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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
- 124. Le comité a examiné ce cas, qui concerne des allégations selon lesquelles des irrégularités auraient été commises dans le processus de mise en place d’une nouvelle structure de négociation, appelée Conseil salarial national (NPC), ainsi que dans la composition, le mode de désignation des représentants et les objectifs de cet organisme, à sa réunion de mars 2008. [Voir 349e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 301e session, paragr. 900-958.] A cette occasion, le comité a formulé la recommandation suivante:
- Le comité demande au gouvernement de reprendre des initiatives visant à engager des consultations pleines et franches avec les représentants des partenaires sociaux ayant une représentativité déterminée selon des critères objectifs, en vue d’avoir des discussions approfondies sur les moyens d’améliorer le fonctionnement, la composition et les objectifs du NPC, de manière à aboutir en la matière à une conclusion satisfaisante pour toutes les parties concernées. Le comité demande à être tenu informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- 125. Le gouvernement a communiqué ses observations les 9 avril et 29 mai 2008. Il exprime tout d’abord son inquiétude devant la conclusion du comité selon laquelle les consultations avec les partenaires sociaux auraient été unilatéralement interrompues sans que le temps nécessaire ait été accordé à l’examen approfondi des points de vue des parties en se donnant tous les moyens de parvenir à une position commune car, à son avis, les syndicats ont eu toute possibilité de discuter du mécanisme destiné à remplacer le Comité national tripartite, comme le laissent apparaître les comptes rendus des diverses réunions tenues avec leurs représentants. Etant donné que, lors de la réunion du 5 février 2007, le président de la Fédération des agents d’Etat a déclaré qu’il fallait cesser toute discussion sur le Conseil national des salaires (rebaptisé ultérieurement Conseil salarial national (NPC)), puisque l’ensemble des syndicats étaient opposés à sa création, ce sont en fait les représentants des organisations de travailleurs eux-mêmes qui se sont dissociés du processus.
- 126. Le gouvernement ajoute qu’aucun projet de législation ne pouvait être fourni aux syndicats car il avait été décidé le 26 janvier 2007 d’établir le NPC par voie administrative, et donc aucun texte ne pouvait leur être fourni. Le gouvernement avait envisagé à un moment donné de prendre les dispositions nécessaires pour créer le NPC par voie législative en modifiant la loi sur les relations professionnelles (IRA) mais, ayant fait sienne la recommandation du directeur du Département des normes internationales du travail tendant à examiner séparément la création du Conseil national salarial et le projet de révision de la législation, il a agi en conséquence.
- 127. En ce qui concerne la question de la nomination unilatérale de représentants des syndicats devant siéger au NPC, il est indiqué au paragraphe 947 que le gouvernement renvoie à l’étude d’ensemble de 1992 sur les mécanismes de fixation des salaires. Le gouvernement soutient en effet que, confronté au refus des syndicats de participer au NPC nouvellement créé, il n’a eu d’autre choix que de nommer des représentants de travailleurs s’étant montrés désireux de siéger au NPC pour garantir que les intérêts des travailleurs y soient dûment pris en compte. Le gouvernement ajoute que, en dépit de la lettre datée du 13 avril 2007, que lui ont adressée les représentants des syndicats pour l’informer qu’ils ne soumettraient pas les noms de représentants susceptibles de siéger au NPC, le ministre a rencontré des représentants des syndicats le 16 avril 2007 et les a invités à y participer, même en protestant. Ils ont été de nouveau invités, par lettre datée du 16 avril 2007, à revenir sur leur décision. Le gouvernement souligne à cet égard qu’aucun effort n’a été épargné pour assurer la participation des syndicats les plus représentatifs au conseil.
- 128. Le gouvernement appelle l’attention sur le fait que, dans sa réponse, il s’est focalisé sur les éléments principaux de la plainte et s’est appuyé sur des faits et non sur des impressions. Il juge préoccupante la référence faite à la recommandation (no 113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960, qui, en sa qualité même de recommandation, ne saurait créer d’obligations pour le gouvernement. Sa décision de procéder à l’établissement du NPC et à la nomination de représentants de travailleurs devant y siéger s’appuyait sur les observations formulées par la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations dans son étude d’ensemble de 1982 sur la convention no 144 et dans son étude d’ensemble de 1992 ainsi que sur la convention no 26. Les conventions nos 26 et 144 ont toutes les deux été ratifiées par le gouvernement de Maurice. Face au refus catégorique des représentants des travailleurs de siéger au NPC, le gouvernement se devait d’envisager d’autres solutions pour servir au mieux les intérêts des travailleurs. Il ne pouvait être tenu en otage par un groupe de syndicats ne représentant que 20 pour cent des travailleurs et ne tenant aucun compte des intérêts des 80 autres pour cent. Le gouvernement rappelle les observations formulées par la commission d’experts dans son étude d’ensemble de 1992 sur le mécanisme de fixation des salaires: «ce qui n’empêche pas les autorités compétentes, dans certains cas où les organisations n’ont proposé aucun nom, de désigner les représentants desdites organisations auprès des organismes chargés de fixer les salaires minima». Le gouvernement s’est appuyé sur ces observations pour arrêter les mesures qu’il a prises dans les conditions décrites.
- 129. Par ailleurs, d’après le gouvernement, étant donné que le comité n’avait pas recommandé la dissolution du NPC comme le souhaitait l’organisation plaignante, de nouvelles consultations ont été engagées avec les parties prenantes en vue de parvenir, dans la mesure du possible, conformément à la recommandation du comité, à un consensus sur la meilleure façon d’améliorer le fonctionnement, la composition et les objectifs du NPC. En outre, le président du NPC, auquel il est fait référence dans la plainte, a démissionné de ses fonctions pour prendre des fonctions à l’étranger, et un nouveau président, qui est un ancien haut fonctionnaire à la retraite, l’a remplacé. Les parties concernées n’ont formulé aucune objection contre sa nomination.
- 130. Le 10 avril 2008, une réunion a été organisée avec les représentants de l’ensemble des fédérations syndicales, regroupées au sein de la Plate-forme syndicale commune (TUCP) pour discuter de la manière dont pourraient être améliorés le fonctionnement, la composition et les objectifs du NPC. A cette occasion, les représentants des fédérations ont insisté sur le fait que le taux d’inflation devait être le seul critère de détermination de la compensation salariale annuelle, et ils ont demandé en outre: i) que le président du NPC soit nommé «par consensus, par les trois partenaires sociaux»; ii) que le nombre des représentants de travailleurs siégeant au NPC soit porté à dix car dix membres au total représentaient le gouvernement et les employeurs au conseil, les représentants du gouvernement étant considérés comme des représentants des employeurs puisque le gouvernement est lui aussi un employeur; iii) que la nomination des représentants des travailleurs soit effectuée par les syndicats eux-mêmes, en fonction de leur représentativité; iv) que le gouvernement soit tenu d’accepter ou de rejeter dans leur intégralité les recommandations du NPC, si elles ont fait l’objet d’un consensus, et que les syndicats aient le droit de déclencher une grève si aucun consensus n’est recueilli au niveau du NPC, et si le gouvernement décide d’une compensation salariale inacceptable pour les travailleurs; et v) qu’en attendant l’issue des discussions en cours sur le NPC un comité indépendant soit institué immédiatement avec la participation des syndicats en vue d’évaluer la perte de pouvoir d’achat résultant de la hausse des prix au cours des douze derniers mois.
- 131. Le gouvernement a examiné les observations et propositions de la TUCP. En ce qui concerne les demandes des syndicats figurant sous i) et iii) ci-dessus, le gouvernement a noté que tel a toujours été le principe régissant ces nominations mais que, étant donné la position des syndicats, d’autres dispositions ont dû être prises à titre exceptionnel. Dans une lettre datée du 22 avril 2008, le ministre a informé l’ensemble des fédérations syndicales que le gouvernement avait décidé ce qui suit: i) étant donné qu’un président est déjà en fonction, à l’avenir la nomination à ce poste se fera après consultation des trois partenaires sociaux; ii) les représentants des travailleurs au NPC seront nommés par les syndicats eux-mêmes en fonction de leur représentativité; iii) la représentativité des trois partenaires au conseil est équitable car le rôle des représentants du gouvernement est neutre, leur tâche étant de faciliter les discussions et non de représenter les employeurs; iv) le taux d’inflation ne saurait être le seul critère de détermination de la compensation salariale annuelle; v) il n’est pas souhaitable d’établir un comité pour l’évaluation de la perte de pouvoir d’achat due à la hausse des prix car cette tâche entre déjà dans les attributions du NPC; et vi) tout mouvement de grève envisagé par les syndicats sur le montant de la compensation salariale devrait être conforme aux procédures établies par la loi. Dans cette même lettre, le ministre rappelait que, dans l’intérêt national et en vue de renforcer le dialogue social, leur participation active aux travaux du conseil offrirait aux travailleurs du pays une plate-forme adéquate pour discuter des questions ayant trait à la compensation salariale annuelle. Les fédérations étaient priées de se mettre d’accord entre elles pour soumettre les noms de cinq représentants de travailleurs devant siéger au NPC.
- 132. Dans une lettre datée du 25 avril 2008 adressée au ministre, la TUCP a pris note de la position du gouvernement sur le mode de désignation des représentants des syndicats et du président du NPC et a demandé que les discussions se poursuivent afin de régler les questions en suspens, en particulier concernant les objectifs du NPC. Un échange de lettres s’en est suivi entre le ministre et les fédérations de syndicats les 29 avril, 2 et 5 mai 2008. Dans cette correspondance, la TUCP était instamment priée de soumettre les noms des représentants au conseil pendant que des discussions avaient lieu sur la manière d’améliorer les objectifs du NPC. La TUCP a finalement informé le ministre le 6 mai 2008 de la désignation de cinq représentants des travailleurs devant siéger au conseil. Ces cinq représentants ainsi que les cinq représentants désignés par la Fédération des employeurs de Maurice ont été nommés membres du NPC le 6 mai 2008.
- 133. Le NPC s’est réuni les 8, 16 et 21 mai 2008 et, après examen des mémorandums soumis par les organisations de travailleurs et d’employeurs, a formulé des recommandations sur le paiement d’une compensation salariale pour l’exercice financier 2008-09 qu’il a communiquées au gouvernement le 21 mai 2008. Il convient de relever que les membres représentant les travailleurs au conseil ont maintenu leur position selon laquelle le calcul de la compensation salariale devait être fondé uniquement sur l’augmentation du coût de la vie. Après soumission de leur mémorandum, les représentants des travailleurs ont refusé de prendre part au débat au sein du NPC. Ils ont quitté la réunion lorsque les employeurs ont présenté leur mémorandum le 16 mai. Ils ont aussi refusé de discuter des propositions présentées par le président au conseil lors de la réunion du 21 mai, après examen des mémorandums soumis par les représentants des employeurs et des travailleurs, et ils ont quitté la réunion.
- 134. Alors que le NPC examinait le mode de fixation de la compensation salariale, le ministre rencontrait, en parallèle, les représentants de l’ensemble des fédérations de syndicats le 12 mai 2008 en vue de poursuivre les discussions sur la manière d’améliorer les objectifs du NPC comme l’avait recommandé l’OIT. Lors de cette réunion, le représentant de la Fédération générale des travailleurs (GWF) a déclaré que sa fédération ainsi que deux autres fédérations, la Fédération des syndicats progressistes et la Fédération des travailleurs unis, n’avaient pas pris part à la nomination des cinq représentants des travailleurs au NPC car elles étaient opposées à ce que le NPC tienne compte de critères tels que la capacité nationale de payer, la productivité nationale et le taux d’emploi et de chômage pour déterminer la compensation salariale annuelle. Comme l’avait proposé le ministre, il a été convenu que les discussions se poursuivraient en vue de parvenir à un consensus sur la meilleure manière d’améliorer les objectifs du NPC. L’aide d’experts comme le directeur du Bureau central de la statistique devait être requise si nécessaire.
- 135. Le comité a rappelé dans son observation précédente que ce cas s’inscrivait dans le contexte des efforts menés de longue date en vue de modifier la loi sur les relations professionnelles (IRA), avec l’assistance technique du BIT, conformément aux conclusions et recommandations du comité formulées dans le cas no 2281. Lors du dernier examen du suivi de ses recommandations dans ce dernier cas, le comité a noté que par le passé les efforts n’avaient pas abouti et que le gouvernement envisageait la rédaction d’un nouveau projet de loi. [Voir 349e rapport, paragr. 951.] La présente plainte s’inscrit dans le contexte des consultations tenues en vue d’élaborer un nouveau projet de loi, et concerne l’introduction dans ces consultations d’un élément qui, selon l’organisation plaignante, n’avait pas fait l’objet d’un accord, à savoir la modification du mécanisme de fixation des salaires minima en vigueur à Maurice depuis les trente dernières années.
- 136. En ce qui concerne la question des consultations, le comité rappelle que ses conclusions précédentes ne font référence qu’au fait que, après que les syndicats ont refusé de poursuivre les discussions sur l’établissement du NPC, le gouvernement a néanmoins procédé à la création de cet organisme par voie administrative avec effet immédiat. En agissant ainsi, le gouvernement a apporté des changements qui reconfigurent de manière substantielle un système en vigueur depuis trente ans. Tenant dûment compte des recommandations du Bureau tendant à ce que la question de la modification de l’IRA et celle de la création d’un nouveau conseil salarial national soient présentées en deux phases distinctes, le comité relève que ces modifications importantes et controversées du conseil salarial ont été apportées à titre prioritaire avant qu’il ne soit procédé à la révision de l’IRA, attendue de longue date, conformément aux recommandations qu’il avait formulées quatre ans auparavant.
- 137. Le comité se déclare néanmoins satisfait de constater que de nouvelles consultations ont récemment été engagées pour examiner les possibilités d’améliorer la composition et le fonctionnement du NPC. Il note avec intérêt que les représentants des travailleurs ont été nommés par la TUCP au NPC. Le comité relève toutefois que les représentants des travailleurs nommés par la TUCP ont en définitive décidé de se retirer du NPC et ont refusé de participer à ses discussions à compter de mai 2008, maintenant leur position selon laquelle le calcul de la compensation salariale devait être fondé uniquement sur la hausse du coût de la vie. Il relève également que l’organisation plaignante, dans le présent cas la Fédération générale des travailleurs, ainsi que la Fédération des syndicats progressistes et la Fédération des travailleurs unis ont refusé de prendre part au NPC protestant contre le fait qu’il soit tenu compte de critères tels que la capacité nationale de payer, la productivité nationale ainsi que les taux d’emploi et de chômage pour déterminer la compensation salariale annuelle.
- 138. Le comité espère que le gouvernement poursuivra des consultations approfondies et franches sur la manière d’améliorer la composition et le fonctionnement du NPC, notamment sur les critères à partir desquels la compensation salariale doit être calculée. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard et de lui fournir d’autres informations sur sa réponse aux recommandations de la TUCP tendant à ce qu’il accepte ou rejette dans leur totalité les recommandations du NPC pouvant être décidées par consensus, et de clarifier si les travailleurs peuvent se mettre en grève pour protester contre une décision du NPC qui n’aurait pas été prise sur la base d’un consensus.