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- 992. Les plaintes figurent dans des communications de la Fédération nationale des employés publics et des travailleurs des entreprises des services publics (FENASEP) et du Conseil national des travailleurs syndiqués (CONATO) en date, respectivement, des 24 novembre 2009 et 30 juin 2010.
- 993. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par des communications en date des 11 mai, 11 novembre et 2 décembre 2010.
- 994. Le Panama a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 995. Dans sa communication en date du 24 novembre 2009, la Fédération nationale des employés publics et des travailleurs des entreprises des services publics (FENASEP) allègue que, le 30 juillet 2009, le gouvernement a promulgué la loi no 43 portant réforme de la loi no 9 de 1994 et de la loi no 8 de 1998, régissant respectivement les carrières administrative et législative. La loi no 43 en question supprime le tripartisme puisque la loi antérieure avait comme principe fondamental que les représentants de la fonction publique pour la Commission technique et la Commission d’appel et de conciliation seraient nommés par la Fédération nationale des employés publics et des travailleurs des entreprises des services publics (FENASEP). La loi actuelle no 43 met fin à cette possibilité.
- 996. D’autre part, malgré le fait que les organes de contrôle de l’OIT aient exigé que la législation du Panama réduise le nombre minimum de personnes requis pour la création d’une organisation syndicale, la loi no 43 a élevé ce nombre à 50 dans la fonction publique.
- 997. La FENASEP allègue également que, le 9 octobre 2009, la ministre du Travail actuelle a licencié le secrétaire général de l’Association des employés du ministère du Travail et du Bien-être social (ASEMITRABS), M. Víctor C. Castillo Díaz (par ailleurs inspecteur du travail, et protégé en outre par les conventions sur l’inspection du travail ratifiées par le Panama) qui est pourtant protégé par la loi no 43 elle-même qui, dans l’article 17, dispose que «ne pourront être démis de leurs fonctions que pour les motifs prévus par la présente loi, même s’ils ne dépendent pas de la carrière administrative, les fonctionnaires suivants: 1. Le secrétaire général de chaque association ou fédération de fonctionnaires, depuis son élection jusqu’à trois mois après la fin de la période pour laquelle il a été élu».
- 998. En outre, la ministre du Travail, Mme Cortés, vu que M. Castillo était inspecteur du travail comme le prouve le règlement du personnel no 102, viole également une autre convention ratifiée par le Panama en 1958, à savoir la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947, et en particulier l’article 6 de ladite convention qui dispose: «Le personnel de l’inspection sera composé de fonctionnaires dont le statut et les conditions de service leur assurent la stabilité dans leur emploi et les rendent indépendants de tout changement de gouvernement et de toute influence extérieure indue.» Les droits de M. Castillo ainsi que ceux d’autres inspecteurs qui ont été licenciés par le gouvernement actuel, et de ceux qui seront certainement encore licenciés, droits consacrés par ladite convention no 81 de l’OIT, sont donc bafoués.
- 999. Enfin, la FENASEP allègue que la ministre du Travail ne veut pas reconnaître la FENASEP comme organisation syndicale et refuse de lui octroyer les fonds d’assurance formation, ce qui laisse sans la protection nécessaire des milliers de fonctionnaires (toutes les autres organisations syndicales du secteur privé reçoivent l’enveloppe budgétaire correspondante).
- 1000. Dans sa communication datée du 30 juin 2010, le Conseil national des travailleurs syndiqués (CONATO) allègue que la loi no 43 de 2009 et la loi no 4 de 2010 ont supprimé le droit des fonctionnaires licenciés de manière injustifiée et réintégrés par la suite par un jugement de percevoir les salaires échus depuis le moment du licenciement jusqu’à leur réintégration dans leur poste de travail.
- 1001. Le CONATO allègue également le refus d’octroyer les 5 pour cent correspondant aux fonds d’assurance formation à la FENASEP. Le décret de cabinet du 27 juillet 1971 portant création des fonds d’assurance formation dispose, à l’article 4, que c’est la Commission de la formation syndicale qui est chargée de déterminer l’emploi des fonds d’assurance formation pour l’éducation ou la formation syndicale et, pendant de nombreuses années, ladite commission a approuvé l’octroi desdits fonds à la FENASEP, tenant compte du fait qu’il s’agit d’une organisation syndicale très particulière qui œuvre dans l’administration publique et qui fait partie du Conseil national des travailleurs syndiqués (CONATO) depuis environ quinze ans et, à plusieurs reprises, c’est un représentant de la FENASEP qui a été le porte-parole de tout le mouvement syndical panaméen à la Conférence internationale du Travail de l’OIT. En outre, 1,25 pour cent est déduit des salaires de tous les fonctionnaires pour alimenter les fonds d’assurance formation. Le CONATO indique que la Commission de la formation syndicale est une structure composée de trois représentants du CONATO, du recteur de l’Université de Panama, de deux techniciens experts en formation syndicale et de la ministre du Travail, qui la préside. Les décisions sont adoptées à la majorité et au sein de cette instance; la ministre du Travail n’a aucun pouvoir d’apprécier elle seule la manière dont sont distribués les fonds d’assurance formation. Il est clair que le fait de bloquer ces fonds procède d’une politique antisyndicale du gouvernement actuel.
- 1002. Les autorités ont également orchestré une campagne de dénigrement et de diffamation ayant pour objectif de diaboliser les dirigeants syndicaux vis-à-vis de l’opinion publique. En particulier, elles ont menacé de poursuivre devant le ministère public plusieurs dirigeants syndicaux au motif d’incohérences présumées dans l’utilisation des fonds correspondant aux 5 pour cent des fonds d’assurance formation. Cette campagne antisyndicale intervient bien que, dans l’article 224 du Code du travail, «la constitution de syndicats est déclarée d’intérêt public, en tant que moyen efficace pour contribuer au soutien et au développement économique et social du pays, de la culture populaire et de la démocratie panaméenne».
- 1003. Le CONATO allègue également que le ministère du Travail et du Développement social (MITRADEL), par la décision no DM 280/09, en date du 15 décembre 2009, a élaboré un manuel de procédures pour le Département des partenaires sociaux afin que les syndicats, les fédérations, les confédérations et les centrales se conforment à de nouvelles règles lorsqu’ils présentent leurs documents concernant le fonctionnement des syndicats. Lesdites normes consistent à superviser la procédure électorale des organisations syndicales et des associations et à les attester, à intervenir d’office ou à la demande d’une des parties dans les conflits entre organisations syndicales ou entre associations ou encore en leur sein, et les résoudre conformément à la loi. Il est également prévu que, dans les cas où les syndicats changent de comité de direction, pour que la nouvelle direction soit dûment instituée, elle soit approuvée par le ministère du Travail et du Développement social. Cette décision cherche à rendre inefficace ou à abroger les normes des conventions de l’OIT, de la Constitution politique et du Code du travail sur le droit d’élire librement les représentants syndicaux, normes qui limitent la compétence du ministère du Travail à l’enregistrement de l’acte électoral. La décision en question met en danger le privilège syndical.
- 1004. Le CONATO ajoute que les autorités du ministère du Travail ont gelé 30 demandes d’enregistrement de syndicats dans les dix derniers mois, ce qui signifie qu’elles ne respectent pas les normes du Code du travail.
- 1005. Par ailleurs, la loi no 29 du 8 juin 2010, en son article 7, permet que, pendant les six premières années d’exercice, les entreprises ne négocient pas de conventions collectives du travail. De plus, l’article 8 de ladite loi n’envisage pas que les organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs, à savoir le CONEP et le CONATO, soient représentées dans la constitution de la Commission de gestion pour la zone économique spéciale de Barú.
- 1006. Enfin, le CONATO allègue que la loi no 30 de 2010 supprime l’obligation faite à l’employeur de déduire la cotisation syndicale et de la reverser au syndicat, ce qui affecte sérieusement les syndicats sur le plan économique. La loi en question modifie également le Code du travail en limitant le droit de grève des travailleurs et leur droit à ce que les conflits soient résolus par arbitrage.
- 1007. En outre, la loi no 30 de 2010 établit que les confédérations et les centrales de travailleurs ainsi que les fédérations syndicales non affiliées à une confédération ou à une centrale formeront le Conseil des travailleurs du Panama (COTRAPA), supprimant ainsi le Conseil national des travailleurs syndiqués (CONATO), soit l’organe le plus important représentant les travailleurs panaméens. Auparavant, l’organe qui présentait à l’organe exécutif les listes en vue de la désignation des représentants des travailleurs à la Conférence internationale du Travail et aux organismes officiels panaméens était le CONATO. Maintenant, ces listes seront présentées par le COTRAPA, les confédérations, les centrales de travailleurs et les fédérations syndicales dans le but que le gouvernement puisse manipuler la désignation des représentants des travailleurs. La loi no 30 aggrave la situation en disposant que le COTRAPA sera composé d’un représentant du CONATO, un représentant du CONUSI, un représentant de chaque confédération syndicale, un représentant de chaque centrale de travailleurs et un représentant de chaque fédération de travailleurs.
- 1008. Enfin, le CONATO se réfère à d’autres violations des droits des travailleurs qui ne sont pas en rapport avec les conventions de l’OIT en matière de liberté syndicale.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 1009. Dans sa communication en date du 11 mai 2010, le gouvernement déclare que les allégations présentées par la FENASEP dans sa plainte décrivent une série de situations que ladite organisation perçoit comme des atteintes aux droits syndicaux, évoquant leur propre organisation et une Association des employés du ministère du Travail et du Bien-être social (ASEMITRABS). Cette dernière est totalement inconnue de la majorité des fonctionnaires se trouvant dans cette institution. Ceci mérite un examen approfondi de la législation interne, étant donné que l’administration publique s’appuie sur des bases de gestion et des règles distinctes de celles qui régissent l’entreprise privée, régie fondamentalement par les dispositions du Code du travail qui définit le concept de syndicat et comment la personnalité juridique lui est accordée; ceci se passe de manière totalement différente dans la fonction publique.
- 1010. En ce qui concerne la modification de la loi no 9 de 1994 et de la loi no 8 de 1998 qui régissent respectivement la carrière administrative et la carrière législative, le gouvernement fait savoir qu’il a cru opportun de reformuler les dispositions de ladite loi, étant donné que par la loi no 24 du 2 juin 2007 l’esprit qui gouverne l’accès à la carrière administrative était dénaturé, cet esprit n’étant autre que l’accès par concours; mais en 2007 l’objectif principal de la carrière administrative a subi une altération incontestable lorsqu’il a été décidé que les fonctionnaires en fonction ne seraient plus évalués que sur les conditions minimales requises par la loi pour accéder à la fonction publique sans qu’il soit nécessaire qu’ils passent un concours d’entrée dans la carrière administrative.
- 1011. En ce qui concerne le nombre minimum légal de membres d’une organisation syndicale dont la FENASEP fait mention, nombre établi dans la loi no 9 de 1994 régissant la carrière administrative, le gouvernement déclare qu’originellement le nombre était de 50; en 2007, sans aucune analyse préalable de la situation, ce nombre a été modifié à 40 personnes nécessaires pour constituer une organisation de fonctionnaires. La seule modification apportée en 2009 est de maintenir le nombre originel de 50 personnes comme nombre minimal nécessaire pour constituer une organisation de fonctionnaires. Il convient d’insister sur ce point, vu que la loi sur la carrière administrative ne mentionne pas les organisations syndicales et ne les régit pas, comme l’indique la FENASEP dans sa plainte.
- 1012. Dans le même ordre d’idées, la FENASEP affirme que la loi no 43 du 30 juillet 2009 met fin au tripartisme dont l’OIT se fait le défenseur, lorsqu’elle élimine sa participation à la Commission technique et à la Commission d’appel et de conciliation de la carrière administrative. Il convient de préciser à cet égard que la participation des fonctionnaires, ainsi que celle du gouvernement et des utilisateurs desdites entités, est maintenue dans les normes de la loi en question.
- 1013. Au sujet de l’allégation selon laquelle M. Víctor C. Castillo Díaz est protégé par l’article 17 de la loi no 43 de 2009, si tant est qu’il ait la charge de secrétaire général de l’Association des employés du ministère du Travail et du Bien-être social (ASEMITRABS), le gouvernement indique que l’association des employés en question n’opère pas actuellement au sein du MITRADEL. Les fonctionnaires ne la connaissent pas et aucune activité de ladite organisation de fonctionnaires n’est connue. De fait, ladite association n’est pas active au sein de l’institution. D’autre part, M. Víctor C. Castillo Díaz a introduit une plainte au contentieux de la pleine juridiction devant la troisième chambre du contentieux administratif de la Cour suprême. L’Etat du Panama ne peut donc émettre d’opinion à cet égard puisque la procédure est actuellement en cours devant l’autorité juridictionnelle interne qui va décider de la validité de sa plainte au regard de la loi.
- 1014. La FENASEP s’autoproclame organisation syndicale et déclare que les fonds d’assurance formation lui sont refusés, ce qui laisse sans la protection nécessaire des milliers de fonctionnaires, étant donné que toutes les autres organisations syndicales du secteur privé reçoivent l’enveloppe budgétaire correspondante. A cet égard, le gouvernement déclare que, dans le droit positif panaméen, la réglementation est très claire en ce qui concerne la différence existant entre un syndicat et une association de fonctionnaires publics. C’est pour cette raison que le gouvernement veut exposer l’exemple suivant. Un syndicat a voulu se constituer à l’Université de Panama, il s’intitulait syndicat de travailleurs d’entreprise. L’enregistrement a été présenté par des fonctionnaires qui travaillent à l’Université de Panama, en qualité de syndicat d’entreprise; cependant, la loi ne permet pas ce type d’organisation pour des raisons élémentaires: 1) les membres de cette organisation ne sont pas juridiquement des travailleurs au sens de l’article 82 du Code du travail; 2) les personnes qui demandent l’enregistrement d’un syndicat d’entreprise travaillent à l’Université de Panama, entité qui, conformément à l’article 103 de la Constitution politique de la République, est une université officielle et autonome de l’Etat, raison pour laquelle tous ceux qui y travaillent sont des fonctionnaires, selon les définitions de l’article 299 de la Charte fondamentale en ces termes: «sont fonctionnaires d’Etat les personnes nommées à titre temporaire ou permanent à des postes relevant de l’exécutif, du législatif ou du judiciaire, de municipalités ou d’entités autonomes ou semi-autonomes, et en général toute personne rémunérée par l’Etat»; 3) ce syndicat se dénomme syndicat d’entreprise, vocable ou terme qui demande une précision au regard de l’article 97 du Code du travail qui dispose: «aux fins des normes du travail, on entend par entreprise l’organisation d’activités et de moyens qui forment une unité économique d’extraction, de production ou de distribution de biens ou de services avec ou sans but lucratif». Il est notoire que cette définition ne s’applique pas à l’Université de Panama, conformément à ce qui est établi dans la Constitution politique de la République. Il est donc important de considérer que l’enregistrement d’une association composée de fonctionnaires de l’Université de Panama n’est pas valable au motif qu’il est contraire aux règles précises et claires du Code du travail.
- 1015. Le gouvernement affirme que l’article premier du Code du travail régit la relation existant entre le capital et le travail, autrement dit il se réfère à la relation de travail existant entre l’investisseur particulier ou privé et un employé. Par opposition à un investisseur public ou officiel, l’investisseur individuel ou privé est juridiquement dénommé «employeur» et défini comme «la personne physique ou morale qui reçoit du travailleur la prestation de services ou l’exécution du travail» selon l’article 87 du Code du travail; de même, par opposition au fonctionnaire d’Etat, l’employé est dénommé «travailleur», c’est-à-dire la personne physique qui, au sens de la loi, contracte l’obligation «par un contrat de travail oral ou écrit, individuel ou collectif, exprès ou tacite de fournir un service ou d’exécuter un travail sous la subordination ou l’autorité d’une personne» (article 82). Le Code du travail ne régit pas les relations de travail entre les fonctionnaires et les institutions gouvernementales ou publiques, conformément aux dispositions de son article 2: «Les employés de la fonction publique relèvent des règles propres à la carrière administrative, sauf dans les cas où il est expressément établi qu’un principe du présent code leur est applicable.» L’article 3 de la Constitution établit que les fonctionnaires sont les personnes nommées, entre autres, dans des entités autonomes ou semi-autonomes et, en général, toute personne rémunérée par l’Etat; par conséquent, ce ne sont pas les règles énoncées dans le Code du travail qui leur sont applicables, mais celles qui sont établies dans la carrière administrative, c’est ce que dispose l’article 2 du code, et on ne peut donc alléguer un traitement égalitaire et des avantages tels que l’enveloppe des fonds d’assurance formation, destinés aux syndicats, si les associations de fonctionnaires ne sont pas couvertes par ce type d’avantages.
- 1016. Dans sa communication en date du 2 décembre 2010, le gouvernement fait parvenir un jugement de la Cour suprême du 17 février 2006, qui reconnaît le droit des fonctionnaires à percevoir les salaires et autres indemnités non perçues entre la date de leur licenciement injustifié et celle de leur réintégration dans leur poste de travail. Sur ce dernier point, dans sa communication en date du 11 novembre 2010, le gouvernement déclare que les plaignants font valoir que dans le monde du travail, qu’il soit public ou privé, la règle générale est que le travailleur licencié abusivement et réintégré par la suite par un jugement a le droit de percevoir les salaires échus depuis le moment du licenciement jusqu’à sa réintégration dans son poste de travail; dans ce sens, ils avancent que la loi no 43 du 30 juillet 2009 supprime ce droit aux fonctionnaires. Le gouvernement déclare que cette affirmation n’est pas fondée car la loi no 43 de 2009 ne supprime à aucun moment un tel droit. Par exemple, on peut mentionner les cas de fonctionnaires du ministère du Travail et du Développement social (MITRADEL) qui, ayant été licenciés, ont introduit des actions en justice dont la décision finale leur a été favorable, et l’Etat a dû payer les indemnités prévues par la résolution.
- 1017. En ce qui concerne l’allégation de non-reconnaissance de la FENASEP en tant qu’organisation syndicale, le gouvernement déclare que, dans la plainte, les autorités sont accusées d’ignorer les articles 10 et 15 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Cependant, l’article 10 ne fait que définir le terme «organisation», il n’est donc ignoré d’aucune autorité car il ne s’agit que de la définition d’un terme. L’article 15, quant à lui, établit le lien qui engage les Etats Membres de l’OIT dont les ratifications auront été enregistrées par le Directeur général.
- 1018. Sur ce dernier point, le gouvernement souligne que cette administration a répondu à l’appel de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations et à la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail, en prenant connaissance des recommandations du Comité de la liberté syndicale sur le cas no 1931 et des propositions que le Bureau aimerait voir appliquées. Entre autres, une demande formelle d’assistance technique du Bureau de l’OIT a été déposée auprès de l’OIT pour traiter des problèmes de liberté syndicale, dans le but de rechercher des formules de conciliation permettant d’harmoniser la législation et la pratique nationales autour des dispositions des conventions nos 87 et 98.
- 1019. Il convient de rappeler que, dans le droit panaméen, il existe une différence claire et définie entre une organisation syndicale et une association de fonctionnaires publics. Le Code du travail, pour sa part, ne régit pas les relations de travail entre les fonctionnaires et les institutions gouvernementales ou publiques, conformément aux dispositions du dernier paragraphe de l’article 2, qui établit: «Les employés de la fonction publique relèvent des règles propres à la carrière administrative, sauf dans les cas où il est expressément établi qu’un principe du présent code leur est applicable.»
- 1020. Quant à la Constitution politique de la République, elle établit que sont fonctionnaires les personnes nommées, entre autres, dans des entités autonomes ou semi-autonomes et, en général, toute personne rémunérée par l’Etat; par conséquent, ce ne sont pas les règles énoncées dans le Code du travail qui leur sont applicables, mais celles qui régissent la carrière administrative.
- 1021. Dans un autre ordre d’idées, pour considérer la FENASEP comme une organisation syndicale, il faudrait procéder à une modification de la Constitution politique, ce qui n’est pas facile, conformément à l’article 313, titre XIII, sur la «réforme de la Constitution» qui dispose:
- L’initiative de proposer des réformes constitutionnelles revient à l’Assemblée nationale, au Conseil de cabinet ou à la Cour suprême. Lesdites réformes devront être approuvées par l’une des procédures suivantes:
- 1. Par un acte constitutionnel approuvé au cours de trois débats à la majorité absolue des membres de l’Assemblée nationale, acte qui doit être publié au Journal officiel et transmis par l’organe exécutif à ladite assemblée, dans les cinq premiers jours des sessions ordinaires suivant la constitution de l’Assemblée nationale élue aux dernières élections générales, afin qu’il soit débattu lors de sa première législature et approuvé sans modification, lors d’un seul débat, à la majorité de ses membres.
- 2. Par un acte constitutionnel approuvé lors de trois débats à la majorité absolue des membres de l’Assemblée nationale, en une législature, et approuvé également lors de trois débats à la majorité absolue des membres de ladite assemblée, lors de la législature suivante. Dans cette procédure, le texte approuvé lors de la législature précédente pourra être modifié. L’acte constitutionnel approuvé de cette manière devra être publié au Journal officiel et soumis à la consultation populaire directe par un référendum qui se tiendra à la date décidée par l’Assemblée nationale, dans un délai qui ne pourra être inférieur à trois mois ni supérieur à six mois, comptés depuis l’approbation de l’acte constitutionnel lors de la deuxième législature».
- 1022. En ce qui concerne l’allégation relative au refus d’octroyer les 5 pour cent correspondant aux fonds d’assurance formation à la FENASEP, le gouvernement indique qu’il s’agit d’une association représentative des travailleurs du secteur public du Panama, ayant une personnalité juridique que lui a accordée l’organe exécutif par la décision no 345 du 20 septembre 1984, d’où il appert que c’est la loi no 9 du 20 juin 1994 qui lui est applicable, loi «qui régit la carrière administrative», plus particulièrement dans le titre VIII, chapitre I, article 174 et suivants.
- 1023. C’est l’article 175 de ladite loi qui l’établit lorsqu’il dispose: «Les associations de fonctionnaires seront reconnues par l’organe exécutif par le biais du ministère du Gouvernement et de la Justice, sur avis de la Direction générale à la carrière administrative par une décision motivée et après avoir respecté les conditions préalables requises par la loi.» Elle dit ensuite: «Elles obtiendront la personnalité juridique une fois enregistrées dans le secteur des associations de fonctionnaires du registre public et auront les mêmes droits et limites que les autres associations sans but lucratif.»
- 1024. Cette introduction est fondamentale pour apprécier si la FENASEP a le droit de recevoir des ressources en provenance des fonds d’assurance formation destinés à la formation syndicale, droit contenu dans l’alinéa 2 de l’article 2 de la loi no 13 du 28 juillet 1987.
- 1025. Ladite loi précise que 5 pour cent seront destinés à la «formation syndicale», autrement dit celle des organisations syndicales qui sont reconnues par l’organe exécutif et dont la personnalité juridique est déterminée par son enregistrement au ministère du Travail et du Développement social, ce qui n’est pas le cas de la FENASEP, vu que sa reconnaissance et, partant, sa personnalité juridique, même si elle est octroyée par l’organe exécutif, l’est par le biais du ministère de l’Intérieur, et elle revêt le caractère d’association sans but lucratif, ce n’est en aucun cas à un niveau syndical, si c’était le cas elle serait enregistrée dans cette institution de l’Etat.
- 1026. Ce qui selon le gouvernement ne peut être négligé, c’est la manière dont il est donné une vie juridique à la FENASEP, ainsi que les objectifs qui ont présidé à sa création; même si ceux-ci semblent coïncider avec ceux d’une organisation syndicale et même si elle fait partie du CONATO, la fédération ne revêt pas ce caractère, ce qui rend difficile le fait qu’elle perçoive des subsides de toute évidence réservé aux organisations syndicales.
- 1027. Elle ne peut voir le jour sous la loi no 9 du 28 juin 1994, pour ensuite utiliser d’autres règles du droit positif panaméen dans le but de s’attribuer des avantages qui, selon le gouvernement, ne lui sont pas applicables juridiquement. Si elle octroyait des subsides, cela impliquerait que la ministre du Travail et du Développement social commette un acte de corruption et de détournement de fonds publics, ce qui à l’évidence constitue un acte illégal.
- 1028. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle le gouvernement licencie des dirigeants syndicaux au ministère du Travail, en dehors des motifs prévus par la loi no 43 de 2009, le gouvernement déclare qu’au ministère du Travail et du Développement social il n’existe aucune association d’employés et, par conséquent, il n’y a aucun licenciement de dirigeants syndicaux.
- 1029. En ce qui concerne l’allégation relative à une campagne organisée en vue de discréditer tous les dirigeants syndicaux, le gouvernement déclare qu’il est évident que les plaignants ont émis une série d’appréciations personnelles totalement erronées. Les plaignants font allusion à un rapport envoyé par les services du contrôleur général de la République en date du 11 mai 2010, rapport qui fait une étude sur l’usage que les syndicats ont fait des fonds publics, comme les fonds d’assurance formation qui, vu qu’ils sont des fonds publics, doivent être supervisés par l’Etat. Ledit rapport a fait apparaître de graves irrégularités administratives et des détournements de fonds par certains syndicats, d’où l’attitude logique de l’Etat de déposer plainte auprès du ministère public et que celui-ci, après avoir appliqué la loi, rencontre les responsables s’ils existent. Dans un Etat de droit, ces principes s’appliquent à tous les citoyens qui habitent dans la République du Panama, les membres d’un syndicat ne constituent pas une exception, et ceci ne constitue une atteinte à aucun article de la convention no 87 ni en aucun cas à la liberté syndicale.
- 1030. En ce qui concerne les allégations relatives au Manuel de procédures des partenaires sociaux créé par la décision ministérielle no DM 280/09 du 15 décembre 2009, le gouvernement affirme qu’il s’agit d’un outil propre aux fonctions du Département des partenaires sociaux du MITRADEL. Ledit manuel examine les mécanismes présidant aux demandes ou aux démarches qui ont lieu dans ledit département et les conditions requises pour les solliciter. Il ne limite en aucune manière la liberté syndicale, bien au contraire il rappelle aux organisations syndicales les formalités que parfois elles ne respectent pas, ce qui rend le travail inefficace et inopportun. En outre, le manuel est instructif et s’inscrit dans le cadre légal, il est fidèle à la Constitution politique et au Code du travail, en permettant que le fonctionnaire soit efficace et qu’il utilise la structure syndicale en bonne et due forme (assemblées, comptages, congés pour assistance à des séminaires, réforme des statuts, etc.). De plus, le Département des partenaires sociaux ne s’immisce pas dans les changements de comités de direction, et encore moins dans des affaires de privilège syndical; ces changements sont communiqués au département dans le but d’actualiser les bases de données et de permettre la certification en cas de demande d’une partie intéressée par ladite information. Le gouvernement fait parvenir en annexe une copie du manuel de procédures, publié au Journal officiel no 26459 du 29 janvier 2010.
- 1031. En ce qui concerne l’allégation de gel de 30 demandes d’enregistrement de syndicats au cours des dix derniers mois, contournant ainsi l’application du Code du travail et enfreignant les règles des conventions nos 87 et 98, le gouvernement déclare que, après avoir procédé aux enquêtes légitimes auprès du Département des partenaires sociaux, il apparaît que neuf personnalités juridiques ont été concédées pendant l’administration actuelle, ce qui dépasse de loin celles accordées au cours des administrations précédentes. Le gouvernement souligne que l’article 356 du Code du travail dispose:
- Passés les quinze jours calendaires dont traitent les articles 352 et 353, sans que la demande d’enregistrement n’ait été refusée ou contestée, le syndicat, la fédération, la confédération, ou la centrale sera considéré comme enregistré à toutes fins légales, et à partir de ce délai le ministère est contraint de fournir les attestations correspondantes et à effectuer dans les registres des partenaires sociaux la transcription correspondante.
- 1032. D’où il appert, continue le gouvernement, qu’une fois passé le délai établi sans qu’il n’y ait de décision de refus ou de contestation faite sur la demande d’enregistrement le syndicat est considéré comme inscrit. Par conséquent, il est impossible que 30 demandes d’enregistrement de syndicats aient été gelées, vu que par la loi ils auraient dû être enregistrés et les attestations correspondantes auraient dû être fournies. Le gouvernement précise cependant que ce qui ne peut pas arriver c’est que des personnalités juridiques soient accordées en marge de la loi, à savoir lorsque les conditions requises par la loi ne sont pas respectées, par exemple si une liste de membres provisoire est présentée hors procédure, si les cartes d’identité ne sont pas présentées, pour des erreurs de forme et parfois de fond des statuts, de même que de l’acte de constitution ou de ses clauses, entre autres motifs qui entraînent la non-admission.
- 1033. En ce qui concerne la loi no 29 du 8 juin 2010 créant un régime spécial pour la zone de Barú, le gouvernement fait savoir que depuis plusieurs décennies Puerto Armuelles et le district de Barú tout particulièrement sont affectés par des problèmes sociaux, culturels, économiques, ainsi que des problèmes de salubrité dus à l’absence de politiques satisfaisantes proposées par les administrations précédentes, le gouvernement a dû y faire face de manière responsable. De constantes évaluations ont été faites dans la région en vue de trouver des possibilités de développement, et il a été conclu qu’il était nécessaire d’établir dans ce district un espace économique spécial comme mécanisme pour attirer l’investissement économique. Le projet consiste en un plan global de développement basé sur la création d’un régime spécial, global, visant à l’implantation d’entreprises, d’industries, d’usines de traitement, et en général toute activité pouvant contribuer à l’économie nationale et globale par des exportations de biens et de services pour qu’elles y déploient leurs activités, encourageant ainsi l’investissement et en même temps le développement scientifique, technologique, économique, culturel, éducatif, sanitaire et social du pays.
- 1034. La législation sociale a été élaborée dans l’idée de la promotion de l’emploi, en garantissant l’activité d’entreprise vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, en organisant des tours et des jours de repos variables selon la décision des parties (pas obligatoirement le dimanche). Actuellement, le ministère du Travail et du Développement social a créé la Commission de gestion pour la zone économique spéciale de Barú. Cette commission a effectué de grandes consultations, a entamé des dialogues et des explications avec les travailleurs de la zone, et ceux-ci ont manifesté leur accord à ce projet.
- 1035. En ce qui concerne les allégations relatives à la loi no 30 de 2010, le gouvernement déclare que la table ronde de dialogue national tripartite avec les secteurs de la société civile a pris fin. Cette table ronde, qui s’est tenue pendant plus de trois mois d’intense dialogue, débattait de la loi no 30. Des accords tripartites ont été obtenus, accords par lesquels il a été convenu que la loi no 30 serait convertie en six projets de loi devant être ensuite approuvés par l’organe législatif.
- 1036. La loi no 30 a été abrogée en octobre 2010 dans le cadre d’un dialogue national tripartite qui a entraîné l’approbation de plusieurs lois par l’Assemblée nationale et, parmi celles-ci, une loi contenant des réformes du travail toutes dûment acceptées par consensus à la table ronde de dialogue tripartite. La loi no 30 ayant été abrogée, la question soulevée par les plaignants n’est plus d’actualité.
- 1037. Enfin, le gouvernement rappelle qu’il est respectueux des conventions sur la liberté syndicale et sur la négociation collective qu’il a ratifiées. Il s’efforce dans toute la mesure du possible de les appliquer pleinement dans le cadre d’un dialogue avec les acteurs sociaux. C’est pourquoi l’administration sociale actuelle, tenant compte de la réalité et dans le but de respecter les conventions nos 87 et 98 sur la liberté syndicale et d’encourager le dialogue social, examine la possibilité d’établir un Conseil supérieur du travail comme organe tripartite consultatif de l’organe exécutif, rattaché au MITRADEL, dans le but primordial de diriger le dialogue et promouvoir la concertation économique et sociale entre les autorités publiques et les organisations d’employeurs et de travailleurs du pays en matière de travail, avec le soutien technique du BIT.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 1038. Le comité observe que, dans le présent cas, les organisations plaignantes allèguent des réformes de lois et des décisions qui portent atteinte aux droits syndicaux fondamentaux, la non-reconnaissance dans la pratique de l’organisation des fonctionnaires FENASEP, son exclusion d’organes tripartites, ainsi que le refus d’accepter que cette organisation bénéficie des fonds d’assurance formation destinés à la formation syndicale, le gel de la reconnaissance de 30 organisations syndicales et le licenciement d’un dirigeant syndical.
- 1039. En ce qui concerne les allégations relatives aux atteintes portées aux droits syndicaux contenues dans la loi no 30 de 2010, en matière de droit de grève, de déduction des cotisations syndicales à la source, de possibilité de recours à l’arbitrage et à la création, en vertu de ladite loi, du Conseil des travailleurs du Panama en vue de supprimer le Conseil panaméen des travailleurs syndiqués, le comité prend bonne note des déclarations du gouvernement informant de l’abrogation de la loi no 30, en octobre 2010, dans le cadre d’un dialogue national tripartite qui a conduit à l’approbation par l’Assemblée nationale de plusieurs lois qui contiennent des réformes dûment consensuelles.
- 1040. En ce qui concerne les allégations relatives à la loi no 29 du 8 juin 2010 créant un régime spécial pour la zone de Barú, loi qui inclut une disposition permettant que, pendant les six premières années d’exercice, les entreprises ne négocient pas de conventions collectives de travail (article 7 de la loi) et que les représentants de la centrale des travailleurs CONATO et de la centrale des employeurs CONEP ne sont pas admis à la Commission de gestion pour la zone économique spéciale de Barú, le comité prend bonne note des déclarations du gouvernement exposant que l’objectif de la loi est d’affronter les graves problèmes sociaux, économiques et culturels en attirant l’investissement économique et en encourageant l’emploi. Selon le gouvernement, le ministère du Travail et du Développement social a créé la «Commission spéciale pour la zone de Barú» qui a effectué des consultations et entamé des dialogues et des explications avec les travailleurs de la zone qui ont manifesté leur accord au projet.
- 1041. Le comité tient toutefois à souligner que le droit de négociation collective est un droit fondamental des travailleurs et de leurs organisations, et que la convention no 98 ne permet des exceptions au droit de négociation collective pour les fonctionnaires qui travaillent dans les administrations de l’Etat qu’en ce qui concerne les forces armées et la police. Par conséquent, le comité estime que l’article 7 de la loi no 29 constitue une violation patente de la convention no 98 et prie instamment le gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour que cette disposition soit abrogée sans délai. Par ailleurs, observant que le gouvernement n’a pas répondu à l’allégation des organisations plaignantes, selon laquelle les représentants de la centrale des travailleurs et de la centrale des employeurs du pays ne sont pas admis à la Commission de gestion pour la zone économique spéciale de Barú, le comité, rappelant l’importance qu’il accorde à la consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives dans les affaires sociales, demande au gouvernement de considérer avec ces organisations la possibilité qu’elles soient représentées dans ledit organe afin qu’elles puissent être consultées sur les sujets qui touchent leurs membres, et de le tenir informé à cet égard.
- 1042. En ce qui concerne les allégations relatives au manuel de procédures des partenaires sociaux (décision ministérielle du 15 décembre 2009) qui, selon les organisations plaignantes, limite l’exercice des droits syndicaux, le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle ledit manuel ne porte pas atteinte à la liberté syndicale et reste fidèle à la Constitution politique et au Code du travail. Le comité observe que les organisations plaignantes soulignent principalement que le manuel exige que les lignes directrices soient «approuvées» par le ministère du Travail et permet à ce ministère d’intervenir d’office dans les conflits entre organisations syndicales ainsi que de superviser les procédures électorales des syndicats. Le comité observe que, selon ce qui ressort du texte dudit manuel (envoyé en annexe par le gouvernement), il ne semble pas qu’il ait fait l’objet de consultations avec les organisations les plus représentatives, mais déclare qu’il s’agit de procédures servant à accélérer les démarches administratives qui sont souples et qui permettent d’examiner les recommandations qui découleraient de son application. Le comité estime que certains termes du manuel tels que l’«approbation» des comités de direction peuvent poser quelques problèmes d’interprétation, et demande au gouvernement d’examiner ledit manuel avec les organisations de travailleurs les plus représentatives afin de dissiper des malentendus et d’obtenir un texte le plus consensuel possible.
- 1043. En ce qui concerne l’élévation du nombre minimum de fonctionnaires nécessaire pour constituer une association syndicale dans le secteur public (50 fonctionnaires) en vertu de la loi no 43, le comité prend note de ce que, selon le gouvernement: 1) le nombre de fonctionnaires était de 50 en 2007 (loi no 9); 2) sans aucune analyse préalable, le nombre de fonctionnaires nécessaire pour constituer une organisation a postérieurement été modifié à 40; et 3) la nouvelle modification de 2009 (loi no 43) a maintenu le nombre originel de 50 personnes. A cet égard, le comité souhaite rappeler le principe selon lequel «les formalités prescrites par la loi pour créer un syndicat ne doivent pas être appliquées de manière à retarder ou à empêcher la formation des organisations syndicales, et tout retard provoqué par les autorités dans l’enregistrement d’un syndicat constitue une violation de l’article 2 de la convention no 87». Le comité se réfère également à l’article relatif au principe qu’il a établi pour les syndicats d’entreprise, à savoir «la création d’un syndicat peut être considérablement gênée ou même rendue impossible lorsque la législation fixe le nombre minimum des membres d’un syndicat à un niveau manifestement trop élevé, ce qui est le cas par exemple lorsque la législation dispose qu’un syndicat doit compter au minimum 50 membres fondateurs». [Voir Recueil de décisions et de principes du comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 279 et 284.]
- 1044. Le comité rappelle également que la commission d’experts avait estimé excessif le nombre requis de 50 fonctionnaires pour constituer une association syndicale au Panama, et avait demandé au gouvernement de réduire ce nombre. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour modifier la loi no 43 de manière à ce que le nombre minimum de fonctionnaires requis pour constituer une association syndicale soit réduit, étant donné qu’un nombre minimum excessif peut entraver les droits syndicaux, en particulier dans certaines institutions publiques et dans les petites municipalités.
- 1045. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle les fonctionnaires licenciés puis réintégrés dans leurs fonctions suite à un jugement n’ont pas le droit, en vertu de la loi no 43 de 2009, de percevoir les salaires échus depuis leur licenciement jusqu’à leur réintégration à leur poste de travail, le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle cette affirmation n’est pas fondée et, pour illustrer cela, il se réfère à deux jugements de la Cour suprême dans lesquels l’Etat a eu l’obligation de rembourser les salaires et autres indemnités. Le comité observe que le gouvernement n’a envoyé qu’un des deux jugements, daté du 17 février 2006 (alors que la loi no 43 n’a été promulguée qu’en 2009); le comité serait donc reconnaissant au gouvernement de lui envoyer d’autres jugements à l’appui de sa déclaration.
- 1046. Quant aux allégations relatives à l’organisation FENASEP non-reconnaissance de celle-ci dans la pratique par les autorités, bien que ses représentants aient participé en tant que délégués à la Conférence internationale du Travail à plusieurs reprises, exclusion de représentants de cette organisation de la Commission technique et de la Commission d’appel et de conciliation en vertu de la loi no 43, du 30 juillet 2009, suppression des fonds d’assurance formation (pour la formation syndicale) dont elle jouissait auparavant – alors que tous les fonctionnaires versent 1,25 pour cent de leur salaire pour alimenter les fonds d’assurance formation – ce qui discrimine ainsi les associations syndicales de fonctionnaires par rapport au secteur privé, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) la FENASEP est une association de fonctionnaires qui perçoivent une rémunération de l’Etat, dont la personnalité juridique est octroyée par le ministère de l’Intérieur, elle est régie par la loi sur la carrière administrative en tant qu’association sans but lucratif et non en tant que syndicat régi par le Code du travail enregistré au ministère du Travail; 2) il n’est pas possible dès lors d’alléguer un traitement égalitaire et des avantages tels que l’enveloppe correspondant aux fonds d’assurance formation, qui sont destinés aux syndicats vu que les associations de fonctionnaires ne sont pas couvertes par ces avantages; et 3) la loi no 43 du 30 juillet 2009 maintient la participation des fonctionnaires et du gouvernement dans la Commission technique et dans la Commission d’appel et de conciliation de la carrière administrative. Selon le gouvernement, pour considérer la FENASEP comme une organisation syndicale, il faudrait procéder à une modification de la Constitution politique. Le gouvernement reconnaît cependant que la FENASEP fait partie du CONATO et qu’elle a été créée avec des objectifs qui semblent coïncider avec ceux d’une organisation syndicale. Le comité rappelle également que, selon la législation, la FENASEP dispose du droit de conclure des négociations collectives.
- 1047. Le comité tient à souligner que les associations de fonctionnaires, qu’elles se nomment ou non syndicats, doivent jouir de l’ensemble des droits et garanties établis par la convention no 87 qui ne permet d’exclure de ces droits et garanties que les forces armées et la police. Le comité souhaite rappeler que, ces derniers temps, l’organisation de fonctionnaires FENASEP – dont les représentants ont participé à plusieurs reprises à la Conférence internationale du Travail et que le gouvernement qualifie d’association représentative – s’est vue privée du droit de percevoir les fonds d’assurance formation pour la formation syndicale en dépit du fait que les fonctionnaires contribuent à 1,25 pour cent de leur salaire auxdits fonds, et elle s’est vu exclure de la Commission technique et de la Commission d’appel et de conciliation de la carrière administrative. Le comité estime que les arguments avancés par le gouvernement en faveur de ces exclusions ne constituent pas une justification, et demande au gouvernement d’engager un dialogue constructif avec la FENASEP en vue de trouver une solution qui écarterait tout risque de discrimination envers cette organisation et qu’elle soit reconnue à toutes fins légales en fonction de sa représentativité.
- 1048. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle le ministère du Travail a gelé 30 demandes d’enregistrement de syndicats ces dix derniers mois, le comité prend note que le gouvernement déclare que l’administration actuelle a concédé neuf personnalités juridiques à des organisations syndicales (soit un nombre qui dépasse de loin celui des administrations précédentes), et rappelle qu’en cas de silence administratif l’enregistrement de l’organisation syndicale doit être effectué car le syndicat est considéré comme enregistré. Le comité prend note également que le gouvernement déclare que les personnalités juridiques ne peuvent être accordées si les conditions requises par la loi ne sont pas respectées (présentation de la liste des membres, présentation des cartes d’identité, manquements dans l’acte de constitution ou dans les clauses des statuts). Le comité demande au gouvernement d’indiquer quels sont les syndicats dont l’enregistrement n’a pas été accordé bien qu’ils aient présenté une demande d’enregistrement, et de communiquer les décisions administratives motivées qui ont conduit à la non-inscription des organisations syndicales.
- 1049. En ce qui concerne le licenciement de M. Víctor C. Castillo Díaz selon les allégations, secrétaire général de l’Association des employés du ministère du Travail et du Bien-être social (ASEMITRABS), en violation des normes de la loi no 43 en matière de protection des dirigeants syndicaux (privilège syndical), le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) cette association est totalement inconnue de la majorité des fonctionnaires du ministère du Travail, et dans ledit ministère il n’y a aucune association d’employés; et 2) M. Víctor C. Castillo Díaz a déposé une plainte devant la troisième chambre du contentieux administratif de la Cour suprême qui se prononcera sur la validité de sa plainte. Le comité demande au gouvernement de communiquer le résultat du recours introduit contre le licenciement de Víctor C. Castillo Díaz et, étant donné que le gouvernement remet en question sa qualité de secrétaire général ainsi que l’existence de son association de fonctionnaires (en dépit du fait que les organisations plaignantes ont fait parvenir un acte notarié attestant sa constitution et accréditant son comité de direction), le comité demande au gouvernement d’indiquer si ladite association a fait des démarches en vue d’obtenir son enregistrement et sa personnalité juridique et, le cas échéant, de fournir les raisons pour lesquelles celles-ci n’ont pas abouti.
- 1050. En ce qui concerne l’allégation relative à une campagne de dénigrement orchestrée contre les dirigeants syndicaux vis-à-vis de l’opinion publique, tout particulièrement en menaçant de poursuivre devant le ministère public plusieurs dirigeants syndicaux au motif d’incohérences présumées dans l’utilisation des 5 pour cent provenant des fonds d’assurance formation, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) il s’agit d’appréciations personnelles erronées; et 2) les services du contrôleur général de la République ont produit un rapport le 11 mai 2010, dans lequel figure une étude sur l’usage des fonds publics tels que les fonds d’assurance formation par les syndicats, étude dans laquelle sont signalées de graves irrégularités administratives et des détournements de fonds par certains syndicats, d’où il semble évident pour le gouvernement de déposer plainte devant le ministère public et que celui-ci, après avoir appliqué la loi, rencontre les responsables s’ils existent. Le comité demande au gouvernement de fournir copie de toute décision ou recours contre des dirigeants syndicaux par le ministère public pour détournement de fonds publics.
- 1051. Enfin, le comité note que le gouvernement examine la possibilité d’établir un Conseil supérieur du travail comme organe consultatif afin de promouvoir le dialogue social en matière de travail avec le soutien technique du BIT, et qu’il a également demandé formellement l’assistance technique du BIT pour conformer la législation et la pratique nationales aux conventions nos 87 et 98 (le gouvernement fait état de cette demande dans la partie relative aux allégations qui affectent la FENASEP). Le comité exprime le ferme espoir que cette assistance pourra se concrétiser très rapidement.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 1052. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce qui concerne les allégations relatives à la loi no 29 du 8 juin 2010, loi qui crée un régime spécial pour la zone de Barú et qui inclut une disposition permettant que, pendant les six premières années d’exercice, les entreprises ne négocient pas de conventions collectives du travail (article 7 de la loi), le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l’article 7 en question soit abrogé sans délai. D’autre part, observant que le gouvernement n’a pas répondu à l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle la centrale des travailleurs CONATO et la centrale des employeurs CONEP ne sont pas représentées dans la Commission de gestion pour la zone économique spéciale de Barú, le comité, rappelant l’importance qu’il accorde à la consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives dans les affaires sociales, demande au gouvernement de considérer avec ces organisations la possibilité qu’elles soient représentées dans ledit organe afin qu’elles puissent être consultées sur les sujets qui touchent leurs membres, et de le tenir informé à cet égard.
- b) En ce qui concerne les allégations relatives au manuel de procédures des partenaires sociaux (décision ministérielle du 15 décembre 2009) qui selon les organisations plaignantes porte atteinte à l’exercice des droits syndicaux, le comité observe que, selon ce qui ressort du texte du manuel en question, il ne semble pas qu’il ait fait l’objet de consultations avec les organisations les plus représentatives, mais déclare qu’il s’agit de procédures servant à accélérer les démarches administratives qui sont souples et qui permettent d’examiner les recommandations qui découleraient de son application. Le comité estime que certains termes du manuel tels que l’«approbation» des comités de direction peuvent poser des problèmes d’interprétation, et demande au gouvernement d’examiner ledit manuel avec les organisations de travailleurs les plus représentatives afin de dissiper les malentendus et obtenir un texte le plus consensuel possible.
- c) En ce qui concerne l’élévation du nombre minimum de fonctionnaires nécessaire pour constituer une association syndicale dans le secteur public (50 fonctionnaires) en vertu de la loi no 43, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la loi no 43 de manière à ce que le nombre minimum de fonctionnaires requis pour constituer une association syndicale soit réduit, étant donné qu’un nombre minimum excessif peut entraver les droits syndicaux, en particulier dans certaines institutions publiques et dans les petites municipalités. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle les fonctionnaires licenciés puis réintégrés dans leurs fonctions suite à un jugement n’ont pas le droit, en vertu de la loi no 43 de 2009, de percevoir les salaires échus depuis leur licenciement jusqu’à leur réintégration à leur poste de travail, le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle cette affirmation n’est pas fondée et, pour illustrer cela, il se réfère à deux jugements de la Cour suprême dans lesquels l’Etat a eu l’obligation de rembourser les salaires et autres indemnités. Le comité observe que le gouvernement n’a envoyé qu’un des deux jugements, daté du 17 février 2006 (alors que la loi no 43 n’a été promulguée qu’en 2009), le comité serait donc reconnaissant au gouvernement de transmettre d’autres jugements à l’appui de sa déclaration.
- d) En ce qui concerne les allégations relatives à l’organisation FENASEP (non-reconnaissance de celle-ci dans la pratique par les autorités, bien que ses représentants aient participé en tant que délégués à la Conférence internationale du Travail à plusieurs reprises, exclusion de représentants de cette organisation de la Commission technique et de la Commission d’appel et de conciliation en vertu de la loi no 43 du 30 juillet 2009, suppression des fonds d’assurance formation pour la formation syndicale dont elle jouissait auparavant (bien que tous les fonctionnaires versent 1,25 pour cent de leur salaire pour le fonds d’assurance formation, ce qui discrimine ainsi les associations syndicales de fonctionnaires par rapport au secteur privé)), le comité demande au gouvernement d’engager un dialogue constructif avec la FENASEP en vue de trouver une solution qui écarterait tout risque de discrimination contre cette organisation et qu’elle soit reconnue à toutes fins légales en fonction de sa représentativité.
- e) En ce qui concerne l’allégation selon laquelle le ministère du Travail a gelé 30 demandes d’enregistrement de syndicats ces dix derniers mois, le comité demande au gouvernement d’indiquer quels sont les syndicats dont l’enregistrement n’a pas été accordé bien qu’ils aient présenté une demande d’enregistrement, et de communiquer les décisions administratives motivées qui ont conduit à la non-inscription des organisations syndicales.
- f) En ce qui concerne le licenciement de M. Víctor C. Castillo Díaz, secrétaire général présumé de l’Association des employés du ministère du Travail et du Bien-être social (ASEMITRABS), en violation des normes de la loi no 43 en matière de protection des dirigeants syndicaux (privilège syndical), le comité demande au gouvernement de communiquer le résultat du recours introduit contre le licenciement de M. Víctor C. Castillo Díaz et, étant donné que le gouvernement questionne son caractère de secrétaire général et l’existence de son association de fonctionnaires (en dépit du fait que les organisations plaignantes ont fait parvenir un acte notarié attestant sa constitution et accréditant son comité de direction), le comité demande au gouvernement d’indiquer si ladite association a fait des démarches visant à obtenir son enregistrement et sa personnalité juridique et, le cas échéant, d’indiquer les raisons pour lesquelles celles-ci n’ont pas abouti.
- g) Le comité demande au gouvernement de fournir copie de toute décision ou recours contre des dirigeants syndicaux par le ministère public pour détournement de fonds publics des fonds d’assurance formation pour la formation syndicale.
- h) Enfin, le comité note que le gouvernement examine la possibilité d’établir un Conseil supérieur du travail comme organe consultatif afin de promouvoir le dialogue social en matière de travail avec le soutien technique du BIT, et qu’il a également demandé formellement l’assistance technique du BIT pour harmoniser la législation et la pratique nationales autour des conventions nos 87 et 98 (le gouvernement signale cette demande dans la partie relative aux allégations qui affectent la FENASEP). Le comité exprime le ferme espoir que cette assistance pourra se concrétiser très rapidement.