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699. La plainte figure dans une communication de l’Union syndicale des contrôleurs aériens (USCA) datée du 3 juin 2010.
- 699. La plainte figure dans une communication de l’Union syndicale des contrôleurs aériens (USCA) datée du 3 juin 2010.
- 700. Le gouvernement a envoyé ses observations par des communications datées du 14 septembre 2010 et du 20 mai 2011.
- 701. L’Espagne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 702. Dans sa communication datée du 3 juin 2010, l’Union syndicale des contrôleurs aériens (USCA) informe qu’elle est le syndicat majoritaire des contrôleurs aériens espagnols qu’elle représente presque en totalité, et que les contrôleurs aériens dépendent directement, pour ce qui est de l’exercice de leur profession, de l’entité publique Aeropuertos Españoles y Navegación Aérea (ci-après AENA – Aéroports espagnols et navigation aérienne) et indirectement du ministère des Travaux publics et des Transports, l’AENA s’inscrivant dans l’organigramme administratif de ce dernier. Ce ministère fixe les lignes directrices du fonctionnement de l’AENA, approuve le plan annuel des objectifs, assure le suivi des activités et assure, indépendamment de ses autres compétences, le contrôle de l’efficacité, conformément aux normes en vigueur.
- 703. L’USCA explique que la première convention collective qu’elle a conclue avec l’AENA a été approuvée par une résolution du 4 mars 1999. L’échéance de cette convention était au 31 décembre 2004. Son article 4.3 établit qu’elle sera en principe prorogée pour douze mois calendaires à partir de la date prévue pour son échéance, si aucune des parties ne la dénonce, et son article 4.4 prévoit que, «à partir de la dénonciation de la convention, et entre la date prévue pour son échéance et la publication d’une nouvelle convention, la convention actuelle restera en vigueur dans sa totalité». L’enregistrement de cette convention collective longue et complexe a été précédé par un rapport favorable des ministères de l’Economie et des Finances et de l’Administration publique.
- 704. L’USCA précise que le libellé de la convention collective reprend en détails tous les aspects relatifs à la prestation professionnelle des contrôleurs. Cela suffit pour prouver l’existence de la volonté de négocier et de conclure un accord de bonne foi, dont les deux parties ont fait preuve lors de la négociation de cette norme si complexe.
- 705. L’USCA ajoute que, afin de substituer une nouvelle convention à la convention collective en vigueur, les parties ont tenu plusieurs séances de négociation, qui ont été unilatéralement interrompues par l’AENA le 2 février 2010, lorsque ses représentants ont quitté la table des négociations (l’USCA joint un exemplaire de la lettre du directeur des ressources humaines de l’AENA, datée du 2 février 2010, faisant état de la rupture unilatérale des négociations). L’USCA souligne que, tout au long du processus de négociation de cette deuxième convention, il n’y a eu aucun préavis de grève ni aucune autre action collective ou mobilisation.
- 706. L’USCA allègue par ailleurs que, trois jours après la rupture unilatérale des négociations par l’AENA, le décret-loi royal no 1/2010 approuvé par le gouvernement sur la proposition du ministère des Travaux publics et des Transports est entré en vigueur, et qu’il établit certaines conditions de travail pour les contrôleurs civils du trafic aérien, tout en réglementant la prestation de ces services. Il fixe également les obligations qui incombent aux fournisseurs civils de ces services. Ce décret-loi, élaboré sur la base d’une nécessité urgente, modifie considérablement des conditions de travail fondamentales dans tout contrat de travail, et qui, dans ce cas, avaient été librement choisies et avaient fait l’objet d’un accord entre l’AENA et l’USCA, que ce soit dans le cadre de la première convention collective, ou par le biais d’accords postérieurs qui, bien qu’ils aient été sentencieusement qualifiés de non statutaires, n’en sont pas moins obligatoires pour les parties. Ces modifications étaient relatives à: la fixation des horaires; la journée de travail (première disposition transitoire); la modification ou la substitution des horaires établis; des changements de journées de travail; les horaires de travail posté; la publication anticipée de ces horaires; les temps de repos pendant la journée de travail; les temps de repos diurnes et nocturnes; les déplacements à l’extérieur du centre de travail; les permissions, les vacances et autorisations; les autorisations spéciales pour raison d’âge, et les infractions.
- 707. Lorsque ce décret-loi a été validé par le Congrès des députés, il a fait l’objet du même traitement qu’un projet de loi selon la procédure d’urgence et il a été abrogé par la loi no 9/2010 (Disposition d’abrogation unique). Tout comme le décret-loi royal, ce texte fait fi de ce qui avait été conclu lors de la négociation collective. Il ne fait aucune mention de la ratification antérieure des conventions fondamentales nos 87 et 98 de l’OIT dont le respect et l’application sont contraignants, à moins qu’il n’y ait dénonciation, étant donné les circonstances; mais cela même est impensable.
- 708. L’USCA allègue qu’elle n’a pas été consultée préalablement à l’adoption du projet de loi.
- 709. Selon les nouvelles parues dans la presse, à trois jours de la parution du décret-loi susmentionné, les syndicats espagnols les plus représentatifs, l’UGT et la CCOO, ont dit leur préoccupation devant le fait que cette norme pouvait «créer un précédent» si elle était étendue à d’autres collectifs de travailleurs dépendant également d’une entité publique, et ils ont qualifié ce décret de «violation pure et simple de la convention collective des contrôleurs».
- 710. L’USCA a déclaré que, en ce qui concerne la sécurité et la santé des contrôleurs aériens, les mesures adoptées (qui impliquent un changement important dans leurs conditions de travail) entraînent pour eux de nouveaux risques professionnels, sans que l’on ait par ailleurs procédé à la mise à jour obligatoire de l’évaluation de ces risques.
- 711. Enfin, l’USCA souligne les principes des organes de contrôle de l’OIT concernant le caractère contraignant des conventions collectives, et les principes qui déclarent contraires au principe de la négociation collective les interventions des autorités législatives ou administratives qui ont pour effet d’annuler ou de modifier le contenu de conventions librement conclues.
- B. Réponse du gouvernement
- 712. Dans sa communication du 14 septembre 2010, le gouvernement déclare que la promulgation du décret-loi royal no 1/2010 et celle de la loi no 9/2010 n’ont aucunement affecté la liberté d’association des contrôleurs aériens, non plus que leur droit de mener à bien, avec l’entité qui les emploie, les négociations leur permettant de définir leurs droits et leurs devoirs en matière de travail. Les dispositions légales dont il est question ont établi un cadre pour la prestation de services que deux éléments essentiels avaient rendus indispensables:
- a) Premièrement, la nature de l’activité professionnelle en question, à savoir le trafic aérien, qui touche à des droits individuels et collectifs de base (comme la libre circulation des personnes et des marchandises), sans compter la question de la sécurité du trafic aérien qui, par ailleurs, et, en ce qui concerne l’Espagne, doit respecter les dispositions du règlement no 2096/2005/CE, du 20 décembre, fixant les règles communes de la prestation de services dans la navigation aérienne, ainsi que d’autres dispositions réglementaires de l’Union européenne s’inscrivant dans le cadre de ce que l’on appelle le «Ciel unique européen».
- b) Deuxièmement, l’impossibilité de conclure un accord entre les parties. En effet, alors que la convention collective était échue au 31 décembre 2004, il a été impossible en cinq ans de conclure un nouvel accord, en dépit des propositions multiples et constantes de l’employeur, qui a organisé 65 séances de négociation en vue d’élaborer la deuxième convention collective, au cours desquelles il a présenté 10 propositions, fondées sur la législation relative au «Ciel unique européen» (obligatoire pour l’Espagne). Pendant ce temps, les représentants des travailleurs n’ont avancé qu’une seule proposition, qui ne prenait en compte aucun des aspects devant être modifiés conformément à la législation communautaire.
- c) En l’occurence, les normes contestées prévoient simplement une modification provisoire des conditions de travail des contrôleurs de l’AENA à un niveau minimum et indispensable pour garantir les objectifs indiqués ci-dessus.
- 713. On ne saurait interpréter ce qui précède comme une violation de la liberté syndicale (nullement affectée) du collectif des contrôleurs aériens espagnols ni de leur droit de négociation collective, droit qui doit être assujetti à certaines conditions étant donné que:
- - Dans le domaine interne, il peut être limité par la loi, conformément aux dispositions de la législation du travail espagnol (loi sur le statut des travailleurs) sans que cette limitation soit comprise comme une violation des droits à la négociation collective, protégés par les instruments internationaux, tels que les conventions nos 87 et 98 de l’OIT.
- - Par ailleurs, comme le prévoit l’article 6 de la convention no 98 de l’OIT, certains travailleurs ont un statut particulier, comme les fonctionnaires. A cet égard, il faut savoir qu’en Espagne les contrôleurs du trafic aérien au service de l’AENA sont des agents publics qui fournissent un service public essentiel pour la société. Ce statut implique qu’ils sont soumis aux principes et normes qu’édicte l’Etat concernant la prestation de ces services.
- 714. Enfin, précisément parce que les normes approuvées par l’Etat espagnol (décret-loi royal no 1/2010 et loi no 9/2010) n’affectent pas le cadre de la négociation collective, leur entrée en vigueur a été suivie par la création d’une nouvelle commission chargée de négocier la future convention collective professionnelle, dans le cadre prévu par ces normes, et conformément au droit à la négociation collective. Cette commission de négociation a organisé à ce jour plus de 18 réunions (dont deux étaient de nature informative).
- 715. Le gouvernement ajoute que l’USCA a saisi l’Audience nationale d’un différend collectif, car le syndicat estime que les modifications apportées aux conditions de travail des contrôleurs du trafic aérien par l’application du décret-loi royal no 1/2010 du 5 février et de la loi no 9/2010 du 14 avril sont illégales, et il a demandé que les contrôleurs du trafic aérien soient immédiatement replacés dans le cadre de la première convention collective signée par le syndicat et l’AENA. La Chambre des affaires sociales de l’Audience nationale a prononcé un jugement le 10 mai 2010 (que le gouvernement joint en annexe); ce jugement rejette entièrement la demande relative au différend collectif présentée par l’USCA et estime que l’intervention des autorités était non seulement nécessaire, mais encore indispensable, opportune et proportionnée, et que son incidence a été minime et transitoire sur la première convention collective, afin de garantir la continuité et la sécurité du trafic aérien.
- 716. Le gouvernement indique que les rapports officiels soulignaient la nécessité de garantir la viabilité économique de l’AENA dont le déficit était très élevé, ainsi que l’urgence pour l’entreprise de se mettre en conformité avec les normes de l’Union européenne, et de restructurer le système actuel de navigation aérienne pour garantir la continuité et la sécurité du service, d’où la nécessité notamment de réglementer de toute urgence certains domaines (journées de travail, temps de repos, formation, etc.). Selon ces rapports, il s’agit de répondre à une menace très grave contre le système national et européen de transport aérien.
- 717. Le gouvernement émet une série de commentaires sur le jugement mentionné plus haut. Il indique que la jurisprudence souligne le principe de la primauté de la loi sur la convention, précisant que, s’agissant de la répartition du travail entre le législateur et la négociation collective, il est tout à fait légal que le législateur se réserve des espaces concrets, qui devraient en principe être réglementés par la négociation collective, lorsque des situations exceptionnelles ou des cas particuliers se produisent. Ayant établi la primauté de la législation sur la convention, sans que cette primauté ne porte préjudice au droit de négociation collective, l’Audience nationale précise, en se fondant sur la Constitution, les lignes directrices qui délimitent le contenu essentiel des droits fondamentaux. A cet égard il est dit qu’aucun droit fondamental n’est absolu, ou en d’autres termes, tous les droits sont limités. Ainsi, tous les droits fondamentaux sont limités par la nécessité de les rendre compatibles avec les autres droits et valeurs juridiques protégés par la Constitution. On est donc tenu de considérer que toute intervention législative contraint à la recherche de solutions lorsque des conflits surviennent entre des droits et dispositions juridiques de niveau constitutionnel, d’où la nécessité absolue d’un exercice de pondération puisque, selon un consensus généralisé, la limitation des droits fondamentaux doit reposer sur la Constitution, car elle ne saurait se fonder uniquement sur de simples intérêts relevés par la majorité parlementaire; ce même critère est inscrit dans la Convention européenne des droits de l’homme, qui fait référence à plusieurs reprises à la disposition bien connue relative à «des mesures nécessaires, dans une société démocratique» en vertu de laquelle la restriction de l’exercice des droits proclamés ne peut avoir lieu que pour défendre certaines valeurs (sûreté publique, protection de la santé, impartialité judicaire, etc.); par conséquent, la restriction de l’exercice des droits fondamentaux doit nécessairement répondre à un intérêt fondamental de la communauté, qu’il ne suffit pas d’invoquer; au contraire, il doit être bien réel, et il faut en outre le protéger face au droit fondamental, jusqu’à justifier la limitation de ce dernier. L’équilibre des intérêts en jeu se fonde nécessairement sur le principe de la proportionnalité, qui est l’outil utilisé pour déterminer si les mesures qui limitent les droits fondamentaux sont conformes aux limites fixées par la Constitution; à cette fin, ces mesures doivent impérativement passer un triple test:
- 1) L’intervention doit être adéquate pour atteindre l’objectif fixé.
- 2) L’intervention doit être nécessaire, c’est-à-dire qu’il ne doit pas exister d’alternative moins dommageable.
- 3) L’intervention doit être strictement proportionnée, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas entraîner un sacrifice excessif du droit, non plus que celui de l’intérêt qui justifie la limitation du droit. Cette dernière condition est la plus importante, étant donné que le principe de proportionnalité et celui du contenu essentiel ne constituent pas deux manières de désigner la même chose, la doctrine ayant établi que le respect du contenu essentiel correspond notamment à la troisième des exigences commentées plus haut; ainsi, il ne suffit pas que l’intervention du législateur soit adéquate et nécessaire. Elle doit obligatoirement passer le test de la proportionnalité. Le triple test indiqué ci-dessus ayant été effectué, le jugement du 10 mai 2010 concernant l’affaire des contrôleurs conclut qu’il n’y a pas eu violation du droit fondamental à la liberté syndicale dont la négociation collective constitue un élément essentiel. Ce jugement précise qu’il a été dûment prouvé que l’AENA n’était pas en mesure de garantir la sécurité et la continuité de la prestation des services du trafic aérien, non plus que de respecter les engagements internationaux de l’Espagne, notamment les règlements communautaires nos 2096/2005/CE et 1070/2009/CE; il a également été prouvé qu’en 2011 l’entreprise n’aurait pas été en mesure de se plier aux exigences communautaires établies par la Commission européenne pour le réseau de trafic aérien à compter de cette année. On ne saurait oublier le rôle essentiel que joue l’Espagne dans le trafic aérien européen et mondial, étant donné l’intensité extraordinaire de son propre trafic aérien. Il a également été prouvé que l’AENA doit faire face à une grave menace pesant sur sa viabilité économique, et qu’elle est devenue l’un des fournisseurs les plus inefficaces de trafic aérien en Europe, comme cela apparaît dans le rapport de la Direction générale de l’aviation civile, qui est l’organisme régulateur et directeur de la politique aéronautique, ce rapport se fondant à son tour sur les rapports d’EUROCONTROL.
- 718. Ainsi, le jugement indique que l’USCA a beaucoup insisté sur le fait qu’aucun motif extraordinaire ni aucun besoin urgent ne justifiait l’intervention du gouvernement d’abord, et du législateur ensuite, car la situation décrite durait déjà depuis vingt ans; or la prolongation pendant plus de vingt ans d’une telle situation, où la négociation collective est utilisée pour détourner la loi, par la signature d’accords officiels concernant une journée de travail insuffisante, dans le but de négocier collectivement par la suite des prolongations de cette journée de travail, entraînant la réalisation de centaines d’heures supplémentaires pour chaque contrôleur, et outrepassant ainsi le nombre des heures supplémentaires prévues par l’article 35, 2ET, ne saurait être considérée comme normale. Il s’agit plutôt d’un état d’exception permanent, qu’aucune administration responsable ne saurait tolérer, parce qu’elle est soumise au principe de la légalité, conformément aux dispositions de l’article 103, 1CE.
- 719. L’intervention du législateur était donc non seulement nécessaire mais indispensable pour revenir à la «normalité», c’est-à-dire au respect de la loi; à cet effet, des mesures de transition ont dû être appliquées au prestataire de services actuel, afin de promouvoir une transition ordonnée vers la mise en place d’une nouvelle organisation des fournisseurs civils du service de trafic aérien, prévue par la loi. Ces mesures ont des incidences sur les contenus concrets de la négociation collective, qui ont provoqué la situation déjà expliquée plus haut; il était inconcevable que le problème puisse être résolu par la négociation collective. Preuve en est l’échec de la négociation de la convention après 75 séances infructueuses.
- 720. Le gouvernement fait savoir en outre que le Protecteur du citoyen a adopté une résolution prévoyant de ne pas faire de recours en inconstitutionnalité contre le décret-loi royal no 1/2010, du 5 février.
- 721. Enfin, et compte tenu de ce qui précède, le gouvernement conclut que l’exercice de la liberté syndicale et du droit à la négociation collective n’a pas été violé.
- 722. Selon un rapport communiqué par le gouvernement, l’AENA fait référence à la déclaration de l’organisation plaignante qui affirme que, tout au long du processus de négociation d’une deuxième convention collective qui devait se substituer à la première (prorogée depuis le 31 décembre 2004), il n’y a eu aucun préavis de grève ni aucune autre action collective ou mobilisation. L’AENA signale que c’est exact, compte tenu des preuves apportées dans le cadre du jugement no 047/2010 de la Chambre des affaires sociales de l’Audience nationale, qui a été repris dans la procédure no 41/10, elle-même suivie par la plainte de l’USCA contre l’AENA, le ministère des Travaux publics et des Transports et le ministère public, concernant le conflit collectif, selon laquelle:
- Les relations de travail de l’ensemble des contrôleurs aériens avec leurs employeurs ont été très conflictuelles; selon les principaux médias, les faits les plus marquants sont:
- [...]
- 6. Les retards enregistrés à Barajas les 2 et 3 janvier 2009, dus au congé maladie de sept contrôleurs aériens.
- 7. La fermeture des deux pistes de l’aéroport de Madrid-Barajas pour cause de congé maladie de contrôleurs aériens le 23 juillet 2009, les contrôleurs refusant de faire des heures supplémentaires.
- 8. Les retards des vols Madrid-Canarias du 27 décembre 2009 au motif que plusieurs contrôleurs aériens de l’aéroport de Madrid-Barajas étaient en congé maladie et que les autres refusaient de faire des heures supplémentaires.
- 9. La fermeture des deux pistes de l’aéroport de Madrid-Barajas pour cause de congé maladie des contrôleurs aériens le 1er janvier 2010, les contrôleurs refusant de faire des heures supplémentaires.
- 10. L’annonce par les contrôleurs du fait que, à partir du 1er avril 2010, ils travailleraient uniquement pendant la durée de leur journée de travail obligatoire d’une durée de douze heures.
- 723. Par ailleurs, l’AENA ajoute que l’organisation plaignante semble ignorer également le contenu de l’alinéa suivant de la déclaration des faits avérés figurant dans le jugement:
- Depuis le 31 décembre 2004, date d’échéance de la première convention, 65 réunions ont eu lieu entre l’AENA et l’USCA, qui n’ont jamais produit de résultats opérationnels.
- Le 2 février 2010, devant l’impossibilité de conclure un accord, l’AENA a rompu les négociations avec l’USCA; elle a notifié les contrôleurs aériens de cette situation par une communication datée du 5 février 2010, qui est à disposition et qui a été reproduite.
- 724. Par ailleurs, l’AENA dit qu’après l’entrée en vigueur des normes mentionnées une nouvelle commission a été constituée et chargée de la négociation de la future convention collective professionnelle, dans le cadre prévu par ces mêmes normes, et conformément au droit à la négociation collective. Cette commission de négociation a tenu de nombreuses réunions.
- 725. Dans sa communication du 20 mai 2011, le gouvernement déclare qu’il présente les observations de l’Espagne concernant ce cas, issues des rapports rédigés par les instances concernées du ministère des Travaux publics et des Transports – Direction de l’aviation civile et l’AENA, ainsi que par celle du ministère du Travail et de l’Immigration – Direction générale du travail.
- 726. La Direction générale de l’aviation civile (ministère des Travaux publics et des Transports) fait savoir que l’adoption et l’entrée en vigueur de la loi no 9/2010 du 14 avril susmentionnée n’a pas affecté le cadre de la négociation collective puisque, après l’entrée en vigueur de cette loi, une commission chargée de négocier la deuxième convention de ce collectif professionnel a été constituée. Le premier résultat des activités de cette commission de négociation a été que les parties, à savoir l’AENA et l’USCA, ont signé en août 2010 un accord fondamental comportant 12 points. Le 29 décembre 2010, cette même commission a ratifié l’accord concernant la procédure de négociation adoptée au préalable par la commission de négociation restreinte, aux termes duquel les parties s’octroyaient un délai jusqu’au 31 janvier 2011 pour se mettre d’accord sur cette deuxième convention collective. Cependant, elles indiquaient expressément que, au cas où des divergences persisteraient concernant l’un ou l’autre des thèmes à négocier, empêchant ainsi la signature de la convention, les deux parties s’engageaient à soumettre les différends restants à une procédure d’arbitrage qu’elles s’obligeraient à honorer dans tous ses termes et à exécuter.
- 727. Lorsque le délai fixé par les parties pour conclure un accord dans le cadre de la négociation collective est arrivé à échéance, elles ont fait savoir à l’arbitre désigné d’un commun accord que les négociations étaient terminées et infructueuses. La procédure d’arbitrage a commencé le 1er février 2011. Elle s’est terminée par la sentence arbitrale qui prévoit que la deuxième convention collective professionnelle des contrôleurs du trafic aérien de l’AENA arrivera à échéance le 31 décembre 2011.
- 728. Le gouvernement réitère que l’intervention du législateur espagnol sur la question soumise à la négociation collective était nécessaire, idoine et proportionnée afin de rétablir la légalité, de garantir le droit des citoyens à la libre circulation, ainsi que la continuité et la sécurité du trafic aérien.
- 729. Cette intervention a été minime et transitoire. Et ce caractère transitoire a été confirmé par l’adoption de la deuxième convention collective des contrôleurs du trafic aérien de l’AENA.
- 730. L’AENA souligne que l’intense processus de négociation mené à bien par la commission (entamé après l’entrée en vigueur du décret-loi royal no 1/2010 du 5 février, et de la loi no 14/2010 du 14 avril, qui lui succède et le remplace), s’est terminé après de nombreuses réunions par la conclusion de la deuxième convention collective, fruit d’un «accord d’arbitrage»; elle a été signée par les parties AENA et USCA le 23 décembre 2010 et ratifiée à la table des négociations le 29 décembre 2010, puis publiée ainsi que la désignation de l’arbitre, dans le Bulletin officiel de l’Etat du 26 janvier 2011. A cet égard, l’article13 de cette convention arbitrale prévoit que «la sentence arbitrale exclut tout autre procédure, dénonciation de conflit collectif ou préavis de grève au motif de la question résolue et en fonction de son efficacité et de son calendrier». L’article 15 prévoit que la présente convention arbitrale a la même nature et les mêmes effets qu’une convention collective statutaire. Elle sera donc publiée au Bulletin officiel et la direction de l’AENA sera déléguée pour effectuer les formalités d’usage.
- 731. La Direction générale du travail du ministère du Travail et de l’Immigration donne des informations détaillées sur les divers aspects de l’accord d’arbitrage et de la convention arbitrale et elle souligne que la sentence arbitrale exclut toute autre procédure, dénonciation de conflit collectif ou préavis de grève au motif de la question résolue et en fonction de son efficacité et de son calendrier. Elle porte sur tous les points de la négociation concernant lesquels un accord n’avait pas été trouvé. C’est pourquoi cette sentence s’abstiendra de connaître des aspects sur lesquels un accord est expressément intervenu ou des questions que les parties, d’un commun accord, ne souhaitent pas inclure dans l’arbitrage. Par ailleurs, le choix consensuel des parties de soumettre leurs différends à un tiers impartial qui leur propose une solution, choix que l’on ne saurait sous aucun prétexte – selon la sentence arbitrale – considérer comme une issue anormale ou un échec de la négociation collective, ne met pourtant pas un terme à la procédure de plainte entamée par l’USCA, non plus qu’il ne suppose un renoncement de l’USCA à cette plainte. Cependant, la sentence arbitrale a permis le remplacement de la première convention collective professionnelle conclue entre les contrôleurs du trafic aérien et l’AENA; et il est plus que probable que l’échec de la négociation entre les deux parties était à l’origine de la plainte de l’USCA.
- 732. La Direction générale du travail donne des informations très détaillées sur l’interprétation jurisprudentielle du principe de bonne foi dans la négociation et elle souligne que l’impasse dans laquelle se trouvait la négociation de la deuxième convention collective a été débloquée premièrement par l’accord d’arbitrage survenu dans l’AENA, signé le 11 janvier 2011, d’une part, par les représentants de l’AENA et, d’autre part, par la section syndicale de l’USCA, conformément aux articles 91 et 90, alinéas 2 et 3, du statut des travailleurs, et au décret royal no 713/2010 du 28 mai, concernant l’enregistrement et le dépôt des conventions et accords collectifs de travail; deuxièmement par la conclusion, l’enregistrement et la publication officielle de la sentence arbitrale, qui comprend le texte intégral de la deuxième convention collective des contrôleurs du trafic aérien de l’AENA, en vigueur depuis le 10 mars 2011.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 733. Le comité observe que, dans la présente plainte, l’organisation plaignante allègue que, alors que l’Union syndicale des contrôleurs aériens (USCA) était en train de négocier avec l’entreprise publique Aeropuertos Españoles y Navegación Aérea (AENA) pour remplacer la convention collective qui venait à échéance le 31 décembre 2004, ces négociations ont été interrompues le 2 février 2010, lorsque que les représentants de l’AENA ont quitté la table des négociations. Selon l’USCA, trois jours après cette rupture unilatérale des négociations, le décret-loi royal no 1/2010 (dont le contenu a été par la suite validé par la loi no 9/2010 du Congrès des députés en des termes semblables à ceux du décret-loi royal) est entré en vigueur, au motif que des raisons impératives et urgentes obligeaient à modifier les conditions de travail prévues par la convention collective en ce qui concerne les horaires de travail, les journées de travail, les temps de repos, les déplacements à l’extérieur du centre de travail, les permissions, vacances et autorisations ainsi que les infractions. L’USCA allègue notamment l’ingérence des autorités dans le processus de négociation collective en violation de la convention no 98, l’absence de consultation, et elle estime que la nouvelle réglementation a engendré de nouveaux risques professionnels pour les contrôleurs aériens. Enfin, selon l’USCA, les faits allégués se sont produits dans le contexte d’un processus de négociation au cours duquel il n’y a eu ni préavis de grève ni aucune autre action collective ou mobilisation.
- 734. Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) les normes qui font l’objet de la plainte de l’organisation plaignante prévoient une modification transitoire de certaines conditions de travail des contrôleurs aériens qui fournissent un service public essentiel à la société; 2) il était indispensable que ce service s’adapte aux dispositions du règlement no 2096/2005 de la Communauté européenne qui établit les exigences communes pour tous les Etats concernant la prestation des services de navigation aérienne, ainsi qu’à d’autres dispositions de l’Union européenne qui réglementent ce que l’on appelle le «Ciel unique européen» – qui revêt un caractère contraignant pour l’Espagne – ces dispositions portant sur la sécurité du trafic aérien et sur le droit fondamental à la libre circulation des personnes et des marchandises; 3) les normes objet de la plainte sont issues de l’impossibilité de conclure une nouvelle convention collective (la convention précédente étant échue le 31 décembre 2004) après cinq années de négociation et en dépit de propositions multiples et répétées de l’employeur, pendant 65 réunions à la table des négociations. En effet, il a présenté 10 propositions fondées sur la réglementation du «Ciel unique européen» alors que les représentants des travailleurs n’ont avancé qu’une seule proposition qui n’envisageait aucun des aspects devant être modifiés; 4) les normes faisant l’objet de la plainte (et qui sont – le gouvernement insiste sur ce point – de nature transitoire) n’ont pas affecté le cadre de la négociation collective puisque, après leur entrée en vigueur, une nouvelle commission a été constituée et chargée de négocier la future convention collective; 5) l’autorité judiciaire (Chambre des affaires sociales de l’Audience nationale) a rejeté intégralement le recours judiciaire de l’organisation plaignante par un jugement du 10 mai 2010; 6) concernant l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle l’intervention des autorités a eu lieu au cours d’un processus de négociation, alors qu’il n’y avait eu aucun préavis de grève ni aucune action collective ou mobilisation, le gouvernement et l’AENA évoquent le jugement de l’autorité judiciaire affirmant que les relations professionnelles de l’ensemble des contrôleurs aériens avec leurs employeurs ont été très conflictuelles, les faits les plus marquants depuis 2009 ayant été des retards de vols dus à des congés maladie répétés et au refus des contrôleurs d’effectuer des heures supplémentaires, et l’annonce des contrôleurs selon laquelle, à partir d’avril 2010, ils ne travailleraient plus que pendant le nombre d’heures correspondant à leur journée de travail fondamentale et obligatoire. Le comité observe que le gouvernement ne répond pas à l’allégation de l’USCA relative à l’absence de consultation lors de l’élaboration des normes faisant l’objet de la plainte mais il comprend que, en plus de la situation d’urgence invoquée par le gouvernement, les nombreuses réunions et les négociations menées à bien entre l’entreprise publique AENA (qui dépend étroitement du ministère des Travaux publics et des Transports) ont permis aux autorités de supposer qu’elles connaissaient suffisamment le point de vue et la position du syndicat sur les thèmes en question.
- 735. Le comité prend note par ailleurs de la deuxième réponse du gouvernement qui précise que, après l’adoption des mesures transitoires par les autorités, la commission négociatrice USCA-AENA a repris la négociation concernant la deuxième convention collective, et qu’elle a résolu, le 23 décembre 2010, de soumettre les questions en suspens à un arbitre (désigné de commun accord le 11 janvier 2011). Ce dernier a émis une sentence arbitrale qui comprend le texte intégral de la deuxième convention collective des contrôleurs aériens entre l’USCA et l’AENA, en vigueur depuis le 10 mars 2011. Cette sentence arbitrale exclut toute autre procédure ou dénonciation de conflit collectif sur la question résolue.
- 736. Le comité souhaite rappeler que le principe de la négociation est libre et volontaire, et notamment le fait que «les organes de l’Etat devraient s’abstenir d’intervenir pour modifier le contenu des conventions collectives librement conclues». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 1001.] Cependant, le comité constate que le contrôle du trafic aérien est un service essentiel au sens strict du terme [Recueil, op. cit., paragr. 585] et que, dans ce type de services, certaines interventions des autorités ne sont pas incompatibles avec les principes de la négociation collective. En particulier, le comité a estimé, par exemple, que le recours à l’arbitrage obligatoire, lorsque les parties ne parviennent pas à un accord par la négociation collective, est admissible pour les services essentiels au sens strict, c’est-à-dire ceux dont l’interruption pourrait mettre en péril la vie, la sécurité ou la santé de tout ou partie de la population. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 994.]
- 737. Par ailleurs, le comité a pris note du contenu de la sentence judiciaire concernant ce cas, des arguments du gouvernement, invoquant des motifs de sécurité, de la nécessité de respecter de toute urgence les normes de l’Union européenne relatives au service de navigation aérienne, ainsi que de la déclaration du gouvernement selon laquelle, après des années de négociations en vue de la conclusion de la deuxième convention collective, le processus se trouvait dans une impasse et qu’il fallait le débloquer, notamment après 65 réunions entre les parties qui n’avaient produit aucun résultat positif pendant cinq ans. A cet égard, le comité a reconnu qu’il arrive un moment dans les négociations où, après des négociations prolongées et infructueuses, l’intervention des autorités peut être justifiée, lorsqu’il devient évident que l’impasse ne pourra être résolue sans une initiative de leur part. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1003.]
- 738. Dans ces conditions, le comité, notant qu’après le dépôt de la plainte les parties se soient accordées pour désigner un arbitre afin de résoudre leurs différends, et que la sentence arbitrale de cet arbitre comprenne le libellé de la deuxième convention collective entre l’UCSA et l’AENA, qui est entrée en vigueur à partir de mars 2011, décide de ne pas poursuivre l’examen de ce cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 739. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité recommande au Conseil d’administration de décider que ce cas ne requiert pas d’examen plus approfondi.