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- 257. La présente plainte figure dans une communication du 16 février 2005 de la Confédération cap-verdienne des syndicats libres (CCSL). L’organisation plaignante a envoyé des informations complémentaires dans une communication datée du 14 mars 2005, ainsi que de nouvelles allégations dans une communication datée du 26 juillet 2005.
- 258. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications datées des 27 avril 2005 et 31 janvier 2006.
- 259. Le Cap-Vert a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 260. Dans ses communications des 16 février et 14 mars 2005, la Confédération cap-verdienne des syndicats libres (CCSL) allègue que le gouvernement a violé l’article 4 de la convention no 98. D’après l’organisation plaignante, bien que le Cap-Vert ait ratifié ladite convention en 1979, il n’y a eu depuis cette date qu’une seule négociation collective dans le secteur de la sécurité, à savoir celle de 1998, qui s’applique à 573 des 144 310 travailleurs du pays. L’organisation plaignante signale que, bien que la convention collective précitée soit de portée nationale, elle n’est pas respectée par les entreprises.
- 261. L’organisation plaignante ajoute que, bien que le gouvernement ait modifié la législation du travail à deux reprises, la négociation collective n’est pas encore réglementée, ce qui est très préjudiciable aux travailleurs du Cap-Vert, dont la grande majorité a signé des contrats individuels de travail. Qui plus est, l’avant-projet de Code du travail du Cap-Vert ne contient aucune disposition facilitant la négociation collective. L’organisation plaignante ajoute qu’aujourd’hui les entreprises du Cap-Vert optent unilatéralement pour la conclusion de contrats de prestations de services.
- 262. Enfin, dans sa communication du 26 juillet 2005, l’organisation plaignante signale qu’en décembre 2003 le gouvernement et les syndicats des infirmiers ont signé un accord prenant en considération un ensemble de revendications anciennes concernant notamment les promotions, les heures supplémentaires, les indemnités pour le travail en périphérie et le repos hebdomadaire. L’organisation plaignante allègue que, le 18 juin 2004, le ministère de la Santé a unilatéralement cessé d’appliquer l’article 18 dudit accord, lequel concerne le travail en périphérie. L’organisation plaignante a formé un recours contre la mesure précitée; ledit recours est actuellement en instance. Par ailleurs, en mai 2005, le même ministère a décidé de modifier la comptabilisation des heures supplémentaires, violant ainsi les articles 16 et 17 de l’accord susmentionné.
- B. Réponse du gouvernement
- 263. Dans ses communications du 27 avril 2005 et du 31 janvier 2006, le gouvernement signale que le Régime juridique général des relations de travail (RJGRT), approuvé par le décret-loi no 62/87 du 30 juin 1987, modifié par le décret-loi no 51-A/89 du 26 juin 1989, entériné par la décision no 32/III/89 du 30 décembre 1989 et modifié par la loi 101/IV/93 du 31 décembre, consacre un titre exclusivement à la négociation collective et que les accords collectifs en vigueur dans le pays sont exécutés en conformité avec ces dispositions.
- 264. Le gouvernement se déclare favorable à un accroissement de la négociation collective, comme en témoignent le programme du gouvernement pour la législature, le programme d’activités du ministère du Travail et les actions menées par les services de l’administration du travail. Cela étant, d’après le gouvernement, il ne faut pas oublier le rôle prépondérant que doivent remplir à cet égard les syndicats et les représentants des employeurs. En effet, l’Etat n’a d’autre tâche que de coordonner ou de promouvoir, et à ce titre il a rempli sa mission.
- 265. Le gouvernement conteste qu’il n’y a eu au Cap-Vert qu’une seule négociation collective et cite à titre de nouvel exemple la négociation menée en 2002 par Cabo Verde Telecom et les organisations syndicales, en plus des négociations qui sont actuellement menées. S’agissant de l’accord dans le secteur de la sécurité privée, l’accord collectif de 1998 a de nouveau été révisé en 2004.
- 266. D’après le gouvernement, la prépondérance des contrats individuels de travail par rapport aux contrats collectifs n’est pas due, comme l’affirme l’organisation plaignante, à l’absence de réglementation et ne relève pas non plus de la responsabilité exclusive de l’Etat, étant donné que la négociation collective doit être volontaire. Ainsi, lorsque les conditions sont réunies, comme elles l’ont été au Cap-Vert, ce sont les syndicats et les employeurs qui doivent négocier en vue de conclure des conventions collectives. Le gouvernement ajoute que de toutes les façons les exemples de contrats individuels présentés par l’organisation plaignante sont antérieurs à l’adoption de la législation précitée.
- 267. S’agissant des allégations selon lesquelles les modifications successives de la législation n’ont pas mis en place la réglementation en matière de négociation collective, le gouvernement signale que les interlocuteurs sociaux ont été impliqués dans tous les processus législatifs menés à bien, aux fins de parvenir à un consensus, conformément aux dispositions constitutionnelles et dans un esprit de dialogue et de concertation sociale. A cet égard, le nouveau Code du travail du Cap-Vert fait actuellement l’objet de discussions dans lesquelles interviennent les interlocuteurs sociaux, y compris la CCSL; ce code est actuellement examiné au sein du Conseil de concertation sociale. Cela étant, le gouvernement se déclare surpris que la CCSL n’a mentionné à aucune occasion la négociation collective au sein du Conseil de concertation sociale, question abordée au livre I, titre II, chapitre II (art. 87 à 100) du Code du travail du Cap-Vert. En conséquence, le gouvernement se déclare déconcerté par la présente plainte, étant donné que l’organisation plaignante a actuellement la possibilité de faire valoir son point de vue devant le conseil susvisé. S’agissant du contrat de prestations de services, le gouvernement signale que, bien qu’il soit réglementé au Cap-Vert, il remplit une fonction distincte de celle du contrat de travail et que, chaque fois qu’il y a rapport de subordination juridique, il y a contrat de travail.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 268. Le comité observe que le présent cas concerne l’absence de mesures prises par le gouvernement pour promouvoir la négociation collective en conformité avec l’article 4 de la convention no 98 ratifiée par le Cap-Vert et la violation par le ministère de la Santé des articles 16, 17 et 18 de l’accord conclu entre le gouvernement et les syndicats des infirmiers.
- 269. S’agissant de l’absence alléguée de mesures prises par le gouvernement pour promouvoir la négociation collective, le comité note que, selon l’organisation plaignante, depuis la ratification de la convention no 98 en 1979, il n’y a eu au Cap-Vert qu’une seule convention collective conclue dans le secteur de la sécurité et que l’avant-projet du Code du travail du Cap-Vert ne contient aucune disposition facilitant la négociation collective.
- 270. Le comité note que, pour sa part, le gouvernement signale que le Régime juridique général des relations de travail (RJGRT) en vigueur consacre un titre exclusivement à la négociation collective (le gouvernement joint une copie des articles pertinents du RJGRT); que le gouvernement encourage la négociation collective à travers le programme du gouvernement pour la législature, le programme d’activités du ministère du Travail et les actions menées par les services de l’administration du travail, mais que c’est aux syndicats et aux employeurs qu’il incombe de mener les négociations collectives. Le gouvernement relève également qu’il existe d’autres conventions collectives que celle mentionnée par l’organisation plaignante, notamment celle de Cabo Verde Telecom, et que ladite organisation n’a pas abordé la question de la négociation collective au sein du Conseil de concertation sociale dont la CCSL fait partie et qui examine actuellement le nouveau Code du travail du Cap-Vert.
- 271. Le comité observe que, bien que la négociation collective au Cap-Vert soit réglementée au titre II du RJGRT, le nombre de conventions collectives conclues depuis la ratification de la convention est très limité, fait confirmé par le gouvernement, qui cite uniquement la convention conclue dans le secteur de la sécurité et celle de Telecom et en mentionne d’autres qui font actuellement l’objet de négociations, sans donner davantage de détails. Le comité constate donc que, bien que le gouvernement signale une série de mesures destinées à promouvoir la négociation collective, la conclusion de conventions collectives n’a pas été suffisamment encouragée dans le pays en conformité avec l’article 4 de la convention no 98, qui stipule que «Des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs d’une part, et les organisations de travailleurs d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi.» Le comité rappelle également les principes exposés aux paragraphes 844 et 845 du Recueil sur la nature volontaire de la négociation collective et selon lesquels la négociation volontaire des conventions collectives, et donc l’autonomie des partenaires sociaux à la négociation, constitue un aspect fondamental des principes de la liberté syndicale [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 844] et que, pour conserver son efficacité, la négociation collective doit revêtir un caractère volontaire et ne pas impliquer un recours à des mesures de contrainte qui auraient pour effet d’altérer ce caractère. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 845]. Le comité rappelle par ailleurs l’importance qu’il attache à l’obligation de négocier de bonne foi pour le maintien d’un développement harmonieux des relations professionnelles. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 814.] Le comité rappelle cependant qu’il n’existe pas d’obligation de conclure un accord.
- 272. Par ailleurs, le comité rappelle que la commission d’experts a rappelé à plusieurs occasions que le gouvernement devait promouvoir davantage la négociation collective dans le pays. [Voir rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III (partie 1A), convention no 98, 2005, 2004, 2002, 2001 et 2000.] Dans ces circonstances, le comité encourage le gouvernement à prendre, en concertation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées, les mesures additionnelles nécessaires pour promouvoir la négociation collective au Cap-Vert et de le tenir informé de toute nouvelle convention collective conclue dans les secteurs public et privé.
- 273. Le comité observe également qu’un nouveau Code du travail fait actuellement l’objet de discussions et que l’avant-projet dudit code, qui contient un chapitre consacré à la négociation collective, est examiné par le Conseil de concertation sociale auquel les interlocuteurs sociaux participent. Le comité exprime l’espoir que le nouveau Code du travail sera examiné et approuvé prochainement en concertation avec tous les interlocuteurs sociaux et qu’il permettra le développement effectif du droit à la négociation collective. Le comité rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du BIT et lui demande de le tenir informé de l’évolution de la situation à ce sujet.
- 274. En ce qui concerne les allégations relatives à la préférence des entreprises pour la conclusion d’accords de prestations de services afin d’éviter l’application du Code du travail, le comité note que, selon le gouvernement, bien que ce type de contrats soit réglementé au Cap-Vert, il a une fonction différente du contrat de travail et, chaque fois qu’il existe un lien juridique de subordination, on considère qu’il y a une relation de travail.
- 275. S’agissant des allégations présentées le 26 juillet 2005 selon lesquelles le ministère de la Santé aurait violé les articles 16, 17 et 18 (relatifs aux indemnités pour le travail en périphérie et aux heures supplémentaires) de l’accord conclu entre le gouvernement et les syndicats des infirmiers, le comité observe que le gouvernement n’envoie pas ses observations à ce sujet et rappelle que les accords doivent être obligatoirement respectés par les parties. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 818.] Le comité demande au gouvernement de mener sans retard une enquête à ce sujet et de lui communiquer ses résultats.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 276. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) S’agissant de l’absence alléguée de mesures visant à promouvoir la négociation collective, le comité encourage le gouvernement à prendre, en concertation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, les mesures additionnelles nécessaires pour promouvoir la négociation collective au Cap-Vert et de le tenir informé de toute nouvelle convention collective conclue dans les secteurs public et privé.
- b) Le comité exprime l’espoir que le nouveau Code du travail sera examiné et approuvé prochainement en concertation avec les interlocuteurs sociaux et qu’il permettra le développement effectif du droit à la négociation collective. Le comité rappelle au gouvernement qu’il faut se prévaloir de l’assistance technique du BIT et lui demande de le tenir informé de l’évolution de la situation à ce sujet.
- c) S’agissant des allégations présentées le 26 juillet 2005 selon lesquelles le ministère de la Santé aurait violé les articles 16, 17 et 18 (relatifs aux indemnités pour le travail en périphérie et aux heures supplémentaires) de l’accord conclu entre le gouvernement et les syndicats des infirmiers, le comité rappelle que les accords doivent être obligatoirement respectés par les parties, et demande au gouvernement de mener sans retard une enquête à ce sujet et de lui communiquer ses résultats.