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Interim Report - REPORT_NO393, March 2021

CASE_NUMBER 3179 (Guatemala) - COMPLAINT_DATE: 15-JAN-16 - Active

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Allégations: Les organisations plaignantes dénoncent, d’une part, le fait que les autorités publiques ont amorcé un processus de révision unilatérale des conventions collectives du secteur de la santé publique, au mépris flagrant du principe de la négociation de bonne foi, et, d’autre part, l’incrimination de l’activité syndicale des membres du Syndicat national des personnels de santé du Guatemala

  1. 478. La plainte figure dans une communication de la Confédération des travailleurs de l’État pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CLATE) et du Syndicat national des personnels de santé du Guatemala (SNTSG) datée du 12 janvier 2016, ainsi que dans une communication de la CLATE datée du 19 février 2019. Par une communication datée du 29 mars 2016, la Fédération nationale des syndicats des agents de l’État du Guatemala (FENASTEG) a fait savoir qu’elle s’associait à la plainte.
  2. 479. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par des communications datées du 18 janvier 2017, du 8 mars 2018, du 28 mai 2019, des 22 et 27 août 2019, du 14 février 2020, du 3 septembre et du 17 décembre 2020.
  3. 480. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 481. Dans une communication datée du 12 janvier 2016, les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement s’est ingéré dans la négociation collective et a fait entrave à celle-ci dans le secteur public, tout particulièrement dans le domaine de la santé, semble-t-il au motif du coût élevé de mise en œuvre des conventions collectives. Elles indiquent que, le 28 avril 2015, le bureau du Contrôleur général des comptes a déposé une plainte auprès du bureau du Procureur général de la République, concernant la convention collective de travail signée en août 2013 par le ministère de la Santé, et que, le 26 juillet 2015, celui-ci a fait de même. Les organisations plaignantes dénoncent le fait qu’avec l’aide du secteur des entreprises, en la personne du Comité de coordination des associations agricoles, commerciales, industrielles et financières (CACIF), l’État employeur persiste à faire fi des conventions existantes et à en demander l’annulation et met de plus en doute la capacité des organisations syndicales à représenter les intérêts des travailleurs de la santé. Selon les organisations plaignantes, il ferme de fait la porte à la négociation collective, car il donne au gouvernement, c’est-à-dire à l’un des signataires de ces conventions en tant qu’employeur, la possibilité de les faire réviser et annuler a posteriori. Cela constitue une pratique déloyale et témoigne d’une mauvaise foi patente, contraire au droit interne et au droit international.
  2. 482. Dans une communication datée du 20 janvier 2019, la CLATE, agissant avec le soutien de plusieurs organisations nationales et internationales – l’Internationale des services publics (PSI), l’Union syndicale des infirmiers(ères) du monde (GNU) et la Fédération des employés(ées) des services publics de l’Union générale des travailleurs d’Espagne (FeSP UGT) – demande la prise en compte d’un certain nombre d’éléments. Ces éléments concernent: la procédure pénale que plusieurs dirigeants syndicaux du SNTSG ont vu être engagée contre eux après leur participation à la négociation de la convention collective conclue en 2013 avec le ministère de la Santé; et l’arrestation et la mise en détention provisoire subséquentes de Luis Antulio Alpirez Guzmán, secrétaire général du SNTSG, et de Dora Regina Ruano Saldaña, secrétaire exécutive du SNTSG. La CLATE indique qu’à ces personnes placées en détention s’est ajouté Javier Méndez Franco, conseiller juridique du SNTSG, et que demande a été faite d’arrêter un autre conseiller juridique du SNTSG, César Landelino Franco López. Pour la confédération syndicale, l’action judiciaire intentée contre la convention collective susmentionnée fait partie d’une campagne du gouvernement visant à discréditer la négociation collective dans le secteur public et à saper le mouvement syndical. Selon des renseignements en date du 19 février 2019 reçus de la CLATE, les dirigeants syndicaux ont certes retrouvé la liberté, mais cela est provisoire, car ils restent visés par une procédure pénale. La situation des deux conseillers juridiques demeure en revanche inchangée.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 483. Dans une communication datée du 18 janvier 2017, le gouvernement indique que le bureau du Procureur général de la nation ne prône ni ne cherche à obtenir l’annulation des conventions collectives de travail du secteur public à la faveur de processus de révision sans base légale. Cela étant, ce service est habilité par la Constitution à soumettre d’office à enquête ou à analyse juridique les instruments de droit qui pourraient comporter ou transposer des clauses ou des articles contraires à la loi, sans que cela ne bafoue ni ne restreigne les droits découlant des conventions nos 87 et 98 de l’OIT. Le gouvernement souligne que ce qu’il met en cause, c’est le mauvais usage qui a été fait des deniers publics; la négociation collective dont il est question ici s’est tenue dans un contexte politique en rupture avec l’intérêt supérieur de l’État, mais surtout avec celui de la population qui dépend directement du système de santé publique, et au mépris de certaines exigences de forme et de fond, comme l’a signalé le CACIF.
  2. 484. Le gouvernement ajoute que, depuis le 28 juillet 2016, la direction du cabinet ministériel du ministère de la Santé publique et de l’Assistance sociale (MSPAS) est pilotée par une administration nouvellement élue. Les hautes autorités du MSPAS considèrent que tant que la convention collective de travail qui lie le MSPAS n’est pas révisée ni modifiée ou annulée par une autorité compétente, elle est formellement valide, car le MSPAS, qui en est aussi l’un des signataires, ne peut unilatéralement l’invalider. Cependant, comme le fait observer le gouvernement, le MSPAS est compétent pour vérifier le respect du principe de la légalité des actes administratifs qui servent d’assise à la conclusion de tout type d’accord, de convention ou de pacte réglant de quelconques questions liées aux conditions de travail au sein du MSPAS. Les démarches connexes menées par les institutions ne visent pas à remettre en question l’exercice de la liberté syndicale et du droit de négociation collective. Au contraire, elles permettent de vérifier la conformité des actes administratifs avec la législation en vigueur; ces actes, qui sont effectués par les fonctionnaires et autres agents publics, doivent être mis à exécution avec la probité qui s’impose lorsqu’il s’agit de conférer ou de reconnaître des droits aux travailleurs. Pour le gouvernement, rien dans la démarche du bureau du Contrôleur général des comptes ne vise à faire réviser la convention collective, l’objectif des procédures d’audit étant de vérifier la légalité du comportement des fonctionnaires et des autres agents publics qui interviennent dans l’adoption et l’exécution des actes administratifs liés à la question des conditions de travail.
  3. 485. Le gouvernement fait ensuite référence à la procédure judiciaire d’amparo engagée par le SNTSG devant la Cour constitutionnelle (affaires jointes nos 4661 2016, 4662 2016 et 5073 2016), laquelle, par arrêt rendu le 12 mai 2016, a confirmé le bien-fondé de l’examen de légalité réalisé par le bureau du Contrôleur général des comptes. Pour le gouvernement, la bonne foi, en tant que principe de la négociation collective dans l’administration publique, réside fondamentalement dans la stricte légalité des actes administratifs effectués par les fonctionnaires qui concluent des conventions collectives et les mettent à exécution. Le gouvernement souligne que cette condition de stricte légalité n’est pas pleinement remplie dans le cas de la convention collective de 2013, et que l’objectif des autorités publiques est de protéger la liberté syndicale et le droit à la négociation collective et de procurer la pérennité voulue aux institutions qui s’emploient à faire en sorte que les conditions de travail soient décentes.
  4. 486. Le gouvernement poursuit en mentionnant les affaires suivantes: i) l’affaire no MP001 2015 39496, résultant de la plainte déposée par le bureau du Contrôleur général des comptes, au motif que la convention collective de travail qui lie le MSPAS et le syndicat du personnel de ce ministère est contraire au règlement sur les indemnités de subsistance énoncé dans le décret gouvernemental no 397 98, en ce que cette convention gonfle de manière exagérée lesdites indemnités dans son règlement y relatif; et ii) l’affaire no MP001 2015 71161, résultant de la plainte déposée le 26 juillet 2015 par l’ex-ministre de la Santé publique et de l’Assistance sociale, Luis Enrique Monterroso de Léon, au motif que la convention collective précitée a certes été homologuée par le MSPAS, mais n’a fait l’objet d’aucun examen technique propre à en évaluer la viabilité budgétaire et financière et qu’elle a en conséquence grevé le budget du MSPAS, car c’est le MSPAS qui a réglé les honoraires extrêmement élevés du conseiller qui a été consulté dans le cadre de l’élaboration de la convention, conseiller que le syndicat avait lui-même mandaté, et cela dans son seul intérêt. Le gouvernement déclare ne pas encourager la révision des conventions collectives de travail. Au contraire, il s’emploie à faire en sorte que tous les acteurs qui interviennent dans le domaine des relations employeurs-travailleurs soient formés et sensibilisés à la négociation collective, y compris avec l’appui technique du Bureau international du Travail. Dans une communication en date du 17 décembre 2020, le gouvernement indique que les affaires susmentionnées se trouvent «en statut de procédure intermédiaire».
  5. 487. Dans une communication datée du 28 mai 2019, le gouvernement fournit de plus amples informations. Il indique que la première division du parquet chargé de la lutte contre la corruption est saisie de l’affaire no MP001 2014 101645, à laquelle sont associées d’autres plaintes, comme celles déposées par le bureau du Contrôleur général des comptes et l’ex-ministre de la Santé publique et de l’Assistance sociale, Luis Enrique Monterroso de León. Le gouvernement signale que les faits incriminés concernent des irrégularités qui auraient été commises dans le cadre de la négociation, de la conclusion et de l’exécution de la convention collective de travail signée par le MSPAS et le SNTSG en 2013. Ces irrégularités résideraient dans ce qui suit: l’insertion illicite dans la convention d’un règlement concernant les indemnités de subsistance (les membres de la commission de négociation se sont ainsi arrogé un pouvoir réglementaire appartenant au seul Président de la République); et le mandatement d’un avocat et notaire, César Landelino Franco López, et le versement de 14 millions de quetzales prélevés sur les deniers publics qui a été fait, sans aucune base légale. Le cinquième tribunal de première instance en matière pénale chargé des affaires de trafic de stupéfiants et d’infractions environnementales du département de Guatemala assure un contrôle juridictionnel de l’instruction, dans le cadre de l’affaire no C 01077 2014 00480, car le secret de l’instruction a été sollicité et décrété en 2017; celui-ci a été de mise jusqu’en janvier 2019, date à laquelle il a été demandé à la juge de contrôle de l’instruction d’émettre des mandats d’arrêt et de perquisition. Le 16 janvier 2019, le tribunal de contrôle de l’instruction a délivré 16 mandats d’arrêt, qui visaient notamment M. Luis Antulio Alpirez Guzmán, Mme Dora Ruano Saldaña, M. Javier Méndez Franco et M. Césera Landelino Franco López, au motif qu’ils étaient soupçonnés d’avoir pris part à la commission de divers faits délictueux, relevant entre autres de l’abus d’autorité, de la soustraction des deniers publics, des cas particuliers d’escroquerie et du blanchiment d’argent ou d’autres actifs. M. Alpirez Guzmán et Mme Ruano Saldaña, qui étaient membres de la commission de négociation de la convention collective de travail, auraient outrepassé les fonctions qui leur étaient confiées à ce titre en s’arrogeant le pouvoir réglementaire d’insérer dans cette convention le règlement précité; celui-ci avait permis de gonfler de manière arbitraire et illicite les indemnités journalières prévues dans le décret gouvernemental qui réglait cette question et était applicable à l’époque. C’est pourquoi M. Alpirez Guzmán et Mme Ruano Saldaña sont accusés d’abus d’autorité, infraction punie par le Code pénal. Le gouvernement affirme que l’activité syndicale des membres du SNTSG n’a nullement été incriminée; les faits qui sont reprochés aux intéressés et pour lesquels ils ont été mis en accusation relèvent de comportements potentiellement délictueux qui devront être élucidés devant les juridictions compétentes dans le cadre de la procédure pénale qui vise plusieurs personnes syndiquées, dont l’ex-ministre de la Santé publique et de l’Assistance sociale, le docteur Jorge Alejandro Villavicencio Álvarez. Le gouvernement poursuit en indiquant que la juge de contrôle a accordé à M. Alpirez Guzmán et à Mme Ruano Saldaña le bénéfice de mesures de substitution à la détention. Ceux-ci ne s’en trouvent pas limités dans leur activité syndicale, car ils sont libres de circuler librement sur le territoire national. Dans ses communications datées du 14 février et du 3 septembre 2020, le gouvernement précise que l’affaire no MP001 2014 101645 comporte deux volets. Le premier, qui concerne l’affaire pénale no 01077 2014 0000480, est en suspens comme suite à la décision rendue par la troisième chambre de la Cour d’appel pénale du Guatemala chargée des infractions de trafic de stupéfiants et d’infractions environnementales, qui a jugé recevable une question préjudicielle; cette décision a fait l’objet d’un pourvoi en cassation formé par le ministère public, recours extraordinaire qui est en attente de jugement. Pour ce qui est du second volet, les choses en sont à l’étape de l’instruction; comme le prévoient les dispositions de l’article 314 du Code de procédure pénale, les tiers n’ont pas accès au dossier.
  6. 488. Dans sa communication datée du 22 août 2019, le gouvernement, évoquant l’homologation des conventions collectives du secteur public, indique qu’à la fin de 2018 le ministre du Travail a soumis à la Commission nationale tripartite des relations professionnelles et de la liberté syndicale un projet de décret gouvernemental, dont le texte encore en cours de mise au point par les partenaires tripartites vise à définir les conditions formelles de l’homologation des conventions collectives dans l’administration publique.
  7. 489. Dans sa communication datée du 27 août 2019, le gouvernement précise que lorsque des employeurs et des travailleurs parviennent à se mettre d’accord sur une convention collective de travail et concluent pareil accord, ils doivent ensuite se plier aux règles de négociation, d’homologation et de dénonciation des conventions collectives de travail en entreprise ou en centre de production qui figurent dans le décret gouvernemental no 221 94 du Président de la République, lequel s’applique en l’absence de norme visant spécialement le secteur public.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 490. Le comité observe que, dans le présent cas, les organisations plaignantes dénoncent: i) la révision unilatérale de la convention collective de travail signée par le ministère de la Santé en 2013 et, plus généralement, des conventions de ce type en vigueur dans le secteur de la santé publique, visant à leur annulation, au mépris flagrant du principe de la bonne foi; et ii) l’incrimination de l’activité syndicale des membres du SNTSG.
  2. 491. Le comité prend note des allégations formulées par les organisations plaignantes qui disent que, le 28 avril 2015, le bureau du Contrôleur général des comptes a déposé une plainte auprès du bureau du Procureur général de la République concernant la convention susmentionnée et que, le 26 juillet 2015, le ministère de la Santé a fait de même. Selon elles, l’État fermerait ainsi de fait la porte à la négociation collective, en donnant au gouvernement la possibilité de faire réviser et annuler a posteriori les conventions conclues.
  3. 492. Le comité constate que le gouvernement déclare qu’il ne cherche pas à obtenir l’annulation des conventions collectives de travail à la faveur de processus de révision sans base légale, que ce qu’il met en cause, c’est le mauvais usage l’usage qui a été fait des deniers publics, et que la réalisation du droit de négociation collective dans l’administration publique exige avant toute autre chose de s’assurer que les fonctionnaires et autres agents publics qui représentent le gouvernement dans sa qualité d’employeur prennent des décisions qui sont correctes et licites. À cet égard, le comité note que, selon le gouvernement, le bureau du Procureur général de la nation est habilité, par la Constitution, à soumettre d’office à enquête ou analyse juridique les instruments de droit qui pourraient comporter ou transposer des clauses ou des articles contraires à la loi, sans que cela ne bafoue ni ne restreigne les droits ou principes découlant des conventions de l’OIT, tels que le principe de la bonne foi. Le comité prend note en outre de l’indication du gouvernement selon laquelle l’arrêt du 12 mai 2016 rendu dans la procédure d’amparo engagée par le SNTSG (affaires jointes nos 4661 2016, 4662 2016 et 5073 2016 de la Cour constitutionnelle) confirme le bien-fondé de l’examen de légalité réalisé par le bureau du Contrôleur général des comptes.
  4. 493. Le comité note, en ce qui concerne en particulier la convention collective de 2013, que le gouvernement estime qu’elle n’a pas été négociée dans le plein respect des règles applicables et que son coût élevé de mise en œuvre est critiquable. Il note que le gouvernement mentionne à cet égard les affaires suivantes: i) l’affaire no MP001 2015 39496, résultant de la plainte déposée par le bureau du Contrôleur général des comptes, au motif que la convention collective est contraire au règlement sur les indemnités de subsistance énoncé dans le décret gouvernemental no 397 98, en ce qu’elle gonfle de manière exagérée lesdites indemnités dans son règlement y relatif; et ii) l’affaire no MP001 2015-71161, résultant de la plainte déposée le 26 juillet 2015 par l’ex-ministre de la Santé publique et de l’Assistance sociale, au motif que la convention collective a certes été homologuée par le MSPAS, mais n’a fait l’objet d’aucun examen technique propre à en évaluer la viabilité budgétaire et financière et qu’elle a en conséquence grevé le budget du MSPAS.
  5. 494. Le comité prend note des différents éléments communiqués par les parties au sujet de la première allégation formulée dans le présent cas. Il constate en particulier ce qui suit: i) la convention collective de travail concernée a été signée par les autorités du MSPAS et le SNTSG le 21 août 2013; ii) elle a ensuite été homologuée par le ministère du Travail; iii) en 2015, elle a été contestée en justice par le bureau du Contrôleur général des comptes et l’ex-ministre de la Santé, au motif qu’elle gonfle de manière exagérée les indemnités de subsistance en vigueur et qu’elle n’a fait l’objet d’aucun examen technique propre à en évaluer la viabilité budgétaire et financière, si bien qu’elle fait peser une charge excessive sur le budget du MSPAS; et iv) à ce jour, aucune information n’a été reçue concernant l’issue de la procédure judiciaire visant la convention collective.
  6. 495. Le comité souhaite rappeler l’importance qu’il attache à l’obligation de négocier de bonne foi pour le maintien d’un développement harmonieux des relations professionnelles. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1327.] Le comité prie donc le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les questions soulevées par la teneur de la convention collective de travail du secteur de la santé puissent, dans la mesure du possible, être réglées par voie de négociation collective. Voulant croire que le principe sera pleinement appliqué, le comité prie également le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau dans les procédures judiciaires en cours mettant en cause la validité de certaines des clauses de la convention collective.
  7. 496. Le comité observe que, après avoir été homologuée par le ministère du Travail, la convention collective du secteur de la santé a été contestée en justice, au motif qu’elle n’a fait l’objet d’aucun examen technique propre à en confirmer la viabilité financière. Il rappelle que, dans le cadre du cas no 3094, il a prié le gouvernement du Guatemala de prendre, en concertation avec les organisations syndicales concernées, les mesures nécessaires pour garantir que les procédures de négociation collective dans le secteur public suivent des règles claires qui soient conformes à la fois aux exigences de viabilité financière et au principe de la négociation de bonne foi. [Voir 377e rapport, mars 2016, paragr. 345.] À cet égard, le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle, à la fin de 2018, le ministre du Travail a soumis à la Commission nationale tripartite des relations professionnelles et de la liberté syndicale un projet de décret gouvernemental, dont le texte encore en cours de mise au point par les partenaires tripartites vise à définir les conditions formelles de l’homologation des conventions collectives dans l’administration publique. Prenant note des efforts entrepris pour renforcer le cadre normatif applicable à la conclusion de conventions collectives dans le secteur public, le comité veut croire que le processus tripartite amorcé dans ce contexte aboutira sous peu à l’adoption d’un texte conforme aux principes de la liberté syndicale et de la reconnaissance effective de la négociation collective.
  8. 497. Concernant la responsabilité pénale de certaines des personnes ayant pris part à la négociation de la convention collective conclue en 2013 avec le ministère de la Santé, le comité constate que la CLATE, agissant avec le soutien d’organisations nationales et internationales, lui a communiqué des informations sur la procédure pénale engagée contre plusieurs dirigeants syndicaux du SNTSG, au motif de leur participation à la négociation de cette convention, ainsi que sur l’arrestation et la mise en détention provisoire subséquentes de Luis Antulio Alpirez Guzmán, secrétaire général du SNTSG, et de Dora Regina Ruano Saldaña, secrétaire exécutive du SNTSG. Le comité prend note de l’indication donnée par la CLATE, à savoir qu’à ces personnes placées en détention s’est ajouté Javier Méndez Franco, conseiller juridique du SNTSG, et que demande a été faite d’arrêter un autre conseiller juridique du SNTSG, César Landelino Franco López. Enfin, le comité prend note de l’information en date du 19 février 2019 reçue de la CLATE, indiquant que les dirigeants syndicaux ont provisoirement retrouvé la liberté, mais que la situation des deux conseillers juridiques demeure inchangée.
  9. 498. Le comité prend note des informations reçues du gouvernement selon lesquelles la première division du parquet chargé de la lutte contre la corruption est saisie de l’affaire no MP001 2014 101645, à laquelle sont associées d’autres plaintes, telles que celles déposées par le bureau du Contrôleur général des comptes et l’ex-ministre de la Santé publique et de l’Assistance sociale, Luis Enrique Monterroso de León. Il constate que, selon le gouvernement, les faits incriminés concernent des irrégularités qui auraient été commises dans le cadre de la négociation, de la conclusion et de l’exécution de la convention collective de 2013, irrégularités qui résideraient dans ce qui suit: l’insertion abusive dans la convention d’un règlement concernant les indemnités de subsistance; et le versement sans base légale à l’avocat et notaire César Landelino Franco López de 14 millions de quetzales prélevés sur les deniers publics. Le comité prend aussi note des informations suivantes émanant du gouvernement: i) le cinquième tribunal de première instance en matière pénale chargé des affaires de trafic de stupéfiants et d’infractions environnementales du département de Guatemala assure un contrôle juridictionnel de l’instruction, dans le cadre de l’affaire no C-01077 2014 00480, car le secret de l’instruction a été sollicité et décrété en 2017 (celui-ci a été de mise jusqu’en janvier 2019, date à laquelle il a été demandé à la juge de contrôle de l’instruction d’émettre des mandats d’arrêt et de perquisition); ii) à la même date, le tribunal de contrôle de l’instruction a délivré 16 mandats d’arrêt, qui visaient notamment M. Alpirez Guzmán, Mme Ruano Saldaña, M. Méndez Franco et M. Franco López; et iii) la juge de contrôle a accordé à M. Alpirez Guzmán et à Mme Ruano Saldaña le bénéfice de mesures de substitution à la détention, lesquels ne s’en trouvent pas limités dans leur activité syndicale, car ils sont libres de circuler librement sur le territoire national. Le comité prend note en outre des informations suivantes données par le gouvernement dans ses communications de février et de septembre 2020: l’affaire no MP001 2014 101645 comporte deux volets; le premier, qui concerne l’affaire pénale no 01077 2014 0000480, est en suspens comme suite à la décision rendue par la troisième chambre de la Cour d’appel pénale du Guatemala chargée des infractions de trafic de stupéfiants et d’infractions environnementales, qui a jugé recevable une question préjudicielle (cette décision a fait l’objet d’un pourvoi en cassation formé par le ministère public, recours extraordinaire qui est en attente de jugement). Pour ce qui est du second volet de cette affaire, le comité note que les choses en sont au stade de l’instruction, comme le confirme le gouvernement dans sa communication du 17 décembre 2020, et que, conformément aux dispositions de l’article 314 du Code de procédure pénale, les tiers n’ont pas accès au dossier.
  10. 499. Le comité rappelle que, si des personnes menant des activités syndicales ou exerçant des fonctions syndicales ne peuvent prétendre à l’immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire, l’arrestation ou l’inculpation de syndicalistes doivent s’appuyer sur des exigences légales qui ne portent pas elles-mêmes atteintes aux principes de la liberté syndicale. [Voir Compilation, paragr. 133.] Il constate que l’affaire pénale susmentionnée est en attente de jugement, tandis que le volet connexe en est encore au stade de l’instruction, et que, comme le prévoient les dispositions de l’article 314 du Code de procédure pénale, les tiers n’ont pas accès au dossier. Il constate que la justice ne s’est à ce jour toujours pas prononcée sur les charges qui pèsent contre les dirigeants du SNTSG. Voulant croire que, en pleine application du principe de la liberté syndicale, la justice rendra son verdict dans un avenir proche, le comité prie le gouvernement de lui fournir des renseignements détaillés à ce sujet. Il le prie de lui communiquer en particulier des informations à jour sur la situation de M. Alpirez Guzmán, secrétaire général du SNTSG, et de Mme Ruano Saldaña, secrétaire exécutive du SNTSG, qui, en février 2019, ont retrouvé la liberté, mais de manière provisoire. Le comité prie en outre le gouvernement de lui faire parvenir des renseignements sur la situation de MM. Méndez Franco et Franco López, conseillers juridiques du SNTSG.
  11. 500. Le comité rappelle au gouvernement la possibilité de se prévaloir de l’assistance technique du Bureau en vue de donner suite aux recommandations du comité.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 501. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les questions soulevées par la teneur de la convention collective de travail du secteur de la santé puissent, dans la mesure du possible, être réglées par voie de négociation collective. Voulant croire que le principe sera pleinement appliqué, il prie également le gouvernement de l’informer de tout fait nouveau dans les procédures judiciaires en cours mettant en cause la validité de certaines des clauses de la convention concernée.
    • b) Soulignant que les procédures de négociation collective dans le secteur public doivent suivre des règles claires qui soient conformes à la fois aux exigences de viabilité financière et au principe de la négociation de bonne foi, et prenant note des efforts entrepris pour renforcer le cadre normatif applicable à la conclusion de conventions collectives dans le secteur public, le comité veut croire que le processus tripartite amorcé dans ce contexte aboutira sous peu à l’adoption d’un texte conforme aux principes de la liberté syndicale et de la reconnaissance effective de la négociation collective.
    • c) Voulant croire que, en pleine application du principe de la liberté syndicale, la justice rendra son verdict dans un avenir proche, le comité prie le gouvernement de l’informer de l’évolution des procédures pénales en cours. Il le prie en particulier de lui communiquer des informations à jour sur la situation de M. Luis Antulio Alpirez Guzmán, secrétaire général du Syndicat national des personnels de santé du Guatemala (SNTSG), et de Mme Dora Regina Ruana Saldaña, secrétaire exécutive du SNTSG, qui, en février 2019, ont provisoirement retrouvé la liberté. Le comité prie en outre le gouvernement de lui faire parvenir des renseignements sur la situation de M. Javier Méndez Franco et de M. César Landelino Franco López, conseillers juridiques du SNTSG.
    • d) Le comité rappelle au gouvernement la possibilité de se prévaloir de l’assistance technique du Bureau en vue de donner suite aux recommandations du comité.
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