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- 727. La plainte présentée contre le gouvernement du Mexique figure dans une communication de la Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie (FIOM) datée du 5 février 2009. Le gouvernement a formulé ses observations dans une communication en date du 1er mars 2010, où il conteste la recevabilité de la plainte et fournit des observations quant au fond de la plainte.
- 728. Dans sa réunion de mars 2010, le comité a décidé de transmettre la réponse du gouvernement à l’organisation plaignante pour qu’elle présente ses commentaires sur les arguments avancés par le gouvernement contre la recevabilité de la plainte.
- 729. Dans une communication du 26 avril 2010, l’organisation plaignante a envoyé les commentaires sollicités. Dans une communication du 12 avril 2011, la Confédération syndicale internationale (CSI) a soutenu la plainte de l’organisation plaignante. Celle-ci a également reçu le soutien des organisations mexicaines suivantes: le Syndicat indépendant des travailleurs de l’Université autonome métropolitaine (SITUAM), le Syndicat des travailleurs de l’industrie du métal, de l’acier et du fer, connexes et analogues (STIMAHCS) et le Syndicat national des travailleurs des mines, de la métallurgie et des branches connexes de la République du Mexique (SNTMMRSM).
- 730. Dans sa réunion de juin 2010, le comité a jugé la plainte recevable et a demandé aux organisations plaignantes – pour pouvoir examiner le cas avec tous les éléments en main – de fournir des informations concrètes et détaillées et, dans le cas des allégations relatives aux aspects législatifs, qu’elles signalent les dispositions légales qui violent la liberté syndicale et pour quels motifs. La FIOM a ensuite envoyé des communications les 19 mai et 7 septembre 2010.
- 731. Le Mexique a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais n’a pas ratifié la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 732. Dans une communication en date du 5 février 2009, la Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie (FIOM) allègue que, au Mexique, bien que la loi fédérale sur le travail établisse des critères d’enregistrement apparemment simples à observer (copie du procès-verbal de l’assemblée constitutive, liste des travailleurs et des patrons, copie des statuts et du procès-verbal de l’assemblée qui élit le comité exécutif) et que les causes de refus soient bien déterminées (ne pas respecter l’objectif prévu par la loi, se constituer avec moins de 20 membres ou ne pas présenter les documents requis), il est habituel que l’interprétation de la loi soit faussée pour éviter que des syndicats qui agissent en marge du «modèle de subordination» soient enregistrés. Parmi les obstacles identifiables figurent:
- a) le fait de devoir prouver l’existence d’une relation de travail (les autorités utilisent différentes interprétations sur les moyens adéquats pour ce faire, ce qui entraîne une grande marge de manœuvre, certaines autorités demandent que le registre des membres soit signé par l’employé);
- b) le fait de devoir justifier la compétence fédérale ou locale de l’employé par des documents légalisés difficiles à obtenir pour les travailleurs;
- c) des observations portées sur la documentation présentée parce que l’autorité considère qu’elle est contradictoire ou qu’elle manque de clarté, ce qui oblige les travailleurs à tenir de nouvelles assemblées et, par conséquent, laisse du temps à l’employeur ou au dirigeant syndical affecté, face à une éventuelle contestation de la qualité de titulaire ou la signature d’un contrat collectif de travail, pour faire pression sur des travailleurs ou les licencier afin qu’ils renoncent à leur intention; les observations peuvent porter sur les statuts, le registre des membres, le procès-verbal de l’assemblée ou les divers documents joints;
- d) le fait de certifier de manière expresse la volonté des travailleurs d’appartenir au syndicat requérant l’enregistrement par des inspections, des documents ou même la présence physique des travailleurs: il suffit d’imaginer la pression exercée sur les travailleurs si des inspecteurs du travail viennent les interroger face au patron ou face aux dirigeants syndicaux contre lesquels la qualité de titulaire sur un contrat collectif de protection patronale (CCPP) serait revendiquée;
- e) le fait d’exiger des requérants qu’ils prouvent la nature de leur activité, en alléguant que les fonctions de certains d’entre eux sont des fonctions de confiance et que, par conséquent, il leur est interdit de faire partie du syndicat.
- 733. Ces conditions requises freinent l’intérêt des travailleurs et suscitent une grande appréhension, surtout parce que les autorités font durer les formalités, obligeant les requérants à entamer d’interminables procédures devant les tribunaux supérieurs au niveau fédéral. Dans la pratique, très peu de travailleurs peuvent supporter ce long chemin tortueux.
- 734. La «prise de note» est l’autorisation nécessaire aux syndicats pour bénéficier d’une vie légale, les formalités à remplir pour l’obtenir relèvent de l’arbitraire et dépendent des caractéristiques de l’organisation, de son niveau d’influence (fédéral ou d’Etat), de l’autorité du travail chargée de son enregistrement, de l’employeur, de la centrale syndicale hégémonique ou titulaire du CCPP du centre de travail auquel appartiennent les travailleurs requérants, etc.
- 735. En ce qui concerne la négociation collective, l’organisation plaignante allègue que, au Mexique, les dénommés «contrats collectifs de protection» (CCPP) s’imposent (à 90 pour cent selon un dirigeant syndical connu); ils s’appuient sur des usages plutôt que sur des normes légales, en d’autres termes sur une façon particulière d’interpréter la législation du travail. Il s’agit de contrats collectifs, dans leur grande majorité signés à l’insu des travailleurs entre un syndicat et un employeur, et ils se limitent généralement à reproduire des clauses minimales établies dans la loi fédérale sur le travail (LFT) sans aucun avantage supplémentaire. Ceci est rendu possible par le fait que la législation mexicaine impose au patron d’utiliser des travailleurs membres d’un syndicat pour signer un contrat collectif lorsque le syndicat le demande, mais sans qu’il soit nécessaire d’indiquer qui sont les travailleurs représentés ni d’obtenir leur consentement. Une fois le contrat collectif signé, il est déposé devant le bureau de conciliation et d’arbitrage (JCA) et pour cette formalité il n’est besoin que de la signature du secrétaire général du syndicat et la représentation formelle du patron, c’est-à-dire qu’il suffit de prouver sa personnalité juridique. L’organisation plaignante souligne qu’une fois franchie cette étape aucun autre contrat ne pourra être signé avec un autre syndicat.
- 736. La législation mexicaine impose au patron d’utiliser des travailleurs membres d’un syndicat pour signer avec lui lorsqu’un «contrat collectif de travail» (CCT) l’exige. Selon la LFT, article 387, si le patron refuse de signer, les travailleurs peuvent exercer le droit de grève. Il existe trois moyens pour obtenir la signature d’un CCT et la qualité de titulaire:
- a) Obligatoire. Par une déclaration de grève ayant pour objet la signature d’un CCT, il faut souligner que la revendication n’est pas prise en considération s’il existe déjà une autre demande déposée auparavant et que certaines conditions imposées excluent l’utilisation de ce moyen.
- b) Volontaire. Signature par accord, sans déclaration de grève. La seule condition requise pour cela est de remplir la formalité de signer le contrat avec la signature des représentants des parties sans que cela doive être avalisé par les travailleurs à qui il est destiné ou que leur consentement soit nécessaire pour ce faire.
- c) Théoriquement, il existe une troisième possibilité, par une procédure ordinaire; cependant, dans la pratique, elle n’est pas employée vu que, à cause de sa lenteur, elle n’est pas considérée comme une option viable.
- 737. Les CCPP concordent avec la voie volontaire, puisque le patron opte pour le syndicat de son choix et que les autorités n’exigent pas d’autre condition que celle de prouver la personnalité juridique des deux parties. Lorsqu’il s’agit de la voie consistant en une déclaration de grève, outre que celle-ci est automatiquement archivée s’il existe déjà un contrat collectif déposé, les bureaux de conciliation et d’arbitrage (JCA) imposent un ensemble de conditions difficiles à observer, en marge de la loi, comme par exemple donner le nom des travailleurs, leurs signatures, présenter des documents justifiant la relation de travail, des fiches d’affiliation au syndicat requérant et, dans certains JCA, qu’ils aient été inscrits dans le registre du syndicat, accompagnés de l’attestation octroyée par cette instance. A première vue, ces conditions peuvent paraître logiques pour garantir la légitimité de la revendication; cependant, dans la pratique, lorsque ces renseignements sont donnés, un mécanisme de pression est immédiatement déclenché contre les travailleurs qui essaient d’obtenir la signature par cette voie, action mise en œuvre par le patron et par le syndicat qui a signé un contrat collectif avant la déclaration de grève ou qui est appelé a posteriori pour éviter qu’un autre contrat soit signé et déposé. La condition requise de présenter l’attestation des inscriptions au registre du syndicat est particulièrement grave parce que c’est précisément le JCA (qui est un organe tripartite) qui la contrôle; comme il est composé de représentants du patron et du syndicat hégémonique dans la région, ils s’opposent à sa production ou retardent la procédure le temps nécessaire pour démanteler la tentative d’organisation. C’est là que le rôle de juge et partie des JCA devient évident et c’est la raison pour laquelle, dans la pratique, ils constituent un obstacle à ce que les travailleurs qui ne font pas partie des syndicats hégémoniques obtiennent la signature d’un CCT par la voie de la déclaration de grève. Le temps nécessaire aux démarches peut être utilisé pour signer ou déposer un autre contrat collectif, au cas où il n’y en aurait pas déjà un, avec un syndicat défendant les intérêts du patron.
- 738. La LFT prévoit le principe d’exclusivité dans les articles 387, 388 et 389; ce dernier énonce clairement que la perte de la majorité a pour conséquence le (celle du) statut de titulaire du CCT. La procédure pour obtenir la qualité de titulaire est soumise aux articles 892 à 899 de la LFT et devrait, théoriquement, se conclure par un scrutin comportant ses propres difficultés. Si un syndicat aspire au statut de titulaire d’un CCT et qu’il y en a déjà un qui est déposé, la seule voie possible pour que les travailleurs aient un syndicat qui réponde à la volonté de la majorité est d’engager cette procédure. Dans une bonne partie des Etats de la République, il n’est même pas donné cours à ces démarches, sous prétexte que ce serait un motif de rupture de la paix sociale. Pour donner un semblant de légalité à cette pratique, sous la direction des autorités du travail elles-mêmes, des conventions ont été signées avec les centrales syndicales hégémoniques dans le but de ne pas se réclamer entre elles le statut de titulaire des CCT; cette pratique en est arrivée à un tel point qu’elles sont publiées par le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale comme étant des succès de la «nouvelle culture sociale». Les dénommés «accords de respect et de collaboration» sont signés par les secrétaires généraux de différents syndicats et le secrétaire au Travail et à la Prévoyance sociale en tant que témoins d’honneur; l’une de ses clauses stipule: «ils s’obligent à respecter leurs contrats collectifs respectifs», ce qui implique qu’ils font abstraction de la volonté des travailleurs et se conforment au rôle qui leur a été dévolu par les patrons lorsqu’ils les ont choisis comme titulaires des CCPP.
- 739. Les demandes en vue d’obtenir la qualité de titulaire sont exposées aux mêmes obstacles que ceux qui s’opposent aux déclarations de grève en vue de la signature de CCT; il est demandé aux requérants de présenter des noms, des signatures, des procès-verbaux d’assemblée dans laquelle apparaît la volonté des travailleurs de formuler la revendication et des attestations justifiant la relation de travail. Dans certains JCA, l’inscription des membres sur les listes du syndicat requérant la qualité de titulaire est également demandée, inscription qui doit être attestée par le bureau du travail lui-même; il est évident que cette exigence freine les démarches des travailleurs visant à changer de syndicat, pour les raisons déjà évoquées. En faisant connaître leurs noms et en donnant leurs signatures, ils font souvent l’objet de répression de la part du patron qui considère comme un affront que ses travailleurs cherchent à appartenir à un autre syndicat que celui qu’il avait choisi pour eux.
- 740. L’organisation syndicale imposée à l’origine par le patron peut intenter des actions de répression contre les travailleurs dissidents; l’une d’entre elles est la clause d’exclusion. Conformément à l’article 395 de la LFT, il est possible d’établir dans le CCT que le patron licencie les travailleurs expulsés par le syndicat titulaire, c’est ce qu’on appelle la clause d’exclusion par séparation; la clause d’exclusion par admission est aussi permise dans le cadre des dispositions de l’article mentionné (il n’admet comme travailleurs que ceux qui sont membres du syndicat titulaire). Cette clause a été déclarée inconstitutionnelle par la Cour suprême dans différents jugements, même lorsqu’il n’y a pas de jurisprudence et qu’elle est conservée dans le texte de la loi. C’est un des moyens de pression supplémentaires qui joue contre les travailleurs qui cherchent à changer de syndicat.
- 741. La réunion de la Commission centrale de la nouvelle culture sociale (ainsi nommée) formée en 1995 par le gouvernement fédéral, les principaux dirigeants des syndicats et des entreprises, lors d’une réunion qui s’est tenue le 3 décembre 1997, a formulé une série de conclusions par lesquelles la gravité de la question des statuts de titulaire a été reconnue, bien que partiellement; de toute manière, il est important de connaître le texte pour se rendre compte de la vision qu’ont les organismes corporatifs usufruitiers sur le modèle des contrats de protection:
- Actuellement, un grand nombre de demandes de statut de titulaire est enregistré. Nombre d’entre elles ne jouissent pas du soutien des travailleurs et ne respectent pas les conditions de procédure exigées par la loi. Plus de 80 pour cent de ces demandes de statut de titulaire se concluent par un désistement, ce qui indique que, dans la plupart des cas, elles obéissent à des intérêts particuliers préjudiciables à la stabilité des contrats collectifs, à la tranquillité sociale et à l’équilibre harmonieux des facteurs de production. Comme preuve, lors de procédures en vue d’obtenir la qualité de titulaire, des faits de violence se sont produits contre des personnes, en particulier dans les audiences et les scrutins; bien que sporadiques, ils constituent une atteinte aux droits fondamentaux des justiciables, de leurs avocats et des juges. Ces phénomènes se manifestent tant dans le domaine fédéral que dans le domaine local.
- 742. La dénommée commission centrale propose des recommandations pour que «soient appliqués des critères plus stricts, conformément à la loi, en ce qui concerne les conditions requises pour la procédure de recevabilité des demandes respectives». Comme on peut le voir, dans ce modèle de limitation absolue des droits collectifs en vigueur au Mexique, la tendance est de perpétuer et même d’étendre les mécanismes de contrôle, vu que, plus il y a de conditions requises pour que les travailleurs puissent changer de syndicat, plus la décision du patron de maintenir le syndicat de son choix avec lequel il a signé le premier CCT est renforcée. Il faut préciser que, dans la loi, aucune condition de procédure n’est requise et que toutes celles qui sont ajoutées sont contraires à la norme, même quand, par ces dénommés dialogues de la nouvelle culture, les autorités et les dirigeants des secteurs se sont mis d’accord pour resserrer la pression du contrôle. A partir de cette pratique, la mise en œuvre des CCPP en question a augmenté, question qui apparaît clairement dans les maigres espaces de transparence de l’information.
- 743. Un pourcentage très réduit des demandes visant à obtenir la qualité de titulaire se concluent par un scrutin; les groupes qui y parviennent participent au scrutin pratiquement démembrés par la pression; nombre d’entre eux sont obligés de renoncer à cause de la nécessité économique, d’autres sont licenciés; à cela s’ajoutent les difficultés inhérentes aux scrutins eux-mêmes, qui sont souvent accompagnés d’une grande violence, comme le reconnaissent les autorités du travail elles-mêmes. Le rapport du président du JFCA de service en 2000 fait référence aux procédures concernant l’obtention du statut de titulaires:
- Cette pratique, et ses objectifs probables, a été mise en œuvre par le fait que dans leur grande majorité, les procédures engagées pour ce motif se terminaient par un désistement pur et simple du syndicat requérant, avant même le scrutin, ou par l’abandon total de la procédure et le désistement au moment du scrutin et enfin, le fait que les procédures qui arrivaient à leur terme par un jugement arbitral étaient dans leur majorité absolutoires.
- 744. On n’en finirait pas de recenser les raisons de cette atmosphère de violence autour des scrutins, par exemple les groupes de pression qui empêchent l’accès des travailleurs au lieu du scrutin, en général, l’entreprise elle-même, dans l’intention évidente d’obtenir la majorité, c’est-à-dire 51 pour cent du total des membres du syndicat pour pouvoir changer d’organisation syndicale, selon les décisions en jurisprudence de la Cour suprême; par conséquent, tout travailleur qui n’est pas présent joue arithmétiquement en faveur du syndicat titulaire qui est généralement celui choisi par le patron, pression au sein de l’usine, menaces de licenciement, agressions physiques dans les files pour aller voter organisées par l’entreprise elle-même et le syndicat titulaire du CCT; dans ces conditions, il est presque impossible de renverser le syndicat imposé par le patron. La violence dans les scrutins a été rapportée par les organisations de la société civile et les syndicats démocratiques.
- 745. Selon l’article 401 de la LFT, le CCT prend fin pour trois raisons: par consentement mutuel, par achèvement du chantier ou par fermeture de l’entreprise. Isolément, cette disposition semble logique; cependant, dans le modèle de contrat collectif de protection, en ce qui concerne le motif à caractère volontaire, dans la pratique, ledit article est utilisé pour dégrader les conditions de travail en décidant de mettre fin à un CCT et immédiatement signer un autre contrat, avec le même syndicat ou un différent selon ce qui convient à l’entreprise, avec des salaires plus bas et des prestations moindres, et de plus en plus souvent avec des sous-traitants.
- 746. Dans les cas de fin de CCT, les autorités n’imposent généralement pas de nouvelles conditions requises, elles n’exigent pas de prouver la volonté des travailleurs ni aucun document supplémentaire; elles obéissent, bien évidemment, à un critère différent et non plus à la rigidité avec laquelle elles font obstacle à une déclaration de grève pour signature de CCT; et c’est ainsi parce qu’un système de complicité totale est mis en place, système dans lequel la force du secteur patronal s’est imposée, tout particulièrement par l’intermédiaire de ses avocats qui soutiennent que cette liberté d’embauche ne peut être limitée qu’en cas d’arrêt volontaire.
- 747. En ce qui concerne le droit de grève, l’organisation plaignante indique que la grève est définie par l’article 440 de la LFT comme suspension temporaire du travail décidée par une coalition de travailleurs, ses motifs sont régulés par l’article 450. Il est important, lorsqu’on fait l’interprétation de la situation sociale au Mexique, de comparer constamment le texte de loi à la pratique, vu qu’il existe une différence énorme entre l’une et l’autre. Par exemple, dans le cas des travailleurs au service de l’Etat, la Constitution leur reconnaît le droit de grève dans la section X de l’alinéa B de l’article 123 et leur règlement fixe les termes de ce droit mais, dans toute l’histoire de ce régime de travail bureaucratique, aucune grève n’a eu lieu légalement, ce qui fait que ce sont des institutions pratiquement mortes. Ceci ne veut pas dire qu’il n’y ait pas de mouvements de grève dans ce secteur; on pourrait même dire que c’est le secteur le plus mobilisé; le problème est que leurs mouvements de grève sont en marge de la loi car les normes sont si restrictives que personne ne s’y conforme. La commission d’experts de l’OIT a connaissance des limitations concernant l’exercice des droits collectifs de ce secteur et ses recommandations formulées dans le passé ont été essentielles.
- 748. Comme indiqué précédemment, dans la pratique, il existe deux voies fondamentales pour accéder à la signature d’un CCT, celle d’une déclaration de grève et celle prétendument volontaire. Ainsi, il existe deux mécanismes pour mettre en place le modèle de CCPP, d’une part, le principe établi dans l’article 923 de la LFT de ne pas donner suite à la demande écrite de déclaration de grève pour obtenir la signature d’un CCT s’il y en a déjà un de déposé, de l’autre, de créer des obstacles à la déclaration de grève déposée par un syndicat qui ne serait pas «acceptable pour le patron».
- 749. En dépit de la ratification de la convention no 87 qui l’oblige à la respecter, le Mexique a toujours mis un frein à l’application des observations de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations du Comité de la liberté syndicale qui demandait des réformes de la législation.
- 750. Le droit syndical est fondamentalement violé avec le modèle de contrats de protection vu qu’il empêche la pluralité syndicale, en mettant un frein à l’enregistrement de nouvelles organisations puisqu’il l’assujettit à une autorisation préalable ainsi qu’au pouvoir discrétionnaire de l’Etat pour qu’il puisse s’exercer pleinement, sans parler des conditions requises presque impossibles à observer, dans une pratique d’interventionnisme flagrant de la part de l’Etat. Ledit enregistrement syndical conditionne la personnalité juridique des organisations syndicales à la «prise de note». L’organisation plaignante allègue l’existence de pratiques telles les licenciements de travailleurs lorsqu’il est soupçonné qu’ils s’organisent en marge du syndicat qui leur a été imposé, des menaces pour qu’ils renoncent au syndicat qui les représenterait, des agressions physiques lors des scrutins et toute la violence qui entoure les procédures d’enregistrement syndical, la signature, la qualité de titulaire, la fin du CCT et la grève, ce qui enfreint les principes de la convention no 87 de l’OIT.
- 751. C’est l’Etat qui justifie le système de contrats de protection sous le prétexte de maintenir la «paix sociale», en renforçant les centrales syndicales qui agissent en conséquence dans les organes tripartites, le pouvoir politique exprimant ouvertement son favoritisme envers elles et appliquant la loi de manière discrétionnaire.
- 752. Parmi les éléments qui rendent inefficace le droit syndical, protégé par la convention no 87, figure l’absence d’une autorité impartiale qui résolve de manière rapide, efficace et peu onéreuse les conflits de travail qui lui sont exposés. L’un des piliers du modèle des contrats de protection, ce sont les bureaux de conciliation et d’arbitrage (JCA) à caractère tripartite, étant donné qu’ils sont composés par les parties intéressées dans les procédures qui sont soumises à leur étude, cette condition de juge et partie nuit à l’essence de tout système de justice impartiale. Cette pratique est évidente dans les formalités d’enregistrement syndical, la signature, l’obtention de la qualité de titulaire et la fin des CCT. Outre la partialité, la durée excessive et délibérée des procédures ainsi que l’exigence de conditions requises extralégales rendent effectif le principe que «la lenteur de la justice constitue un déni de justice», vu qu’elle démobilise et décourage les requérants et affecte également ainsi le droit syndical contenu dans la convention no 87. De même, il est porté atteinte au droit des travailleurs de s’affilier à l’organisation de leur choix dans le sens où ils sont obligés de s’affilier aux syndicats et aux centrales syndicales hégémoniques et leur appliquer les clauses d’exclusion s’ils quittent le syndicat choisi par le patron, ce qui entraîne aussi des actes de discrimination syndicale.
- 753. La législation du travail inclut des normes de protection pour les travailleurs qui sont impraticables à cause du réseau de complicité établi entre la justice du travail, le patron et les syndicats, composantes clés du modèle des «contrats de protection patronale». L’organisation syndicale qui entre dans la composition dudit réseau est choisie par l’employeur dans un menu d’options, selon la taille du centre de travail, la branche de production et la région dans laquelle le centre de travail va s’installer; les conseillers juridiques (depuis le grand bureau transnational jusqu’au plus petit avocat qui installe des gens en face des bureaux de conciliation et d’arbitrage pour offrir ses services) contribuent au choix. La décision est préparée avec des représentants du pouvoir public comme le gouverneur de l’Etat dans lequel le centre de travail va s’installer, ou le personnel du bureau de conciliation et d’arbitrage lui-même. L’offre des syndicats de protection inclut les possibilités économiques du futur patron et l’historique de contrôle des travailleurs.
- 754. Il existe une grande documentation faisant état de la manière dont la lenteur de la justice du travail et la violence avec laquelle sont réprimées les tentatives d’organisation des travailleurs (visible dans les cas présentés contre le Mexique, dans lesquels les licenciements, les menaces, les plaintes au pénal et l’emprisonnement de dirigeants sont constants) jouent contre l’organisation syndicale. Il serait difficile d’imaginer un modèle de violation intégrale des droits humains du travail sans la complicité du système d’administration publique du travail et de la fonction administrative des JCA qui apparaît formellement comme le représentant des secteurs dans un système tripartite, sans tenir compte du fait que, les formes de représentation collectives étant viciées à l’origine, les JCA sont juge et partie et manquent en général de l’impartialité propre à tout juge.
- 755. D’autre part, l’organisation plaignante allègue l’intention de renforcer le système de contrats de protection et, par conséquent, les violations des droits contenus dans la convention no 87, perceptibles dans le projet de loi présenté le 12 décembre 2002 devant la Chambre des députés du Congrès de l’Union, projet connu sous le nom de «réforme Abascal», du nom du secrétaire au Travail et à la Prévoyance sociale de l’époque, Carlos Abascal Carranza. Ce projet comprend des modifications apportées à trois articles de la LFT: 387, 920 et 923 qui, ensemble, établissent comme condition requise préalable à la demande de signature d’un CCT par voie de grève d’identifier par leur nom les travailleurs qui autorisent cette déclaration de grève, justifier le rayon d’action du syndicat lié à l’activité de l’entreprise et présenter des certificats de demande d’enregistrement auprès de la zone d’enregistrement des associations (localement la JCA et au niveau fédéral la STPS); sans ces conditions, aucune demande de signature de CCT avec déclaration de grève ne peut être traitée, ce qui laisse comme seule possibilité ce qu’on appelle la signature volontaire, dans laquelle le patron opte pour le syndicat de son choix, et les futurs travailleurs auront l’obligation de s’y affilier s’ils souhaitent travailler dans ce centre de travail. Si cette option est bloquée pour les travailleurs, il ne leur restera plus que le changement de titulaire du CCT.
- 756. L’initiative bloque également cette possibilité et considère dans la réforme des articles 893-A et 893-C de la LFT des conditions requises semblables appelées «de procédure», articles dans lesquels l’attestation de l’autorité d’enregistrement est demandée; or, comme nous l’avons rappelé lors de la précédente plainte, dans le cas des JCA, elles sont tripartites, ce qui fait que la représentation du patron et du syndicat hégémonique constitue la majorité des votes; il est donc évident qu’ils ne donneront pas l’autorisation ou l’approbation pour qu’eux-mêmes soient accusés dans la procédure. Ici, le caractère de juge et partie de ces tribunaux est évident. Si ces conditions requises, qui deviennent des obstacles, sont approuvées, les travailleurs risqueront difficilement leur emploi et leur intégrité personnelle et familiale en accordant des signatures et des documents aux organisations qui, en leur nom, chercheraient à déclarer la grève ou à changer de titulaire. Comme élément absurde et complémentaire apparaît l’article 893-C qui indique que, tant que le statut de titulaire d’un CCT ne sera pas résolu, aucune autre demande pour le même motif ne sera admise, ce qui apporte un avantage supplémentaire au patron qui peut ainsi savoir au préalable quels sont les travailleurs qui cherchent à changer de syndicat, c’est-à-dire à faire partir le syndicat originellement installé par le patron. Grâce à ce nouvel article, il suffira que les patrons déposent une plainte contre eux-mêmes présentée par un syndicat illégitime pour empêcher indéfiniment l’action d’un syndicat authentique; et c’est ainsi parce que quiconque a un minimum d’expérience dans le monde du travail sait que toute action syndicale suppose un minimum d’organisation préalable; c’est pourquoi il suffit que le patron ou le syndicat titulaire ait un minimum d’information préalable, qui pourra être obtenue, évidemment, vu la nécessité de rassembler les signatures, les documents et de demander l’attestation des listes devant les représentants du patron et du syndicat hégémonique eux-mêmes; avec cette information, il restera assez de temps pour bloquer une éventuelle plainte du syndicat authentique sans qu’il n’y ait de limite dans le temps, vu que la fin de la procédure dépend du patron, du syndicat contrôlé par lui et par l’éventuel syndicat engagé pour l’acte de simulation.
- 757. La «réforme Abascal» est reproduite dans le projet élaboré récemment par le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, connu sous le nom de «réforme Lozano»; ce projet augmente le risque que le contrat de protection acquière une apparence de légalité; s’il était approuvé, il ne resterait plus aux travailleurs qu’à opter pour la voie de la clandestinité pour faire valoir leurs droits, vu que, par ces réformes, il deviendrait impossible d’obtenir un CCT authentique; la valve de sortie permettant un changement de syndicat par la voie du statut de titulaire contractuel serait verrouillée.
- 758. La réforme viole d’autres droits fondamentaux qui portent atteinte aux principes au centre de la présente plainte. A titre de référence, un nouvel article 388 est ajouté; dans son dernier paragraphe, la possibilité que les syndicats puissent obtenir le statut de titulaire d’un CCT pour leur propre syndicat est supprimée quand originellement il a été signé avec un syndicat d’industrie. Il s’agit d’un article clairement élaboré contre les syndicats démocratiques du secteur de l’éducation et de l’aéronautique qui occupent un espace privilégié dans le syndicalisme alternatif au Mexique. Le préjudice est évident vu que, si le patron opte pour le syndicat de son choix en signant le CCT originel, s’il le fait avec un syndicat ayant un enregistrement légal de ceux dénommés d’industrie, plus jamais un syndicat corporatiste ne pourra demander la représentation des travailleurs de sa corporation. L’inclusion de cet article dans la «réforme Lozano» a été faite à la demande de patrons du secteur aéronautique craignant que les syndicats démocratiques puissent réclamer le statut de titulaire dans les nouvelles entreprises du secteur qui ont signé un CCPP. Avec la réforme de la loi, le syndicat choisi par le patron serait renforcé pour toujours sans que les syndicats démocratiques historiquement organisés en corporation n’aient aucune possibilité d’inclure en leur sein les travailleurs régis par le CCPP (la FIOM envoie de nombreuses annexes).
- 759. Dans sa communication du 19 mai 2010, la FIOM déclare que la réponse du gouvernement mexicain s’articule autour de trois arguments centraux. Le premier d’entre eux nie catégoriquement l’existence des contrats de protection, au motif que cette figure juridique n’est pas contemplée par le système juridique mexicain et que la législation nationale reconnaît le droit syndical. Le second argument assure une nouvelle fois que les violations alléguées dans la plainte ne sont pas recevables, dans la mesure où la loi établit le contraire. En conclusion, ces deux premiers arguments reposent sur une logique selon laquelle on ne peut alléguer la violation des droits si la loi stipule l’inverse; d’après cette logique aucune plainte ne serait recevable.
- 760. Le troisième argument souligne le manque de précision concernant les cas concrets signalés dans la plainte, comme si la plainte se limitait à ces cas, alors qu’en réalité la particularité de la plainte est qu’elle vise le système des relations de travail dont le fonctionnement général empêche le respect de la convention no 87 sur la liberté syndicale. Il faut souligner que le gouvernement mexicain omet de réfuter les accusations précises formulées dans la plainte, préférant rester flou et obscur pour tenter d’éviter de créer une controverse qui permettrait au Comité de la liberté syndicale de se prononcer. Cette approche, qui consiste à rester extrêmement vague et à s’en référer constamment à la loi, est adoptée par le gouvernement tout au long de sa réponse, bien que par moments sa posture acquière un caractère radical lorsqu’il nie toute violation aux droits des travailleurs, comme s’il était facile de duper le Comité de la liberté syndicale, comme s’il s’agissait de la seule plainte dénonçant des situations de violation généralisée des droits collectifs et comme si les autorités publiques n’étaient pas réputées pour éviter l’adoption de recommandations aussi bien légales que pratiques.
- 761. Le premier argument porte sur l’enregistrement syndical, la signature de contrats collectifs de travail (CCT) et la qualité de titulaire desdits contrats. Le gouvernement se réfère aux procédures légales et au cadre juridique prévus dans chacun de ces cas. En invoquant la loi, le gouvernement prétend démontrer qu’il respecte la convention no 87 et, bien plus encore, il signale que l’existence de mécanismes légaux accessibles aux travailleurs se sentant lésés dans leurs droits suffit à prouver que le gouvernement mexicain ne viole pas la LFT et la convention no 87.
- 762. Tel que la plainte le signale, le fond du problème réside dans les mécanismes qui entravent l’exercice des droits et qui sont illustrés par les cas présentés dans la plainte.
- 763. En ce qui concerne l’enregistrement syndical, il a été démontré, à travers l’exemple de l’UNTYPP, la façon dont un syndicat, tout en observant l’ensemble des conditions requises par la loi, se voit imposer des formalités supplémentaires, déclenchant ainsi l’un des principaux mécanismes utilisés pour entraver l’exercice du droit syndical, à savoir le maniement du temps pour décourager et licencier les dirigeants et les membres du syndicat à travers le recours à toutes sortes de pressions et d’agressions. Les conditions requises en marge de la loi ont été poussées jusqu’à l’absurde lorsqu’il a été question pour les travailleurs de l’UNTYPP de prouver l’existence de leur employeur PEMEX, principale entreprise publique du pays. Portant clairement atteinte à l’autonomie du syndicat, le gouvernement a exigé des modifications dans ses statuts et sa typologie, le renvoi de certains de ses affiliés, tandis qu’il procédait au licenciement brutal de membres de son comité exécutif et refusait des adhésions en niant aux adhérents et à leurs familles l’accès aux services d’urgence en matière de santé. Neuf mois plus tard, l’enregistrement du syndicat a été refusé.
- 764. La «prise de note» telle qu’elle est mise en œuvre est un mécanisme qui porte atteinte à l’exercice du droit syndical des travailleurs mexicains et est largement documentée dans les recommandations formulées par la commission d’experts pour l’application des conventions et des recommandations (CEACR) et dans les cas soumis à l’examen du Comité de la liberté syndicale (CLS) lui-même, ce qui prouve qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé ou ponctuel, mais bien d’un modèle de comportement du gouvernement mexicain. Une telle affirmation s’appuie sur des études, présentées comme preuves dans la plainte de la FIOM, où le phénomène est analysé à travers la présentation d’études de cas, des mécanismes et des instances légales impliqués. Certaines de ces études ont d’ailleurs été menées par des consultants d’organisations internationales, telles que l’OIT et la CEPAL. Par ailleurs, de façon contradictoire, le gouvernement mexicain affirme que la constitution d’un syndicat est libre et qu’elle n’est pas assujettie à une autorisation préalable. Pourtant, un syndicat qui n’est pas inscrit au registre selon les termes prévus par la loi (autorisation préalable) ne bénéficie pas d’une existence juridique et ne peut, par conséquent, tant que de la «prise de note» n’a pas été octroyée, exercer ou jouir du droit syndical. Ainsi, il est clairement fait état de la violation des articles 2, 3 2), 5, 7, et 10 de la convention no 87.
- 765. Le deuxième thème abordé par le gouvernement dans sa réponse concerne la signature de contrats collectifs de travail (CCT). Le gouvernement soutient que les syndicats ont le droit de convoquer une grève pour exiger d’un patron la signature d’un CCT, de sorte que ces accords sont le résultat d’une conciliation entre le syndicat et l’employeur. En réalité, le patron, y compris avant même d’initier les activités de l’entreprise, signe avec le syndicat de la centrale syndicale la plus influente au niveau de la branche et de la région un CCT reproduisant les clauses minimales fixées par la loi, et qui vraisemblablement les maintiendra ad infinitum. Le syndicat en question se charge de contrôler les travailleurs et d’éviter qu’ils n’exigent des améliorations de leurs salaires ou de leurs prestations et, si l’un d’entre eux prétend agir en marge du modèle ou créer un autre syndicat, il se charge de le repérer immédiatement et qu’il puisse être licencié. De plus, il est impossible d’espérer demander la signature d’un contrat collectif sans bénéficier au préalable de l’enregistrement syndical. Les preuves rapportées dans la plainte témoignent clairement de la façon dont les gouvernements nationaux encouragent la signature de CCT avec des centrales syndicales avant l’ouverture même des entreprises (journal Milenio, 6 juillet 2007, «Caso la célula»), ce qui constitue manifestement une atteinte à l’article 3 de la convention no 87.
- 766. La reconnaissance de la qualité de titulaire d’un CCT est étroitement liée à sa signature. Lorsque les travailleurs n’ont pas la possibilité de choisir un syndicat qui les représente ni de modifier leurs conditions de travail, ou d’améliorer leurs salaires et prestations, ceux-ci s’organisent pour provoquer des changements dans ce sens; ce qui témoigne en soi des restrictions auxquelles les travailleurs mexicains sont confrontés dès qu’il s’agit de s’organiser librement, d’obtenir l’enregistrement de syndicats et de solliciter la signature de CCT. Un tel système empêche toute possibilité d’exercice du droit syndical et renvoie à un modèle de comportements qui doit être examiné dans son ensemble et non de façon isolée comme le prétend le gouvernement dans sa réponse, et dont l’existence reste clairement établie, comme cela a été mis en avant, par les cas présentés devant le CLS et les observations formulées par la CEACR.
- 767. Concernant la question du statut de titulaire d’un CCT, le gouvernement mexicain signale qu’il n’existe aucun différend à ce sujet. Les autorités du travail chargées de cette procédure sont impartiales. Le gouvernement exalte les bienfaits du tripartisme et cite pour illustrer son propos une thèse de jurisprudence sur la façon dont il convient d’organiser un scrutin. Tel que le souligne la plainte, les conseils de conciliation et d’arbitrage (JCA) ont fait l’objet d’observations de la part de la CEACR, du CLS, du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et du Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies. La simple référence faite aux articles de la LFT ne prouve pas l’impartialité des JCA, comme le prétend le gouvernement mexicain. Précisons que cette critique ne s’adresse pas à l’ensemble des institutions tripartites. Celles-ci constituent en matière de concertation un outil précieux, comme en témoigne l’existence même de l’OIT. Bien différent est le cas d’une instance soi-disant de justice où le pouvoir de décision appartient au pouvoir exécutif – que ce soit au niveau fédéral, à travers le secrétariat au Travail, ou au niveau local, à travers le gouverneur. Dans ces instances, au moment de prendre une décision, la tierce partie obtient automatiquement le soutien du représentant favorisé par sa décision, et il ne pourrait en être autrement lorsque le régime financier, la désignation et la destitution de cette tierce personne dépendent du pouvoir exécutif. Autrement dit, de telles instances ne jouissent pas de l’autonomie et de l’impartialité indispensables à tout juge.
- 768. En ce qui concerne le statut de titulaire d’un CCT, le scrutin n’est que l’une de ces étapes. Les travailleurs, en effet, doivent tout d’abord commencer par respecter les «conditions de procédure» exigées, puis obtenir la notification des parties, et enfin, une fois l’audience fixée, ils doivent patienter encore davantage en raison des syndicats convoqués par l’employeur pour solliciter la qualité de titulaire en vue de retarder la procédure, faire face aux cogneurs qui s’infiltrent dans les audiences, résister aux menaces et éviter les licenciements. Dans un tel contexte, le scrutin n’apparaît que comme l’une des étapes dans la procédure. Les cas détaillés dans la plainte décrivent un modèle de comportements qui porte atteinte à l’exercice du droit syndical, en interdisant toute possibilité pour les travailleurs d’appartenir et d’être représentés par le syndicat de leur choix, et constitue une violation aux articles 2, 3, 5, 7 et 8 de la convention no 87. Ces cas ne doivent pas être analysés de façon isolée mais, à la lumière des autres cas présentés devant le CLS et des recommandations formulées par la CEACR. Il faut en particulier tenir compte des preuves apportées en ce sens, notamment du document 4 relatif aux accords passés par les centrales syndicales, patronales et les représentants du gouvernement, portant sur la question du statut de titulaire, qui ne visent plus ici la représentation des intérêts des travailleurs, mais cherchent à éviter les confits et à assurer la paix sociale; ces accords ont été célébrés dans le cadre du secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale. Le gouvernement mexicain, représenté par le secrétariat d’Etat, et les organisations patronales définissent à leur niveau une politique syndicale éloignée des intérêts des travailleurs; de fait il s’agit des mêmes centrales syndicales et patronales qui ont répondu à la plainte de la FIOM.
- 769. Il faut souligner, comme cela a été indiqué dans la plainte, le lien étroit qui existe au Mexique entre la négociation collective et le droit syndical. En règle générale, les travailleurs font partie d’organisations syndicales non parce qu’ils ont choisi librement d’y adhérer, mais parce qu’ils sont entrés dans une entreprise où un syndicat opérait déjà. D’où l’importance des dispositions qui définissent les voies de la négociation collective. Comme cela a été signalé précédemment, il existe deux moyens pour obtenir la signature d’un CCT, soit l’employeur choisit son syndicat – voie la plus largement répandue, soit la signature du contrat est obtenue par une déclaration de grève. Etant donné que les travailleurs sont obligatoirement affiliés au syndicat désigné par le patron, la seule possibilité qui leur reste en vue d’être correctement représentés est de revendiquer la qualité de titulaire du CCT. Ce mécanisme est essentiel pour comprendre le fonctionnement du système. Son existence n’est d’ailleurs pas contestée par le gouvernement dans sa réponse, pour la simple et bonne raison qu’il s’agit d’un mécanisme avéré dont tout le monde sait l’existence. Il est même perçu comme un moindre mal, face à la perspective autrement redoutée par les employeurs d’une véritable reconnaissance du principe de liberté syndicale et des garanties visées par la convention no 87. A tel point que, dans les réponses formulées par le secteur patronal et reprises par le gouvernement, l’existence d’une telle procédure est curieusement en partie avouée, même si celui-ci tente de se justifier. De telles inquiétudes se traduisent par la volonté de donner un semblant de légalité à cette pratique, comme en témoigne la récente initiative parlementaire, élaborée par le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, et présentée le 23 mars 2010 auprès de la Chambre des députés par le groupe parlementaire du Parti d’action nationale (PAN), auquel appartient le pouvoir exécutif. Bien que cette initiative soit postérieure à la présentation de la demande, son contenu est très révélateur. Il témoigne de la façon dont le gouvernement prétend que les violations qui ont lieu dans la pratique, et qui ne sont à ce jour pas officiellement reconnues, acquièrent un statut légal. En ce qui concerne la question du statut de titulaire d’un CCT, il suffit de considérer l’article 899 A) et C). L’article 899 A) dans sa section IV fixe comme «condition de procédure», c’est-à-dire comme condition préalable requise pour lancer une procédure pour l’obtention de la qualité de titulaire, que le syndicat fournisse notamment «l’attestation de l’autorité d’enregistrement faisant état que les personnes [sus]-mentionnées sont bien inscrites au registre syndical, ainsi que la date de leur enregistrement». Pour prendre la mesure de la portée d’une telle disposition, il faut rappeler que les autorités chargées de l’enregistrement sont précisément le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale au niveau fédéral, et les conseils de conciliation et d’arbitrage (JCA) au niveau local qui, chacune dans son domaine de compétence, devra délivrer cette attestation ou autorisation. Or, si l’on tient compte du fait que les JCA sont majoritairement composés par des représentants patronaux et les représentants du syndicat hégémonique dans la région, qui est généralement le défendeur dans ce type de recours, il faudra obtenir le consentement de la partie à qui le procès peut porter préjudice. Cela arrive déjà en pratique et explique que les procédures concernant l’obtention du statut de titulaire soient entravées et lentes, ainsi que le fait que, tel que le reconnaissent les autorités elles-mêmes, 95 pour cent de ces procédures n’aboutissent pas. Une telle certification implique, en effet, la production de documents justifiant la relation de travail, la signature des travailleurs, etc., autant d’informations que le patron devra fournir si elles ne sont pas admises par l’«autorité d’enregistrement». Il s’agit, en définitive, du cercle vicieux, principal fondement de la plainte.
- 770. L’article 899 C) s’explique par lui-même, en particulier dans son premier paragraphe qui interdit de lancer une procédure pour l’obtention de la qualité de titulaire d’un CCT si une autre demande a déjà été déposée, et oblige dans ce cas à ce qu’il s’écoule un délai d’un an. En pratique, ceci aura pour conséquence que, lorsqu’un groupe quelconque de travailleurs s’organisera pour contester le syndicat imposé par l’employeur, il suffira que n’importe quel syndicat choisi par l’employeur dépose une demande de reconnaissance du statut de titulaire pour bloquer pendant longtemps toute possibilité de changement.
- 771. En ce qui concerne la signature d’un CCT avec déclaration de grève, l’article 920, section IV, point 3, impose le même type de conditions constituant une entrave à l’autre voie de négociation collective. En définitive, l’objectif poursuivi est de verrouiller les contrats collectifs de protection (CCPP), ceux-là mêmes dont l’existence est aujourd’hui niée avec un parfait cynisme, surtout lorsque l’on sait qu’ils constituent l’immense majorité des conventions collectives, comme s’il était possible de dissimuler un problème d’une telle ampleur.
- 772. La FIOM signale que le gouvernement nie l’existence des CCPP sous prétexte qu’ils ne sont pas contemplés dans la LFT, ce qui d’un point de vue strictement formel est vrai. Mais il est bien évident que la plainte dénonce un usage abusif qui survient dans un système où l’interprétation de la loi est faussée pour permettre aux entreprises de continuer à conclure et contrôler les contrats collectifs comme elles l’entendent. Il est bien évident que nous ne nous référons pas ici aux organismes publics ni aux vieux syndicats du secteur paraétatique, mais précisément aux établissements où il n’existe pas de véritable syndicat mais juste un simulacre de représentation visant à empêcher que les travailleurs s’organisent librement. Le gouvernement défend ce système, au point de vouloir le transposer dans la loi, convaincu qu’il s’agit du meilleur moyen pour attirer l’investissement et soi-disant créer des emplois. La complicité entre le secteur patronal et le gouvernement apparaît clairement dans la réponse du gouvernement vue dans son ensemble.
- 773. L’existence de ces accords est largement documentée, en témoignent les études fournies comme preuve, en particulier le document 4, alinéa a), pages 133 et 134, et alinéa c), page 213, et le représentant du gouvernement y fait expressément référence. Dans certains entretiens et documents officiels reproduits dans la page Web du secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, le Secrétaire d’Etat au Travail et à la Prévoyance sociale, Javier Lozano, se réfère clairement aux contrats de protection. Par exemple:
- – L’exposé des motifs du projet de réforme en matière de travail du 18 mars 2010, présentée devant la Chambre des députés le 23 mars 2010 par le Parti d’action nationale (PAN), fait précisément référence aux contrats de protection et, à la fin du paragraphe 35, il signale textuellement: «De même, afin d’éviter dans les relations collectives du travail la signature de contrats dits «de protection», il est proposé dans l’article 390 que les conditions exigées précédemment soient respectées en vue du dépôt auprès des conseils de conciliation et d’arbitrage (JCA) de contrats collectifs de travail.» Cette initiative est soutenue par le gouvernement à travers le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale (STPS) dans sa page Web.
- – Un entretien du 29 mars 2010 accordé au Secrétaire d’Etat au Travail est publié dans la page Web du ministère où il s’approprie le projet de loi présenté devant la Chambre des députés par le groupe parlementaire du Parti d’action nationale (mentionné au précédent alinéa).
- – La rubrique presse de la page Web du secrétariat au Travail reproduit une série de discours prononcés par le Secrétaire d’Etat au Travail à l’occasion de sa participation à divers événements officiels où celui-ci fait expressément référence aux contrats de protection, dont voici certains exemples:
- - 23 janvier 2008, discours prononcés par le ministre lors de la clôture de l’assemblée générale commémorative de la Journée d’émancipation des pilotes aviateurs au Mexique, célébrée par l’Association syndicale des pilotes aviateurs (ASPA): «Je partage largement la plupart des affirmations, commentaires, concepts que votre secrétaire général, Dennis Lazarus, vient juste de prononcer. C’est la raison pour laquelle il est si important, dans la mesure où nous sommes tous concernés par les questions de la sous-traitance, de l’externalisation, de la simulation, des syndicats «fantômes», des contrats de protection; si ces questions nous préoccupent autant, alors nous allons les affronter ensemble. C’est quelque chose que nous pouvons et devons faire tous les jours (…). Je félicite également l’ASPA pour avoir réellement su faire face à la concurrence dans son secteur, une concurrence féroce. Il a fallu faire face tout d’abord à la crise due à l’attentat du 11 septembre 2001, et à l’apparition ces dernières années des vols à bas coûts. Or, comme soulignait Dennis, la concurrence ne s’est pas nécessairement déroulée dans des conditions de travail des plus équitables, dans la mesure où, comme on peut le constater, ce secteur se caractérise par les contrats de protection, les syndicats blancs, et parfois la simulation. Dans un pays comme le nôtre, nous ne pouvons pas nous offrir le luxe, au nom de la réduction des coûts, de passer outre les droits des travailleurs et de recourir à de pseudo-instruments juridiques comme s’ils étaient réellement prévus par la loi (…).»
- - 25 mars 2010, version sténographiée de l’entretien réalisé par le journaliste de W Radio, Carlos Puig, au Secrétaire d’Etat au Travail, Javier Lozano Alarcón, qui répondait en ces termes à ses questions: «…Précisément en ce qui concerne les contrats de protection, je suis totalement opposé à l’existence aussi bien de syndicats blancs que de contrats de protection. L’antidote est la transparence. Les travailleurs doivent avoir connaissance des contrats collectifs qui doivent pouvoir être consultés sur Internet…»
- - 4 août 2009, mots prononcés par le Secrétaire d’Etat au Travail qui présidait l’assemblée générale du syndicat des pilotes aviateurs. «… De même, je rejette les pratiques par lesquelles certaines entreprises prétendent imposer des contrats dits de «protection», qui dans beaucoup de cas s’accompagnent d’importantes infractions à la loi fédérale du travail (…).»
- - 1er avril 2010, dans la version sténographique de la conférence de presse du Secrétaire d’Etat au Travail organisée dans les locaux d’Infonacot, celui-ci a tenu des propos concernant les contrats de protection: «(…) Un autre point très important: la publication sur Internet de tous les contrats collectifs de travail et registres syndicaux. Ce qui arrive bien souvent et explique l’existence de contrats de protection et de syndicats blancs (…).»
- – Le Secrétaire d’Etat au Travail et à la Prévoyance sociale fait aussi référence aux contrats de protection dans certains discours prononcés à l’occasion d’événements officiels et repris par les sites Internet de divers médias, notamment:
- - Dans un entretien réalisé pour la revue Fortuna, le Secrétaire d’Etat au Travail affirme: «(…) Réguler la sous-traitance, encourager le recours aux journées de travail discontinues, tolérer les contrats de protection et annuler des prestations sociales, dans l’agenda du gouvernement de Felipe Calderón. Avec un PEA de près de 30 millions, la proposition du gouvernement est de réformer la loi fédérale du travail pour l’incorporer à un “panorama productif et compétitif”(…).»
- - 30 mai 2007, lors d’une réunion du conseil directif national de la CANACINTRA, le Secrétaire d’Etat au Travail a affirmé: «(…) Le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale (STPS) s’est manifesté contre les syndicats blancs, les contrats de protection et en faveur de la disparition de la clause d’exclusion de l’article 128 du contrat collectif de travail (…).»
- - 5 mai 2008, dans un entretien publié au journal El Universal portant sur la réforme du droit du travail: «(…) Par ailleurs, le Secrétaire d’Etat au Travail a considéré que le meilleur antidote contre les contrats de protection était la transparence et l’information (…).»
- – Le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale lui-même admet expressément, dans son Programme national de politique du travail 2001-2006, l’existence des contrats collectifs de protection (CCPP) comme étant un élément clé de sa politique. Dans la section intitulée «Programme national de politique du travail 2001-2006», il signale mot pour mot à la page 2: «Conformément à ces principes de base, le programme répond aux déclarations faites par Vicente Fox Quezada pendant sa campagne menée auprès de diverses organisations syndicales spécialisées en droit syndical, et d’autres organismes, sur des sujets relatifs aux conditions de travail dignes et justes, à la liberté et la démocratie syndicales, à la négociation collective légitime et à la justice au travail. Parmi les thèmes abordés figurent notamment: (…) convoquer les parties impliquées à une concertation sur la question des contrats de protection patronale.»
- 774. Il est important de souligner que la plainte s’appuie sur des preuves concrètes qui n’ont pas été contestées, hormis de façon générale par de simples qualificatifs dépourvus de valeur, de sorte que, pour éviter une approche vague de la plainte, il faut procéder à son analyse précise. Ceci afin que soient formulées des recommandations visant à ce que le système des relations de travail au Mexique soit compatible avec les compromis assumés par le gouvernement mexicain.
- 775. Enfin, la FIOM a envoyé une communication datée du 7 septembre 2010 où elle indique que le contrat de protection (CCPP) n’est pas une figure contemplée par la législation du travail sous cette dénomination, que son nom lui vient d’un usage répandu au Mexique.
- 776. Il a été signalé que la signature d’un contrat collectif de travail (CCT) était un acte unilatéral de l’employeur, qui peut engager le syndicat de son choix avant même que les emplois ne soient créés. Certains allèguent qu’il s’agit d’un acte légal sous prétexte que, conformément à l’article 387, aucune condition n’est prévue pour sa signature, qu’il n’est pas nécessaire de procéder à une consultation préalable des travailleurs et qu’il n’est même pas besoin de justifier un nombre minimum de travailleurs. Il suffirait par exemple que, dans une entreprise de1 000 salariés, seuls deux d’entre eux en fassent la demande pour que les conditions exigées par la loi soient observées et, qu’une fois le CCT signé, conformément à l’article 396, ses dispositions s’appliquent à l’ensemble des travailleurs de l’entreprise ou de l’établissement concerné, même si ceux-ci ne sont pas membres du syndicat signataire.
- 777. Pour célébrer un contrat collectif, seules deux signatures sont requises, celle du représentant de l’employeur et celle du secrétaire général du syndicat. Tout de suite après sa signature, le contrat est déposé devant le conseil de conciliation et d’arbitrage (JCA) compétent.
- 778. Une fois le contrat déposé devant le JCA, un processus de protection s’enclenche qui empêche que d’autres travailleurs puissent exiger la signature d’une convention collective par voie de grève, en vertu de l’article 450, section II, de la LFT. En effet, comme le stipule l’article 923, il ne faut donner suite à aucune déclaration de grève ayant pour objet la signature d’un contrat collectif si un autre contrat a déjà été déposé. Dans ce cas, la place est déjà occupée et interdit à tout syndicat authentique de solliciter la signature d’un contrat collectif et, en cas de refus, de faire un appel à la grève en vue de sa signature.
- 779. Une fois le contrat signé avec le syndicat choisi par l’employeur et déposé auprès du JCA, la possibilité de signer une nouvelle convention collective étant verrouillée, les travailleurs n’ont d’autre choix que de contester le statut de titulaire du CCT. Pour se voir reconnaître la qualité de titulaire du CCT, il existe deux possibilités: obtenir l’enregistrement d’un syndicat qui respecte les conditions prévues par l’article 365 de la LFT ou faire une demande en vue d’obtenir la qualité de titulaire en démontrant via une procédure judiciaire, en général très compliquée, que le syndicat en question représente la majorité des travailleurs.
- 780. Il faut souligner que si pour signer un CCT la loi n’exige pas de justifier du soutien de la majorité ou d’un nombre minimum de travailleurs affiliés, en revanche, si un employeur refuse de signer un CCT, pour pouvoir déclencher une grève, en vertu de l’article 451, section II, de la LFT, il faudra dans ce cas justifier du soutien de la majorité. De sorte que la signature des CCT est entre les mains de l’employeur, situation qui conduit les pseudo-dirigeants syndicaux à chercher les faveurs des entreprises pour signer ce type de contrats. Il suffit de consulter le site Internet du conseil local de conciliation et d’arbitrage du district fédéral (JCADF) pour confirmer le dépôt de CCT qui s’en tiennent aux normes minimales légales et sont signés dans plusieurs centres de travail à la fois.
- 781. Dans les déclarations enregistrées et transcrites par la Fondation Friedrich Ebert dans la publication «Essor et perspectives des contrats de protection», l’existence desdits contrats est expressément reconnue. D’ailleurs, certains représentants patronaux allèguent que ceux-ci sont nécessaires pour protéger les entreprises d’appels à la grève initiés par des syndicats escrocs, qui exigent le paiement d’une certaine somme d’argent en échange de ne pas déclencher de grève. Les réponses fournies par Jorge A. del Regil, du cabinet Baker & Mackenzie, membre de l’actuel Comité de la liberté syndicale du BIT, et de Tomás Natividad, représentant de la Confédération patronale de la République mexicaine (COPARMEX) sont significatives. Jorge A. del Regil admet qu’au cours de ses quarante années d’expérience il a signé des contrats de protection avec toutes les centrales syndicales pour protéger les entreprises qu’il représente, et reconnaît que la volonté des travailleurs n’est pas prise en compte dans ces contrats, «mais qu’ils servent à protéger les emplois contre tout appel à la grève en vue de la signature d’un contrat collectif lancé par un autre syndicat (…)». Il reconnaît également qu’il faut rétribuer le dirigeant syndical pour une telle protection et que les contrats de protection constituent un «modèle idéal de relations du travail, dans la mesure où, bien qu’ils aient un coût, ils garantissent aux entreprises l’asservissement des travailleurs et les blindent contre toutes actions non contrôlées en main d’organisations syndicales».
- 782. Ces propos sont particulièrement révélateurs et doivent être rapprochés d’une déclaration faite par Ramón Gámez Martínez qui, à travers un large réseau de syndicats auquel appartient «Justo Sierra» (et d’autres organisations dont les dénominations s’accompagnent du qualificatif de «progressiste»), est titulaire de plusieurs milliers de contrats collectifs de travail. Ce pseudo-dirigeant syndical a obtenu une large partie des contrats collectifs grâce à ses relations avec le cabinet Baker & Mackenzie. Parmi les entreprises contrôlées par le syndicat «Justo Sierra» figurent la chaîne de restauration rapide McDonald’s et l’Université del Valle de Mexico. Ramón Gámez reconnaît que 95 pour cent des conventions collectives au Mexique sont conclues de cette façon, et tout est dit dans l’une des phrases prononcées lors de cet entretien: «(…) toutes les centrales procédons de la sorte. La loi nous y oblige. Et, vous voudrez bien m’excusez, mais il serait stupide pour un employeur d’agir autrement (…)». Pour sa part, Tomás Natividad, dont les propos figurent dans la réponse apportée par le gouvernement à la présente plainte, avoue l’existence de tels contrats et souligne que: «(…) les contrats de protection sont un mal nécessaire, ils sont justifiés, ils sont nécessaires au maintien de l’emploi (…)».
- 783. Il existe de multiples preuves témoignant de l’ampleur du phénomène des contrats collectifs de protection (CCPP), ainsi que des déclarations publiques du Secrétaire d’Etat au Travail lui-même, largement documentées dans le premier document de la plainte. Pourtant, dans la première réponse que nous avons obtenue du gouvernement mexicain, l’existence des CCPP est niée, sous prétexte que de tels contrats ne peuvent exister puisque leur existence ne serait pas légale.
- 784. La FIOM déclare, par ailleurs, que l’existence de la célébration de CCPP ne prenant pas en considération la volonté et la participation des travailleurs et résultant d’un acte unilatéral de l’employeur, est clairement établie et démontrée à travers plusieurs cas de syndicats présentés dans la plainte et détaillés à la fin de ce document. L’extension de ces pseudo-conventions collectives à l’ensemble des travailleurs conduit à ce que l’adhésion à un syndicat ne soit pas acte volontaire et indépendant de la négociation collective, et que les actuels et futurs travailleurs de l’entreprise soient obligés à s’affilier au pseudo-syndicat ayant signé le CCT. En d’autres termes, les travailleurs qui font partie d’un syndicat y sont forcés en vertu de la clause d’exclusion établie dans l’article 395 de la loi fédérale du travail.
- 785. Au Mexique, les travailleurs n’ont aucune possibilité d’adhérer de façon indépendante au syndicat de leur choix. S’agissant du régime des travailleurs au service de l’Etat, le décompte de leurs cotisations syndicales figure sur leur fiche de paie; les travailleurs sont ainsi automatiquement affiliés au syndicat de l’entreprise, alors même que la législation du travail en vigueur interdit l’usage de la clause d’exclusion par admission. Cette pratique est courante, ce qui explique que, dans des organismes publics les plus importants, tels que le Secrétariat de l’éducation publique, les taux de syndicalisation affichés soient proches de 100 pour cent. S’agissant du régime général (identifié à l’alinéa A de l’article 123 de la Constitution), le travailleur s’affilie au syndicat titulaire du CCT dès qu’il commence à travailler dans l’entreprise. Il existe sans doute des exceptions dans l’un ou l’autre régime, mais celles-ci ne font que confirmer la règle.
- 786. Les principaux articles de la convention no 87 auxquels le gouvernement mexicain et ses représentants portent atteinte tous les jours sont les articles 2, 3 1) et 2), 4, 7, 8 2) et 11. Les travailleurs mexicains n’ont aucune option ni possibilité de participer aux négociations collectives initiales. L’adhésion des travailleurs est dictée par l’employeur qui, en contrôlant le processus de négociation collective, choisit systématiquement le pseudo-syndicat auquel le travailleur doit appartenir.
- 787. Tout ceci s’inscrit dans un système dont il faut, pour évaluer à quel point il porte atteinte au principe de liberté syndicale, considérer dans sa globalité, à savoir: 1) le contrôle des registres syndicaux; et 2) le contrôle de la «prise de note» des comités exécutifs syndicaux.
- 788. Dans la pratique, les syndicats doivent régulièrement obtenir l’autorisation de l’autorité dite d’enregistrement, simple organe de contrôle (que se soit au niveau fédéral à travers le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, ou local à travers le conseil tripartite de conciliation et d’arbitrage) où les démarches pour exister juridiquement (registre), continuer d’exister (prise de note du comité exécutif) ou contester la qualité de titulaire du CCT lorsque l’employeur a déjà signé un contrat collectif de travail, doivent se faire auprès de la représentation patronale et du dirigeant syndical qui détient le plus de contrats collectifs dans la branche industrielle, ce qui est absurde.
- 789. Ainsi, les études menées à l’Université nationale autonome de Mexico (UNAM) par le chercheur, Dr Alfonso Bouzas Ortíz, confirment, si l’on se réfère aux registres des conventions collectives de la ville de Mexico, que plus de 90 pour cent desdits contrats ne font état d’aucun type d’existence ou de vie propre. Ces contrats ne sont ni révisés, ni négociés et se limitent à reprendre les minimums de protection requis par la loi. Il ne s’agit donc que de pseudo-conventions collectives. Dans un tel contexte, tous les travailleurs soi-disant couverts par ces conventions collectives, dont ils n’ont ni la connaissance ni la capacité de négocier le contenu, voient leurs droits fondamentaux de créer librement une organisation pour défendre leurs droits et de s’associer librement à une organisation de leur choix bafoués.
- 790. Un argument souvent avancé par les entreprises est que les contrats de protection visent à «protéger l’entreprise de cas d’extorsion syndicale». Une telle affirmation n’est pas tout à fait exacte dans la mesure où, si de tels syndicats existent qui simulent des actes juridiques pour obtenir des avantages financiers, ceux-ci jouent sur la peur des entreprises qui, si elles devaient organiser un scrutin ou s’opposer à une fausse grève, se verraient obligées de divulguer leurs contrats de protection souvent gardés secrets – ils sont déposés auprès du conseil de conciliation et d’arbitrage et maintenus secrets, totalement ou partiellement, des travailleurs. A cet égard, la plainte présente de façon générale les différents aspects qui portent atteinte à la liberté d’association et à la négociation collective. Ces deux aspects sont indissociables puisqu’il serait absurde d’obtenir l’enregistrement syndical sans pouvoir négocier. Aussi, divers secteurs démocratiques de la société ont exigé du gouvernement mexicain qu’il ratifie la convention no 98 de l’OIT, ce qu’il a refusé, alléguant que ceci porterait atteinte à la législation nationale, en particulier en ce qui concerne la clause d’exclusion, disposition légale qui, bien qu’elle continue à s’appliquer de façon assez ferme en pratique, a, d’un point de vue légal, été déclarée à deux reprises inconstitutionnelle par la Cour suprême de justice de la nation.
- 791. Le modèle mexicain doit être analysé en considérant les obstacles auxquels les travailleurs se confrontent tous les jours pour exercer librement le droit syndical et de négociation collective. Il n’existe pas de dispositif reposant sur un arbitre impartial ni de mécanismes qui certifient la volonté des travailleurs au moment de la signature des CCT. L’adhésion de la majorité des travailleurs n’est exigée qu’en cas de grève ou de contestation de la qualité de titulaire. Enfin, les retards, les délais et les lenteurs enregistrés dans les procédures légales constituent des facteurs dissuasifs et répressifs essentiels. Par exemple, si les demandes d’enregistrement ou de «prise de note» d’un syndicat sont rejetées, le syndicat doit engager une procédure judiciaire excessivement longue qui commence par une action en amparo auprès d’un juge de district pouvant donner lieu à toute une série de retards et qui finit par une révision par un tribunal fédéral collégial. Dans une bonne partie des cas dont on a connaissance, ainsi que dans les cas décrits dans la plainte, lorsque la procédure en amparo finit par aboutir favorablement, c’est pour que l’autorité d’enregistrement corrige sa résolution et dicte elle-même une nouvelle résolution négative.
- 792. Dans le cas signalé dans la plainte portant sur l’UNTYPP, pendant plus d’un an l’autorité d’enregistrement a cherché à décourager les travailleurs en leur imposant de nouvelles conditions et en les menaçant l’un après l’autre de licenciement. L’action en amparo a duré près d’un an (15/I/09-30/XI/09) et, une fois la demande aboutie, les travailleurs à l’origine du procès ont été licenciés et contraints de signer un document adressé aux autorités où ils renonçaient au syndicat. Le même document, rédigé selon les mêmes termes, a été soumis à tous les travailleurs et, ce qui est plus grave encore, le fondé de pouvoir désigné pour les démarches d’annulation du registre syndical n’était autre qu’un avocat de l’entreprise. De plus, les retards s’observent à tous les niveaux et constituent une sérieuse entrave au principe de liberté syndicale, dans la mesure où, sans possibilité de s’enregistrer ni d’obtenir une «prise de note», et avec les retards enregistrés dans les procédures de demande de reconnaissance de la qualité de titulaire du contrat collectif, un processus de répression parallèle se met en place qui empêche pratiquement que les procédures légales soient menées à bien. Un exemple récent nous est fourni par le Secrétaire d’Etat au Travail, Javier Lozano, dans un éditorial publié au journal El Universal «Los caminos del SME» (les voies du SME). Le ministre se réfère au Syndicat mexicain des électriciens (SME) qui, avec le conflit des travailleurs du secteur des mines et de la métallurgie (SNTMMSRM affilié à la FIOM), a occupé une place centrale au Mexique ces derniers temps. Il allègue que les comités exécutifs des deux syndicats ne bénéficient pas de la «prise de note». Pourtant, il signale qu’il disposait de deux mois pour répondre à toute demande de «prise de note», autrement dit pour priver un syndicat de représentation légale pendant cette période. Bien évidemment, une telle affirmation ne repose sur aucun fondement légal, dans la mesure où le délai de deux mois prévu par la loi concerne l’enregistrement des syndicats et non la prise de note des élections périodiques de ses représentants. Tout est dit dans cette phrase: «(…) sans prise de note un conflit permanent serait généré au sein des syndicats et la représentation légale de ces derniers dans la vie civile serait précaire, voire pratiquement inexistante».
- 793. Le gouvernement mexicain a l’habitude de vouloir dissimuler la réalité nationale et emploie des ressources considérables pour renvoyer vers l’extérieur une image de pays démocratique. Il y parvient dans une certaine mesure, étant donné que les représentants patronaux, qui connaissent bien la réalité mais préfèrent la cacher, exploitent la façade démocratique des organes de contrôle avec leur composition soi-disant tripartite. Alors que, malheureusement, comme on peut le vérifier dans beaucoup de cas, la complicité entre les représentants du gouvernement, des entreprises et des travailleurs, qui partagent étroitement les mêmes intérêts, est manifeste. Cette situation constitue l’un des principaux obstacles à toute modification du système de justice du travail et au remplacement des actuels conseils de conciliation et d’arbitrage par de véritables organes de contrôle impartiaux et réellement tripartites, autrement dit par des organes qui représentent effectivement les trois secteurs. L’actuelle configuration des conseils de conciliation et d’arbitrage a également contribué au rejet d’initiatives de réformes en matière de travail, telles que celle portant sur le registre public des syndicats et les contrats collectifs pour se doter d’un arbitre impartial indispensable.
- 794. En effet, il est absurde qu’avec l’usage si répandu des contrats de protection ne tenant pas compte de la volonté des travailleurs, et ne laissant comme seule porte de sortie que de déposer une demande en vue de l’obtention du statut de titulaire, qu’une telle procédure doive être menée devant un tribunal où précisément ceux qui décident sont les défendeurs, ceux-là mêmes qui sont à l’origine du différend, à savoir les représentants patronaux agissant en accord avec les représentants du gouvernement et des travailleurs, s’agissant bien souvent de la même centrale syndicale que les travailleurs prétendent contester. La réponse du gouvernement mexicain à notre plainte témoigne clairement de cette complicité. Elle a, en effet, été élaborée avec la participation des deux centrales ouvrières hégémoniques et du syndicat patronal COPARMEX, pour que tous coïncident en une même réponse commune.
- 795. Nous joignons ci-dessous pour information, la description des procédures, et le détail de trois des cas concrets de violation au principe de liberté syndicale dont il est question dans notre plainte.
- 796. La FIOM fait état des faits concernant les trois cas concrets signalés dans sa plainte initiale de février 2009.
- 797. En ce qui concerne l’Union nationale des salariés techniques et professionnels de PEMEX (UNTYPP) et l’enregistrement du syndicat, la FIOM souligne que:
- – Le 18 mars 2008, l’UNTYPP se constitue en assemblée où sont approuvés ses statuts et procède à l’élection de son comité exécutif.
- – Le 29 avril 2008, l’UNTYPP sollicite son enregistrement auprès de la Direction générale des registres d’associations du secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, en présentant comme l’exige la loi fédérale du travail: la convocation et le procès-verbal de l’assemblée constitutive du syndicat où s’exprime la volonté des travailleurs présents d’intégrer ledit syndicat et de solliciter son enregistrement; le registre des membres avec 260 adhérents, les statuts dûment certifiés, 260 fiches d’adhésion et documents qui attestent leur statut de salariés de PEMEX.
- – Le 6 juin 2008, le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale demande à l’UNTYPP, entre autres, de modifier ses statuts et de fournir le procès-verbal de l’assemblée où il aura été procédé à la modification, ainsi que de prouver l’existence de PEMEX et le fait que les adhérents travaillent bien pour cette entreprise.
- – Le 11 juin 2008, le secrétaire aux relations publiques de l’UNTYPP, Oscar del Cueto Charles, est licencié pour son activisme syndical.
- – Le 21 août 2008, le secrétariat au Travail demande pour la deuxième fois à l’UNTYPP, entre autres: de modifier ses statuts et de fournir le procès-verbal de l’assemblée où il aura été procédé à la modification, qu’il élimine du registre syndical les travailleurs n’ayant pas fourni les documents originaux démontrant qu’ils travaillent bien pour PEMEX.
- – Le 21 août 2008, le secrétaire général de l’UNTYPP, Didier Marquina Cárdenas, est convoqué par le sous-directeur des ressources humaines de PEMEX, Marco Antonio Murillo Soberanis, à son bureau de Mexico, et subit des pressions pour retirer sa demande d’enregistrement du syndicat, parmi les menaces dont il fait l’objet on lui suggère de penser à son avenir et à celui de ses enfants.
- – Le 16 octobre 2008, le secrétariat au Travail demande pour la troisième fois à l’UNTYPP de prouver la volonté de chaque adhérent de faire partie du syndicat, de modifier ses statuts et de fournir le procès-verbal de l’assemblée où ces modifications ont lieu.
- – Le 14 novembre 2008, PEMEX procède au licenciement de 14 membres du comité exécutif, et plus de 40 dirigeants et membres de l’UNTYPP sont expulsés violemment de leur centre de travail par le personnel de sécurité de l’entreprise et dépouillés de leurs biens personnels.
- – Le 18 novembre 2008, l’UNTYPP dépose un recours pour obtenir une résolution concernant sa demande d’enregistrement syndical déposée auprès du secrétariat au Travail, le syndicat ayant rempli toutes les formalités exigées par la LFT et 60 jours s’étant écoulés sans qu’aucune résolution n’ait été émise à ce propos.
- – Le 19 novembre 2008, le secrétariat au Travail répond au recours déposé le 18 novembre 2008 par l’UNTYPP, et indique que celui-ci n’a pas lieu d’être, dans la mesure où il a émis diverses observations et que l’enregistrement est à l’étude.
- – Le 19 novembre 2008, le père de l’un des membres du comité exécutif du syndicat, Felipe Jaime Valencia Galindo, décède. Le décès intervient après que les soins d’urgence médicaux de l’hôpital de PEMEX lui aient été refusés parce que son fils était membre de l’UNTYPP.
- – Le 20 novembre 2008, PEMEX convoque plusieurs des travailleurs licenciés, leur propose leur réintégration en échange à ce qu’ils renoncent à l’UNTYPP. Plusieurs d’entre eux confrontés à d’urgentes nécessités médicales signent leur lettre de démission du syndicat.
- – Le 25 novembre 2008, l’UNTYPP exige son enregistrement syndical au ministère du Travail, tel que le prévoit l’article 366 de la LFT, le syndicat ayant rempli toutes les formalités exigées par la LFT, 60 jours s’étant écoulés sans qu’aucune résolution n’ait été émise à ce propos, et trois jours s’étant écoulés suite au recours déposé dans ce sens par le syndicat sans qu’aucune résolution n’ait été dictée.
- – Le 27 novembre 2008, le secrétariat au Travail demande à l’UNTYPP qu’il précise de quel type de syndicat il s’agit, d’un syndicat d’entreprise ou de travailleurs.
- – Les 27 et 28 novembre 2008, PEMEX déploie toute une série de menaces dans ses centres de travail pour contraindre les membres actifs de l’UNTYPP à démissionner du syndicat, qui en cas de refus s’exposeraient à perdre leur emploi.
- – Le 27 novembre 2008, le secrétariat au Travail informe l’UNTYPP qu’il a demandé à PEMEX de le tenir informé des activités des membres de l’UNTYPP et de lui confirmer les informations fournies par les travailleurs au registre des membres.
- – Le 1er décembre 2008, l’UNTYPP répond à l’observation du secrétariat au Travail du 27 novembre 2008 et demande son enregistrement conformément à l’article 366 de la LFT.
- – PEMEX redouble de violence envers les membres de l’UNTYPP: les menaces voilées ou adressées directement aux syndicalistes et à leurs familles se multiplient; l’accès au service de soins est refusé aux travailleurs victimes de chantage qui ne peuvent désormais accéder aux services médicaux que s’ils démissionnent du syndicat; on assiste à des mises à la retraite forcée.
- – Le 23 décembre 2009, le secrétariat au Travail rejette la demande d’enregistrement de l’UNTYPP, soi-disant pour non-respect de la LFT, notamment, en raison du nombre de syndiqués inférieur à 20.
- – En réponse au refus d’enregistrement, divers syndiqués ratifient leur appartenance à l’UNTYPP, démontrant ainsi qu’ils sont plus de 20.
- – Le 12 janvier 2009, un recours est déposé pour licenciement abusif de travailleurs syndiqués et de dirigeants syndicaux pour cause de participation syndicale.
- – Le 15 janvier 2009, l’UNTYPP forme un recours en amparo contre la résolution de la Direction générale des registres d’associations qui refuse de procéder à l’enregistrement du syndicat.
- – Le 2 juillet 2009, en réponse au recours d’amparo formé par l’UNTYPP, la juge de première instance en matière de travail du district fédéral statue favorablement sur la demande d’enregistrement, toutes les conditions exigées par la LFT ayant été respectées, et ordonne au Secrétaire d’Etat au Travail de procéder à l’enregistrement de l’UNTYPP.
- – Le 16 juillet 2009, le secrétariat au Travail conteste la décision de justice qui ordonne l’enregistrement de l’UNTYPP.
- – Le 30 novembre 2009, le 14e tribunal collégial en matière du travail statue et confirme la décision ordonnant l’enregistrement syndical de l’UNTYPP.
- – Le 21 décembre 2009, le secrétariat au Travail procède à l’enregistrement syndical de l’UNTYPP et à la «prise de note» de son comité exécutif pour la période du 18 mars 2008 au 17 mars 2012.
- – Le 23 décembre 2009, certains membres de l’UNTYPP et des représentants syndicaux commencent à recevoir des appels téléphoniques les menaçant de licenciement et de faits portant atteinte à leur intégrité s’ils ne démissionnent pas du syndicat.
- – Le 30 décembre 2009, l’UNTYPP sollicite à PEMEX une réunion pour initier des relations formelles.
- – En janvier 2010, l’UNTYPP lance une campagne d’adhésion syndicale et organise à cet effet des visites dans les centres de travail de l’ensemble du pays.
- – En réponse à cette campagne, l’entreprise par l’intermédiaire de son personnel de sécurité et de ses dirigeants menace de licenciement les travailleurs qui assistent aux réunions de l’UNTYPP. Des représentants syndicaux, ainsi que leurs familles, sont menacés dans leur intégrité physique, ils sont surveillés et suivis en voiture par des individus incognito.
- – En janvier 2010, les dirigeants de chaque centre de travail convoquent un par un à leur bureau les affiliés de l’UNYTPP. Ils sont retenus par du personnel de sécurité pendant une période assez longue, tandis qu’ils sont menacés de licenciement s’ils ne renoncent pas au syndicat, on exige la signature de deux lettres soi-disant personnelles, mais qui en réalité ont toutes le même format, et un même avocat est désigné pour réaliser les formalités mentionnées dans ces courriers. Il s’agit, pour la première lettre, d’une lettre de démission au syndicat et, pour la deuxième, d’une demande de dissolution de l’UNTYPP adressée au secrétariat du Travail et de la Prévoyance sociale. Le conseil fédéral de conciliation et d’arbitrage a reçu ces documents et ouvert les dossiers nos 1/2010 à 55/2010 qu’il a portés devant son conseil spécial no 12.
- – Le 18 janvier 2010, près de 200 travailleurs membres de l’UNTYPP sont contraints sous menace de licenciement, par le personnel de direction du département des ressources humaines de PEMEX, renforcé par du personnel de sécurité, à signer leur démission du syndicat et à en demander la dissolution. Treize membres et dirigeants syndicaux sont licenciés.
- – Le 28 janvier 2010, le secrétaire du travail du comité exécutif, Erasto Luis de la Cruz, et cinq membres du comité exécutif de la section raffinerie «Antonio Dovalí Jaime» sont menacés de licenciement par le gérant et le sous-gérant des ressources humaines de la raffinerie, sous prétexte qu’ils refusent de signer les lettres de démission du syndicat.
- – Le 15 février 2010, suite à leur refus de signer les lettres de démission du syndicat, le secrétaire du travail du comité exécutif et les cinq membres du comité exécutif de la raffinerie «Antonio Dovalí Jaime» sont licenciés.
- – En mars et avril 2010, nos membres et conseillers syndicaux ont fait l’objet d’une vigoureuse attaque. Le secrétaire général a en particulier été visé, qui a reçu plusieurs coups de téléphone répétés sur son téléphone portable le menaçant lui et sa famille.
- – En avril 2010, des organisations syndicales lancent une campagne de soutien aux collègues syndicaux en adressant des lettres au gouvernement mexicain lui demandant de mettre un terme aux menaces et agressions à leur encontre, et réclamant leur réintégration au sein de l’entreprise.
- – En mai 2010, PEMEX convoque les membres du comité exécutif pour de soi-disant négociations, leur demande de stopper la campagne de lettres et propose la réintégration dans l’entreprise à certains d’entre eux.
- – Fin mai 2010, le comité exécutif accepte de stopper la campagne en faveur de la défense du syndicat si le gouvernement accepte de mettre un terme à la répression contre ses adhérents et travailleurs.
- – En juin 2010, il est mis fin à la répression contre les membres syndicaux et les travailleurs.
- – Le 16 juillet 2010, Didier Marquina Cárdenas et Francisco Ríos Piñeyro, respectivement secrétaire général et secrétaire de l’organisation, sont réintégrés dans l’entreprise. Ils sont cependant bloqués à leurs postes de travail sans aucune perspective.
- 798. En ce qui concerne le cas du Syndicat des travailleurs d’habitations commerciales, bureaux et entrepôts de liquidation et métiers connexes ou apparentés du district fédéral (STRACC), portant sur la qualité de titulaire, la FIOM signale les faits suivants:
- – Le 9 janvier 2003, le STRACC présente une demande en vue d’obtenir la qualité de titulaire du CCT et demande au conseil de conciliation et d’arbitrage du district fédéral (JCADF) qu’il conserve en secret les données des travailleurs affiliés au STRACC, informations devant être envoyées sous pli cacheté.
- – En février 2003, les dirigeants de l’organisation sont licenciés après avoir été identifiés suite à la divulgation des données personnelles les concernant contenues dans le pli.
- – Aucune audience n’est convoquée, le JCADF n’ayant pas notifié le syndicat défendeur ni l’entreprise, tout du moins de façon régulière, et dans la mesure où d’autres demandes en vue de l’obtention de la qualité de titulaire du CCT ont été présentées. Finalement, la date du scrutin est fixée au 20 août 2003.
- – Le 20 août 2003, le JCADF suspend les élections deux heures avant de procéder au scrutin, ceci afin de donner suite à une demande de reconnaissance de la qualité de titulaire présentée par un autre syndicat (la centrale CTC). Cette manœuvre permet d’identifier les travailleurs affiliés au STRACC.
- – Une fois les membres du STRACC identifiés, l’entreprise licencie trois autres de ses dirigeants syndicaux et intensifie la campagne de menaces et de violences contre les travailleurs.
- – Le 10 novembre 2003, au cours d’une audience, une nouvelle date de scrutin est demandée. Un autre syndicat se présente alors réclamant lui aussi le statut de titulaire. Des cogneurs interviennent pour intimider les membres du STRACC. Le JCADF ne fixe aucune date de scrutin et n’intervient pas face aux agressions dont il est témoin, bien qu’il ait les moyens légaux pour les éviter.
- – Le 8 décembre 2003, le JCADF accède à la nouvelle demande syndicale en vue d’obtenir la qualité de titulaire présentée lors de l’audience du 10 novembre 2003.
- – Plusieurs audiences sont convoquées, et de nouveaux syndicats présentent des demandes de reconnaissance du statut de titulaire qui toutes sont invariablement admises par le JCADF, de sorte qu’il n’est pas possible de procéder au scrutin tant que les audiences de chaque demande cumulée ne sont pas tenues.
- – Le JCADF continue à convoquer des audiences qui ne sont pas réalisées en l’absence de notification des syndicats de plus en plus nombreux, ou en raison des erreurs dolosives dans les accords du JCADF.
- – Le 18 novembre 2005, les élections sont convoquées par le JCADF dans les locaux de l’entreprise. Celles-ci ne peuvent être réalisées, l’entreprise étant encerclée par des cogneurs qui interdisent l’entrée du fonctionnaire du JCADF et des représentants du STRACC. Les agressions et des menaces constituent le mot d’ordre, et des travailleurs sont séquestrés par l’entreprise pour éviter qu’ils ne votent.
- – Le JCADF ne notifie pas le syndicat défendeur, bien qu’il en ait les moyens légaux et malgré les demandes réitérées des représentants du STRACC en ce sens. Les autres demandes du statut de titulaire proviennent de la CTM, du CROM et de la CTC. Tous ont des représentants au JCADF.
- – Le 15 janvier 2009, l’audience correspondant au dossier du STRACC est réalisée et une date de scrutin est fixée au 22 janvier 2009.
- – Le 22 janvier 2009, le scrutin est organisé, et le JCADF utilise comme liste des votants celle fournie par l’entreprise, sans procéder, comme le prévoit la loi, à sa vérification. Sur cette liste figurent des personnes qui ne travaillent pas pour la station-service. Le scrutin se déroule au milieu d’actes de violence perpétrés par des cogneurs sans que le JCADF n’intervienne pour stopper ces violences. Malgré tout, le STRACC sort vainqueur du scrutin.
- – Fin 2009, le JCADF reconnaît au STRACC dans une décision finale la qualité de titulaire du CCT.
- – En 2010, l’entreprise Nivel Superior refuse de réincorporer les travailleurs licenciés.
- 799. En ce qui concerne le cas Johnson Controls, et son usine de Puebla, la FIOM souligne les faits suivants:
- – Entre le second semestre 2005 et l’année 2006, l’augmentation de la journée de travail dans le secteur de la confection, passée à douze heures en travail posté, a été imposée de façon unilatérale, le montant des étrennes a diminué ainsi que les avantages sociaux qui ont été remplacés par un bon de moindre valeur.
- – Face aux abus et aux atteintes de leurs droits dont ils sont systématiquement victimes, les travailleurs s’organisent. Ils forment une coalition pour faire face au syndicat de protection, réclamer une amélioration de leurs conditions de travail, ainsi que la participation aux négociations collectives et salariales, et l’élection de leurs représentants.
- – En mai 2007, conformément à la loi fédérale du travail (LFT), il fallait procéder à une révision du CCT signé avec le Syndicat national des travailleurs de l’industrie ainsi que des salaires.
- – Le 4 juin 2007, la coalition de travailleurs proteste contre le syndicat de protection qui ne procède qu’à une révision salariale et non du contrat collectif, dont ils exigent une copie pour en prendre connaissance. Le syndicat leur propose de retirer une copie du contrat à son bureau.
- – En juin 2007, en raison de l’inconfort croissant manifesté par la coalition de travailleurs, le syndicat lance une campagne de harcèlement contre tout travailleur manifestant son désaccord. Il soumet à des actes de harcèlement et de surveillance les travailleurs dans les lignes de production et les villages.
- – En juin 2007, sept membres de la coalition de travailleurs sont licenciés en vertu de la clause d’exclusion. Les travailleurs présentent une demande pour licenciement abusif auprès du JFCA.
- – Les 26 et 27 octobre 2007, 150 travailleurs sont licenciés sans que le syndicat de protection n’intervienne en leur défense et ne prévoie d’indemnisation de licenciement.
- – En août 2008, après avoir mis sous surveillance la coalition de travailleurs, le syndicat et l’entreprise procèdent au licenciement de 15 dirigeants.
- – En juin 2008, 50 travailleurs sont licenciés, au motif, selon l’entreprise, qu’ils «étaient en train de s’instruire».
- – Les travailleurs, dirigeants et organisateurs ont fait systématiquement l’objet d’agressions physiques directes et de menaces.
- – L’entreprise et le syndicat ont refusé de fournir une copie du contrat collectif aux travailleurs, et ceux qui en font la demande sont licenciés. Toute tentative d’organisation est anéantie par le licenciement des dirigeants syndicaux.
- – Johnson Controls recrute ses travailleurs à travers différentes entreprises de sous-traitance, chacune disposant de son propre syndicat et contrat collectif de protection.
- – En raison de la lenteur et des risques qu’implique de demander l’enregistrement syndical, la coalition des travailleurs a décidé de solliciter la reconnaissance de la qualité de titulaire du contrat collectif qui n’a pas encore été présentée.
- – En 2010, les travailleurs et les dirigeants de Johnson Controls et de la coalition sont agressés et menacés par un groupe d’hommes associé au syndicat de protection de l’entreprise.
- – Le 29 mai 2010, la coalition et les travailleurs de l’usine Johnson Controls (secteur Resurrección) de Puebla exigent le droit de créer leur propre section syndicale en s’affiliant à un syndicat national démocratique. Ils mènent une grève pendant trois jours, avant de négocier un accord avec l’entreprise et les autorités régionales.
- 800. Enfin, la FIOM envoie un tableau récapitulatif des dispositions légales en vigueur.
- B. Réponse du gouvernement
- 801. Dans sa communication datée du 1er mars 2010, le gouvernement déclare qu’il s’est permis de consulter les acteurs impliqués afin de clarifier les déclarations de la FIOM et, pour cette raison, les commentaires et observations du gouvernement fédéral sont ci-après présentés conjointement avec ceux de la Confédération des travailleurs du Mexique (CTM), de la Confédération révolutionnaire des ouvriers et paysans (CROC), de la Confédération des chambres d’industrie des Etats-Unis du Mexique (CONCAMIN) et de la Confédération patronale de la République mexicaine (COPARMEX).
- 802. Dans le cadre de sa thèse initiale, la FIOM fait savoir qu’elle a suivi avec préoccupation l’état actuel des relations du travail et syndicales au Mexique, au vu des réclamations constantes des travailleurs, des syndicats en formation, des organisations syndicales constituées, des organisations non gouvernementales et dans le domaine des droits de l’homme, qui font part des difficultés auxquelles se heurtent la formation de syndicats et leur enregistrement officiel auprès des autorités du travail, comprenant le système de la prise de note, les règles pratiques qui régissent l’accès aux contrats collectifs dans leurs différentes étapes, depuis leur naissance, signature ou conclusion jusqu’à leur révision périodique et à leur fin, ainsi que la mise en place de mécanismes entravant la réalisation satisfaisante des droits figurant dans la convention no 87.
- 803. De même, elle avance des affirmations hypothétiques, basées pour la plupart sur des travaux scientifiques imprécis, concernant: i) la pratique généralisée des contrats de protection, qui porte atteinte à l’intégrité du droit syndical; ii) une reconnaissance expresse de ce modèle de la part de l’Etat mexicain; iii) le contrôle corporatif des travailleurs en tant qu’élément fondamental du système politique; iv) l’utilisation et le renforcement de ce corporatisme comporte, dans la pratique, la faculté de l’Etat d’intervenir et d’exercer son influence dans le cadre de l’organisation des travailleurs, et le fait que le secteur patronal utilise et renforce le modèle de protection pour empêcher que ses travailleurs ne s’organisent et ne réclament la signature d’un contrat collectif de travail (CCT) ou des améliorations des conditions de celui-ci.
- 804. La FIOM fonde sa plainte sur les faits suivants:
- i) Les contrats collectifs de travail de protection patronale (CCPP) en tant que pratique réduisant à néant la jouissance et l’exercice des droits sociaux.
- ii) Les points critiques de violation du droit syndical attestent d’un modèle de comportements identifiables dans les plaintes déposées auprès du Comité de la liberté syndicale du BIT et dans les cas soumis à différentes instances aux niveaux national et international, liés aux principales institutions du droit collectif, à savoir l’enregistrement des syndicats, la demande de signature d’un CCT, le statut de titulaire d’un CCT, la fin du CCT et la grève.
- iii) La croissance constante du phénomène des CCPP devient évidente au fur et à mesure qu’il existe davantage de renseignements sur le contenu des CCT, et révèle que, dans leur immense majorité, ces derniers ne bénéficient pas aux travailleurs puisqu’ils s’en tiennent aux normes minimales prévues par la loi et ne sont signés et déposés que dans le but d’imposer des syndicats et des CCPP par une décision du secteur patronal.
- iv) Des cas expliquant et clarifiant les restrictions, à commencer par la classification des syndicats, le système d’enregistrement, les règles en matière de signature, de qualité de titulaire et de fin des CCT, la grève, ainsi que la tendance à renforcer les contrôles en cherchant à leur conférer une forme juridique au travers de réformes de la législation du travail.
- v) Les contrats collectifs de protection et leurs mécanismes reposent principalement sur des pratiques, et non pas sur la législation. Il serait difficile d’imaginer un modèle de violation intégrale des droits humains du travail sans la complicité du système d’administration publique du travail et de la fonction administrative des conseils de conciliation et d’arbitrage.
- vi) Un modèle intégral, exposant la nécessité d’une explication de la part du secteur gouvernemental mexicain devant l’OIT; en plus de la résistance témoignée par le fait que le gouvernement mexicain n’a pas suivi les recommandations du CLS de l’OIT de respecter la convention no 87.
- vii) Les limitations légales du droit syndical commencent par la typologie des restrictions syndicales prévues à l’article 360 de la LFT, qui énumère de manière limitative les types de syndicats: corporatistes, d’entreprise, d’industrie, syndicats nationaux d’industrie et de bureaux divers; sur la base de cette qualification et sous l’empire de l’interprétation de la répartition des compétences prévues à l’article 527 de la même loi fonctionne un ensemble de restrictions au dénommé «rayon d’action» des syndicats visant à limiter leur sphère de représentation par branches d’activité, qui trouvent une expression concrète dans les mécanismes d’enregistrement et dans la dénommée «prise de note».
- Les critères d’enregistrement sont apparemment très simples à observer en respectant les différentes sections de l’article 365 de la LFT. En dépit de cette réglementation dûment formulée, il est habituel que l’interprétation de la loi soit faussée pour éviter que des syndicats qui agissent en marge du modèle de subordination caractérisant les contrats de protection soient enregistrés. Parmi les obstacles identifiables figurent le fait de devoir prouver l’existence d’une relation de travail; le fait de devoir justifier la compétence fédérale ou locale de l’employé, par des documents légalisés difficiles à obtenir pour les travailleurs; des difficultés concernant la documentation présentée; le fait de certifier de manière expresse la volonté des travailleurs d’appartenir au syndicat requérant l’enregistrement par des inspections, des documents ou même la présence physique des travailleurs, ainsi que le fait d’exiger des requérants qu’ils prouvent la nature de leur activité, en alléguant que les fonctions de certains d’entre eux sont des fonctions de confiance et que, par conséquent, il leur est interdit de faire partie du syndicat. Ces conditions requises lèsent l’intérêt des travailleurs et suscitent une grande appréhension.
- viii) La constitution d’organisations est évitée car elles pourraient revendiquer la signature d’un CCT.
- ix) Une fois signé, le CCT est déposé auprès du conseil de conciliation et d’arbitrage correspondant, et pour cette formalité il n’est besoin que de la signature du secrétaire général du syndicat et la représentation formelle du patron. Une fois cette étape accomplie, il n’est pas possible de signer un autre contrat avec un syndicat différent, car un principe d’exclusivité ou de titularité s’applique.
- x) La plupart des CCT prévoient les normes minimales légales, ce qui permet de présumer que la quasi-totalité des CCT sont des CCPP, puisque la conclusion et le dépôt d’un CCT ayant ces caractéristiques sont dépourvus de sens, étant donné que sa finalité est d’améliorer les conditions de travail.
- xi) Les Etats du pays ne disposent pas de cette information, car il règne une grande opacité qui devient un élément important empêchant les travailleurs de prendre connaissance de l’existence d’un CCT conclu pour régir les relations de travail dans leur centre de travail. Les conseils de conciliation et d’arbitrage imposent un ensemble de conditions difficiles à remplir, en marge de la loi, telles que la communication des noms des travailleurs, les signatures de ces derniers, la production de documents justifiant la relation de travail, les fiches d’affiliation au syndicat requérant. La prescription exigeant d’attester de l’inscription dans le registre du syndicat est particulièrement grave. Cela met en évidence le fait que les JCA jouent le rôle de juge et partie, ce qui devient dans la pratique un obstacle empêchant les groupes de travailleurs n’appartenant pas aux syndicats hégémoniques d’obtenir la signature d’un CCT par la voie de la déclaration de grève.
- xii) Si un syndicat aspire au statut de titulaire d’un CCT et qu’il y en a déjà un qui est déposé, la seule voie possible pour que les travailleurs aient un syndicat qui réponde à la volonté de la majorité est d’engager cette procédure. Dans certains Etats de la République, il n’est même pas donné cours à ces démarches, sous prétexte que ce serait un motif de rupture de la paix sociale. Les demandes à bénéficier du statut des titulaires sont exposées aux mêmes obstacles que ceux qui s’opposent aux déclarations de grève en vue de la signature d’un CCT: il est demandé aux requérants de présenter des noms, des signatures, des procès-verbaux d’assemblée faisant apparaître la volonté des travailleurs de formuler la revendication et des attestations justifiant la relation de travail.
- L’organisation syndicale imposée à l’origine par le patron peut se livrer à des actions de répression contre les travailleurs dissidents; l’une d’entre elles est la clause d’exclusion. C’est l’un des moyens de pression supplémentaires qui joue contre les travailleurs cherchant à changer de syndicat.
- La quasi-totalité des CCT qui sont déposés actuellement ne prévoient aucune amélioration allant au-delà des normes minimales prévues par la loi, ce qui fait ressortir qu’il s’agit d’un acte de simulation cherchant essentiellement à protéger le patron de l’apparition d’une autre organisation syndicale, ce qui porte atteinte à l’essence de la liberté syndicale prévue non seulement dans notre cadre national, mais également dans la convention no 87 de l’OIT. Ces obstacles aspirent au statut législatif, comme il ressort du projet de loi approuvé par le STPS, connu sous le nom de «réforme Lozano».
- Un pourcentage très réduit des demandes visant à obtenir la qualité de titulaire se conclut par un scrutin; les groupes qui y parviennent participent au scrutin pratiquement démembrés par la pression; nombre d’entre eux sont obligés de renoncer à cause de la nécessité économique, d’autres sont licenciés; à cela s’ajoutent les difficultés inhérentes aux scrutins eux-mêmes, qui sont souvent accompagnés d’une grande violence, comme le reconnaissent les autorités du travail elles-mêmes.
- xiii) Dans le modèle de contrat collectif de protection, le motif à caractère volontaire est dans la pratique utilisé pour dégrader les conditions de travail en décidant de mettre fin à un CCT pour signer immédiatement un autre contrat, avec le même syndicat ou un syndicat différent selon ce qui convient à l’entreprise, avec des salaires plus bas et des prestations moindres, et de plus en plus souvent avec des sous-traitants.
- Dans les cas où il est mis fin à un CCT, les autorités n’imposent généralement pas de conditions plus rigoureuses: elles n’exigent pas de prouver la volonté des travailleurs ni aucun document supplémentaire; elles suivent de toute évidence un critère différent de la rigidité avec laquelle elles font obstacle à une déclaration de grève pour signature de CCT; et c’est ainsi parce qu’un système de complicité totale est mis en place, système dans lequel la force du secteur patronal s’est imposée, tout particulièrement par l’intermédiaire de ses avocats qui soutiennent que cette liberté contractuelle ne peut être limitée en cas de fin volontaire.
- xiv) En ce qui concerne les travailleurs au service de l’Etat, la Constitution leur reconnaît le droit de grève dans la section X de l’alinéa B de l’article 123, et la loi réglementaire y afférente détermine les modalités de ce droit mais, dans toute l’histoire de ce régime de travail bureaucratique, aucune grève n’a eu lieu légalement, ce qui fait que ce sont des institutions pratiquement mortes.
- xv) Comme indiqué précédemment, dans la pratique, il existe deux voies fondamentales pour accéder à la signature d’un CCT, celle d’une déclaration de grève et celle prétendument volontaire. Ainsi, il existe deux mécanismes pour mettre en place le modèle de CCPP; d’une part, le principe établi dans l’article 923 de la LFT de ne pas donner suite à la demande écrite de déclaration de grève pour obtenir la signature d’un CCT s’il y en a déjà un de déposé, de l’autre, de créer des obstacles à la déclaration de grève déposée par un syndicat qui ne serait pas «acceptable pour le patron».
- Le modèle des contrats collectifs de protection patronale, tel qu’il a été décrit, fonctionne sur la base de pratiques visant à contenir l’organisation des travailleurs à partir du moment où elle est détectée, en mettant en œuvre des opérations d’espionnage à l’égard des groupes et organisations participant au processus, commençant par les menaces voilées et allant aux menaces directes, aux agressions physiques mettant en danger la vie et l’intégrité des travailleurs et de leurs familles, jusqu’au licenciement. Dans cette situation, l’exercice du droit syndical devient impossible.
- 805. La question centrale de la plainte déposée par la FIOM porte sur les dénommés «contrats collectifs de travail de protection patronale» définis par l’organisation plaignante de la manière suivante:
- Ce sont des instruments convenus entre le secrétariat général d’un syndicat dépourvu de vie réelle mais enregistré auprès de l’autorité et l’employeur dans le but de permettre à ce dernier de contourner le principe bilatéral lors de la détermination des conditions de travail.
- 806. D’une manière générale, notre système juridique ne prévoit pas les dénommés «contrats collectifs de travail de protection patronale» (CCPP). En ce sens, le gouvernement mexicain ne reconnaît d’aucune manière l’existence de ces contrats, puisque les organisations syndicales sont libres de se constituer, de rédiger leurs statuts, de désigner leurs représentants et dirigeants, ainsi que de réglementer leur structure et leur vie interne.
- 807. Les autorités du travail mexicaines se bornent à prendre note de la constitution des syndicats, de l’élection de leurs organes de direction et de leurs dirigeants, des statuts régissant leur vie et leur organisation interne, mais ils n’interviennent à aucun moment dans ces processus, en vertu du respect des dispositions figurant dans la convention no 87 de l’OIT concernant la liberté syndicale.
- 808. Les conditions requises par l’autorité du travail en vue de l’enregistrement d’un syndicat sont révisées par l’autorité administrative, conformément aux dispositions de l’article 365 de la loi fédérale sur le travail (ci-après «LFT»), qui énonce les conditions devant être remplies pour que les syndicats demandent leur enregistrement.
- 809. Les articles 368 et 374 de la LFT prévoient que l’enregistrement des syndicats par les autorités du travail produit des effets à l’égard de toutes les autorités en conférant aux syndicats la personnalité morale.
- 810. Cette situation ne porte nullement préjudice aux syndicats, puisque l’enregistrement du syndicat ne s’oppose pas au droit des travailleurs de constituer une organisation syndicale, d’élire ses organes de direction et d’établir ses statuts, étant donné que ce droit se trouve protégé tant par l’article 123, section XVI, de la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique que par l’article 357 de la LFT. Il s’ensuit qu’à partir du moment même de leur constitution les syndicats jouissent des droits correspondants, ce qui a été reconnu même par notre Cour suprême dans la thèse isolée ci-dessous reproduite:
- Neuvième époque.
- Instance: Assemblée plénière.
- Source: Semanario Judicial de la Federación y su Gaceta IX, juin 1999. Page: 1.5.
- Thèse: P. LII/99. Thèse isolée. Sujet(s): travail.
- Syndicats. Leur enregistrement ne produit pas d’effet constitutif: Les syndicats sont des personnes morales ayant capacité pour défendre leurs droits devant toutes les autorités et pour exercer les actions correspondantes, à partir du moment où les conditions définies par la loi respective en vue de leur constitution sont remplies, et non pas à partir de leur enregistrement auprès de l’autorité compétente, car l’enregistrement n’est pas une condition préalable de leur constitution; en effet, au travers de l’enregistrement, l’autorité correspondante atteste que l’acte constitutif remplit les conditions de fond exigées par la loi, mais elle ne confère pas au syndicat son existence ni la personnalité juridique.
- Amparo en révision 1339/98. Francisco Pacheco García et consorts. 11 mai 1999; unanimité de dix voix. Absent: José Vicente Aguinaco Alemán; rapporteur: Juan Díaz Romero. Greffier: Armando Cortés Galván.
- 811. Nous estimons qu’il convient d’exposer ci-après quelques arguments visant à fonder et à motiver dans les grandes lignes la manière dont les syndicats fonctionnent et sont organisés au Mexique.
- 812. Au Mexique, on entend par «syndicat» la définition figurant à l’article 356 de la LFT, qui prévoit:
- Article 356. Le syndicat est une association de travailleurs ou de patrons, constituée en vue de l’étude, de l’amélioration et de la défense de leurs intérêts respectifs.
- 813. La constitution légale d’un syndicat exige la réunion d’un minimum de 20 travailleurs en service actif conformément à l’article 359 de la LFT; néanmoins, les syndicats peuvent être constitués sans que l’octroi d’une autorisation ou d’un permis préalable de la part de l’autorité soit nécessaire. Ainsi, la relation entre les organisations syndicales et les autorités se limite à l’enregistrement; en d’autres termes, les autorités n’interviennent pas dans le cadre de la formation, du fonctionnement ou de la vie interne des syndicats, mais se bornent à tenir un registre de ces organisations.
- 814. Pour déterminer l’instance compétente pour procéder à l’enregistrement, il faut distinguer les syndicats relevant de la compétence fédérale et ceux relevant de la compétence locale, les premiers devant être enregistrés auprès du secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale (ci-après «STPS»), tandis que les seconds doivent être enregistrés auprès des conseils de conciliation et d’arbitrage de chaque Etat de la République.
- 815. La relation que les syndicats entretiennent avec les autorités postérieurement à leur constitution et à leur enregistrement est la même que dans le cas de toute autre personne morale, conformément aux dispositions des articles 368 et 374 de la LFT. En tant qu’associations ayant pour objet la défense de leurs membres, les syndicats ont pour fonction de représenter les travailleurs qui en font partie. Cette représentation légale sera assurée par le secrétaire général ou par la personne désignée par l’organe de direction, sauf disposition particulière des statuts, en application des articles 375 et 376 de la LFT.
- 816. La plainte déposée par la FIOM fait état d’irrégularités alléguées, à savoir:
- - La FIOM joint à sa communication diverses copies d’études, des chapitres de livres, des articles de journaux et de revues, pour tenter d’appuyer ses arguments infondés. A cet égard, le Comité de la liberté syndicale est prié de ne pas tenir compte de ces textes comme preuve des affirmations de l’organisation plaignante, puisqu’ils ne constituent que des opinions à caractère affirmatif, dans certains cas, et de nature académique, dans d’autres, qui doivent être appréciées en fonction de leur portée exacte, c’est-à-dire comme étant des expressions libres de leurs auteurs qui, même si elles s’appuient sur l’analyse de faits qui pourraient être réels, ne reflètent que des critères personnalisés qui ne pourraient être utilisés comme appui et référence pour fonder la plainte de la FIOM, d’autant plus qu’elles n’expriment pas de faits caractérisant des violations de la liberté syndicale d’organisations concrètes ou d’un nombre déterminé de travailleurs, puisqu’elles représentent des questions subjectives ayant trait à des aspects qui, s’ils peuvent se manifester de manière concrète dans des affaires spécifiques faisant l’objet d’une étude et d’une analyse, ne peuvent refléter l’ensemble de la réalité nationale et, en conséquence, ces textes ne devraient pas être pris en compte comme preuves de faits généraux.
- - De même, la FIOM signale que «les limitations du droit syndical ont été exprimées, en plus des autres voies, dans le cadre de 46 plaintes déposées devant le Comité de la liberté syndicale (ci-après le “CLS”) contre le gouvernement mexicain (jusqu’au mois de décembre 2008), qui portent sur 39 cas dans lesquels ont été obtenues 66 observations législatives entre 1990 et 2006, dont une seulement a été retenue en partie et, sur les 26 observations pratiques, aucune ne l’a été».
- Il ressort de cette déclaration que la FIOM accepte et reconnaît que les organisations syndicales dans notre pays disposent de plusieurs recours juridiques qu’elles peuvent faire valoir si elles estiment que leurs droits à la liberté syndicale ont été violés, y compris lorsqu’elles ont exercé les recours correspondants devant les instances internationales, tels que les plaintes déposées auprès du Comité de la liberté syndicale du BIT, qui s’est prononcé sur elles en adressant des observations au gouvernement mexicain, qui agit conformément au droit en s’efforçant de se conformer à ces observations dans la mesure où la législation mexicaine le lui permet, car il faut rappeler que les autorités ne peuvent faire que ce que la loi leur permet sans dépasser leurs facultés ou compétences.
- - A un autre endroit de sa plainte, la FIOM signale que «… il existe une vaste documentation faisant état de la manière dont la lenteur de la justice du travail et la violence avec laquelle sont réprimées les tentatives d’organisation des travailleurs (visible dans les cas présentés contre le Mexique, dans lesquels les licenciements, les menaces, les plaintes au pénal et l’emprisonnement de dirigeants sont constants) jouent contre l’organisation syndicale».
- A cet égard, il convient de signaler que tant les travailleurs que les organisations syndicales qui les représentent disposent des recours et voies de droit que notre système juridique prévoit pour exercer des actions correspondantes afin de solliciter, le cas échéant, la défense de leurs droits.
- - Dans les cas de licenciements injustifiés, les travailleurs peuvent agir individuellement ou collectivement auprès des autorités administratives ou juridictionnelles compétentes pour demander leur réintégration ou le versement des indemnités qui pourraient être dues conformément aux dispositions de la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique et de la législation du travail applicable. Il convient de souligner que le gouvernement fédéral a mis en place au profit des travailleurs des bureaux ayant pour mission principale de promouvoir la défense des droits sociaux, et notamment:
- – Orienter et conseiller les travailleurs, leurs syndicats ou ayants droit en ce qui concerne les droits et obligations découlant des normes en matière de travail, de prévoyance et de sécurité sociales, ainsi que les formalités, les procédures et les organes compétents auxquels ils peuvent s’adresser pour les faire valoir.
- – Recevoir de la part des travailleurs, de leurs syndicats ou ayants droit des plaintes en cas de non-respect et de violation des normes en matière de travail, de prévoyance et de sécurité sociales et, le cas échéant, inviter les patrons ou syndicats à comparaître pour faire connaître leur position, en les avertissant que le défaut de comparution est passible d’une amende pouvant atteindre 100 fois le montant du salaire minimum général journalier en vigueur au lieu et au moment du manquement.
- – Formuler les plaintes correspondantes devant les autorités compétentes en cas de non-respect et de violation des normes en matière de travail, de prévoyance et de sécurité sociales et porter à la connaissance du ministère public les faits susceptibles de constituer des infractions pénales.
- – Proposer aux parties intéressées des solutions amiables en vue du règlement de leurs conflits, moyennant la conclusion d’accords extrajudiciaires, et établir ces derniers sous forme d’actes authentiques.
- – Représenter les travailleurs, leurs syndicats ou bénéficiaires, lorsqu’ils le demandent, devant les autorités juridictionnelles ou administratives et devant toute autre institution publique ou privée, en vue de l’exercice des actions et recours correspondants selon la procédure ordinaire ou spéciale, y compris le recours en amparo, jusqu’au dénouement définitif de la procédure.
- Comme il ressort de ce qui précède, le gouvernement mexicain a institué des organes administratifs proposant des services d’orientation et de conseil juridique non seulement aux travailleurs à titre individuel, mais également aux organisations syndicales, afin de faire respecter les droits sociaux, y compris devant les autorités juridictionnelles en engageant les procédures correspondantes dont ils assurent le suivi, et en encourageant dans le même temps le règlement des conflits, au vu de quoi on ne saurait en aucune manière affirmer que le gouvernement mexicain viole les normes du travail qu’il encourage et soutient.
- - La FIOM affirme dans sa plainte que «le renforcement du corporatisme a favorisé le développement du modèle de la protection patronale, dont les contrats collectifs de protection patronale sont l’expression extrême …». Par cette affirmation, l’organisation syndicale cherche à faire croire que les patrons interviennent et exercent un contrôle au sein des syndicats, en partant de l’idée que ce sont eux qui les constituent sans qu’il y ait une représentation «réelle» des travailleurs, pour signer avec leurs représentants des contrats collectifs qui ne bénéficient qu’aux patrons.
- Une telle argumentation se révèle complètement erronée puisque, comme il a été indiqué précédemment, la législation du travail en vigueur prévoit les conditions que tout syndicat doit remplir pour obtenir son enregistrement en tant qu’association, mais la constitution des syndicats est libre et n’est soumise à aucune autorisation préalable de la part des autorités.
- Les syndicats ont le droit de déclarer la grève aux patrons en vue de la signature d’un contrat collectif de travail prévoyant des avantages supplémentaires pour les travailleurs en échange des services fournis. Dans ce cas, les contrats sont le résultat de la conciliation réalisée entre les travailleurs et les patrons, mais ils servent toujours l’intérêt des conditions générales de l’accomplissement du travail, ce qui fait ressortir une fois de plus le fait que les «contrats de protection patronale» invoqués par l’organisation plaignante n’existent pas.
- - La FIOM indique dans sa plainte que «… [les] JCA qui appara[issent] formellement comme le représentant des secteurs dans un système tripartite, sans tenir compte du fait que, les formes de représentation collectives étant viciées à l’origine, les JCA sont juge et partie et manquent en général de l’impartialité propre à tout juge …».
- Sur cette question, l’organisation plaignante n’est pas fondée à s’exprimer de telle manière, vu que les conseils de conciliation et d’arbitrage sont des organes créés pour régler les conflits entre le capital, représenté par les patrons, et le travail, représenté par les travailleurs, dont la composition est tripartite et prévoit l’intervention d’un représentant du gouvernement qui est impartial, ce qui vise à réaliser le juste équilibre dans le cadre des relations entre ouvriers et patrons.
- 817. La composition tripartite des conseils fédéraux de conciliation et d’arbitrage (ci-après «JFCA») est prévue aux articles 605, 606, 607, 608 et 609 de la LFT, ce qui fait que leurs décisions sont conformes au droit, sont équitables et cherchent à assurer l’équilibre entre les facteurs de production sans laisser prévaloir la décision d’une représentation particulière, puisque leurs décisions sont prises en la forme collégiale.
- 818. La Cour suprême de la nation a précisé dans plusieurs de ses avis que les conseils de conciliation et d’arbitrage devaient exiger la preuve du scrutin moyennant le vote secret des travailleurs, en cas de conflit portant sur la perte de la qualité de titulaire et l’administration d’un contrat collectif de travail.
- 819. L’article 931 de la LFT ne précise pas la manière dont les votes doivent être émis aux fins de la preuve du scrutin, mais on peut conclure, à partir d’une analyse systématique de cette prescription par rapport à d’autres dispositions de la même loi, et compte tenu du fait que le scrutin constitue le moment procédural au cours duquel peut être prouvée la volonté absolue et libre du travailleur quant au syndicat qui doit administrer le contrat collectif, qu’il faut protéger le caractère confidentiel de la volonté de la personne exprimant sa préférence afin d’éviter les influences extérieures susceptibles de faire varier sa décision et d’affecter sa sécurité lors de l’exercice de son vote dans le cadre du système de vie démocratique prévu dans la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique, et qui transcende tous les ordres de la vie sociale, y compris les syndicats.
- 820. Nous reproduisons ci-après la thèse de jurisprudence no 150/2008 de la deuxième chambre de la Cour suprême de la nation, ayant pour objet de régler la contradiction de jurisprudence entre les tribunaux collégiaux en matière de travail quant à la preuve du scrutin en cas de conflit portant sur la titularité du contrat collectif (Semanario Judicial de la Federación y su Gaceta, décision 150/2008, p. 451):
- Scrutin ayant pour objet de déterminer la qualité de titulaire du contrat collectif de travail prévu à l’article 931 de la loi fédérale sur le travail. Les conseils de conciliation et d’arbitrage doivent ordonner et garantir que les travailleurs émettent un vote personnel, libre, direct et secret. Conformément aux principes fondamentaux prévus dans la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique, les traités internationaux et les lois secondaires qui, conformément à l’article 133 de la Charte fondamentale, constituent la loi suprême de toute la nation, ainsi qu’aux principes généraux du droit et de la justice sociale, applicables en vertu de l’article 17 de la loi fédérale sur le travail, les travailleurs ont le droit d’exprimer leur opinion et leur préférence pour élire librement l’organisation qui les représentera, en étant protégés contre tout acte de discrimination. Cela étant, pour se conformer à ces principes, l’autorité du travail, en tant que maître de la procédure concernant la titularité du contrat collectif de travail, doit ordonner que la preuve du scrutin visée à l’article 931 de la loi citée soit apportée au travers d’une procédure garantissant, dans le cadre d’un système démocratique de liberté syndicale, le vote personnel, libre et direct de tous les travailleurs, étant donné que c’est le moment procédural au cours duquel peut être prouvée la volonté absolue et libre de restrictions de chacun d’entre eux quant au syndicat qu’ils estiment devoir être le titulaire et l’administrateur du contrat collectif de travail. Il appartient donc aux conseils de conciliation et d’arbitrage, aux niveaux local et fédéral, de veiller à ce que la preuve remplisse sa mission d’assurer la liberté totale de ceux qui exercent ce droit; à cette fin, ils doivent protéger le caractère confidentiel, authentique et libre de leur volonté, en évitant les influences extérieures susceptibles de faire varier leur décision et de mettre en danger leur intégrité lors de l’exercice du vote dans le cadre du système de vie démocratique et de liberté syndicale, qui représente une garantie sociale intimement liée aux libertés d’expression et d’association, ce qui suppose que chaque personne puisse prendre sa décision sans subir une quelconque pression, intervention ou usurpation. En conséquence, le conseil de conciliation et d’arbitrage compétent en ce qui concerne l’administration de la preuve en question devra, selon ce qu’il estime pertinent à la lumière des particularités de l’espèce: 1) demander en temps voulu une liste fiable, complète et à jour de tous les travailleurs pouvant voter, compte tenu des dispositions des sections II, III et IV de l’article 931 mentionné; 2) s’assurer que le lieu ou les lieux où se tiendra le scrutin offrent les conditions matérielles et de sécurité minimales en vue de son déroulement rapide, ordonné et paisible; 3) vérifier que la documentation et le matériel nécessaires et appropriés afin que le vote puisse se dérouler de manière sûre, libre et secrète sont disponibles le jour du scrutin; 4) constater que les mécanismes permettant d’assurer l’identification complète des travailleurs ayant le droit de participer au scrutin ont dûment été prévus; 5) vérifier que le décompte final des votes est effectué de manière transparente et publique par l’autorité du travail supervisant l’administration de la preuve, en la présence des représentants syndicaux et patronaux dûment habilités à cette fin; et 6) au cas où des objections sont présentées, organiser, avant le déroulement du scrutin et sans tarder, l’audience prévue dans la section V de l’article 931 susmentionné.
- 821. En conséquence, la thèse de jurisprudence citée institue l’obligation, à la charge du JFCA, de veiller, dans le cadre des procédures portant sur des demandes à bénéficier de la qualité de titulaire de contrats collectifs de travail, à ce que tous les scrutins des travailleurs se déroulent moyennant un vote secret, ce qui garantit la libre volonté des travailleurs et protège le caractère confidentiel de l’exercice de leur vote concernant le syndicat devant administrer le contrat collectif.
- 822. Le JFCA est un tribunal du pouvoir exécutif, son tripartisme est inhérent à son origine historique et répond à une réalité consistant dans l’équilibre des forces sociales. La structure tripartite du JFCA trouve son fondement dans l’article 123, alinéa A, section XX, de la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique et dans l’article 605 de la LFT. L’organisation tripartite des organes de la justice du travail a été considérée comme étant la forme idéale en vue du règlement des litiges.
- 823. La légitimité et la force du JFCA dépendent dans une large mesure du tripartisme, qui a permis de consolider une marge de certitude en matière de travail. Au-delà des pressions propres à toute négociation, il a su privilégier la raison et la loi.
- 824. En ce qui concerne le contrat collectif de travail, il est régi par l’article 386 de la LFT, qui prévoit:
- Article 386. Le contrat collectif de travail est la convention conclue entre un ou plusieurs syndicats de travailleurs et un ou plusieurs patrons, ou un ou plusieurs syndicats patronaux, en vue de définir les conditions selon lesquelles doit être effectué le travail dans une ou plusieurs entreprises ou établissements.
- 825. En vertu du principe de la liberté syndicale, il peut exister une pluralité de syndicats dans une entreprise, par établissement ou par catégorie.
- 826. Il est important de signaler que, conformément à l’article 387 de la LFT, le patron qui emploie des travailleurs membres d’un syndicat est obligé de conclure avec ce dernier, lorsqu’on lui demande, un contrat collectif de travail, et qu’en cas de refus les travailleurs peuvent exercer le droit de grève. Il est clair dans ce contexte que, conformément à la LFT, la prérogative de demander la conclusion d’un contrat collectif de travail appartient aux travailleurs au travers de leurs syndicats, et non pas aux patrons.
- 827. Le JFCA, fonctionnant dans des formations spéciales, est tenu des obligations de dépositaire des contrats collectifs et des règlements intérieurs du travail conformément à l’article 616 de la LFT.
- 828. Le JFCA procède à l’enregistrement et au contrôle des contrats collectifs de travail et assure la fonction de dépositaire de ces derniers; il analyse les conditions requises par la LFT et veille à ce qu’elles soient respectées, après quoi il donne son accord en vue de l’enregistrement correspondant.
- 829. Depuis 2003, le JFCA met en œuvre un programme de numérisation dans le cadre de la loi fédérale sur la transparence et l’accès aux informations publiques gouvernementales. Ce programme prévoit la numérisation de dossiers de contrats collectifs de travail, de conventions d’administration de contrats-lois et de règlements intérieurs du travail.
- 830. Au cours du mois de décembre 2008 ont été numérisés 16 062 contrats collectifs de travail, conventions d’administration du contrat-loi et règlements intérieurs du travail, figurant dans 20 482 dossiers qui contiennent 1 558 982 images, mises à la disposition des intéressés sur la page Web du STPS à l’adresse suivante: http://contratoscolectivos.
- stps.gob.mx/RegAso/legal_contratos.asp.
- 831. Les contrats collectifs de travail à durée indéterminée bénéficient à 1 995 000 travailleurs, et les conventions d’exécution et administration du contrat-loi favorisent près de 97 000 travailleurs, ce qui contribue d’une manière significative à la stabilité économique et aide au maintien de la paix sociale au Mexique.
- 832. Grâce à la publication des contrats collectifs de travail, n’importe quel travailleur a la possibilité de connaître le contrat et d’en obtenir une copie, ainsi que ses prestations, le syndicat auquel il appartient, le nom de son secrétaire général, ce qui se traduit par la formation d’une nouvelle conscience parmi les travailleurs et se répercutera de manière favorable dans le cadre du développement de leurs relations collectives et individuelles de travail et de la liberté syndicale.
- 833. Les conditions requises aux fins de la procédure de déclaration de grève en vue de la signature d’un contrat collectif de travail sont définies par les articles 920 et 923 de la LFT, qui se lisent comme suit:
- Article 920. La procédure de grève est déclenchée par la présentation du dossier de revendications, qui devra remplir les critères suivants:
- I. il doit être adressé par écrit au patron et contenir un exposé des revendications, annoncer l’objectif de la grève en cas de non-satisfaction, exprimer de manière concrète l’objet de la grève et signaler le jour et l’heure de la suspension du travail, ou la durée du préavis de grève;
- II. un double du dossier est déposé auprès du conseil de conciliation et d’arbitrage. Si l’entreprise ou l’établissement sont situés dans un lieu différent de celui du siège du conseil, le dossier pourra être déposé auprès de l’autorité du travail la plus proche ou de l’autorité politique supérieure du lieu de situation de l’entreprise ou de l’établissement. L’autorité dont émane la déclaration transmettra le dossier, dans les vingt-quatre heures, au conseil de conciliation et d’arbitrage, et informera par télégraphe ou par téléphone le président du conseil;
- III. le préavis de suspension du travail devra être adressé au moins six jours avant la date de la suspension du travail déclarée, et dix jours à l’avance lorsqu’il s’agit de services publics, dans le respect des dispositions de la présente loi. Le délai commence à courir à partir du jour et de l’heure où le patron a été notifié.
- Article 923. Il ne sera pas donné suite à la déclaration de grève lorsque celle-ci n’aura pas été formulée conformément aux prescriptions de l’article 920 ou lorsqu’elle aura été présentée par un syndicat qui n’est pas le titulaire du contrat collectif de travail ou l’administrateur du contrat-loi, ou lorsqu’elle a pour objet de demander la signature d’un contrat collectif en dépit de l’existence d’un tel contrat qui a déjà été déposé auprès du conseil de conciliation et d’arbitrage compétent. Avant de donner suite à une déclaration de grève, le président du tribunal devra vérifier que les conditions ci-dessus ont été remplies, ordonner la certification correspondante et communiquer par écrit sa décision au requérant.
- 834. Pour ce qui est des cas particuliers concernant la qualité de titulaire signalés dans le passage «Cas concernant la titularité d’un CCT» et «Cas Johnson Controls», le JFCA ne leur a pas donné suite et, partant, il n’y a pas manquement au principe de la liberté syndicale.
- 835. En ce qui concerne les documents justificatifs, point 4, lettre a), où il est fait allusion au JFCA, leur lecture révèle des situations générales et des commentaires, des articles de la LFT et des thèses de jurisprudence qui n’établissent nullement le non-respect du principe de la liberté syndicale et du droit syndical consacrés par la convention no 87 de l’OIT.
- 836. De même, dans le passage consacré aux preuves sont signalés de prétendus exemples de contrats collectifs de protection patronale dans le secteur aérien, et le contenu de l’article 387 de la LFT est reproduit une fois de plus à cet égard.
- 837. La Confédération des travailleurs du Mexique a indiqué que le droit syndical dans le domaine du travail était réglementé à l’article 9, paragraphes 1 et 4, et à l’article 123, paragraphe 1, et section XVI, de la Constitution, dans la convention no 87 de l’OIT ratifiée par le Mexique, ainsi que dans le titre septième de la LFT, concernant les relations collectives de travail; il est donc inutile d’exiger qu’un texte législatif soit édicté pour réglementer la question examinée, puisqu’il existe déjà un vaste cadre juridique.
- 838. En ce qui concerne la plainte présentée par la FIOM, à aucun moment n’ont été signalées des violations concrètes du droit syndical, mais sont seulement mentionnées des institutions du droit collectif telles que l’enregistrement des syndicats, la demande de la signature du contrat collectif de travail, la fin du contrat collectif de travail et la grève; ce fait n’est donc pas sujet à contestation.
- 839. L’Etat mexicain, agissant en tant qu’autorité, ne pourrait ni ne peut différencier les contrats collectifs de travail conclus devant lui, sauf en vertu des hypothèses définies par la LFT. Les types de contrats régissant les relations entre ouvriers et patrons prévus dans cette loi sont: 1) le contrat collectif de travail; 2) le contrat-loi; et 3) le contrat individuel.
- 840. Le contrat collectif de travail est la convention conclue entre un ou plusieurs syndicats de travailleurs et un ou plusieurs patrons, ou un ou plusieurs syndicats patronaux, en vue de définir les conditions selon lesquelles doit être effectué le travail dans une ou plusieurs entreprises ou établissements.
- 841. Le contrat-loi est la convention conclue entre un ou plusieurs syndicats de travailleurs et plusieurs patrons, ou un ou plusieurs syndicats patronaux, en vue de définir les conditions selon lesquelles doit être effectué le travail dans une branche déterminée de l’industrie et qui est déclarée obligatoire dans une ou plusieurs entités fédérales, dans une ou plusieurs zones économiques comprenant une ou plusieurs de ces entités, ou sur tout le territoire national.
- 842. En ce qui concerne le contrat individuel, la LFT le définit comme étant l’acte en vertu duquel une personne s’oblige à effectuer envers une autre un travail personnel subordonné, moyennant le paiement d’un salaire, les relations entre ouvriers et patrons ayant été définies antérieurement.
- 843. En conséquence, pour les autorités de l’Etat mexicain, il est impossible de procéder à une différenciation ou à un classement en tant que contrat collectif de protection patronale (CCPP), vu que les contrats collectifs, les contrats-lois et les contrats individuels possèdent la même nature juridique.
- 844. Quant à l’affirmation selon laquelle «dans leur immense majorité, ils ne bénéficient pas aux travailleurs puisqu’ils s’en tiennent aux normes minimales légales et ne sont déposés que pour imposer des syndicats», l’autorité analyse la légalité et le formalisme des contrats collectifs de travail (CCT) qui sont conclus devant elle, et qui doivent satisfaire à certaines exigences de forme.
- 845. Les mécanismes en vue de la conclusion d’un CCT sont pleinement identifiés et établis dans la LFT, au chapitre troisième concernant le contrat collectif de travail, qui s’étend de l’article 386 à l’article 403, toute pratique située en dehors de la loi se trouvant exclue, comme le savent les spécialistes en droit du travail mexicain et international. A cet égard, il faut rappeler le tripartisme fondamental qui fait partie des normes du droit du travail, prenant en compte les patrons, les travailleurs et le gouvernement. En conséquence, comme ce tripartisme constitue un principe de base de la justice du travail, il est inacceptable que la FIOM déclare que les conseils de conciliation et d’arbitrage, au niveau local ou fédéral, soient juge et partie, puisqu’ils jouent le rôle d’arbitre et/ou de conciliateur, en vue de résoudre les conflits du travail.
- 846. Les autorités mexicaines n’ont jamais négligé les recommandations émises par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du Bureau international du Travail, qui comme leur nom l’indique sont des recommandations que le gouvernement mexicain a prises en considération et respectées, en observant ainsi pleinement les dispositions de la convention no 87; en d’autres termes, le gouvernement mexicain n’a jamais restreint les droits d’association d’aucun travailleur mexicain.
- 847. Aucune limitation n’existe dans l’Etat mexicain en matière de droit syndical; il est important de signaler qu’au Mexique le droit syndical ou de réunion paisible ayant un objet licite quelconque n’est pas violé, y compris le droit syndical.
- 848. En vertu de la liberté que nous accorde notre Constitution politique des Etats-Unis du Mexique dans ses articles 5 et 123, ainsi que de l’engagement que le Mexique a assumé en ratifiant la convention no 87 de l’OIT, le gouvernement mexicain est tenu de protéger ces droits. Par conséquent, il a réglementé ces activités associatives, et peut ainsi conférer la vie juridique aux syndicats, ce qui est clairement établi à l’article 25, section IV, du Code civil fédéral du Mexique, en leur reconnaissant la personnalité morale avec tous les droits et obligations qui en découlent, ce qui prouve l’intérêt du gouvernement à préserver la liberté syndicale.
- 849. Quant à l’article 360 de la LFT, loin de constituer une limitation comme l’indique la FIOM, il représente un cadre juridique permettant d’accorder une qualité particulière à un ensemble de travailleurs associés en vue d’obtenir de meilleures conditions de travail, ainsi que de conférer la personnalité juridique à leur mouvement.
- 850. Pour pouvoir procéder à la classification des syndicats, il est nécessaire de savoir s’ils ont été constitués par des travailleurs d’une même profession, bureau ou spécialité; par des travailleurs fournissant leurs services dans une même entreprise; par des travailleurs fournissant leurs services dans deux ou plusieurs entreprises de la même branche d’industrie; par des travailleurs fournissant leurs services dans une ou plusieurs entreprises de la même branche d’industrie, implantées dans une ou plusieurs entités fédérales; ou par des travailleurs de professions différentes. Ces syndicats ne pourront être constitués que lorsque, dans la municipalité en question, le nombre des travailleurs d’une même profession est inférieur à 20; la LFT définit parfaitement les conditions devant être remplies en vue de la formation d’un syndicat; compte tenu du fait qu’ils ont tous des caractéristiques différentes et propres, il est nécessaire de les grouper et d’établir leur qualité et, pour cette raison, la LFT les groupe en syndicats corporatistes, d’entreprise, d’industrie, syndicats nationaux d’industrie et de bureaux divers.
- 851. Les conditions prévues par la LFT sont nécessaires pour aider les autorités du travail à résoudre l’affaire sur le fond, ainsi que pour établir la capacité juridique dont doit justifier le demandeur dans une procédure portant sur la qualité de titulaire, en vue d’exercer son droit.
- 852. La Confédération révolutionnaire des ouvriers et paysans (CROC) a fait part de son désaccord avec la plainte déposée par la FIOM auprès de l’OIT. Lors de la réunion du bureau régional de cette fédération pour l’Amérique centrale, le Mexique et la République dominicaine, qui s’est tenue les 15 et 16 avril 2009 à Buenos Aires, Argentine, les organisations mexicaines membres de la FIOM ont fait part de leur désaccord et ont condamné le mécanisme utilisé lors de l’élaboration de la plainte, qui a été portée à la connaissance des organisations membres postérieurement à son élaboration, à son dépôt et à sa publication dans la presse mexicaine.
- 853. La confédération a demandé le retrait immédiat de la plainte signée par MM. Jurgen Peters et Marcello Malentacchi et déposée par le comité exécutif de la FIOM auprès de l’Organisation internationale du Travail le 5 février 2009, concernant la convention no 87 de l’OIT, contre le gouvernement du Mexique, à cause du fait que la plainte n’a pas été rédigée en consultation avec les syndicats mexicains membres.
- 854. Le corps de la plainte porte fondamentalement atteinte et préjudice aux préceptes juridiques collectifs de défense des contrats collectifs que sont la qualité de titulaire du contrat collectif, le droit de grève et les clauses de sécurité syndicale, qui ne sont nullement en conflit avec la convention no 87 de l’OIT.
- 855. Cette confédération a indiqué que la justification de la plainte se référait à un ensemble de questions de fait et aux opinions de différentes personnes, concernant l’existence de contrats collectifs de travail signés entre un employeur et un organisme syndical, qui sont désignés par la dénomination de «contrats collectifs de protection patronale», et qu’au travers de ces contrats collectifs la convention no 87 se trouvait violée.
- 856. En somme, ce que les plaignants signalent se réfère à l’existence d’un acte juridique légitime et, en outre, légal, qui existe dans la pratique mexicaine du travail et qui, d’après les plaignants, consiste en la signature d’un contrat collectif de travail sans l’intervention des travailleurs d’une entreprise déterminée.
- 857. Le texte de la LFT, dans sa partie concernant les contrats collectifs, reflète parfaitement le contenu de la convention no 87 de l’OIT, puisque, comme on l’a déjà dit, les articles de la convention no 87 concernant le droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte et sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, principes énoncés à l’article 2 de la convention no 87, sont intégralement respectés. La lecture du reste des articles ne fait pas apparaître la pratique d’une forme spécifique de conclusion de contrats collectifs de travail.
- 858. Il convient de rappeler que le Mexique n’a pas ratifié la convention no 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective. Néanmoins, il ne faut pas considérer que la forme dans laquelle un contrat collectif de travail est signé ait quelque chose à voir avec la liberté syndicale ou avec le droit de négociation collective, puisque la loi mexicaine et les conventions citées visent le droit des personnes de former les organisations syndicales de leur choix et le droit des syndicats de négocier collectivement et, partant, on doit estimer que la signature entre une organisation syndicale que la loi considère comme une entité juridique et un employeur correspond à des actes non seulement légitimes et permis par la législation et les conventions internationales, mais représente également en soi l’exercice d’un droit consacré par la loi, à savoir le droit de conclure des conventions collectives.
- 859. Il convient de signaler, d’un autre côté, que les incapacités ou impossibilités présumées des travailleurs d’intervenir dans les contrats collectifs ne se présentent pas sur le plan du principe de la liberté syndicale, puisque la simple existence du contrat collectif de travail entre deux entités, les syndicats et l’employeur confirme que le principe de la liberté syndicale s’est déjà réalisé, et ce précisément au moment de la constitution du syndicat concluant le contrat collectif.
- 860. En somme, la CONCAMIN estime que la plainte contient une série d’opinions attribuées à diverses personnes, qu’elle produit une série de documents de nature journalistique et scientifique n’ayant aucun rapport avec la liberté syndicale et qui, en outre, ne peuvent être considérés comme valables, puisqu’ils ne représentent pas un fait certain et indubitable, étant donné qu’au vu de l’expérience mexicaine, dans l’immense majorité des cas, les publications journalistiques et scientifiques modifient, faussent ou déforment les propos des déclarants présumés. Pour ce qui est des publications annexées, il est clair qu’il s’agit de publications d’un secteur académique déterminé, affichant des tendances politiques nettement prononcées qui ne coïncident pas nécessairement avec celles de la majorité des citoyens ni avec celle des gouvernements élus de manière démocratique par les habitants du pays et, pour la même raison, elles ne sauraient davantage être prises en compte en tant qu’éléments indubitables.
- 861. Au vu de ce qui précède, la CONCAMIN nie le bien-fondé de ces allégations, puisqu’elles ne présentent aucun rapport avec le texte de la convention no 87.
- 862. En ce qui concerne les cas concrets signalés dans la plainte et portant sur la qualité de titulaire d’un contrat collectif dans les stations-service, il n’est pas possible de les accepter, puisque les employeurs ne sont pas définis d’une manière concrète; en ce qui concerne les cas des entreprises Nivel Superior de Servicios S.A. de C.V. et Superservicios Coapa S.A. de C.V., ils doivent être écartés, puisqu’ils n’ont rien à voir avec la plainte qui se réfère à l’existence de contrats collectifs de travail dénommés «de protection patronale», mais constituent apparemment des cas concernant des procédures ou des conflits collectifs où il existe une opposition entre deux organisations syndicales qui se disputent le droit à la qualité de titulaire et à la représentation des travailleurs dans un centre de travail, ce qui est de nouveau en contradiction avec la violation alléguée de la convention no 87, puisqu’il est expressément reconnu qu’il existe deux syndicats en conflit, et que l’un d’entre eux allègue avoir acquis le droit d’administrer le contrat collectif lors d’un scrutin.
- 863. Pour ce qui est du cas «Johnson Controls», il s’agit d’un exemple typique d’externalisation ou sous-traitance et, partant, ce cas ne présente non plus aucun rapport avec la plainte.
- 864. De même, dans le cas «Black & Decker», il s’agit de situations de licenciement et d’un autre conflit portant sur la qualité de titulaire, où il est également clair qu’il existe une opposition entre deux organisations syndicales et, pour la même raison, ce cas n’a aucun rapport avec la convention no 87 puisque, par définition, pour qu’un syndicat existe, il doit être formé par des travailleurs et si, en l’espèce, il existe deux syndicats en conflit, il est évident que la liberté syndicale s’est réalisée et que l’administration du contrat collectif reviendra au syndicat qui détient la majorité.
- 865. D’un autre côté, en se référant aux différentes propositions de réforme, les plaignants reconnaissent en substance qu’il existe actuellement un vide juridique, qui permet d’une part l’exercice du droit de grève en vue d’obtenir la signature d’un contrat collectif de travail, sans apporter la preuve du fait qu’on représente les travailleurs de l’entreprise en question, ce qui peut évidemment donner lieu à une fiction juridique, puisqu’il suffit de dire que l’on représente les travailleurs de l’entreprise pour pouvoir en principe déclencher un mouvement de grève, même si on ne représente pas les travailleurs de l’entreprise. Dans la pratique, cette confédération doit exprimer sa grande préoccupation en raison de l’existence de ce vide juridique, qui a donné lieu à un nombre infini d’abus et s’est transformé en un instrument d’extorsion et de chantage.
- 866. La vérité est que, dans le cadre des projets de réforme dans le domaine du travail, on a soutenu le principe selon lequel le fait de réclamer la signature d’un contrat collectif de travail exigeait la certitude du fait qu’on représente des travailleurs de l’entreprise déterminée, à défaut de quoi, le principe de la liberté syndicale se trouve en effet violé et les travailleurs d’une entreprise seraient obligés d’accepter, contre leur volonté, la présence d’un syndicat réclamant la signature d’un contrat collectif. C’est la raison pour laquelle les projets de réforme dans le domaine du travail prévoient cette mesure élémentaire de sécurité démocratique; au vu des personnes citées dans la demande, il est clair pour cette confédération que les chercheurs et universitaires mentionnés ont fait part de leur rejet de cette forme d’exercice syndical démocratique pour défendre l’idée de la supériorité de l’organisation syndicale sur la personne individuelle.
- 867. En conclusion, la CONCAMIN estime que les allégations dans la plainte déposée contre le gouvernement mexicain ne sont pas fondées sur le terrain de la liberté syndicale mais reposent sur des circonstances ayant trait à la forme des relations entre ouvriers et patrons dans le pays, qui sont parfaitement légales et, partant, licites, et considère dès lors que l’OIT doit rejeter les déclarations infondées figurant dans le document signé par les représentants de la FIOM.
- M. Tómas Natividad Sánchez, membre de la Confédération patronale de la République mexicaine (COPARMEX)
- 868. L’argumentation de la plainte contient plusieurs affirmations et faits qui ne sont pas certains et doivent être contestés en ce sens. Par exemple, il est affirmé que les propositions de réforme de la législation mexicaine du travail promues par le gouvernement lui-même vont à l’opposé de ce qui est signalé dans la plainte, alors qu’il n’existe pas de propositions du gouvernement fédéral tendant à réformer la législation du travail, mais des propositions qui ont été présentées par des députés et sénateurs des différentes législatures.
- 869. On cite des cas d’organisations syndicales réclamant la signature d’un contrat collectif de travail sans représenter les travailleurs de l’entreprise en question, puisque ces travailleurs ne se sont pas encore affiliés à un syndicat. Dans certaines zones, Etats ou régions du pays, lorsque l’on crée une entreprise ou que l’on annonce l’ouverture d’un commerce sans pour autant avoir commencé à embaucher des travailleurs, et parfois même sans que la date du début des activités soit proche, le futur employeur se voit adresser une déclaration de grève en vue de la signature d’un contrat collectif par ces organisations, la déclaration de grève étant maintenue jusqu’à ce que le patron commence ses activités.
- 870. La nécessité que les syndicats réclamant la signature d’un contrat collectif de travail avec une entreprise justifient au préalable auprès des autorités qu’ils représentent bien les travailleurs de ce centre de travail, ou certains d’entre eux, fait partie des sujets que les secteurs de production ont discutés sous la coordination des autorités fédérales du travail lors des négociations de la réforme du travail qui est en cours dans le pays.
- 871. De nos jours, les grandes et moyennes entreprises opérant dans le pays sont assujetties à des codes d’éthique internationaux qui sont appliqués et respectés au Mexique, et qui prévoient des règles qui n’envisagent pas un contrat tel que le contrat de protection, qui sont fermées et inconnues des travailleurs, qui devraient être les vrais bénéficiaires des contrats collectifs.
- 872. Il est certain que les normes mentionnées ont été et continuent d’être amplement discutées et revues par les secteurs de production dans le pays qui, sous la coordination du gouvernement fédéral, ont négocié de nombreuses réformes de la législation en vigueur, qui n’ont pas pu se réaliser en raison de problèmes d’ordre politique.
- 873. Au vu de tout ce qui précède, il est faux que notre législation en vigueur réduise à néant le droit syndical et que ce soit toujours les patrons qui choisissent le contrat qu’ils préfèrent; que notre législation comprenne des normes protégeant les travailleurs qui seraient hors de la portée de ces derniers et qu’il existerait un réseau de complicité instauré entre la justice du travail, le patron et les syndicats, et que dès lors existeraient les dénommés contrats de protection patronale.
- 874. En ce qui concerne les faits mentionnés dans la plainte, nous indiquons ce qui suit:
- - Il est faux qu’au Mexique les travailleurs n’élisent pas l’organisation syndicale qui représente leurs intérêts sociaux et que ce soit le patron qui élit le syndicat conformément à ses intérêts et signe un CCT en marge des destinataires de celui-ci.
- - Les cas joints en annexe, par lesquels les plaignants tentent d’expliquer les violations de la liberté syndicale et du droit syndical, n’attestent d’aucune manière ces violations.
- - La réglementation permise par la législation en vigueur au Mexique ne restreint pas le rayon d’action des syndicats, puisque le pays a choisi les différentes formes de syndicats précisément en respectant la liberté d’association, afin de permettre l’existence de: syndicats corporatistes, d’entreprise, industriels, syndicats nationaux d’industrie et de bureaux divers (art. 360 de la LFT).
- - La conclusion d’accords de respect et de collaboration entre les secrétaires généraux de divers syndicats et le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale ne viole pas mais au contraire protège la liberté syndicale et les contrats collectifs, qui découlent de cette dernière.
- - Il est faux que la preuve du scrutin soit entourée d’une atmosphère de violence et de pression afin d’empêcher les travailleurs d’accéder au lieu où il se déroule, puisque la Cour suprême de la nation s’est déjà prononcée, dans une jurisprudence nettement formulée, en faveur du vote secret en cas de conflits portant sur la qualité de titulaire de contrats collectifs de travail.
- - Les articles 2, 3, 5, 7 et 10 de la convention no 87 ne sont nullement violés, puisque notre législation en vigueur prévoit clairement ces droits et ils sont respectés intégralement selon les termes définis dans la convention citée, qui restent en conformité avec l’article 123, section XVI, de la Constitution et les articles 132 (sections X, XI, XXI et XXII), 354, 356, 357, 369, 368, 374 et 381 de la LFT.
- - Il n’est pas correct d’affirmer, sans preuve à l’appui, qu’il n’existe pas d’autorités qui puissent résoudre les conflits du travail d’une manière impartiale. Il existe au Mexique des tribunaux spécialisés en matière de travail et des tribunaux d’amparo qui règlent les conflits du travail, et qui ont été constitués conformément au droit et appliquent la législation en vigueur dans le pays d’une manière impartiale, en se soumettant au droit, et d’une manière rapide, efficace et gratuite.
- - Il est faux que des violations des droits visés dans la convention no 87 existent dans un projet de réforme de la LFT, puisque dans aucun des projets ayant été déposés devant la Chambre des députés ou le Sénat du Congrès de l’Union, qui comprennent plus de 300 initiatives de réforme, ne sont affectés les droits des travailleurs, et encore moins les droits liés à la liberté syndicale visés dans la convention no 87.
- 875. Dans sa plainte, la FIOM mentionne différents décisions et principes adoptés par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT, qui auraient prétendument été transgressés par le gouvernement du Mexique et font l’objet de la plainte, parmi lesquels nous mentionnons les suivants:
- - Au point 8 de la plainte, il est allégué que «la pratique existant dans le cadre du modèle mexicain, qui fait obstacle à l’exercice du droit syndical, rend inefficaces les contrats collectifs lorsque les travailleurs ne peuvent participer et exercer leur influence lors de la détermination de leurs conditions de travail».
- A cet égard, comme il a été déclaré dans le présent document, le gouvernement du Mexique a garanti, au travers de la Constitution et de la LFT, le droit des travailleurs de décider librement de s’associer en vue de protéger leurs conditions de travail et d’influencer l’amélioration de ces dernières, et il a été signalé systématiquement que l’organisation plaignante n’indiquait aucune situation ni aucun fait particulier permettant de supposer l’existence de ce qu’elle affirme.
- - Aux points 10, 11 et 12, la plainte mentionne que les CCPP limitent la jouissance et l’exercice des droits d’association, du droit de conclure des contrats collectifs et du pluralisme syndical de la part des travailleurs, en imposant des restrictions à la création de nouveaux syndicats et en donnant la préférence aux syndicats existants; et elle cite les paragraphes 296, 297, 309, 310, 339, 340, 341, 343 et 344 du Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT de 2006 (ci-après «Recueil de 2006»).
- - A cet égard, il convient de signaler que, comme il a été dit et démontré précédemment, le gouvernement du Mexique ne viole ni ne limite à aucun moment, ni en fait, ni en droit, la liberté syndicale ni le droit des travailleurs de conclure des contrats collectifs, et de rappeler que son rôle se limite à la tenue d’un registre des associations existantes, auxquelles il demande seulement de remplir certains éléments de nature formelle qui, dans la pratique, ne sont pas insurmontables pour ceux qui s’associent librement; la «prise de note» constitue une simple formalité d’enregistrement, et non pas de validation ou de reconnaissance, puisqu’au Mexique l’existence des associations n’est pas subordonnée à cette formalité, et encore moins à l’autorisation des employeurs.
- - Aux points 13 et 15, la FIOM affirme que l’un des piliers du modèle des contrats de protection sont les conseils de conciliation et d’arbitrage, et que l’Etat mexicain n’a pas réussi à établir des mesures de protection en faveur des travailleurs qui promeuvent la liberté syndicale, et cite les paragraphes 33, 770, 771, 772, 773, 775, 776, 780, 785, 338 et 1261 du Recueil de 2006, en raison du fait qu’il est juge et partie dans le cadre des procédures de prise de note ou d’enregistrement des syndicats, de signature, de qualité de titulaire et de fin des contrats collectifs de travail et de grève, et ne garantit pas la protection des travailleurs.
- - Cependant, dans les paragraphes précédents ont été dégagées les caractéristiques de la composition tripartite de la justice au Mexique, qui est transparente, impartiale et qui prévoit, lorsque le travailleur le demande, des conseils gratuits en vue de la protection de ses droits sociaux et syndicaux au travers du Bureau fédéral de la défense du travail. De même, la Cour suprême a établi des critères spécifiques pour garantir le droit d’élection aux travailleurs mexicains. A cela s’ajoute le fait, comme il a été mentionné tout au long du présent document, que la FIOM ne présente pas de preuves spécifiques à l’appui de son accusation.
- - Au point 14, la FIOM se plaint de la clause d’exclusion existant dans certains contrats collectifs de travail, en signalant qu’il est porté atteinte au droit des travailleurs de s’affilier à l’organisation de leur choix, et cite les paragraphes 363, 334, 335 et 368 du Recueil de 2006.
- A cet égard, comme il a été mentionné précédemment, la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique consacre, au travers de ses institutions les plus importantes et représentatives, aux articles 5 et 9, le droit au travail et à la liberté d’association.
- - Il ressort du point 16 que l’organisation plaignante estime que les contrats collectifs de protection violent le droit syndical, puisque les travailleurs manquent de syndicats correspondant à leurs intérêts, et il est mentionné qu’il est porté atteinte aux paragraphes 597, 966, 967 et 984 du Recueil de 2006.
- Comme il a été mentionné tout au long de ce document et conformément à l’opinion partagée par les secteurs ouvrier, patronal et gouvernemental, le modèle du contrat collectif de protection ne constitue pas une figure juridique reconnue au Mexique. De même, la FIOM ne présente pas de preuves, d’éléments ou de faits établissant d’une manière convaincante l’existence de ces contrats dans la pratique mexicaine du travail.
- - Au point 17, la FIOM mentionne l’ingérence de l’Etat au travers du système des contrats de protection, par l’application de critères discrétionnaires quant aux conditions que les organisations syndicales doivent remplir en vue de leur enregistrement, et elle se fonde sur les paragraphes 303, 375, 377, 381, 388, 389, 967, 296, 297, 299 et 986 du Recueil de 2006.
- A cet égard, et pour éviter les répétitions, l’Etat mexicain respecte profondément les institutions sociales créées en vue de la défense des intérêts des travailleurs et de leur droit à la liberté d’association, consacrée dans la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique, en rappelant que les conditions requises en vue de l’enregistrement ne sont que formelles et que, dès lors, il n’existe pas d’ingérence, ni de fait, ni de droit, de la part du gouvernement mexicain dans la vie des syndicats et, à plus forte raison, dans l’organisation de ces derniers, et en rappelant que les affirmations de la FIOM à cet égard sont obscures et générales et qu’elle ne présente pas d’éléments de preuve suffisants.
- - Au point 18, il est mentionné que dans le contexte des contrats collectifs de protection patronale, le droit de grève est réduit à néant, et cette affirmation est fondée sur les paragraphes 520, 521, 522, 523, 524 et 525 du Recueil de 2006.
- - Comme il a été mentionné précédemment, les contrats collectifs de protection patronale n’existent pas dans la législation mexicaine et, pour cette raison, ils ne peuvent être considérés, comme la FIOM cherche à le faire croire, comme un moyen de limiter le droit de grève des travailleurs protégés par la LFT.
- - Les points 19 et 20 se réfèrent à des projets de réforme de la LFT, qui, d’après la FIOM, présentent des violations graves des droits prévus dans la convention no 87, et il est procédé à une analyse du contenu des réformes. Il convient de signaler que ces réformes ne font pas partie du droit en vigueur et que les hypothèses auxquelles se réfère la FIOM sont des événements futurs dont la réalisation est incertaine, étant donné qu’avant d’être approuvées, les propositions de réformes législatives présentées par l’exécutif fédéral doivent être discutées au sein du Congrès de l’Union, conformément à l’article 72 de la Constitution politique des Etats-Unis du Mexique. Nous signalons en outre que l’étude présentée par la FIOM révèle une appréciation incorrecte de la portée possible des réformes qui, comme il a été indiqué, ne peuvent faire l’objet d’un examen, puisqu’elles ne font pas partie du droit en vigueur au Mexique.
- 876. Le système juridique mexicain ne prévoit pas la figure des dénommés «contrats collectifs de travail de protection patronale (CCPP)». En conséquence, le gouvernement mexicain ne reconnaît d’aucune manière l’existence de ces contrats, puisque les organisations syndicales sont libres de se constituer, de rédiger leurs statuts, de désigner leurs représentants et dirigeants, ainsi que de réglementer leur structure et leur vie interne.
- 877. Le document qui est censé représenter une plainte s’avère être un exercice conceptuel, obscur et général, puisqu’il ne précise pas d’infractions concrètes en matière de liberté syndicale, étant donné qu’il ne ressort pas des faits rapportés dans la communication que les droits sociaux des membres de la fédération plaignante aient été violés et que, de même, il n’en ressort aucunement que la liberté des travailleurs d’adhérer à une organisation syndicale ait été violée.
- 878. Le gouvernement mexicain a institué des organes administratifs qui proposent des services d’orientation et de conseil juridique non seulement aux travailleurs à titre individuel, mais également aux organisations syndicales, afin de faire respecter les droits sociaux, y compris devant les autorités juridictionnelles en engageant les procédures correspondantes dont ils assurent le suivi, et en encourageant dans le même temps le règlement des conflits, au vu de quoi on ne saurait en aucune manière affirmer que le gouvernement mexicain viole les normes du travail qu’il encourage et soutient.
- 879. Les syndicats ont le droit de déclarer la grève aux patrons en vue de la signature d’un contrat collectif de travail prévoyant des avantages supplémentaires pour les travailleurs en échange des services fournis. Dans ce cas, les contrats sont le résultat de la conciliation réalisée entre les travailleurs et les patrons, mais ils servent toujours l’intérêt des conditions générales de l’accomplissement du travail, ce qui fait ressortir une fois de plus le fait que les «contrats de protection patronale» invoqués par l’organisation plaignante n’existent pas.
- 880. La composition tripartite des conseils fédéraux de conciliation et d’arbitrage (ci-après «JFCA») est prévue aux articles 605, 606, 607, 608 et 609 de la LFT, ce qui fait que leurs décisions sont conformes au droit, sont équitables et cherchent à assurer l’équilibre entre les facteurs de production sans laisser prévaloir la décision d’une représentation particulière, puisque leurs décisions sont prises en la forme collégiale.
- 881. La thèse de jurisprudence no 150/2008 de la Cour suprême de la nation institue l’obligation, à la charge du JFCA, de veiller, dans le cadre des procédures portant sur des demandes à bénéficier de la qualité de titulaire de contrats collectifs de travail, à ce que tous les scrutins des travailleurs se déroulent moyennant un vote secret, ce qui garantit la libre volonté des travailleurs et protège le caractère confidentiel de l’exercice de leur vote concernant le syndicat devant administrer le contrat collectif.
- 882. Depuis 2003, le JFCA met en œuvre un programme de numérisation des contrats collectifs de travail dans le cadre de la loi fédérale sur la transparence et l’accès aux informations publiques gouvernementales.
- Grâce à la publication des contrats collectifs de travail, n’importe quel travailleur a la possibilité de connaître le contrat et d’en obtenir une copie, ainsi que ses prestations, le syndicat auquel il appartient, le nom de son secrétaire général, ce qui se traduit par la formation d’une nouvelle conscience parmi les travailleurs et se répercutera de manière favorable dans le cadre du développement de leurs relations collectives et individuelles de travail et de la liberté syndicale.
- 883. Les organisations syndicales dans notre pays disposent de plusieurs recours juridiques qu’elles peuvent faire valoir si elles estiment que leurs droits à la liberté syndicale ont été violés, y compris lorsqu’elles ont exercé les recours correspondants devant les instances internationales, tels que les plaintes déposées contre le gouvernement du Mexique auprès du Comité de la liberté syndicale du BIT.
- Entre 1954 et 2010, le comité susmentionné a examiné 48 cas concernant notre pays, dont 43 ont été classés par l’organe de l’OIT lui-même, et cinq sont en cours d’examen. Les cas classés indiquent que le gouvernement mexicain a donné suite aux recommandations émises par le Comité de la liberté syndicale, conformément au droit.
- 884. Les réformes des réglementations en matière du travail au Mexique ont été réalisées avec la collaboration du Bureau international du Travail, à la lumière des recommandations de celui-ci.
- 885. De l’avis de la Confédération des travailleurs du Mexique (CTM), les mécanismes en vue de la conclusion d’un contrat collectif de travail se trouvent pleinement identifiés et établis dans la LFT, toute pratique située en dehors de la loi étant exclue.
- 886. Les autorités mexicaines n’ont jamais négligé les recommandations émises par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du Bureau international du Travail, qui, comme leur nom l’indique, sont des recommandations, que le gouvernement mexicain a prises en considération et a respectées, en observant ainsi pleinement les dispositions de la convention no 87; en d’autres termes, le gouvernement mexicain n’a jamais restreint les droits d’association d’aucun travailleur mexicain.
- 887. Aucune limitation n’existe dans l’Etat mexicain en matière de droit syndical. Au Mexique, le droit syndical ou de réunion paisible ayant un objet licite quelconque n’est pas violé, y compris le droit syndical.
- 888. La Confédération révolutionnaire des ouvriers et paysans (CROC), organisation mexicaine membre de la FIOM, a condamné le mécanisme utilisé lors de l’élaboration de la plainte et a demandé le retrait immédiat de la plainte déposée par le comité exécutif de la FIOM.
- 889. La CONCAMIN estime que la plainte contient une série d’opinions attribuées à diverses personnes, que sont produits une série de documents de nature journalistique et scientifique n’ayant aucun rapport avec la liberté syndicale, et conteste le bien-fondé de ces allégations, parce qu’elles sont sans rapport avec le texte de la convention no 87.
- 890. En ce qui concerne les cas des entreprises Nivel Superior de Servicios S.A. de C.V., Superservicios Coapa S.A. de C.V. et «Black & Decker», ils doivent être écartés, puisqu’ils n’ont rien à voir avec la plainte, étant donné qu’ils constituent apparemment des cas concernant des procédures ou des conflits collectifs où il existe une opposition entre deux organisations syndicales qui se disputent le droit à la qualité de titulaire et à la représentation des travailleurs dans un centre de travail. Dans le cas «Johnson Controls», il s’agit d’un exemple typique d’externalisation ou sous-traitance et, partant, ce cas ne présente non plus aucun rapport avec la plainte.
- 891. En vertu des dispositions claires de la loi, la vie juridique des syndicats dépend de l’enregistrement, qui est effectué par les autorités du travail compétentes en la matière, à savoir le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, pour les syndicats fédéraux, et les conseils locaux de conciliation et d’arbitrage dans les différents Etats de la République et celui du district fédéral, au niveau local, qui sont des instances assurant la réglementation de la vie syndicale et donnant naissance à l’existence juridique des syndicats.
- 892. Il est faux que notre législation en vigueur réduise à néant le droit syndical et que ce soit toujours les patrons qui choisissent le contrat qu’ils préfèrent; que notre législation comprenne des normes protégeant les travailleurs qui seraient hors de la portée de ces derniers et qu’il existe un réseau de complicité instauré entre la justice du travail, le patron et les syndicats, et que dès lors existeraient les dénommés contrats de protection patronale.
- 893. Les articles 2, 3, 5, 7 et 10 de la convention no 87 ne sont nullement violés, puisque notre législation en vigueur prévoit clairement ces droits et ils sont respectés intégralement selon les termes définis dans la convention citée, qui restent en conformité avec l’article 123, section XVI, de la Constitution et les articles 132 (sections X, XI, XXI et XXII), 354, 356, 357, 359, 368, 374 et 381 de la LFT.
- 894. Au vu de ce qui précède, le Comité de la liberté syndicale est prié de rejeter la plainte déposée.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 895. Le comité observe que dans la présente plainte l’organisation plaignante remet en cause de façon générale le fonctionnement du système des relations du travail au Mexique en ce qui concerne la reconnaissance des organisations syndicales et de leurs comités exécutifs («prise de note») – qu’elle qualifie de discrétionnaire –; la possibilité pour l’employeur de signer un contrat collectif de portée générale avec une organisation syndicale de son choix avant que l’entreprise ne commence à opérer ou sans besoin d’attester la représentativité de celle-ci, ni la participation des travailleurs, se limitant à reprendre les minimums de protection requis par la législation du travail (d’après l’organisation plaignante l’immense majorité des contrats collectifs procède ainsi); les obstacles rencontrés dans la pratique pour démontrer à travers le vote la détention de la majeur représentativité par rapport à un autre syndicat; le manque d’indépendance, d’impartialité et la lenteur excessive des conseils de conciliation et d’arbitrage (JCA) chargés de traiter les plaintes en matière de violation des droits syndicaux; les obstacles à l’exercice du droit de grève, et les projets de loi visant à entraver encore davantage l’exercice des droits syndicaux. L’organisation plaignante dénonce l’existence d’un réseau de corruption instauré entre les organisations syndicales et les employeurs avec la complicité des autorités publiques, à travers les conseils de conciliation et d’arbitrage. Aussi, d’après l’organisation plaignante, lorsque les travailleurs tentent d’exercer leurs droits syndicaux dans un tel contexte, ils doivent faire face à des actes de violence, ainsi qu’à des menaces et des actes de discrimination. La CSI signale dans sa communication datée du 12 avril 2010 que la plainte repose sur la violation du droit syndical, bâti sur le principe selon lequel les travailleurs choisissent librement l’organisation syndicale qui représente ses intérêts en matière de travail; lorsque l’employeur choisit le syndicat en fonction de ses propres intérêts et signe une convention collective de travail (CCT) sans tenir compte des personnes bénéficiaires, les droits fondamentaux des travailleurs contenus dans la convention no 87 de l’OIT sont violés.
- 896. Le comité prend note que dans les informations complémentaires, l’organisation plaignante déclare que: 1) le contrat de protection (CCPP) n’est pas une figure contemplée par la législation du travail sous cette dénomination, que son nom lui vient d’un usage répandu au Mexique; 2) il a été signalé que la signature d’un contrat collectif est un acte unilatéral de l’employeur qui peut choisir le syndicat de sa préférence, y compris avant l’existence même de la source de travail; 3) il s’agit d’un acte légal dans la mesure où conformément à l’article 387 aucune condition n’est requise pour la signature du contrat collectif entre le représentant de l’entreprise et le pseudo syndicat, et qu’il n’est pas non plus nécessaire de consulter préalablement les travailleurs, ni même de justifier un nombre minimum de travailleurs; il suffirait que seuls deux d’entre mille travailleurs en fasse la demande pour que ces formalités soient observées et qu’une fois un tel contrat collectif signé, conformément à l’article 396, celui-ci soit applicable à l’ensemble des travailleurs de l’entreprise ou de l’établissement en question, même si ceux-ci ne sont pas membres du syndicat qui l’a célébré. Seules deux signatures sont requises pour la signature d’un contrat collectif, celle du représentant de l’entreprise et celle du secrétaire général du syndicat. Tout de suite après, celui-ci est déposé devant le conseil de conciliation et d’arbitrage compétent; 4) une fois le contrat déposé auprès du conseil de conciliation et d’arbitrage, un processus de protection est enclenché – qui empêche que d’autres travailleurs puissent exiger la signature d’une convention collective par voie de grève, tel que le souligne l’article 450, section II, de la Loi fédérale du travail. Comme le stipule l’article 923, il ne peut être donné suite à aucune déclaration de grève ayant pour objet la signature d’un contrat collectif si un autre a déjà été déposé, dans ce cas la place est déjà occupée et empêche à un syndicat authentique de solliciter la signature d’un contrat collectif et, en cas de refus, de faire un appel à la grève en vue de sa célébration; 5) une fois le contrat signé et déposé auprès du conseil de conciliation et d’arbitrage, les travailleurs n’ont d’autre choix que de contester la qualité de titulaire du contrat collectif de travail. Pour se voir reconnaître la qualité de titulaire du CCT il existe deux possibilités: obtenir l’enregistrement d’un syndicat qui respecte les conditions prévues par l’article 365 de la LFT ou faire une demande en vue d’obtenir la qualité de titulaire en démontrant via une procédure judiciaire, en général très compliquée, que le syndicat en question représente la majorité des travailleurs; 6) il faut souligner que, si pour signer un CCT la loi n’exige pas de justifier du soutien de la majorité ou d’un nombre minimum de travailleurs affiliés; en revanche, si un employeur refuse de signer un CCT, pour pouvoir déclencher une grève, en vertu de l’article 451, section II, de la LFT, il faudra dans ce cas justifier du soutien de la majorité; de sorte que la signature des CCT est entre les mains de l’employeur, situation qui conduit les pseudo-dirigeants syndicaux à chercher les faveurs des entreprises pour signer ce type de contrats; selon la FIOM, il suffit de consulter le site Internet du conseil local de conciliation et d’arbitrage du district fédéral (JCADF) pour confirmer le dépôt de CCT qui s’en tiennent aux normes minimales légales et sont signés dans plusieurs centres de travail à la fois; la FIOM souligne que le recours généralisé aux contrats de protection a été confirmé par d’importants chefs d’entreprises, ainsi que par des personnalités qui aujourd’hui occupent des postes clés au sein du ministère du Travail; et 7) d’après la FIOM, ce qui existe n’est autre qu’une simulation de la négociation collective. Des études menées à l’Université nationale autonome de Mexico (UNAM) par le chercheur Dr Alfonso Bouzas Ortíz confirment, si l’on se réfère aux registres des conventions collectives de la ville de Mexico, que plus de 90 pour cent desdits contrats ne font état d’aucun type d’existence ou de vie propre. Ces contrats ne sont ni révisés, ni négociés et se limitent à reprendre les minimums de protection requis par la loi. Il ne s’agit donc que de pseudo-conventions collectives. Le comité prend note que, selon la FIOM, divers secteurs démocratiques de la société ont exigé du gouvernement mexicain qu’il ratifie la convention no 98 de l’OIT, ce qu’il a refusé, alléguant que ceci porterait atteinte à la législation nationale, en particulier en ce qui concerne la clause d’exclusion (il s’agit d’une clause de sécurité syndicale), disposition légale qui, bien qu’elle continue à s’appliquer de façon assez ferme d’un point de vue légal, a été déclarée inconstitutionnelle à deux reprises par la Cour suprême de justice de la nation.
- 897. Le comité prend note des explications du gouvernement sur le contenu des normes légales et procédures disponibles, ainsi que les conclusions qu’il apporte sur le cas présent et qui résument parfaitement sa position:
- a) Le système juridique mexicain n’envisage pas un contrat tel que les dénommés «contrats collectifs de travail de protection patronale (CCPP)». En conséquence, le gouvernement mexicain ne reconnaît d’aucune manière l’existence de ces contrats, puisque les organisations syndicales sont libres de se constituer, de rédiger leurs statuts, de désigner leurs représentants et dirigeants, ainsi que de réglementer leur structure et leur vie interne.
- b) Le document qui est censé représenter une plainte s’avère être un exercice conceptuel, obscur et général, puisqu’il ne précise pas d’infractions concrètes en matière de liberté syndicale, étant donné qu’il ne ressort pas des faits rapportés dans la communication que les droits sociaux des membres de la fédération plaignante aient été violés et que, de même, il n’en ressort aucunement que la liberté des travailleurs d’adhérer à une organisation syndicale ait été violée.
- c) Le gouvernement mexicain a institué des organes administratifs proposant des services d’orientation et de conseil juridique non seulement aux travailleurs à titre individuel, mais également aux organisations syndicales, afin de faire respecter les droits sociaux, y compris devant les autorités juridictionnelles en engageant les procédures correspondantes dont ils assurent le suivi, et en encourageant dans le même temps le règlement des conflits, au vu de quoi on ne saurait en aucune manière affirmer que le gouvernement mexicain viole les normes du travail qu’il encourage et soutient.
- d) Les syndicats ont le droit de déclarer la grève aux patrons en vue de la signature d’un contrat collectif de travail prévoyant des avantages supplémentaires pour les travailleurs en échange des services fournis. Dans ce cas, les contrats sont le résultat de la conciliation réalisée entre les travailleurs et les patrons, mais ils servent toujours l’intérêt des conditions générales de l’accomplissement du travail, ce qui fait ressortir une fois de plus le fait que les «contrats de protection patronale» invoqués par l’organisation plaignante n’existent pas.
- e) La composition tripartite des conseils fédéraux de conciliation et d’arbitrage est prévue aux articles 605, 606, 607, 608 et 609 de la LFT, ce qui fait que leurs décisions sont conformes au droit, sont équitables et cherchent à assurer l’équilibre entre les facteurs de production, sans laisser prévaloir la décision d’une représentation particulière, puisque leurs décisions sont prises en la forme collégiale.
- f) La thèse de jurisprudence no 150/2008 de la Cour suprême de la nation institue l’obligation, à la charge du JFCA, de veiller, dans le cadre des procédures portant sur des demandes à bénéficier de la qualité de titulaire de contrats collectifs de travail, à ce que tous les scrutins des travailleurs se déroulent moyennant un vote secret, ce qui garantit la libre volonté des travailleurs et protège le caractère confidentiel de l’exercice de leur vote concernant le syndicat devant administrer le contrat collectif.
- g) Depuis 2003, le JFCA met en œuvre un programme de numérisation des contrats collectifs de travail dans le cadre de la loi fédérale sur la transparence et l’accès aux informations publiques gouvernementales. Grâce à la publication des contrats collectifs de travail, n’importe quel travailleur a la possibilité de connaître le contrat et d’en obtenir une copie, ainsi que ses prestations, le syndicat auquel il appartient, le nom de son secrétaire général, ce qui se traduit par la formation d’une nouvelle conscience parmi les travailleurs et se répercutera de manière favorable dans le cadre du développement de leurs relations collectives et individuelles de travail et de la liberté syndicale.
- h) Les organisations syndicales disposent de plusieurs recours juridiques qu’elles peuvent faire valoir si elles estiment que leurs droits à la liberté syndicale ont été violés, y compris lorsqu’elles ont exercé les recours correspondants devant les instances internationales, tels que les plaintes déposées auprès du Comité de la liberté syndicale du BIT. Entre 1954 et 2010, le comité susmentionné a examiné 48 cas concernant le Mexique, dont 43 ont été classés par l’organe de l’OIT lui-même, et cinq sont en cours d’examen. Les cas classés indiquent que le gouvernement mexicain a donné suite aux recommandations émises par le Comité de la liberté syndicale, conformément au droit.
- i) Les réformes des réglementations en matière du travail au Mexique ont été réalisées avec la collaboration du Bureau international du Travail, à la lumière des recommandations de celui-ci.
- j) De l’avis de la Confédération des travailleurs du Mexique (CTM), les mécanismes en vue de la conclusion d’un contrat collectif de travail se trouvent pleinement identifiés et établis dans la LFT, toute pratique située en dehors de la loi étant exclue.
- k) Les autorités mexicaines n’ont jamais négligé les recommandations émises par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du Bureau international du Travail, qui, comme leur nom l’indique, sont des recommandations, que le gouvernement mexicain a prises en considération et respectées, en observant ainsi pleinement les dispositions de la convention no 87; en d’autres termes, le gouvernement mexicain n’a jamais restreint les droits d’association d’aucun travailleur mexicain.
- l) Aucune limitation n’existe dans l’Etat mexicain en matière de droit syndical; il est important de signaler qu’au Mexique le droit syndical ou de réunion paisible ayant un objet licite quelconque n’est pas violé, y compris le droit syndical.
- m) La Confédération des travailleurs mexicains (CTM) a fait part de son désaccord avec la plainte déposée par la FIOM. La Confédération révolutionnaire des ouvriers et paysans (CROC), organisation mexicaine membre de la FIOM, a condamné le mécanisme utilisé lors de l’élaboration de la plainte et a demandé le retrait immédiat de la plainte déposée par le comité exécutif de la FIOM.
- n) La CONCAMIN estime que la plainte contient une série d’opinions attribuées à diverses personnes, qu’elle produit une série de documents de nature journalistique et scientifique n’ayant aucun rapport avec la liberté syndicale, nie le bien-fondé de ces allégations, puisqu’elles ne présentent aucun rapport avec le texte de la convention no 87.
- o) En ce qui concerne les cas des entreprises Nivel Superior de Servicios S.A. de C.V., Superservicios Coapa S.A. de C.V. et «Black & Decker» ils doivent être écartés, puisqu’ils n’ont rien à voir avec la plainte, mais constituent apparemment des cas concernant des procédures ou des conflits collectifs où il existe une opposition entre deux organisations syndicales qui se disputent le droit à la qualité de titulaire et à la représentation des travailleurs dans un centre de travail. Pour ce qui est du cas «Johnson Controls», il s’agit d’un exemple typique d’externalisation ou sous-traitance et, partant, ce cas ne présente non plus aucun rapport avec la plainte.
- p) En vertu des dispositions claires de la loi, la vie juridique des syndicats dépend de l’enregistrement, qui est effectué par les autorités du travail compétentes en la matière, à savoir le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, pour les syndicats fédéraux, et les conseils locaux de conciliation et d’arbitrage dans les différents Etats de la République et celui du district fédéral, au niveau local, qui sont des instances assurant la réglementation de la vie syndicale et donnant naissance à l’existence juridique des syndicats.
- q) Il est faux que la législation en vigueur réduise à néant le droit syndical et que ce soit toujours les patrons qui choisissent le contrat qu’ils préfèrent; que la législation comprenne des normes protégeant les travailleurs qui seraient hors de la portée de ces derniers et qu’il existe un réseau de complicité instauré entre la justice du travail, le patron et les syndicats, et que dès lors existeraient les dénommés contrats de protection patronale.
- r) Les articles 2, 3, 5, 7 et 10 de la convention no 87 ne sont nullement violés, puisque notre législation en vigueur prévoit clairement ces droits et ils sont respectés intégralement selon les termes définis dans la convention citée, qui restent en conformité avec l’article 123, section XVI, de la Constitution et les articles 132 (sections X, XI, XXI et XXII), 354, 356, 357, 369, 368, 374 et 381 de la LFT.
- 898. Le comité conclut que les déclarations de l’organisation plaignante et celles du gouvernement sont largement contradictoires. Le comité observe que le gouvernement se centre davantage sur l’aspect légal et nie l’existence des contrats collectifs de protection (CCPP), tandis que l’organisation plaignante met l’accent sur le fait qu’il s’agit de mécanismes qui se produisent dans la pratique dans la mesure où la loi n’exige pas des syndicats qu’ils justifient d’un minimum de représentativité pour enregistrer une convention collective, y compris avant même que l’entreprise ne commence à opérer. Le comité observe que le gouvernement remet en question la validité des exemples d’entreprises présentés par l’organisation plaignante pour argumenter sa plainte.
- 899. Le comité signale qu’à certaines occasions antérieures il a sollicité des réformes législatives visant à renforcer les droits syndicaux, il a constaté des retards excessifs de la part des autorités administratives ou judiciaires en lien avec certains enregistrements syndicaux ou la reconnaissance de certains comités exécutifs; de même, le comité a déjà eu connaissance de situations de violence entre groupes syndicaux qui se prétendaient plus représentatifs. Par ailleurs, la FIOM souligne qu’une part importante des problèmes soulevés vient du fait que, malgré la déclaration d’inconstitutionnalité à deux reprises des clauses de sécurité syndicale dénommées «clauses d’exclusion» par la Cour suprême de justice, ces clauses ont continué à s’appliquer de façon assez ferme en pratique.
- 900. De même, le comité observe qu’aussi bien l’organisation plaignante que le gouvernement ont communiqué que des projets de loi de réforme de la législation du travail et en matière syndicale avaient été déposés auprès du Congrès de la République.
- 901. Dans ces conditions, et considérant les contradictions manifestes entre les allégations de la partie plaignante et la réponse du gouvernement, et le fait que les organisations d’employeurs, la CTM et la CROC sont en désaccord avec la plainte, le comité invite le gouvernement à prendre des mesures pour initier un dialogue constructif avec les organisations de travailleurs (y compris les cinq organisations plaignantes) et les organisations d’employeurs, sur l’application de la législation du travail et du droit syndical. Ce dialogue devrait inclure: 1) les questions relatives aux clauses de sécurité syndicale «d’exclusion» déclarées inconstitutionnelles par la Cour suprême de justice pouvant conduire à certaines situations décrites dans la plainte; 2) les questions relatives à la représentativité minimale exigée aux organisations syndicales pour pouvoir négocier collectivement; et 3) les allégations relatives au manque d’impartialité des JCA et la durée présumée excessive de leurs procédures. Le comité demande au gouvernement de faire état des réunions tenues et des résultats de ce dialogue.
- 902. Le comité prie également le gouvernement de répondre spécifiquement aux allégations et exemples fournis par les organisations plaignantes concernant: 1) les personnalités publiques, y compris les autorités publiques, qui ont fait des déclarations concernant la réalité des conventions collectives de protection des employeurs et au nombre élevé de ces conventions; et 2) les cas spécifiques d’entreprises mentionnées aux paragraphes 796 à 799, y compris les allégations de fonctionnement déficient et partiel des conseils de conciliation et d’arbitrage (JCA) en relation avec l’exercice des droits syndicaux du syndicat STRACC.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 903. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité invite le gouvernement à prendre des mesures pour initier un dialogue constructif avec les organisations de travailleurs (y compris les cinq organisations plaignantes) et les organisations d’employeurs, sur l’application de la législation du travail et du droit syndical. Ce dialogue devrait inclure: 1) les questions relatives aux clauses de sécurité syndicale «d’exclusion» déclarées inconstitutionnelles par la Cour Suprême pouvant conduire à certaines situations contemplées dans la plainte; 2) les questions relatives à un degré minimum de représentativité exigé aux organisations syndicales pour pouvoir négocier collectivement; et 3) les allégations relatives au manque d’impartialité des conseils de conciliation et d’arbitrage (JCA) et la durée présumée excessive de leurs procédures. Le comité demande au gouvernement de faire état des réunions tenues et des résultats de ce dialogue.
- b) Le comité prie également le gouvernement de répondre spécifiquement aux allégations et exemples fournis par les organisations plaignantes concernant: 1) les personnalités publiques, y compris les autorités publiques, qui ont fait des déclarations concernant la réalité des conventions collectives de protection des employeurs et au nombre élevé de ces conventions; et 2) les cas spécifiques d’entreprises mentionnées aux paragraphes 796 à 799, y compris les allégations de fonctionnement déficient et partiel des conseils de conciliation et d’arbitrage (JCA) en relation avec l’exercice des droits syndicaux du syndicat STRACC.