et le développement (ADHOC) ont été arrêtés et placés en détention préventive durant plus d’un an. Ils ont été libérés sous contrôle judiciaire en juin 2017, et la date de leur procès n’est toujours pas connue (paragr. 21 et 22). Qui plus est, plusieurs protestataires liés à la campagne Black Monday contre l’arrestation de ces membres de l’ADHOC ont été arrêtés et poursuivis pour diffamation, insultes publiques et diverses atteintes à l’ordre public, en application du Code pénal. Entre autres, Tep Vanny a fait l’objet de poursuites après avoir participé à la manifestation du Black Monday le 15 août 2016. Elle a ensuite été accusée d’ «actes de violence intentionnels avec circonstances aggravantes» en lien avec une autre manifestation qui avait eu lieu en 2013 et a été condamnée à deux ans et demi d’emprisonnement, le 23 février 2017 (paragr. 45). De plus, un analyste politique indépendant, Kim Sok, est en détention provisoire depuis le 17 février 2017 pour des chefs d’accusation de diffamation et d’incitation au désordre, parce qu’il avait exprimé publiquement son opinion selon laquelle le parti au pouvoir était responsable du meurtre de Kem Ley (paragr. 48).
La commission note que, bien que les délits de diffamation publique et d’insultes ne soient passibles que d’amendes en vertu du Code pénal de 2009, ces dispositions ont été appliquées aux différentes personnes susmentionnées qui ont été sanctionnées par des peines d’emprisonnement (qui comportent une obligation de travailler). La commission se voit dans l’obligation d’exprimer sa profonde préoccupation face aux mesures de détention et aux poursuites judiciaires dont font l’objet des membres du parti d’opposition, des représentants d’ONG, des membres de syndicats et des défenseurs des droits de l’homme, et elle rappelle que la restriction des droits et libertés fondamentaux, y compris la liberté d’expression, peut avoir une incidence sur l’application de la convention lorsque ces restrictions sont mises en œuvre à travers l’application de sanctions comportant l’obligation de travailler. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que les garanties juridiques qui entourent l’exercice de la liberté de pensée et d’expression, du droit de réunion pacifique, de la liberté d’association et du droit de ne pas être arrêté pour motif arbitraire constituent une protection importante contre l’imposition de travail obligatoire en tant que sanction de l’expression de certaines opinions politiques ou idéologiques, ou en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique (étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 302). La commission prie par conséquent instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour s’assurer que, tant en droit qu’en pratique, aucune sanction comportant du travail obligatoire n’est imposée en tant que sanction de l’expression d’opinions politiques ou de la manifestation d’une opposition à l’ordre établi. A cet égard, elle prie le gouvernement de s’assurer que l’article 42 de la loi sur les partis politiques, telle que modifiée en 2017, et les articles 494, 495, 522 et 523 du Code pénal de 2009 sont modifiés, en restreignant clairement le champ d’application de ces dispositions aux situations liées au recours à la violence ou à l’incitation à la violence, ou en supprimant les sanctions comportant du travail obligatoire. Elle prie également le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que l’application du Code pénal, de la loi sur les syndicats, de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales et de la loi sur les manifestations pacifiques n’aboutit pas, dans la pratique, à l’imposition de sanctions comportant du travail obligatoire, dans les situations visées à l’article 1 a) de la convention. Enfin, la commission prie le gouvernement de communiquer copie de la législation sur le cybercrime, lorsqu’elle aura été adoptée.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 107e session et de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2018.]
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