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- 1016. La plainte est exposée dans une communication du 23 septembre 2006.
- 1017. Etant donné l’absence de réponse de la part du gouvernement, le comité a lancé un appel urgent, à sa session de juin 2007 [voir 346e rapport, paragr. 10], et a appelé l’attention du gouvernement sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d’administration, il pourra présenter un rapport sur le fond de cette affaire, même si ses informations et observations n’étaient pas envoyées à temps.
- 1018. Le Pakistan a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 1019. Dans sa communication du 23 septembre 2006, l’organisation plaignante déclare que sa filiale, le syndicat de Karachi Shipyard (KSLU), qui représente les salariés de l’entreprise Karachi Shipyard and Engg Works Ltd (dénommée ci-après l’employeur), a été enregistré par le greffier des syndicats de la province de Sindh et déclaré agent négociateur le 8 janvier 2003. L’employeur est une grande entreprise commerciale et industrielle exploitant une fonderie et un laboratoire. Ses principaux clients sont des raffineries de sucre, des fonderies, des laminoirs et des entreprises de navigation appartenant au secteur privé.
- 1020. Après avoir été certifié agent négociateur, le KSLU a présenté un cahier de revendications en vue d’une négociation collective avec l’employeur; le cahier de revendications est cependant resté en suspens au cours des quatre ans qui ont suivi.
- 1021. L’organisation plaignante allègue que plusieurs «réunions de conciliation» ont eu lieu entre le KSLU et l’employeur entre mars et août 2006. Les réunions étaient présidées par un conciliateur et visaient à régler le différend concernant le cahier de revendications.
- 1022. Selon l’organisation plaignante, une réunion conjointe des trois syndicats enregistrés de l’entreprise a été organisée le 1er août 2006 par le greffier des syndicats pour déterminer l’agent négociateur pour la prochaine période de trois ans. Ladite réunion s’est poursuivie jusqu’à la troisième semaine d’août 2006. Le 24 août 2006, le greffier a invité le KSLU à prouver son affiliation à une fédération nationale de syndicats; deux jours plus tard, il a rendu une ordonnance d’annulation de l’enregistrement du KSLU, au motif que le syndicat a «cessé d’exister».
- 1023. L’organisation plaignante déclare qu’elle n’a reçu aucune notification écrite de cette ordonnance et n’a pas eu la possibilité d’y répondre. En outre, l’annulation de l’enregistrement du KSLU enfreint l’article 12(3) de l’ordonnance sur les relations professionnelles (IRO), de 2002, qui dispose que l’enregistrement d’un syndicat ne sera annulé par le greffier qu’après l’ouverture d’une enquête. L’annulation de l’enregistrement du KSLU, selon l’organisation plaignante, viole les principes de la liberté d’association et a pour but de restreindre les activités syndicales dans les locaux de l’employeur.
- 1024. L’organisation plaignante joint à sa communication une notification du ministère de la Production stratégique en date du 5 août 2006. Le document indique que l’employeur a été placé sous le contrôle administratif du ministère de la Production stratégique, en vertu d’un arrêté de la division du cabinet no 4-15/2006-Min-I du 2 août 2006, et devra exécuter les tâches stratégiques et de défense qui lui seront assignées par le ministère.
- 1025. Enfin, l’organisation plaignante joint également une copie de l’ordonnance du 26 août 2006 rendue par le greffier de Sindh. L’ordonnance annule l’enregistrement du KSLU et de deux autres syndicats, au motif que l’employeur a été placé sous le contrôle administratif du ministère de la Production stratégique et n’était donc plus assujetti aux dispositions de l’IRO. L’ordonnance indique en outre que l’annulation a été effectuée en vertu de l’article 12(3)(i) de l’IRO.
- 1026. L’article 12(3) de l’IRO de 2002 dispose que l’enregistrement d’un syndicat sera annulé par le greffier, qui en fournira les motifs par écrit, si, après enquête, il constate qu’un syndicat:
- i) s’est dissous ou a cessé d’exister; ou
- ii) n’a pas participé en tant que candidat à un référendum pour l’acquisition du statut d’agent négociateur; ou
- iii) n’a pas fait une demande pour l’acquisition du statut d’agent négociateur en vertu de l’article 20(2) dans les deux mois qui ont suivi son enregistrement comme nouveau syndicat ou la promulgation de cette ordonnance, selon l’option qui interviendra le plus rapidement, pour autant qu’il n’existe pas déjà un agent négociateur au sens de l’article 20(11) dans un établissement ou un groupe d’établissements ou d’entreprises; ou
- iv) a recueilli moins de 15 pour cent des voix obtenues par liste finale de votants, lors d’un référendum pour l’acquisition du statut d’agent négociateur.
B. Conclusions du comité
B. Conclusions du comité- 1027. Le comité déplore que, malgré le délai qui s’est écoulé depuis la présentation de cette plainte, il n’ait pas reçu d’observations du gouvernement alors que celui-ci a été invité à le faire à plusieurs reprises, y compris au moyen d’un appel urgent, afin qu’il présente ses commentaires et observations sur le cas. Le comité invite instamment le gouvernement à être plus coopératif à l’avenir.
- 1028. Dans ces conditions, conformément à la règle de procédure applicable [voir 127e rapport, paragr. 17, approuvé par le Conseil d’administration], le comité se voit contraint de présenter un rapport sur le fond de l’affaire sans bénéficier des informations qu’il espérait recevoir du gouvernement.
- 1029. Le comité rappelle que l’objectif de l’ensemble de la procédure établie par l’Organisation internationale du Travail pour examiner les allégations de violations de la liberté syndicale est de promouvoir le respect de cette liberté dans le droit et dans les faits. Le comité reste confiant sur le fait que, si cette procédure protège les gouvernements contre les accusations déraisonnables, ceux-ci voudront bien reconnaître à leur tour l’importance qu’il y a à ce qu’ils présentent, en vue d’un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre.
- 1030. Le comité rappelle que le présent cas porte sur des allégations concernant l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat. Le comité observe, d’après les informations qui lui ont été communiquées, que l’employeur concerné – l’entreprise Karachi Shipyard and Engg Works Ltd – avait été placé sous le contrôle administratif du ministère de la Production stratégique, à la suite de quoi l’enregistrement du KSLU a été annulé en vertu d’une ordonnance rendue par le greffier des syndicats, conformément à l’article 12(3) de l’IRO.
- 1031. Pour ce qui est de l’ordonnance d’annulation, le comité rappelle qu’il a toujours souligné que l’annulation par le greffier des syndicats de l’enregistrement ou la radiation du registre des syndicats d’une organisation équivaut à la dissolution de ladite organisation par voie administrative. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 685.] Le comité estime en outre que la dissolution d’organisations syndicales est une mesure qui ne devrait intervenir que dans des cas de gravité extrême. Une telle dissolution ne devrait pouvoir intervenir qu’à la suite d’une décision judiciaire afin de garantir pleinement les droits de la défense. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 699.]
- 1032. Le comité note, d’après l’ordonnance du greffier de Sindh, que l’annulation de l’enregistrement du syndicat semble tenir au fait que l’employeur a été placé sous le contrôle administratif du ministère de la Production stratégique. Alors que l’organisation plaignante prétend que la majeure partie des activités de l’entreprise sont effectuées dans le secteur privé, le comité entend souligner en tout état de cause que les travailleurs civils des établissements manufacturiers des forces armées doivent avoir le droit de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix, conformément à la convention no 87. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 227.] Dans ces circonstances, le comité ne peut que conclure que l’annulation de l’enregistrement du KSLU est contraire aux principes de la liberté syndicale mentionnés ci-dessus. Il invite donc le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour abroger l’ordonnance du greffier, de façon à rétablir l’enregistrement du KSLU et de tout autre syndicat qui aurait été dissous en raison du contrôle administratif de l’entreprise concernée par le ministère de la Production stratégique. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
- 1033. Le comité relève que l’article 12(3) de l’IRO prévoit l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat lorsque: le syndicat s’est dissous ou a cessé d’exister; ou n’a pas participé à un référendum pour l’acquisition du statut d’agent négociateur; ou n’a pas fait de demande pour acquérir le statut d’agent négociateur en vertu de l’article 20(2) de l’IRO; ou a recueilli moins de 15 pour cent des votes obtenus lors d’un référendum pour acquérir le statut d’agent négociateur. Bien que la dissolution volontaire d’un syndicat par les travailleurs concernés ne porte pas atteinte, d’une manière générale, aux droits syndicaux, eu égard aux conséquences graves que l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat entraîne pour la représentation des travailleurs, le comité estime que les autres motifs d’annulation prévus à l’article 12(3) de l’IRO – qui concernent tous l’incapacité à obtenir le statut d’agent négociateur en vertu des procédures applicables –- ne devraient pas entraîner l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat. Il prie le gouvernement de réviser et d’amender l’article 12(3) de l’IRO en conséquence.
- 1034. Le comité relève que le KSLU, bien qu’il ait été certifié en tant qu’agent négociateur en 2003, a tenté à plusieurs reprises mais en vain d’engager des négociations avec l’employeur, y compris par le biais de réunions de conciliation organisées de mars à août 2006, qui visaient à régler le différend concernant son cahier de revendications. A cet égard, le comité prie le gouvernement d’ouvrir une enquête concernant les obstacles à la négociation collective auxquels le syndicat s’est heurté pendant cette période, et de promouvoir une future négociation collective avec le KSLU, s’il est reconnu que ce syndicat représente toujours les travailleurs au sein de l’entreprise Karachi Shipyard and Engg Works Ltd.
- 1035. Le comité appelle l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 1036. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité déplore que, malgré le délai qui s’est écoulé depuis la présentation de cette plainte, il n’ait pas reçu d’observations du gouvernement. Le comité prie instamment le gouvernement d’être plus coopératif dans le futur.
- b) Le comité invite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour abroger l’ordonnance d’annulation du greffier de Sindh de façon à rétablir l’enregistrement du KSLU et de tout autre syndicat qui aurait été dissous en raison du contrôle administratif de l’employeur concerné par le ministère de la Production stratégique. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
- c) Le comité demande au gouvernement de réviser et d’amender l’article 12(3) de l’IRO, de 2002, de façon à ce que l’incapacité à obtenir le statut d’agent négociateur ne constitue pas un motif d’annulation de l’enregistrement d’un syndicat.
- d) Le comité prie le gouvernement d’ouvrir une enquête sur les obstacles à la négociation collective auxquels le KSLU s’est heurté pendant la période allant de 2003 à 2006 et de promouvoir une future négociation collective avec le syndicat, s’il est reconnu que ce syndicat représente toujours les travailleurs au sein de l’entreprise Karachi Shipyard and Engg Works Ltd.
- e) Le comité appelle l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.