DISPLAYINEnglish - Spanish
- 399. La plainte figure dans une communication du Collège des professeurs du Chili A.G. en date du 27 mai 2008. Le gouvernement a fait parvenir sa réponse dans une communication en date du 2 mars 2009.
- 400. Le Chili a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 401. Dans sa communication en date du 27 mai 2008, le Collège des professeurs du Chili A.G. allègue que, le 3 août 2007, le représentant légal de la Société éducative carmélite de Viña del Mar (SODEC Ltda.) a reçu notification d’un projet de convention collective présenté par le Syndicat des professionnels de l’éducation des écoles sous administration de cette entreprise, à savoir Jerusalén et Ciudad de Paz.
- 402. Le représentant légal en question, administrateur provisoire, a été nommé par le Sous-secrétariat à l’éducation, conformément à la décision no 3806 du 26 avril 2007, car l’accréditation de l’entreprise privée qui était l’administratrice des écoles susmentionnées avait été révoquée en vertu de la décision no 1635 du 6 juin 2007 de l’autorité étatique.
- 403. L’administrateur temporaire susmentionné, représentant de l’Etat chilien, a refusé de réceptionner ledit projet de convention collective et a refusé de négocier collectivement, permettant en outre, au mépris des dispositions légales en vigueur, à l’ancienne administratrice (sostenedora) et propriétaire des écoles en question de licencier, sans droit à indemnisation, les membres du Syndicat des professionnels de l’éducation des écoles susmentionnées, le 6 août 2007, en violation des dispositions expresses du Code du travail sur l’immunité de fonction durant le processus de négociation collective.
- 404. De la même manière, ledit représentant légal désigné par le gouvernement chilien a refusé d’exécuter la décision de 2007 de la deuxième chambre du tribunal du travail de Valparaíso, dans la plainte no 92-2007, ordonnant la réintégration de la déléguée syndicale licenciée Cecilia Arancibia Pastén.
- 405. L’organisation plaignante déclare que la décision du chef de la division juridique du Département du travail en date du 25 octobre 2007 et celle de l’inspecteur municipal du travail de Viña del Mar du 7 octobre 2007, qui sont jointes à la plainte, attestent de ces manquements.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 406. Dans sa communication en date du 2 mars 2009, le gouvernement déclare que les violations mentionnées dans le texte de la plainte se présentent comme suit: 1) le refus par l’administrateur provisoire des collèges de Jerusalén et Ciudad de Paz d’accepter une demande de négociation collective et de négocier collectivement; 2) le refus, par le même administrateur temporaire, d’exécuter la décision de la deuxième chambre du tribunal du travail de Valparaíso ordonnant la réintégration de la dirigeante syndicale doña Cecilia Arancibia Pastén; et 3) le 6 août 2007, l’ancienne administratrice (sostenedora) et propriétaire des écoles en question aurait licencié, sans droit à indemnisation, les membres du Syndicat des professionnels de l’éducation des établissements susmentionnés, en violation des dispositions expresses du Code du travail sur l’immunité syndicale durant le processus de négociation collective.
- 407. Le gouvernement indique que l’administrateur provisoire des établissements éducatifs à Jerusalén et Ciudad de Paz a été désigné par décision no 3806 du 26 avril 2007 du ministère de l’Education du Chili avec pour objectif de sauvegarder le droit à l’éducation des élèves des établissements susmentionnés pour l’année 2007, car l’autorité éducative susmentionnée avait constaté, au début de l’année scolaire, une série d’irrégularités dans la gestion de ces écoles par la SODEC Ltda., l’entreprise qui en était à l’époque l’administratrice (sostenedora). Le but de la nomination était de permettre «le déroulement normal des activités scolaires dans les deux établissements éducatifs» et «que les élèves de ces établissements puissent achever leurs études de manière normale jusqu’à la fin de 2007» dans les écoles où ils avaient commencé leur année scolaire.
- 408. L’objet de la nomination était de faire face à une situation présentant un délai et couvrant la période entre avril et décembre 2007 (la date de la fin de l’année scolaire), ainsi qu’il ressort du libellé de la décision no 3806 du ministère de l’Education en date du 26 avril 2007. Cet acte administratif visait à sauvegarder le droit à l’éducation des élèves des écoles en question qui, du fait de l’absence d’un d’administrateur (sostenedor), ne pouvaient plus prétendre à une subvention accordée par l’Etat par le décret no 177/1996 du ministère de l’Education ni dispenser un enseignement reconnu par l’Etat. Le but était aussi d’empêcher les élèves de perdre l’année scolaire 2007.
- 409. Le gouvernement a fait parvenir des informations du Département régional de l’éducation de Valparaíso indiquant que le 16 avril 2007 «une réunion a eu lieu avec les représentants de l’association des enseignants de Valparaíso et des membres du comité exécutif du syndicat des écoles pour discuter de moyens d’action possibles, au cours de laquelle il a été convenu que, avant le 26 avril 2007, le Département régional de l’éducation organiserait une réunion avec l’avocat d’ex-sociétaires ayant participé au processus de liquidation de l’entreprise en question afin de trouver un terrain d’entente sur les moyens d’accélérer la nomination d’un liquidateur pour l’entreprise, suite à quoi un accord a été conclu sur la nomination de l’administrateur provisoire par le ministère, dans les conditions requises».
- 410. Le gouvernement fait savoir que les travailleurs des établissements scolaires évoqués dans la plainte étaient tout à fait au courant de la situation qui les affecterait et, en particulier, de la fin imminente de leurs fonctions à partir de l’année scolaire 2008. Concrètement, le 5 mars 2007, le Département de l’éducation a averti les membres du syndicat et les enseignants des deux collèges que l’administratrice (sostenedora) des écoles cesserait d’être effective et des conséquences immédiates de cette situation au nombre desquelles la perte de l’accréditation pour fonctionner comme collège et le non-paiement de la subvention publique accordée pour chaque élève. Dans ces conditions, les établissements n’auraient pu fonctionner comme établissements éducatifs, même en 2007; néanmoins, pour ne pas que les élèves soient pris de court pour s’inscrire dans d’autres écoles et/ou qu’ils risquent de perdre l’année scolaire 2007, un administrateur provisoire a été nommé.
- 411. C’est dans ces circonstances que, le 30 juillet 2007 et quatre mois seulement avant la fin de la période de l’administration intérimaire des écoles susmentionnées, l’administrateur intérimaire a été informé d’un projet de convention collective qui porterait sur la période 2007-2010. L’administrateur provisoire n’avait ni l’autorité ni le budget pour engager les écoles sous son administration dans un processus de négociation collective réglementé en vertu du Code du travail.
- 412. Compte tenu de la situation décrite plus haut, et bien que l’administrateur provisoire ait effectivement refusé un processus de négociation collective (comme cela apparaît dans le rapport régulier no 4269 demandé à cette fin par la Direction nationale du travail), il convient de noter que les conditions de travail que ce projet entendait régir n’allaient pas au-delà de décembre 2007, date d’expiration de l’autorisation accordée par l’administration intérimaire. En d’autres termes, l’accord n’aurait pu être appliqué que durant quatre mois.
- 413. Or, comme cela est prévu dans le premier paragraphe de l’article 347 du Code du travail du Chili, «la durée des conventions collectives et des sentences arbitrales ne sera pas inférieure à deux ans ni supérieure à quatre ans». Dans ces conditions il n’était pas possible de s’engager dans un processus dit de «négociation collective réglementée» prévu par la réglementation nationale.
- 414. Conformément au principe de bonne foi, largement reconnu dans la jurisprudence du Comité de la liberté syndicale dans plusieurs rapports, il était approprié et conforme à ce principe d’avertir les travailleurs de la perte imminente de leurs sources de travail et de les encourager à trouver d’autres établissements éducatifs plutôt que de négocier des conditions de salaire et de travail qu’il était impossible d’assurer. Cela revenait à organiser une négociation illusoire et non réelle. De fait, selon la jurisprudence du Comité de la liberté syndicale, «il importe qu’employeurs et syndicats participent aux négociations de bonne foi et déploient tous les efforts pour aboutir à un accord; des négociations véritables et constructives étant nécessaires pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties».
- 415. S’agissant de l’allégation selon laquelle l’administrateur provisoire nommé aurait refusé d’exécuter la décision de la deuxième chambre du travail du tribunal de Valparaíso dans le cadre de la plainte no 92-2007, ordonnant la réintégration de la dirigeante syndicale doña Cecilia Arancibia Pastén, le gouvernement déclare que, selon un rapport demandé par la Direction nationale du travail, il est établi que la Direction régionale du travail de Valparaíso a effectivement lancé cette procédure pour pratique antisyndicale, mais contre l’entreprise SODEC Ltda., car c’est cette entreprise, en qualité d’administratrice (sostenedora) des écoles et employeuse de la responsable syndicale, qui a licencié cette dernière. Selon les informations fournies par la Direction du travail, aucune indication ne permet de dire que l’ordre provisoire de réintégrer la dirigeante syndicale adressé à l’administratrice (sostenedora), dans le cadre d’une procédure pour pratiques antisyndicales, a été exécuté. Pour l’heure, l’affaire est à l’examen et aucun jugement définitif n’a été rendu.
- 416. En ce qui concerne la troisième allégation de la plainte, à savoir que le 6 août 2007 l’ancienne administratrice (sostenedora) aurait licencié, sans droit à compensation, les membres du Syndicat des professionnels de l’éducation des écoles concernées, en violation des dispositions expresses du Code du travail sur l’immunité durant la négociation collective, le gouvernement déclare que, sur la base d’un rapport de la Direction nationale du travail, la Direction régionale du travail de Valparaíso a porté le cas no 757-2007 devant la deuxième chambre du tribunal du travail de Valparaíso pour licenciement illégal des travailleurs protégés par l’immunité syndicale durant la négociation collective. L’affaire est en cours devant le tribunal et aucun jugement définitif n’a été rendu.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 417. Le comité note que, dans la présente plainte, l’organisation plaignante allègue les faits suivants: 1) le refus de l’administrateur provisoire de la Société éducative carmélite de Viña del Mar (SODEC Ltda.), et plus concrètement des établissements éducatifs de Jerusalén et de Ciudad de Paz, de réceptionner le projet de convention collective présenté par le syndicat et de négocier collectivement; 2) le licenciement illégal, le 6 août 2007, des membres du syndicat, en violation des dispositions légales relatives à l’immunité syndicale; et 3) le refus de l’administrateur provisoire susmentionné d’exécuter une décision de justice ordonnant la réintégration de la dirigeante syndicale Cecilia Arancibia Pastén. L’organisation plaignante explique que l’administrateur provisoire a été nommé par le Sous-secrétariat d’Etat le 26 avril 2007 après que l’accréditation de l’entreprise SODEC Ltda. a été révoquée le 6 juillet 2007.
- 418. Le comité prend note des déclarations du gouvernement expliquant le contexte des allégations comme suit: 1) le ministère de l’Education a constaté au début de l’année scolaire (2007) une série d’irrégularités dans l’administration de l’entreprise; 2) la nomination de l’administrateur provisoire par les autorités visait à garantir jusqu’à la fin de l’année scolaire, en décembre 2007, le droit à l’éducation des élèves des deux établissements éducatifs afin que les étudiants ne perdent pas l’année scolaire 2007; selon le gouvernement, en l’espèce, la société à responsabilité limitée en question ne pouvait ni prétendre à une subvention publique ni assurer un enseignement reconnu par l’Etat (en raison de la perte de l’autorisation de fonctionner comme établissement agréé); le gouvernement se réfère effectivement à un processus de liquidation de la société; 3) en avril 2007, les autorités du ministère de l’Education ont organisé une réunion avec les membres du collège de professeurs de la ville de Valparaíso et des membres du comité exécutif du syndicat des établissements concernés pour étudier les moyens d’action possibles, et un accord a été conclu sur la nomination d’un administrateur provisoire. En tout état de cause, selon le gouvernement, les travailleurs des établissements scolaires et les membres du syndicat savaient que leurs fonctions cesseraient de manière imminente, à partir de l’année scolaire 2008, et en avaient été informés par le Département de l’éducation en mars 2007.
- 419. Plus spécifiquement, en ce qui concerne le refus allégué de l’administrateur provisoire désigné par les autorités de réceptionner et de négocier le projet de convention collective présenté par le syndicat, le comité prend note que, selon le gouvernement: 1) plutôt que de négocier des conditions de travail et de rémunération impossibles à réaliser dans les conditions décrites, précédemment, il était conforme au principe de bonne foi d’avertir les travailleurs de la perte imminente de leur emploi et de les encourager à travailler dans d’autres établissements; 2) le projet de convention collective a été présenté par le syndicat le 30 juillet 2007 (quelques mois avant l’expiration de la période de l’administration intérimaire des écoles) et visait à couvrir la période 2007-2010, de sorte que l’administrateur provisoire n’avait ni l’autorité ni le budget pour participer à un processus de négociation collective avec des écoles qui allaient fermer à la fin de 2007; 3) en vertu de l’article 347 du Code du travail, les conventions collectives doivent avoir une durée qui ne sera pas inférieure à deux ans, ce qui signifie qu’il n’était pas possible de négocier dans le cadre de la négociation collective réglementée prévue par le Code du travail. De l’avis du comité, la référence à une négociation collective «réglementée» (impossible, selon le gouvernement, d’un point de vue juridique) implique que d’autres types d’accords ne sont pas exclus (la négociation collective non réglementée existe aussi au Chili), par exemple ceux sur la mise en œuvre effective des normes sur les prestations légales au moment de la cessation de travail.
- 420. Le comité conclut que le refus de l’administrateur provisoire de négocier, dans le cadre de la négociation collective réglementée, un projet de convention collective qui resterait applicable même plusieurs années après la fermeture des deux écoles ne constitue pas, en l’espèce, une violation des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective; il estime toutefois que l’administrateur provisoire aurait dû expliquer les raisons de son refus aux autorités du ministère de l’Education ainsi qu’au syndicat, au lieu de refuser (comme indiqué dans les documents envoyés par l’organisation plaignante) de donner des réponses et de communiquer le projet de texte à l’ensemble des travailleurs, comme exigé par la loi lorsqu’un syndicat présente un projet de convention collective à une entreprise. Le comité considère aussi que l’administrateur provisoire aurait dû être ouvert au dialogue et à la négociation relative à l’impact de la fermeture des écoles sur les travailleurs et sur leurs droits.
- 421. S’agissant de l’allégation relative au licenciement de la secrétaire générale du syndicat, Mme Cecilia Arancibia Pastén, et du refus de l’administrateur provisoire d’exécuter la décision de l’autorité judiciaire ordonnant sa réintégration, le comité note que, selon le gouvernement: 1) ce sont les autorités régionales du travail qui ont lancé la procédure sur les pratiques antisyndicales; 2) rien n’indique que le jugement de réintégration provisoire rendu par le tribunal ait été exécuté; 3) l’affaire est en cours devant le tribunal et aucun jugement définitif n’a été rendu. Le comité regrette que l’administrateur provisoire n’ait pas exécuté le jugement de réintégration rendu par l’autorité judiciaire, même s’il comprend que la question de la réintégration n’est plus d’actualité, dans la mesure où les deux écoles ont été fermées. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de la procédure judiciaire et espère que, si des pratiques antisyndicales sont avérées, le jugement définitif prévoira le paiement de tous les salaires et prestations légales dus à la secrétaire générale du syndicat.
- 422. Enfin, en ce qui concerne le licenciement allégué des membres du syndicat, sans droit à indemnisation, le 6 août 2007, le comité note que, selon le gouvernement, un procès pour licenciement illégal, durant un processus de négociation collective, de travailleurs protégés par leur mandat syndical est en cours. Selon le gouvernement, les poursuites ont été engagées sur la base d’un rapport de la Direction nationale du travail. Le comité croit comprendre que la question de la réintégration de ces travailleurs n’est plus d’actualité, après la fermeture des deux écoles. Le comité prie le gouvernement de lui communiquer le résultat de ce procès et espère que, si des pratiques antisyndicales sont avérées, les personnes intéressées recevront les salaires et les autres prestations légales qui leur sont dus.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 423. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
- Le comité prie le gouvernement de lui communiquer le résultat des procès relatifs au licenciement de la secrétaire générale du syndicat plaignant et des membres de ce syndicat et espère que, si des pratiques antisyndicales sont avérées, les intéressés percevront les salaires et les autres prestations légales qui leur sont dus.