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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 15. Le présent cas, dans lequel les organisations plaignantes ont allégué de graves violations de la liberté syndicale, y compris licenciements massifs de membres et de dirigeants syndicaux en raison de leur participation à une grève, menaces contre l’intégrité physique de dirigeants syndicaux, arrestations, harcèlement, poursuites, intimidation et ingérence dans les affaires internes d’un syndicat, a été examiné pour la dernière fois par le comité à sa réunion d’octobre 2017. [Voir 383e rapport, paragr. 17-28.] A cette occasion, le comité a prié à nouveau le gouvernement de lui communiquer une copie des décisions de justice rendues pour les cas d’Abu Dheeb et de Jalila al-Salman, ainsi que toute information concernant le recours qu’ils pourraient introduire devant la cour de cassation ou leur demande de réhabilitation. Le comité a prié en outre le gouvernement de rendre compte de tout progrès accompli concernant la possibilité de ratifier la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que d’organiser sans tarder des consultations avec les partenaires sociaux concernés afin d’assurer la mise en conformité de la loi sur les syndicats (TUA) avec les principes de la liberté syndicale. Enfin, le comité a prié le gouvernement de lui fournir des renseignements actualisés sur la situation des syndicats dans les entreprises au sein desquelles une enquête était encore en cours au sujet des allégations de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les affaires syndicales.
- 16. Dans sa communication datée du 25 septembre 2018, le gouvernement fournit des informations sur la situation actuelle de l’économie et du travail dans le pays et souligne que, depuis 2011, année de dépôt de la plainte, la situation est retournée à la normale, en ce sens que 99 pour cent des cas de licenciement ont été résolus par l’intermédiaire du dialogue et de la coopération tripartite entre les parties concernées. Le gouvernement ajoute que, récemment, les syndicats et la direction des entreprises ont noué des relations fructueuses à la faveur des efforts et des mesures que le ministère du Travail et du Développement social a déployés en vue de réconcilier les parties.
- 17. En ce qui concerne la détention d’Abu Dheeb et de Jalila al-Salman, le gouvernement réitère que tous deux ont eu droit à un procès équitable, ont pu désigner un avocat et ont bénéficié de toutes les garanties judiciaires et que les jugements rendus initialement à leur encontre ont été par la suite modifiés par la cour d’appel civile. Tous deux ont désormais purgé leur peine, jouissent pleinement de leurs droits et peuvent présenter une demande de réhabilitation, conformément aux règles et aux lois en vigueur. Le gouvernement rappelle en outre que l’Association des enseignants de Bahreïn (BTA) est une ancienne organisation de la société civile, créée en 2001, mais dissoute en 2011, et qu’elle n’est pas considérée comme un syndicat et n’est dotée d’aucun statut juridique en vertu du droit de Bahreïn.
- 18. Pour ce qui est de la possibilité de ratifier les conventions nos 87 et 98, le gouvernement indique que, même s’il n’a pas ratifié les conventions en question, il dispose déjà d’un système progressiste fondé sur le principe du pluralisme syndical, conformément aux dispositions énoncées dans la TUA, la protection contre la discrimination antisyndicale et le droit de grève des travailleurs pour défendre leurs intérêts, ainsi que d’autres garanties prévues dans le Code du travail pour le secteur privé, notamment des mesures relatives au règlement de conflits collectifs et à l’élaboration de conventions collectives.
- 19. Concernant les modifications qu’il a été demandé d’apporter à la TUA, le gouvernement fait savoir que l’interdiction de la grève dans certains secteurs d’activité relève de sa compétence et qu’il tient compte des intérêts économiques en vue de protéger la société, tout en offrant d’autres garanties pour protéger les intérêts de la main-d’œuvre et que, malgré la tenue de nombreuses réunions tripartites et bipartites, ni les partenaires sociaux ni d’autres parties concernées n’ont abordé cette question au niveau interne. En conséquence, le gouvernement estime qu’une telle interdiction n’a pas de répercussions sur l’exercice de la liberté syndicale dans le pays.
- 20. Enfin, le gouvernement exprime l’espoir que le comité clora le présent cas dans la mesure où toutes les allégations ont été réglées et que les parties concernées n’ont pas fourni de nouvelles informations ou observations quant au fond de la plainte. Il exprime en outre sa volonté de coopérer avec les partenaires sociaux afin d’examiner toute proposition susceptible d’être présentée dans le cadre du dialogue tripartite au niveau national.
- 21. Le comité prend bonne note des renseignements fournis par le gouvernement sur la situation actuelle de l’économie et du travail à Bahreïn, en particulier du fait que la majorité des cas de licenciement ont été réglés par l’intermédiaire du dialogue et de la coopération et que les syndicats et la direction des entreprises ont noué des relations fructueuses, à la faveur des efforts et des mesures déployés par le gouvernement en vue de réconcilier les parties. Le comité croit comprendre que ces informations concernent aussi les entreprises au sein desquelles des cas de discrimination antisyndicale avaient été dénoncés dans le cadre du présent cas et veut croire que les efforts menés par le gouvernement empêcheront toute pratique antisyndicale dans l’avenir et contribueront à maintenir des relations professionnelles harmonieuses dans les entreprises concernées.
- 22. Le comité regrette profondément que, bien qu’il ait été invité à le faire à de multiples reprises, le gouvernement n’a toujours pas fourni les copies des condamnations prononcées contre Abu Dheeb et Jalila al-Salman et qu’il se contente de communiquer des informations soumises précédemment concernant leur procès. Dans de telles circonstances, le comité se voit dans l’obligation de rappeler à nouveau que la détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques, en général, et des libertés syndicales en particulier. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 123.] Tout en notant par ailleurs l’affirmation du gouvernement selon laquelle Abu Dheeb et Jalila al-Salman jouissent désormais pleinement de leurs droits, le comité observe aussi que la BTA, par suite de sa dissolution en 2011, ne dispose plus de statut juridique en vertu du droit de Bahreïn et croit donc comprendre que les syndicalistes ne peuvent en conséquence pas jouir de leurs droits syndicaux. Compte tenu de ce qui précède, le comité s’attend à ce que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour faire en sorte que, si elle souhaite se reconstituer selon la législation en vigueur, la BTA ne se heurte pas à des obstacles administratifs et qu’Abu Dheeb et que Jalila al-Salman puissent exercer librement leurs droits de l’homme ainsi que leurs droits syndicaux, conformément aux principes de la liberté syndicale. Le comité invite tant le gouvernement que les organisations plaignantes à fournir des informations mises à jour sur le statut actuel de la BTA.
- 23. En ce qui concerne la possibilité de ratifier les conventions nos 87 et 98, le comité note que le gouvernement énumère un certain nombre de droits syndicaux reconnus à l’échelle nationale, sans pour autant indiquer si des mesures concrètes ont été prises en vue d’une ratification effective des conventions en question. Le comité veut croire que, conformément à l’engagement qu’il a pris dans le cadre de l’accord tripartite de 2012, le gouvernement œuvrera progressivement en faveur de la ratification de ces conventions.
- 24. En outre, le comité note avec regret que, malgré ses demandes répétées invitant les autorités à modifier la TUA et la décision du Premier ministre no 62 de 2006 de manière à assurer leur conformité aux principes de la liberté syndicale, en particulier s’agissant de la liste des services dans lesquels les grèves peuvent être restreintes, voire interdites, et de la manière dont ces services sont déterminés, le gouvernement se contente de communiquer une nouvelle fois des informations qu’il avait fournies préalablement et affirme que l’interdiction de la grève dans certains secteurs d’activité relève des autorités étatiques et que les partenaires sociaux n’ont pas soulevé cette question au niveau national. Le comité rappelle à cet égard que le droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour des fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. Pour déterminer les cas dans lesquels une grève pourrait être interdite, le critère à retenir est l’existence d’une menace évidente et imminente pour la vie, la sécurité et la santé dans tout ou partie de la population [Voir Compilation, op. cit., paragr. 830 et 836.] Rappelant en outre qu’il demande d’apporter des modifications législatives à cet effet depuis plusieurs années, le comité prie le gouvernement de poursuivre le dialogue instauré avec les partenaires sociaux, afin d’assurer la mise en conformité de la TUA avec ce qui précède, en tenant pleinement compte des commentaires antérieurs du comité.