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- 1333. Le comité a déjà examiné ce cas quant au fond à trois occasions, la dernière fois à sa session de juin 2006, où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 342e rapport, paragr. 1040-1053, approuvés par le Conseil d’administration à sa 296e session.]
- 1334. L’organisation plaignante a soumis un complément d’information à l’appui de sa plainte dans une communication du 28 septembre 2006. Le gouvernement a présenté des observations complémentaires dans des communications des 6 septembre, 14 septembre, 1er octobre et 17 octobre 2006.
- 1335. Le Zimbabwe a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
Historique
Historique- A. Examen antérieur du cas
- 1336. Dans son examen antérieur du cas, le comité a fait les recommandations suivantes [voir 342e rapport, paragr. 1053]:
- a) Le comité prie instamment le gouvernement de se montrer plus coopératif à l’avenir.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé sur l’évolution de la situation liée au licenciement de 56 travailleurs de l’entreprise Netone et de lui communiquer tout jugement rendu dans cette affaire.
- c) Le comité prie instamment le gouvernement encore une fois de le tenir informé de l’évolution de la situation à Zimpost et à l’entreprise TelOne, et de fournir des informations détaillées sur les motifs de l’arrestation des dirigeants syndicaux et des syndicalistes suivants: M. Sikosana, arrêté à Bulawayo le 11 octobre 2004, et six autres syndicalistes arrêtés à Gweru; M. Mparutsa, M. Mereki et M. Kaditera, arrêtés à Mutare; M. Marowa, M. Mhike, M. Nhanhanga et M. Chiponda, arrêtés le 6 octobre 2004; M. Khumalo, M. Ngulube et M. Munumo, arrêtés le 11 octobre 2004.
- d) Le comité prie instamment le gouvernement de lui fournir une copie du jugement rendu contre M. Choko et huit autres syndicalistes suite à leur participation à la manifestation du 18 novembre 2003 à Bulawayo.
- e) Le comité prie le gouvernement de veiller à ce que M. Takaona soit rapidement réintégré dans ses fonctions à la Zimpapers, ou à un poste équivalent, sans perte de salaire ou d’indemnités, et de le tenir informé sur l’évolution de la situation à cet égard.
- f) Le comité prie instamment le gouvernement d’inciter l’employeur à réexaminer sa décision de mutation qui affecte le dirigeant syndical Mangezi afin de lui permettre de retourner à son poste initial en temps voulu s’il le souhaite. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- g) Le comité réitère sa profonde inquiétude quant au climat de forte insécurité qui affecte les activités syndicales au Zimbabwe et prie une fois de plus le Conseil d’administration d’accorder une attention toute particulière à cette situation.
- h) Le comité demande au gouvernement d’accepter une mission de contacts directs.
- B. Nouvelles allégations
- 1337. Dans sa communication du 28 septembre 2006, la CISL a présenté un complément d’information se rapportant essentiellement à des actes d’intimidation, de harcèlement et de violence à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, qui se sont produits de février 2005 à septembre 2006.
- Nouveaux éléments relatifs à l’arrestation
- de quatre dirigeants syndicaux le 5 août 2004
- 1338. Concernant l’arrestation de quatre dirigeants du Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) à Gweru le 5 août 2004 (Mme Lucia Matibenga, vice-présidente du ZCTU; M. Wellington Chibebe, secrétaire général du ZCTU; M. Sam Machinda, vice-président du ZCTU pour la région centrale; et M. Timothy Kondo, coordinateur du service-conseil du ZCTU), mentionnée dans une précédente communication par l’organisation plaignante, cette dernière déclare à présent que les cas de Mme Matibenga, de M. Machinda et de M. Kondo ont été instruits le 3 novembre 2004 et que les charges contre eux ont ensuite été abandonnées. Quant au cas de M. Chibebe, il a fait l’objet d’une décision de non-lieu pour manque de preuves.
- Ingérence des autorités dans les activités
- de coopération internationale du syndicat
- 1339. L’organisation plaignante cite plusieurs cas visant à faire obstruction à la coopération syndicale internationale, notamment par le harcèlement et l’expulsion de syndicalistes étrangers. Le 9 février 2005, deux chargés sud-africains d’éducation syndicale, M. Bobby Marie et Mme Vichemina Prout, ont été expulsés par les services de l’immigration du Zimbabwe, où tous deux venaient d’arriver à la demande du Conseil de coordination syndicale d’Afrique australe (SATUCC) pour discuter avec le ZCTU au sujet de la création d’une école syndicale pour les travailleurs en Afrique australe. A leur arrivée à Harare, ils se virent déclarer par des agents du service de l’immigration que tous les syndicalistes devaient être munis d’une «lettre d’autorisation» délivrée par le ministère du Travail. Comme ils n’en avaient pas, ils furent réexpédiés sur le même vol.
- 1340. Le 29 octobre 2005, deux représentants de la Fédération unie des travailleurs danois (3F) ont été avertis qu’une équipe avait été envoyée pour les frapper pendant leur visite à la Fédération des travailleurs de l’habillement, du textile et du cuir du Zimbabwe (FUCTLWZ). L’organisation plaignante déclare que les deux dirigeants, M. Arne Skov Andersen et Mme Silva Mulambo, du bureau régional de la 3F à Maputo au Mozambique, étaient arrivés le 26 octobre 2005 pour planifier une nouvelle phase de coopération avec la FUCTLWZ, mais ils ont rapidement quitté le pays dès qu’ils ont été informés qu’une équipe des services secrets zimbabwéens (CIO) avait été envoyée pour «s’occuper d’eux».
- 1341. Le 13 décembre 2005, la police de l’aéroport international de Harare a confisqué le passeport de M. Raymond Majongwe, secrétaire général du Syndicat des enseignants progressistes du Zimbabwe (PTUZ) et membre du ZCTU, qui revenait d’un atelier VIH/SIDA de l’OIT au Nigéria. M. Majongwe était censé figurer sur la liste des «vendus» dressée par le gouvernement, dont la police avait ordre de confisquer les passeports pour les empêcher de voyager à l’étranger. Bien que le passeport de M. Majongwe lui ait été rendu à la suite d’une intervention des «Avocats du Zimbabwe pour les droits de l’homme», l’organisation plaignante maintient que la confiscation constitue encore un autre exemple du harcèlement à l’encontre des syndicalistes par le gouvernement et de la tentative de ce dernier d’empêcher que s’exprime toute solidarité internationale entre des Zimbabwéens et des syndicalistes étrangers.
- 1342. Le 1er mars 2006, une activiste syndicale sud-africaine, Mme Pat Horn, de l’organisation «Street Net» a été expulsée du Zimbabwe. Elle devait aider à organiser un événement didactique à la Silver Jubilee School du ZCTU. Le 20 mars 2006, les consultants hollandais, MM. Bagani Ngeleza et Jeff Handmaker, ont été expulsés. Ils travaillaient pour la Confédération syndicale des Pays-Bas, Federatie Nederlandse Vakbeweging (FNV), et devaient évaluer un programme du ZCTU financé par la FNV.
- 1343. L’organisation plaignante déclare que Mme Alice G. Siame, une consultante de la Confédération norvégienne des syndicats (LO Norway) pour l’Afrique, de nationalité zambienne, entrée au Zimbabwe le 16 mai 2006, a alors été escortée de force jusqu’à l’aéroport de Harare où elle a passé la nuit avant d’être mise le lendemain matin dans un avion à destination de Johannesburg en Afrique du Sud. La responsable du programme pour l’Afrique de LO Norway, Mme Nina Mjonberg, s’est elle aussi vu refuser l’entrée dans le pays en vertu de l’article 31(1)(b) de la loi sur l’immigration et a été contrainte de repartir par le même avion que celui avec lequel elle était arrivée. Les syndicalistes, M. Jan Mahlangu d’Afrique du Sud et M. Wiep Basie de Hollande, se sont vu opposer la même interdiction d’entrer dans le pays, à l’instar de M. Zwelinzima Vavi, le secrétaire général du Congrès des syndicats sud-africains (COSATU) (un membre affilié de la CISL), invité d’honneur au Congrès du ZCTU. L’organisation plaignante ajoute que M. Vavi s’est non seulement vu interdire l’entrée, mais qu’il a par ailleurs été catalogué comme constituant une menace pour la sécurité et déclaré persona non grata, ce qui lui interdit définitivement d’entrer au Zimbabwe.
- 1344. Le 22 septembre 2006, à l’occasion de la Journée internationale d’action contre la torture qui s’est déroulée les 12 et 13 septembre, le gouvernement du Zimbabwe a refusé à une délégation de dirigeants syndicaux des Etats-Unis le droit d’entrer dans le pays pour rencontrer des dirigeants blessés du ZCTU. Une délégation syndicale, composée de quatre personnes, du groupe d’une section locale de AFL-CIO, la Coalition des syndicalistes noirs conduite par le vice-président de l’AFL-CIO, M. William Lucy, s’est vu refuser l’entrée au Zimbabwe par des fonctionnaires et contrainte de repartir pour l’Afrique du Sud.
- Ingérence du gouvernement dans les affaires
- du ZCTU pour évincer la direction du syndicat
- 1345. L’organisation plaignante déclare que, pendant toute l’année 2005, le ZCTU et ses dirigeants ont subi un harcèlement incessant du gouvernement soit ouvertement, soit par le biais d’«agents provocateurs» qui tentaient d’évincer la direction en place du ZCTU. La CISL allègue que des rapports de presse ont affirmé que certaines sources émanant de l’intérieur même des services secrets zimbabwéens (CIO) ont confirmé qu’ils prévoyaient de déstabiliser le ZCTU en faisant naître un conflit interne pour remplacer la direction en place en payant des dirigeants d’affiliées du ZCTU pour qu’ils exigent un changement de direction. Ces sources auraient également déclaré que la CIO ne permettrait pas que la direction actuelle du ZCTU demeure en place.
- 1346. Selon l’organisation plaignante, au début du mois de mars 2005, une série d’articles ont commencé à paraître dans la presse citant des dirigeants syndicaux mécontents de syndicats affiliés au ZCTU qui accusaient les dirigeants du ZCTU de corruption, de fraude et de prises de décisions sans consultation des membres. Le 19 mars, trois dirigeants syndicaux dissidents de syndicats affiliés du ZCTU ont perturbé une réunion du conseil exécutif de ce dernier à Harare, en organisant un groupe de 40 manifestants accusant la direction du ZCTU de mauvaise gestion des affaires syndicales et exigeant sa démission. Ce groupe était conduit par MM. Nicholas Mazarura et Kumbirayi Kudenga du Syndicat des travailleurs de la construction et des secteurs connexes du Zimbabwe (ZCAAAWU) et par un groupe qui se faisait appeler le Syndicat des travailleurs d’affiliées lésés (AAAWU). L’organisation plaignante déclare que la direction du ZCTU lui a fait part de sa conviction que le gouvernement était derrière ces attaques et que certains des dirigeants mécontents s’étaient subitement trouvés en mesure de rembourser des dettes financières. De plus, dans le cadre de sa campagne contre le ZCTU, le gouvernement a déclaré le 15 mars 2005 que, contrairement à ce qui s’était produit dans le passé, il ne laisserait pas le ZCTU contrôler les élections parlementaires.
- 1347. Le 6 avril 2005, une réunion du conseil général du ZCTU organisée pour discuter des préparations du 1er mai a été interrompue par MM. Langton Mugeji, Nicholas Mazurura et Farai Makanda, tous trois membres de syndicats affiliés au ZCTU. Après leur tentative infructueuse d’obliger la réunion à discuter d’une motion appelant à la démission de la direction du ZCTU sur la base d’allégations de corruption et de fraude, ils ont commencé à malmener physiquement des membres du conseil général, provoquant ainsi l’abandon de la réunion.
- 1348. L’organisation plaignante déclare que, le 23 avril 2005, M. Matombo, Mme Matibenga, M. Chibebe et Mme Tabitha Khumalo ont été physiquement agressés par des agents provocateurs de deux syndicats affiliés au ZCTU – le Syndicat des travailleurs de la construction et le Syndicat des travailleurs du cuir – qui, selon le ZCTU, agissaient sous l’influence du gouvernement. Ce jour-là, des hooligans recrutés par les deux syndicats affiliés en question ont agressé des membres lors d’une réunion du ZCTU et ont exigé la démission du secrétaire général. Eu égard à la violence de ces agressions personnelles, M. Matombo, Mme Matibenga, M. Chibebe et Mme Khumalo ont tous réussi à obtenir des décisions judiciaires de maintien de l’ordre public pour protéger leur sécurité personnelle. L’organisation plaignante allègue que l’AAAWU soutient que les dirigeants qui n’avaient pas d’emploi dans le secteur d’activité qu’ils représentaient n’avaient pas de section locale et ne pouvaient dès lors pas représenter des travailleurs. La direction du ZCTU devrait donc démissionner. L’AAAWU ne démord pas de cet avis en dépit du fait que des dirigeants du ZCTU, tels que M. Matombo, ont perdu leur emploi directement à cause de leurs activités syndicales. L’organisation plaignante ajoute qu’aucune des règles internes du ZCTU n’exige que les dirigeants syndicaux soient tenus d’être employés dans le secteur qu’ils représentent.
- 1349. Dans une lettre du 26 mai 2005, M. Mazarura, le porte-parole de l’AAAWU, a fait part de la décision du conseil général de nommer une commission d’enquête pour examiner les accusations présentées par ce groupe, alléguant que:
- – le versement d’un salaire à M. Matombo et l’utilisation des véhicules du ZCTU n’étaient pas autorisés;
- – Mme Matibenga n’était plus employée dans le secteur commercial qu’elle représentait lorsqu’elle a été élue en 2001 et elle devrait donc être révoquée de la direction du ZCTU;
- – bien qu’elle n’ait pas de section locale, Mme Khumalo était néanmoins élue au conseil général du fait de l’intérêt personnel de la direction;
- – la gestion du compte du secteur informel est inconstitutionnelle car M. Chibebe et le responsable du projet de secteur informel ne sont pas les signataires pour le compte. Qui plus est, le compte a fait l’objet d’une utilisation abusive et les syndicats concernés ont déposé une plainte auprès de la police qui a ouvert une enquête;
- – d’une manière générale, la mauvaise gestion des fonds a été de règle, et la gestion, les rapports financiers et les rapports d’audit n’ont pas été soumis au conseil général;
- – des biens ont été achetés sans l’autorisation en bonne et due forme du conseil général; et
- – le COSATU a été invité à prendre part à une mission d’investigation sans la permission expresse du conseil général.
- 1350. En mai 2005, le gouvernement s’est servi de son pouvoir de choisir des représentants syndicaux de la délégation du Zimbabwe auprès de la Conférence internationale du Travail (CIT) pour intensifier le conflit interne qu’il avait fomenté. En ne parrainant pas les candidats officiels du ZCTU, à savoir son président démocratiquement élu, M. Lovemore Matombo, et son secrétaire général, M. Wellington Chibebe, il espérait pouvoir donner un coup de pouce au changement de direction. Il décida de parrainer des membres de l’AAAWU et invita M. Elias Mlotshwa, alors deuxième vice-président du ZCTU, en qualité de délégué officiel, et M. Edmund Ruzive, le troisième vice-président, en qualité de conseiller et délégué-suppléant. Malgré l’appui du gouvernement, l’absence d’un mandat en bonne et due forme de la part des travailleurs zimbabwéens eux-mêmes incita M. Elias Mlotshwa à refuser le parrainage gouvernemental. Mais le gouvernement et l’AAAWU ont néanmoins continué de tenter de court-circuiter les authentiques délégués du ZCTU et, le 26 mai, le porte-parole de l’AAAWU, M. Nicholas Mazarura, a écrit au Directeur général du BIT pour dénoncer la direction du ZCTU et soutenir la candidature de M. Edmund Ruzive à la place de M. Elias Mlotshwa qui s’était «dégonflé» selon les termes employés dans la lettre de l’AAAWU. Le gouvernement a prétendu n’avoir joué aucun rôle dans la sélection des candidats du ZCTU. Ils ont été informés par le ZCTU que le président, M. Lovemore Matombo, son adjointe, Mme Lucia Matibenga, le secrétaire général, M. Wellington Chibebe, et Mme Tabitha Khumalo faisaient tous l’objet d’une enquête et étaient suspendus de leurs fonctions de dirigeants. Telle était l’unique raison pour laquelle le gouvernement avait ensuite fait appel aux deuxième et troisième vice-présidents. Le gouvernement avait exigé que les quatre délégués légitimes du ZCTU prouvent par une copie du procès-verbal de la réunion du 23 avril 2005 qu’ils n’avaient pas été suspendus. Selon le gouvernement, faute d’avoir reçu une telle preuve, il n’avait donc pas pu sélectionner les dirigeants élus du ZCTU. L’organisation plaignante fait remarquer que le gouvernement n’a pas demandé à l’AAAWU de fournir la preuve de la suspension alléguée sous la forme d’un procès-verbal écrit, pas plus que toute autre preuve concernant les allégations de fraude, et que l’AAAWU n’a fourni aucune preuve de ce type. L’organisation plaignante est d’avis que cela démontre sans ambiguïté que le gouvernement a tenté indûment de s’immiscer dans les affaires internes du ZCTU pour tenter d’imposer des éléments favorables au gouvernement. Pour finir, le CISL a parrainé le voyage à Genève du président du ZCTU, M. Lovemore Matombo, et a assuré sa participation à la Conférence.
- 1351. D’autres tentatives de discréditer le secrétaire général du ZCTU ont encore eu lieu par la suite. Le 5 juillet, un groupe de plus de 20 personnes a fait irruption dans les bureaux du ZCTU à la recherche de M. Wellington Chibebe, menaçant de le passer à tabac. Ne l’ayant pas trouvé, le groupe est ressorti et a commencé à chanter des chansons désobligeantes à son encontre. La scène qui a été enregistrée dans son intégralité par la ZBC, la chaîne de télévision publique, semblait suivre un scénario préétabli. Puis, le 6 juillet, une manifestation a été organisée au siège du ZCTU pour accuser M. Chibebe d’outrepasser son mandat, alléguant qu’il avait fait partie d’un groupe œuvrant à l’OIT en faveur d’une interdiction mondiale de l’amiante. Les manifestants accusèrent également les dirigeants de prendre part aux activités d’un parti d’opposition, le Mouvement pour un changement démocratique (MDC). Tous ces événements ont été perçus par le ZCTU comme faisant partie de la campagne gouvernementale visant à discréditer ses dirigeants.
- 1352. Le 9 juillet, Mmes Tabitha Khumalo et Phoebe Vhareta, du comité consultatif du ZCTU pour les femmes (WAC), ont été agressées lors d’une réunion dudit comité par des membres de l’AAAWU. Ces derniers ont déclaré qu’ils continueraient à perturber toutes les activités du ZCTU jusqu’à ce que ses dirigeants démissionnent. Un groupe de membres de l’AAAWU et de jeunes, soupçonnés d’avoir été recrutés pour commettre cette agression, aurait fait irruption dans la salle de conférence du Quality International Hotel où les femmes tenaient une réunion du WAC. Ils auraient alors commencé à perturber la réunion, avant d’agresser Mmes Phoebe Vhareta et Tabitha Khumalo. Cette dernière, gravement blessée, a ensuite été admise en clinique pour faire des radios. Le ZCTU est convaincu que le groupe était soutenu par le gouvernement, dans le cadre de sa tentative de remplacer les dirigeants du ZCTU.
- 1353. L’organisation plaignante déclare que, selon l’AAAWU parrainé par le gouvernement, 17 syndicats affiliés n’étaient pas satisfaits de la direction. Cela s’est toutefois révélé faux avec la déclaration de soutien rédigée le 10 août 2005 par 30 des 35 syndicats affiliés (dont la liste est jointe aux nouvelles allégations de l’organisation plaignante en annexe 1). Suite aux nombreuses accusations formulées par l’AAAWU et à son assertion prétendant que 17 syndicats affiliés étaient mécontents des dirigeants, la direction du ZCTU a décidé de prier instamment ses syndicats affiliés de faire savoir le 14 juillet s’ils soutenaient ou non les dirigeants. Les cinq membres mécontents étaient le Syndicat des travailleurs de la construction et des professions connexes du Zimbabwe, le Syndicat des travailleurs des mines associés du Zimbabwe, le Syndicat des travailleurs du transport et des secteurs généraux, le Syndicat des travailleurs du cuir, de la chaussure et des professions connexes du Zimbabwe et le Syndicat des journalistes du Zimbabwe, ce dernier exprimant son soutien au ZCTU mais sans vouloir prendre position pour ou contre sa direction. Les dirigeants des quatre autres syndicats affiliés, qui avaient donné naissance au conflit ainsi créé en attaquant le ZCTU dans les médias, en interrompant et en perturbant des réunions du conseil général, en recrutant des voyous pour perturber les activités du ZCTU et en tentant de représenter le ZCTU sans mandat valable dans des forums internationaux et auprès de partenaires internationaux tels que l’OIT et la CISL, ont été suspendus conformément à l’article 15, paragraphes 4 et 5, de la constitution du ZCTU, en vertu desquels des membres peuvent être expulsés s’ils agissent d’une manière préjudiciable aux intérêts du ZCTU.
- Descente de police au siège du ZCTU
- 1354. Le 13 mai 2005, la police a fait une descente au siège du ZCTU, aux neuvième et dixième étages de Chester House à Harare, à la recherche de toutes preuves d’opérations en devises, dans le cadre de la mainmise renforcée de l’Etat sur les organisations sociales et syndicales. La police a également laissé entendre qu’elle soupçonnait le ZCTU d’avoir commis des fraudes à l’encontre de certains de ses syndicats affiliés. Sous les ordres de l’inspecteur de police, M. Mambambo, la police a laissé quatre fonctionnaires de l’Inspection nationale de la conduite économique (NECI), MM. Bernard Savanhu, Mapanzure, Musiiwa et Sango, procéder à la perquisition en mettant sens dessus-dessous les chéquiers et relevés de banque, de même que les dossiers relatifs aux comptes de l’organisation, au secteur informel et aux services de santé et de sécurité, et ce en dépit des protestations de la conseillère juridique du ZCTU, Mme Tsitsi Mariwo. Ils ont confisqué des dossiers et des disquettes informatiques. M. Savanhu a également emporté les montants suivants en devises: 27 dollars des Etats-Unis, 40 livres sterling, 2 500 kwachas zambiens (ZMK) et 110 euros, bien que la conseillère juridique du ZCTU l’ait informé que l’argent n’appartenait pas au ZCTU mais à l’un de ses responsables. Considérant que la saisie du matériel et des montants susmentionnés était illégale, le ZCTU a intenté un procès (cas no 2401/05 du 24 mai 2005) contre le ministre de l’Intérieur, M. Kembo Mohadi, un inspecteur principal et le commissaire de police, M. Augustine Chihuri, en saisissant la Haute Cour, aux motifs que ses biens étaient saisis illégalement, que le mandat de perquisition était rédigé en termes vagues et imprécis n’indiquant pas le matériel confisqué et ne précisant pas de quel délit le ZCTU était soupçonné qui pourrait justifier la perquisition de ses locaux. La demande en référé visait aussi à se faire restituer le matériel saisi illégalement, qui comprenait des disquettes servant au travail du syndicat et, plus crucial encore, les carnets de chèques en cours du syndicat. Les opérations du syndicat se trouvaient sévèrement paralysées s’il ne pouvait avoir totalement accès à ses fonds.
- Enquête du gouvernement sur les finances du syndicat
- 1355. En octobre 2005, le ministre du Travail a organisé une réunion consultative avec le conseil général du ZCTU après la révocation des membres de l’AAAWU de leurs fonctions. Le gouvernement a ensuite démarré en novembre 2005 une enquête préliminaire portant sur des allégations de malversations et de violations de la constitution du ZCTU, soi-disant basées sur des plaintes émanant des membres de l’AAAWU suspendus. Cette enquête préliminaire a conduit à la désignation fin 2005 d’un chargé d’enquête officiel. Le 28 décembre, le ministre du Travail, M. Nicholas Goche, a annoncé avoir nommé un chargé d’enquête officiel, M. Tendai Chatsauka, un commissaire aux comptes expert, pour examiner de près les affaires du ZCTU, suite aux accusations d’importants détournements de fonds, de corruption et de violations de la constitution de l’organisation. En vertu de l’article 120 de la loi sur les relations professionnelles, le ministre peut ordonner une enquête sur un syndicat (ou une organisation d’employeurs) s’il existe des motifs raisonnables de soupçonner une mauvaise gestion ou un détournement de fonds ou de biens du syndicat, ou une gestion des affaires préjudiciables aux intérêts de ses membres. Selon le gouvernement, l’enquête a été ordonnée à la suite de nombreuses plaintes de la part de syndicats affiliés au ZCTU. Ces plaintes faisaient soi-disant état de plusieurs cas de mauvaise gestion et de détournements de fonds, entre autres pour le versement d’un salaire au président du ZCTU, M. Lovemore Matombo, à hauteur de 15 millions de dollars zimbabwéens. L’organisation plaignante précise que le ministre du Travail déclare avoir insisté sur l’importance vitale de s’en tenir aux faits et de ne pas indiquer comme cibles des personnes précises au chargé d’enquête officiel, M. Tendai Chatsauka, le commissaire aux comptes expert, lors de leur rencontre le 28 décembre 2005. Les tâches dévolues à M. Tendai Chatsauka étaient notamment d’enquêter sur les opérations du ZCTU au titre de son compte de projet de secteur informel (ce projet n’étant soi-disant pas géré en conformité avec la constitution du ZCTU), le manuel de gestion financière et d’autres règles du ZCTU. L’enquête pourrait également examiner l’acquisition de biens à Harare, Chinhoyi, Gwere, Masvingo, Bulawayo et ailleurs.
- 1356. M. Nicolas Mazarura du Syndicat des travailleurs de la construction et des professions connexes aurait également porté plainte, en son nom et pour le compte de MM. Edmund Ruzive et Joseph Midzi, tous deux membres du Syndicat des travailleurs des mines associés du Zimbabwe, de M. Langton Mugeji du Syndicat des travailleurs du cuir, de la chaussure et des professions connexes et de M. Farai Makanda du Syndicat des travailleurs du transport et des secteurs généraux pour avoir été suspendus du conseil général du ZCTU. Tous les cinq estimaient avoir été indûment suspendus, la direction du ZCTU les accusant sans fondement d’avoir demandé s’il convenait ou non de garder la dénomination ZCTU. Par ailleurs, MM. Charles Gumbo, Benson Ndemera et Leyson Mlambo ont porté plainte auprès du ministre au sujet de leur révocation de leurs fonctions au sein du ZCTU.
- 1357. Selon l’organisation plaignante, cette enquête était une autre tentative du gouvernement en vue de remplacer les dirigeants du ZCTU par des éléments lui étant favorables. Le ZCTU a lui-même soumis à l’OIT une documentation relative à cette affaire. En dépit de leur suspension et de leurs plaintes auprès du gouvernement à l’encontre de la direction du ZCTU, les délégués de l’AAAWU ont été invités en mai 2006 au sixième Congrès du ZCTU où ils se sont vu accorder tous les droits et tous les pouvoirs de représentation.
- 1358. L’enquête devait normalement se terminer en mars 2006 mais, le chargé d’enquête n’ayant pas réussi à trouver des pièces à conviction, le gouvernement a décidé de prolonger son mandat jusqu’à nouvel ordre. Le ZCTU craignait que le gouvernement se serve de l’enquête pour fabriquer de toutes pièces des accusations à leur encontre pour les empêcher de se représenter à la réélection au congrès du ZCTU, prévu pour le premier semestre 2006. Heureusement, le chargé d’enquête nommé par le gouvernement n’est pas parvenu à clore l’enquête avant le congrès du ZCTU, au cours duquel la direction actuelle a été réélue en présence de plusieurs observateurs internationaux.
- 1359. Le 19 juillet 2006, le résumé analytique du rapport d’enquête a été communiqué au ZCTU par le ministre du Travail, mais ce n’est que plus tard que les conclusions de ce rapport ont été rendues disponibles, faisant un certain nombre d’allégations concernant les échanges en devises et le détournement de fonds du syndicat. Le chargé d’enquête a transmis son rapport à la police pour les suites à donner.
- 1360. Le 8 août, M. Wellington Chibebe, secrétaire général du ZCTU, a été interrogé par la section des fraudes graves de la Sûreté nationale. L’interrogatoire s’est concentré sur les allégations portant sur sa responsabilité dans des opérations de change illégales en sa qualité de signataire des comptes bancaires du ZCTU. Ce cas avait déjà fait précédemment l’objet d’une enquête avant d’être abandonné par la police, mais l’affaire a été rouverte après le rapport du chargé d’enquête.
- Arrestations, détentions, intimidations
- et harcèlement de syndicalistes en 2005-06
- 1361. Le président du ZCTU, M. Lovemore Matombo, le secrétaire général, M. Wellington Chibebe, et la secrétaire du conseil consultatif pour les femmes (WAC), Mme Tabitha Khumalo, ont tous reçu des menaces de mort après la victoire du parti Zanu Patriotic Front (PF) aux élections générales du pays fin mars 2005. Il a de nouveau été dit que les autorités prévoyaient d’«éliminer» la direction syndicale, ces menaces étant encore renforcées par l’annonce de la nomination de l’ancien chef des services secrets (CIO) aux fonctions de ministre du Travail.
- 1362. Le 27 avril 2005, la police a interrompu avec fracas une réunion du ZCTU qui se tenait à l’Helenic Club de Mutare pour préparer la journée du 1er mai. Cinq membres du conseil régional et un membre du conseil général du ZCTU ont été arrêtés. Selon l’organisation plaignante, la police a prétendu que la réunion enfreignait les dispositions de la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA), en vertu desquelles la police devait, pour les réunions publiques, donner son accord préalable. Or, selon la loi, les syndicats sont exemptés de l’obligation d’obtenir une autorisation pour les activités du 1er mai, dont les préparations constituent une activité syndicale légitime. L’organisation plaignante déclare que la police a invoqué à plusieurs autres reprises les dispositions de la POSA pour réprimer l’activité syndicale, et ce bien que le gouvernement ait de manière répétée garanti à l’OIT que la POSA ne s’appliquait pas aux activités syndicales ni ne les restreignait. Ainsi, par exemple, avant la Commission de l’application des normes de la 95e Conférence internationale du Travail (Genève, juin 2006), le ministre du Service public, du Travail et de la Prévoyance sociale a précisé que la POSA n’avait jamais eu pour objet de s’immiscer dans les activités syndicales mais avait été promulguée pour les besoins du contre-terrorisme et de la sécurité nationale. L’organisation plaignante allègue que l’incident susmentionné survenu à Mutare n’est qu’un exemple parmi d’autres de l’utilisation systématique de la POSA par les autorités pour faire obstruction aux activités syndicales légitimes.
- 1363. Le 28 avril 2005, six délégués syndicaux du ZCTU, dont M. Nathan Banda, le coordonnateur de la santé et de la sécurité du ZCTU, ont été arrêtés pour avoir pris part à une marche pour la santé et la sécurité organisée par l’Agence nationale de la sécurité sociale (NSSA) pour célébrer la Journée internationale de commémoration des travailleurs morts et blessés. La police a par ailleurs mis fin à cette marche à cause de la participation du ZCTU, bien que le syndicat ait été autorisé à y prendre part. Outre M. Banda, les autres syndicalistes arrêtés étaient MM. Elijah Mutemeri, Vmbai Mushongera, Nyikadzino Madzonga et deux délégués syndicaux de la mine de nickel de Bindura. Les syndicalistes sont restés une heure en état d’arrestation, pendant que des fonctionnaires de la NSSA négociaient leur libération avec la police.
- 1364. Le comité des projets du Syndicat des travailleurs du commerce du Zimbabwe (CWUZ) s’est vu empêché de tenir une réunion le 12 mai, après que des gardes de sécurité de l’entreprise Chinotimba Security eurent encerclé l’immeuble, empêchant le personnel d’entrer ou de sortir. La Chinotimba Security Company est dirigée par M. Joseph Chinotimba, un vétéran de guerre et l’un des fondateurs de la Fédération des syndicats du Zimbabwe (ZFTU) affiliée au gouvernement. Les gardes de la sécurité ont allégué que la réunion était illégale et, lorsque la police est finalement arrivée, ils ont forcé les gens à partir et la réunion a dû être abandonnée. Le lendemain, les gardes de la sécurité sont revenus, déclarant cette fois-ci que la réunion du comité exécutif national du CWUZ devait également être annulée, ce qui fut fait.
- 1365. Au Zimbabwe, le harcèlement contre des délégués du ZCTU s’est poursuivi. Le 9 juin 2005, à 5 heures du matin, MM. Percy Mcijo, David Shambare et Ambrose Manenji ont été arrêtés à leur domicile à Bulawayo et emmenés au poste de police. Ils ont été accusés d’avoir organisé un débrayage de deux jours qui s’est produit les 9 et 10 juin. Le débrayage entrait dans le cadre d’une grève générale nationale organisée par les partis d’opposition. Au cours de la grève, la police a arrêté 30 000 personnes et saccagé des milliers de maisons et de magasins. La police avait dit qu’elle traiterait «impitoyablement» toutes protestations de rue.
- 1366. Le 15 juillet, lors d’un atelier de la direction du ZCTU pour valider le projet de régime de retraite organisé à Harare à l’hôtel Bronte, un inconnu a fait irruption et a commencé à asperger les participants de déjections humaines. La réunion a été interrompue pendant une heure et l’inconnu a été emmené par la police, puis relâché.
- 1367. L’organisation plaignante signale également que, le 4 août 2005, M. Bright Chibvuri, journaliste à The Worker, un journal publié par le ZCTU, et M. Lovemore Madhuku, défenseur des droits de l’homme et président de l’Assemblée constitutionnelle nationale (NCA), un groupement d’ONG indépendantes engagées dans la promotion de la démocratie et de l’Etat de droit au Zimbabwe, ont été arrêtés au cours d’une manifestation en faveur de réformes constitutionnelles. Après que la police eut fait intervenir une brigade antiémeutes pour faire échouer la protestation publique, MM. Bright Chibvuri et Lovemore Madhuku ont été inculpés en vertu de l’article 19 de la POSA pour avoir été impliqués dans des rassemblements susceptibles d’entraîner une émeute, des troubles à l’ordre public ou de l’intolérance. S’ils venaient à être jugés coupables, ils pourraient être passibles d’une amende pouvant aller jusqu’à 50 000 dollars zimbabwéens et/ou d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à dix ans. Relâchés le lendemain moyennant une caution de 250 000 dollars zimbabwéens, les deux hommes ont été depuis cités à comparaître à plusieurs reprises, mais la date de leur procès n’a toujours pas été fixée.
- 1368. Le 7 août 2005, des internes en médecine et des médecins de rang intermédiaire, qui s’étaient mis en grève pendant la première semaine d’août, ont reçu l’ordre du gouvernement de reprendre le travail, faute de quoi ils pourraient être appréhendés. Au cours de la deuxième semaine de grève, les médecins ont reçu des agents de la sécurité de l’Etat qui leur ont dit que, pour leur propre bien, il valait mieux qu’ils retournent travailler ou ils pourraient être arrêtés pour infraction à la loi sur les services essentiels. Les médecins, qui touchent un salaire de base de 5,7 millions de dollars zimbabwéens par mois (environ 57 dollars des Etats-Unis), exigeaient que leur salaire passe à 47 millions de dollars zimbabwéens (environ 474 dollars des Etats-Unis) et de meilleures conditions de travail. Outre les visites des agents de sécurité, les médecins ont également reçu celle du ministre-adjoint de la Santé, M. Edwin Muguti, leur disant qu’ils seraient arrêtés s’ils ne reprenaient pas le travail. Les grévistes ont levé la grève car les patients souffraient et des centaines de nouveaux patients étaient refoulés des hôpitaux.
- 1369. Le 20 septembre 2005, M. Harry Taruva, professeur d’anglais au lycée Mambo de Gweru et membre du Syndicat des enseignants progressistes du Zimbabwe (PTUZ), a été emmené de force pour être interrogé et a été torturé par deux personnes disant appartenir aux services de renseignements (CIO). Vers 10 h 30, M. Taruva a été poussé de force dans un camion Mazda B1600 blanc devant des collègues et des élèves, en dépit des protestations du directeur du lycée. Il a été conduit dans un lieu connu comme étant les bureaux d’Agritex, également appelé «Chinyavada», où il a été soumis à un interrogatoire avant d’être torturé pour son appartenance au PTUZ, pour avoir enseigné des programmes d’opposition à ses élèves et pour son association avec le secrétaire général du PTUZ, M. Raymond Majongwe.
- 1370. Le 19 octobre 2005, Mme Lucia Matibenga, secrétaire générale du Syndicat des travailleurs du commerce du Zimbabwe (CWUZ) et dirigeante de l’Assemblée des femmes du MDC, qui avait reçu l’ordre de se rendre au poste de police de Gweru, où elle habite, s’est vue appréhendée, menottée et conduite en bus public à Harare, sous l’escorte de deux policiers. La police a déclaré avoir dû utiliser le bus car elle n’avait ni essence ni véhicule pour l’emmener au commissariat central de Harare. Mme Lucia Matibenga a déclaré à la presse être convaincue que son arrestation était liée à ses fonctions au CWUZ, dont les bureaux avaient été envahis en mai 2005 par des personnes essayant de faire partir le bureau du syndicat dans le cadre de la tentative gouvernementale d’obtenir la démission des dirigeants du ZCTU; mais, le CWUZ ayant porté avec succès l’affaire devant les tribunaux, le syndicat fonctionnait de nouveau normalement.
- 1371. Plus de 1 254 travailleurs représentés par le Syndicat des travailleurs de la communication et des services connexes (CAAAWUZ), un syndicat dûment inscrit en conformité avec les lois du Zimbabwe pour représenter les intérêts des travailleurs des communications et des industries liées, ont été licenciés sans indemnités par la direction de la société de télécommunications du secteur public (TelOne) après avoir entamé une grève sur un différend salarial le 6 octobre 2004. Les «employeurs avaient refusé de/manqué à mettre en œuvre les recommandations d’un arbitre indépendant d’augmenter les salaires des travailleurs conformément à la recommandation du Tribunal du travail. Après avoir épuisé toutes les voies de recours amiable existantes, les travailleurs se sont alors tournés vers une action collective. Représentés par leurs délégués, ils se sont conformés à toutes les conditions requises au titre de la loi syndicale de notifier avec un préavis en bonne et due forme leur intention de s’engager dans une telle action. Le tribunal a statué en faveur des travailleurs dans toutes les tentatives de la direction de l’entreprise de stopper l’action comme étant illégale et illégitime. Après avoir vainement tenté de contester l’action professionnelle, la direction de TelOne a décidé de licencier tous les travailleurs, au motif qu’ils avaient violé le code de conduite. Les travailleurs ont alors saisi la Haute Cour, qui a statué en leur faveur le 26 octobre, déclarant que les employeurs ne pouvaient pas les licencier en se basant sur un code de conduite quand ce dernier n’est pas en conformité avec la loi. Aux termes du jugement, «un code de conduite ne se substitue pas à l’autorité des lois, mais réglemente simplement les relations entre employeur et employé(e)s». Ce qui signifiait effectivement que les licenciements étaient considérés comme nuls et non avenus. Le lundi 30 octobre 2005, suite à la décision de la Haute Cour, 300 travailleurs se sont rendus dans les bureaux de leurs employeurs en vue de reprendre le travail, puisque le tribunal avait jugé leur licenciement illégal et avait ordonné leur réintégration effective, mais ils se sont heurtés à une résistance sur leurs lieux de travail habituels. Pour protester contre le manquement de leur employeur à les recevoir, à discuter avec eux et à respecter la décision du tribunal, les travailleurs ont alors entamé une veille nocturne pacifique et non violente dans les locaux de leurs employeurs. Vers 22 heures, l’inspecteur Moyo de la Police de la République du Zimbabwe et M. Chikwaya, un haut responsable de la société de sécurité travaillant pour TelOne, sont venus s’adresser aux travailleurs, dont le nombre s’était entre-temps réduit à 72, les autres ayant cherché refuge dans les immeubles et ruelles du voisinage. L’inspecteur Moyo et M. Chikwaya ont fait croire aux travailleurs que la direction était disposée à discuter avec eux de ces questions au commissariat central de Harare. En dépit de leurs protestations contre l’idée de se rendre à la police à pareille heure, ils se sont vus contraints de se rendre à pied de force jusqu’au commissariat en question. A leur arrivée vers 2 h 30 du matin, les travailleurs ont constaté que la direction de TelOne ne se trouvait nulle part à proximité du commissariat et n’était pas disposée à entamer des discussions significatives. Entre-temps, l’inspecteur Moyo et son équipe avaient donné l’ordre à la police antiémeutes de venir les rejoindre au commissariat. Dès leur arrivée vers 3 heures du matin, ils ont immédiatement éteint les lumières dans tout le secteur du commissariat où se trouvaient les travailleurs et ont commencé à frapper sans discrimination les travailleurs sans défense à coups de bâtons et de bottes. Environ 16 de ces travailleurs ont dû se faire soigner pour des blessures diverses, dont l’un pour une blessure à la tête.
- 1372. Deux dirigeants du ZCTU à Bulawayo ont été arrêtés dans la nuit du 7 novembre 2005 et un troisième au matin du 8 novembre pour leur implication dans la préparation d’une marche dans le cadre de la Journée nationale d’action contre la pauvreté fixée le 8 novembre. Comme l’exige la loi, ils avaient respecté les conditions légales requises en avertissant la police bien avant le 8 novembre de la marche prévue; ce qui n’a pas empêché leur arrestation.
- 1373. La police a arrêté 118 membres du ZCTU à Harare, 41 à Mutare, six à Gweru et cinq à Bulawayo. Parmi les personnes arrêtées se trouvaient le secrétaire général du syndicat, M. Wellington Chibebe, et le président, M. Lovemore Matombo, arrêtés dans le centre ville alors qu’ils se rendaient à l’angle des rues Nelson Mandela et Leopold Takawira, point de départ de la marche organisée par le ZCTU pour protester contre la pauvreté, la faim, le chômage, l’inflation et les coûts de transport élevés. Les manifestants demandaient des salaires convenables, une réduction de l’impôt sur le revenu de 40 à 30 pour cent, la mise à disposition des médicaments antirétroviraux et un arrêt des importations de marchandises bon marché en provenance de pays asiatiques. Selon le ZCTU, la vie des travailleurs n’avait jamais été aussi misérable avec un chômage de masse et un taux d’inflation de 360 pour cent. Les manifestants prévoyaient également de remettre une requête au ministre du Travail sur ces questions. A peine dix minutes après le début de la manifestation, la police antiémeutes est intervenue, armée de bâtons, de boucliers et de chiens, et a arrêté 118 participants qui avaient entonné des chansons sur la pauvreté et qui portaient des pancartes contre l’importation de produits chinois de mauvaise qualité. Transportés en camion au commissariat central de Harare, les manifestants ont ensuite été emmenés à Chitungwiza, à 25 kilomètres d’Harare. Les dirigeants du ZCTU ont pu avoir accès à M. Chibebe et à M. Matombo, qui n’ont fait l’objet d’aucune inculpation. Ce 8 novembre 2005, les forces de police armées sont restées fortement présentes dans les rues de Harare et, avant la marche, elles ont arrêté tous les véhicules transportant plus d’un passager à des barrages routiers installés sur toutes les routes menant à la ville. On pouvait voir des paramilitaires munis de chiens, de boucliers et de bâtons dans toute la ville d’Harare. Qui plus est, 20 personnes infectées par le VIH/SIDA, qui se trouvaient parmi les personnes arrêtées, auraient été laissées sans médicaments. Des femmes avec des bébés et des personnes handicapées ont également été détenues. Toujours le 8 novembre, M. Mlamlei Sibanda, M. Last Tarabuku, Mme Tabitha Khumalo et M. Leonard Ngwenzi ont été, un peu avant 13 heures, tirés de force hors d’un minibus du ZCTU par des soldats postés à un barrage routier au centre de Harare, soi-disant pour avoir photographié un camion de l’armée. Ils ont été conduits dans une caserne, où ils ont été détenus pendant plus de quatre heures et interrogés sur leurs intentions, leurs familles, leur adresse, etc. Plus tard dans la soirée, l’armée les a remis à la police qui les a relâchés car il s’agissait seulement de cadres moyens et de chauffeurs. Les photos qu’ils avaient prises ont toutefois été effacées et ils ont dû laisser sur place leurs numéros d’immatriculation professionnelle.
- 1374. Des dirigeants activistes du ZCTU de plusieurs régions ont été arrêtés avant la marche, bien que les syndicats locaux aient averti la police de toutes les manifestations, comme l’exige la loi. Ainsi, par exemple, à Bulawayo, deux dirigeants du ZCTU ont été arrêtés au soir du 7 novembre et un troisième au matin du 8 novembre. Il s’agissait du dirigeant syndical régional, M. Reason Ngwenya, du vice-président régional, M. Dzavamwe Shambari, et du dirigeant régional, M. Percy Mcijo. 41 autres personnes ont été arrêtées à Mutare. Le dirigeant régional du ZCTU pour Mutare, M. Tambaoga Nyazika, a été menacé par une personne prétendant être un policier, qui lui a dit qu’il «regrettera toute sa vie de travailler pour le ZCTU». Un vendeur, qui vendait des boissons à des dirigeants du ZCTU pour des membres du syndicat arrêtés, aurait été violemment agressé par des agents de police prétendant appartenir au service d’enquête criminelle. Le 10 novembre, quatre des personnes arrêtées à Mutare ont été relâchées sous caution après avoir payé une amende de 25 000 dollars zimbabwéens, et les 37 personnes restantes ont été relâchées en échange d’une caution de 500 000 dollars zimbabwéens chacune, à l’exception de M. Tambaoga Nyazika, qui a dû verser une caution de 1,5 million de dollars zimbabwéens. Tous devaient comparaître au tribunal le 24 novembre 2005, sous l’accusation d’infraction à la POSA. La CISL a par ailleurs reçu une copie de la décision de la police d’interdire la marche contre la pauvreté, qui a été envoyée au ZCTU le 4 novembre 2005, ainsi que d’autres interdictions semblables portant sur des marches en 2004. L’une de ces décisions fait directement référence à la POSA. Deux membres du Syndicat des cheminots unis du Zimbabwe (ZARU) affilié à l’ITF ont également été arrêtés, à savoir Mme S. Moyo, secrétaire de l’organisation régionale (région est du Zimbabwe) et l’activiste, Mme Francisca Gurure, qui ont respectivement été détenues en cellule par la police de Chitungwiza et de Mutare. A Chinoyi et à Masvingo, la police a empêché la tenue de manifestations par des syndicats dont elle avait préalablement bloqué les locaux. Quant aux 118 membres du ZCTU arrêtés à Harare, ils ont été relâchés le 12 novembre 2005 après d’âpres négociations avec le bureau du ministre de la Justice. Selon ce dernier, la police ne disposant pas d’accusation solide procéderait par la suite par des citations à comparaître.
- 1375. Le 8 août 2006, deux cadres du ZCTU, MM. Michael Kandukutu et Wilson Kambanje de la région du nord, ont été interrogés par la police, qui avait confisqué des tracts du ZCTU dans leur bureau la semaine précédente. Ces tracts contenaient des informations sur le taux d’imposition élevé et, selon la police, ces informations étaient fausses et portaient préjudice à l’Etat en étant susceptibles d’encourager la violence publique. La police leur a fait savoir qu’ils allaient être inculpés en vertu de la loi pénale no 23 de 2004 (Codification et Réforme) dès que la police aurait reçu l’accord du ministère de la Justice. L’organisation plaignante ne sait pas si les actes d’accusation ont officiellement été rédigés. De plus, le bureau de la région du nord à Chinoyi, à environ 100 kilomètres d’Harare, a été perquisitionné et plus de 2 000 tracts portant sur la campagne du ZCTU contre les impôts élevés ont été confisqués.
- 1376. Le 15 août 2006, vers 19 h 20, M. Wellington Chibebe, qui revenait de Masvingo en voiture avec sa famille, a été arrêté à un barrage routier et placé en détention au commissariat de Waterfalls. D’après nos informations, il a été arrêté au barrage routier placé le long de Simon Mazorodze Road, près de Waterfalls, par le brigadier M. Mukonyonga. La police a demandé à fouiller sa voiture, soi-disant pour chercher de l’argent liquide. Une telle intervention policière pourrait faire partie de la campagne menée par le gouvernement du Zimbabwe pour empêcher la spéculation financière pendant qu’il met en œuvre une réforme monétaire majeure censée avoir pour but de lutter contre l’hyperinflation, qui s’élevait à l’époque à 1 200 pour cent. De telles perquisitions – et la confiscation d’argent à des ressortissants zimbabwéens aux barrages routiers – sont illégales et vont prochainement faire l’objet de recours auprès des tribunaux. Quoi qu’il en soit, les agents de police postés au barrage routier de Waterfalls ont réagi avec une extrême violence quand M. Chibebe leur a déclaré que ce qu’ils faisaient était illégal. Un policier a alors tenté de le faire sortir de force de sa voiture alors que sa ceinture de sécurité était encore attachée. D’après ce qui a été rapporté, le policier a alors giflé deux fois violemment M. Chibebe, l’accusant d’opposer une résistance à la perquisition. Tout cela s’est produit sous les yeux de la famille de M. Chibebe, lequel a ensuite été arrêté par la police et conduit au commissariat de Waterfalls, où il a été accusé de voie de fait simple pour avoir soi-disant agressé un policier alors que, dans les faits, c’est lui qui avait été agressé. Selon des sources juridiques du ZCTU, la police a délibérément changé les chefs d’accusation en voie de fait simple de manière à rendre les choses plus graves, étant donné l’identité du prisonnier et la forte popularité dont il jouit au niveau national. Le 17 août, il a finalement été présenté devant le Tribunal d’instance de Mbare, où il a été inculpé en vertu de l’article 176 de la loi pénale (Codification et Réforme) (chap. 9:23), qui stipule que «Toute personne qui agresse ou résiste de manière violente à un gardien de la paix agissant dans le cadre de ses fonctions, en sachant qu’il s’agit d’un gardien de la paix ou en réalisant qu’il existe un risque ou une possibilité qu’il s’agisse d’un gardien de la paix, sera coupable d’agression ou de résistance à un gardien de la paix et passible d’une amende ne dépassant pas le niveau 12 ou d’une peine de prison ne dépassant pas dix ans ou des deux sanctions.» Il a alors été relâché moyennant une caution de 2 millions de dollars zimbabwéens (2 000 dollars zimbabwéens réévalués) (8 dollars des Etats-Unis) et cité à comparaître devant le tribunal le 4 septembre. L’affaire a ensuite été repoussée au 7 septembre du fait du procès intenté auprès de la Cour suprême pour savoir si la loi pénale (Codification et Réforme) était ou non conforme à la Constitution. Le jour même où M. Chibebe était relâché, un autre syndicaliste, M. Leonard Gwenzi, organisateur national du ZCTU, a été arrêté en possession de 200 000 dollars zimbabwéens (200 dollars des Etats-Unis) à son retour d’une série d’ateliers syndicaux qui s’étaient déroulés dans tout le pays. Il a toutefois été relâché un peu plus tard après que la Banque de réserve du Zimbabwe eut reconnu, sur la base des reçus et justificatifs détenus par M. Gwenzi, qu’il transportait en fait des fonds du ZCTU. Il a été relâché sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui et l’argent lui a été restitué.
- Arrestations, détentions et violences physiques
- en relation avec une manifestation du 13 septembre 2006
- 1377. Le ZCTU avait programmé pour le 13 septembre 2006 une manifestation contre le taux d’inflation du pays, atteignant 1 200 pour cent – le plus élevé du monde au vu de tous les comptes disponibles – et pour exiger une augmentation des revenus (en liant le salaire minimum au seuil de pauvreté), une baisse des impôts, un meilleur accès aux médicaments antirétroviraux nécessaires pour lutter contre le VIH/SIDA et un arrêt du harcèlement des travailleurs dans le secteur de l’économie informelle. La manifestation avait été annoncée de longue date et le ZCTU avait informé la police deux jours à l’avance des itinéraires qui devaient être empruntés. Le gouvernement avait averti le ZCTU que la manifestation était considérée comme illégale, dans la mesure où de telles questions devaient être traitées dans le cadre du Forum national tripartite. Les nouvelles du 12 septembre faisaient état des propos du ministre du Travail disant que la manifestation n’était pas liée aux intérêts des travailleurs mais était de nature politique. Entre-temps, les itinéraires prévus pour les manifestants et les points de rassemblement avaient été bloqués dans de nombreuses villes, y compris à Harare, où des miliciens du parti Zanu PF portant des insignes du parti allaient d’un point à un autre en intimidant les gens; ce qui permet de supposer que les autorités elles-mêmes avaient dans l’idée de politiser ce qui était une manifestation purement syndicale. A Harare, à peine dix minutes après que les manifestants eurent commencé à marcher, la police leur a demandé de s’arrêter; ce qu’ils ont fait. On leur a alors ordonné de s’asseoir, ce qu’ils ont également fait. On les a fait ensuite monter de force dans des camions pour les placer en détention. Par ailleurs, dans tout le pays, de très nombreux dirigeants syndicaux ont été placés en détention, interrogés et, dans certains cas, victimes de violences policières. D’autres ont fait l’objet de menaces et d’intimidations. Ces arrestations et ces actes ont commencé dès le 12 septembre, avant la manifestation prévue pour le 13 septembre. La police a arrêté un certain nombre de dirigeants du ZCTU à leur domicile ou dans leurs bureaux. Le 13 septembre, la campagne d’arrestations s’est intensifiée. Les bureaux du ZCTU ont été bloqués et/ou fermés par l’armée et/ou les forces de police, par exemple à Masvingo et à Mutare. La répression contre des syndicalistes et d’autres civils s’est produite dans tout le pays, notamment à Harare, Chitungwiza, Plumtree, Gwanda, Hwange, Bulawayo, Beitbridge, Masvingo, Mutare, Chinhoyi, Kariba, Gweru, Shurugwi, Gokwe, Kwekwe et Chegutu. Au bout du compte, entre le 12 et le 13 septembre, quelque 265 manifestants syndicalistes ont été arrêtés dans les villes et communes de tout le pays, plusieurs personnes ont été interrogées et un nombre indéterminé a fait l’objet d’intimidations ou de violences physiques. Le 13 septembre, à 15 h 30, la situation était la suivante:
- – Harare: 15 personnes arrêtées, parmi lesquelles le secrétaire général du ZCTU, M. Wellington Chibebe, le président, M. Lovemore Matombo, la vice-présidente, Mme Lucia Matibenga, et le responsable des Syndicats des enseignants progressistes du Zimbabwe, M. Raymond Majongwe. Leur arrestation s’est accompagnée de violences physiques. Depuis le matin, on notait dans la ville une forte présence policière. L’itinéraire prévu pour la marche était fermé. Des miliciens du Zanu PF arborant des insignes du parti étaient présents;
- – Chitungwiza: important déploiement de troupes militaires avec des camions-citernes. 50 personnes arrêtées, notamment des membres de l’Association des résidents de Chitungwiza et l’épouse de l’ancien maire;
- – Plumtree: forte présence policière;
- – Gwanda: forte présence policière;
- – Hwange: M. Daniel Ncube détenu pendant quatre heures pour être interrogé;
- – Bulawayo: une vingtaine de personnes arrêtées, notamment le président, le secrétaire et un organisateur de la section régionale; deux personnes arrêtées le 12 septembre étaient encore détenues par la police le lendemain;
- – Beitbridge: trois personnes arrêtées;
- – Masvingo: M. Gapare a été interrogé par la police de Masvingo; 15 agents de police munis de bâtons, de boites en fer et de fusils ont bloqué l’entrée des bureaux du ZCTU;
- – Mutare: 20 personnes arrêtées; huit agents de police munis de matraques et de boites en fer ont encerclé le bureau du ZCTU à Mutare; des citoyens ordinaires ont été frappés;
- – Chinoyi: 15 travailleurs arrêtés; le président régional a été emmené pour un interrogatoire de quatre heures; un dirigeant régional et trois autres membres arrêtés le 12 septembre étaient encore détenus, dont l’un d’eux pour avoir commis la seule faute d’apporter à manger à ceux déjà détenus;
- – Kariba: des membres du comité ont fait l’objet d’intimidations policières; d’après certains rapports non confirmés, des arrestations ont eu lieu le 12 septembre;
- – Gweru: 16 manifestants arrêtés;
- – Shurugwi: des membres de la direction ont été emmenés pour interrogatoire;
- – Gokwe: des membres de la direction ont été emmenés pour interrogatoire;
- – Kwekwe: des membres de la direction ont été emmenés pour interrogatoire;
- – Chegutu: 15 manifestants arrêtés; deux ont été interrogés;
- – Kadoma: 11 manifestants arrêtés;
- – Victoria Falls: trois manifestants arrêtés; et
- – Rusape: des rapports non confirmés font état de l’arrestation de dirigeants à leur domicile et dans les bureaux.
- 1378. Le 13 septembre 2006, le président du ZCTU, M. Lovemore Matombo, la première vice-présidente, Mme Lucia Matibenga, et le secrétaire général, M. Wellington Chibebe, ont été arrêtés avec 12 autres personnes à Harare. Tous les quinze ont été jetés dans un bus, qui suivait un autre bus transportant une trentaine d’autres syndicalistes mais, alors que ce bus s’était arrêté au commissariat central de Harare, le leur a poursuivi sa route jusqu’à l’abominable commissariat de Matapi à Mbare, où les prisonniers sont couramment torturés. Ils ont alors été poussés à coups de poing et de pied à l’intérieur du commissariat et jetés deux par deux dans des cellules. Là, cinq hommes qui les attendaient les ont violemment battus. Les premiers rapports indiquent que, après être passés entre les mains de la police, MM. Matombo et Chibebe ne pouvaient même pas se tenir debout et leurs vêtements étaient couverts de sang. Mme Lucia Matibenga avait les pieds tuméfiés et ne pouvait plus marcher, ce qui suggère qu’on leur avait frappé la plante des pieds. Au début de leur détention, les soins médicaux leur ont été refusés, de même que l’accès à un avocat. La police a refusé qu’un médecin des «Médecins pour les droits de l’homme» ait accès aux syndicalistes détenus, bien que leur état physique fût si mauvais que les autorités de police de rang supérieur ont refusé de se les voir confier au commissariat central de Harare, où les trois dirigeants du ZCTU avaient été transférés à l’aube du 14 septembre. Selon des rapports de diverses sources qui se recoupent, les fonctionnaires de police du commissariat central ont insisté pour recevoir un rapport sur l’identité de ceux qui leur ont fait subir les violences. La police de Matapi a nié que les personnes arrêtées aient été agressées. L’avocat qui représente les victimes a déposé une demande urgente auprès de la Haute Cour pour qu’elle ordonne que les détenus puissent avoir un médecin. Tous trois ont de nouveau été transférés à Matapi. Des informations plus précises sur la gravité des blessures causées aux principaux dirigeants du ZCTU ont été obtenues ultérieurement. Selon leur avocat, M. Aleck Muchadehama, le président du ZCTU, M. Lovemore Matombo, avait un bras cassé et des bosses et contusions sur tout le corps. La première vice-présidente, Mme Lucia Matibenga, avait des marques de fouet sur tout le dos et sur les fesses. Elle avait le cou tuméfié et ses tympans étaient en si mauvais état qu’elle avait des difficultés à entendre. Elle devait porter un bras en écharpe. Le secrétaire général, M. Wellington Chibebe, avait de graves coupures à la tête, trois os cassés et de sérieuses bosses et contusions sur tout le corps. Les rapports des médecins relatifs à d’autres membres du conseil du ZCTU indiquent que d’autres ont également de graves fractures des os, des bosses et contusions sérieuses et des coupures, notamment MM. Moses Ngondo et R. Chigwagwa. Des rapports exhaustifs pour toutes les personnes blessées pendant leur séjour dans les locaux de la police n’étaient pas disponibles lors de la rédaction des présentes allégations. Les dirigeants syndicaux auraient également été contraints de marcher pieds nus dans les eaux usées s’écoulant dans les cellules, ces dernières ayant été qualifiées d’inhumaines par la Cour suprême du Zimbabwe.
- 1379. M. Wellington Chibebe a informé des journalistes que les dirigeants syndicaux ont été placés par deux dans des cellules, où la police les a frappés à l’aide de barres de fer et de bâtons. Il était effrayé par les coups répétés et par les propos des policiers, qui leur disaient que «des gens sont morts pendant la lutte pour l’indépendance et c’est exactement ce qui va aussi arriver maintenant» et «nous avons été formés pour tuer et non pour rédiger des fiches». Vers 16 heures, il a lui-même été frappé jusqu’à ce qu’il perde connaissance et il n’a repris conscience que le lendemain 14 septembre. Il a finalement été transféré le vendredi 15 septembre à l’Hôpital Parirenyatawa, qui ne disposait pas de médicaments. La police a refusé de le transférer vers un meilleur hôpital, bien que les quatorze autres détenus aient été admis à l’Hôpital Dandaro à Borrowdale. (L’organisation plaignante joint en annexe 4 plusieurs photographies de M. Chibebe couché sur un lit d’hôpital, le bras gauche plâtré et bandé.)
- 1380. Mme Lucia Matibenga a elle aussi confirmé qu’ils avaient été placés par deux dans des cellules, où cinq hommes munis de bâtons les attendaient et les ont battus et roués de coups pendant une vingtaine de minutes. Ils lui ont cogné la tête contre le mur à trois reprises; elle a été giflée à pleines mains plusieurs fois et frappée sur les jambes, les bras et le dos sans discontinuer. Quand elle s’est effondrée, on lui a ordonné de se relever. Après ces violences, elle n’a pas été maintenue en cellule mais a été autorisée à s’asseoir dans la zone du guichet. Des collègues et des avocats du ZCTU venaient juste de se voir invités à quitter le guichet puisque les quinze dirigeants syndicaux n’étaient pas dans la prison de Matabi quand Mme Lucia Matibenga, en dépit des menaces de policiers, est parvenue à signaler sa présence à ses collègues. Le 15 septembre au soir, 29 des activistes et des dirigeants arrêtés à Harare ont été présentés au tribunal. Six avaient un bras en écharpe par suite des blessures subies sous la garde de la police. Tous ont été accusés en vertu de l’article 37 de la loi pénale (Codification et Réforme) selon lequel toute action susceptible de causer un trouble à l’ordre public constitue un délit. Tous ont été relâchés moyennant le versement d’une caution de 20 000 dollars zimbabwéens chacun. Ils doivent passer en jugement le 3 octobre à 9 h 30 et, jusqu’à cette date, se présenter au commissariat central de Harare chaque vendredi. M. Wellington Chibebe n’a quant à lui pas pu se présenter à la même audience du tribunal que les vingt-neuf autres activistes et dirigeants, du fait des graves blessures qui lui ont été infligées par la police. Une audience séparée du tribunal a donc été organisée pour lui le 16 septembre sur son lit d’hôpital. Il a été relâché sans caution et son jugement est également prévu pour le 3 octobre. Du fait des violences qu’il a subies, il a dû être opéré le lundi 18 septembre. Le représentant du ministère public, M. Tawanda Zvakare, a rejeté l’accusation de torture, considérant les blessures subies par les dirigeants syndicaux comme des contusions obtenues au cours d’accrochages avec la police, pendant lesquels des agents de police ont eux-mêmes été blessés. Le magistrat a toutefois diligenté une enquête sur les violences et M. Alec Muchadehama, l’avocat des dirigeants syndicaux, a également déposé plainte contre la police pour torture pour le compte de M. Chibebe et d’autres.
- 1381. Dans les trente-quatre autres sections du ZCTU, des activistes ont été relâchés sous caution ou en réglant des amendes d’aveu de culpabilité ou des amendes pour entrave à la circulation, atteignant dans certains cas 250 dollars zimbabwéens:
- – Chegutu: 11 membres du Syndicat général des travailleurs de l’agriculture et des plantations du Zimbabwe, six hommes et cinq femmes, ont été battus et torturés par la police. On les a fait entrer un par un dans une pièce pour les frapper. Trois d’entre eux ont été battus par des agents de la sécurité (CIO). L’un des dirigeants serait si gravement blessé qu’il risque de mourir des suites des violences qu’il a subies. Leurs plaintes à ce sujet ayant été ignorées, ils ont dû verser une caution de 1 000 dollars zimbabwéens chacun(e) et sont cités à comparaître au tribunal le 29 septembre, toujours sous l’accusation d’avoir enfreint la loi pénale (Codification et Réforme);
- – Victoria Falls: trois activistes ont été relâchés moyennant une caution 5 000 dollars zimbabwéens chacun;
- – Hwange: deux membres du ZCTU qui avaient été arrêtés pour avoir distribué des tracts le 13 septembre ont été relâchés moyennant une caution de 2 000 dollars zimbabwéens chacun;
- – Chitungwiza: des activistes ont été relâchés le 14 septembre après avoir réglé des amendes d’aveu de culpabilité. Huit d’entre eux avaient subi des violences policières et avaient dû recevoir des soins médicaux; et
- – Kadoma: 11 membres ont comparu devant le tribunal le 15 septembre et ont été accusés d’infraction à la loi pénale (Codification et Réforme).
- 1382. Le 19 septembre 2006 à 12 h 30, le premier secrétaire général adjoint du ZCTU, M. Japhet Moyo, a été détenu et interrogé pendant deux heures à l’aéroport international de Harare. Au guichet de l’immigration, il a été accosté par deux personnes déclarant être membres de la CIO, l’accusant d’avoir organisé des manifestations du ZCTU (sans doute le 13 septembre) et de quitter le pays pour diffuser de fausses informations sur le Zimbabwe. Ses bagages ont été fouillés pendant son interrogatoire, mais rien n’a été confisqué. On lui a dit de ne parler de l’incident à personne car il s’agissait juste d’un contrôle de sécurité de routine. Le ZCTU soupçonne que M. Silas Kuvheya, le secrétaire général du Syndicat des travailleurs du textile du Zimbabwe, a lui aussi été interrogé car on ne l’a trouvé nulle part après son arrivée à l’aéroport international de Harare prévue pour 14 h 30.
- 1383. Le 25 septembre 2006, le président Mugabe a déclaré à la presse que la police avait eu raison de traiter sévèrement les dirigeants syndicaux les 12 et 13 septembre. «Certaines personnes font à présent courir la rumeur qu’elles ont subi des violences. Et bien oui, on vous tape dessus. Quand la police vous ordonne de dégager»; et d’ajouter «Si vous ne dégagez pas, vous invitez la police à faire usage de la force» aurait déclaré le président Mugabe. Selon lui, la manifestation du 13 septembre faisait partie d’une campagne visant à le faire quitter ses fonctions. De l’avis de l’organisation plaignante, ces citations montrent clairement que le gouvernement du Zimbabwe cautionne et est pleinement responsable des tortures et des violences physiques infligées aux dirigeants syndicaux les 12 et 13 septembre. L’organisation plaignante se déclare très inquiète de ces déclarations et demande au Comité de la liberté syndicale de faire savoir sans équivoque au gouvernement du Zimbabwe que la torture et les attaques physiques de manifestants syndicaux pacifiques vont à l’encontre des principes de la convention no 87.
- 1384. Le 20 août 2004, un projet de loi sur les organisations non gouvernementales (ONG) a été publié (Gazette no 68, 20 août 2004; annonce gouvernementale générale no 432 de 2004) pour exiger l’enregistrement de toutes les ONG. Ce projet prévoyait que tous les membres du comité directeur d’une ONG non enregistrée pourraient être passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq mois de prison si l’ONG concernée ne mettait pas fin à ses opérations. Ce projet visait à empêcher des ONG locales de recevoir, notamment de donateurs étrangers, des fonds pour des «questions de gouvernance», cette expression était définie comme incluant «la promotion et la protection des droits de l’homme et les questions de gouvernance politique». Les syndicats craignaient que ce projet permette une ingérence dans leur coopération avec des donateurs étrangers. En octobre 2005, le ministre du Travail, du Service public et de la Prévoyance sociale alors en fonctions, M. Nicholas Goche, a déclaré que, conformément à cette politique, il était impératif que les ONG demandent l’autorisation d’opérer à leur gouverneur provincial, à titre de mesure provisoire, en attendant l’adoption définitive du projet de loi, et ce afin de garantir la responsabilité des ONG. Cette politique n’a toutefois pas été suivie par certaines ONG. Le projet de loi a été voté par le Parlement le 9 décembre 2005, mais le président Robert Mugabe ne l’a toutefois pas signé dans le délai imparti de vingt et un jours, le renvoyant devant le Parlement. Selon le ministre actuel du Travail, du Service public et de la Prévoyance sociale, M. Paul Mangwana, le projet de loi est toujours en cours d’examen par le Président et il pourrait être soumis à des consultations avec des organisations sociales. Le ZCTU craint que, si la loi était adoptée, elle serve à empêcher les financements étrangers de ses activités.
- 1385. Le projet de loi Labour Amendment Bill H.B.1, 2005, a été publié dans la gazette juridique du 11 mars 2005. Le ZCTU s’est plaint de l’absence de consultation sur un certain nombre de dispositions du projet. L’un de ses principaux sujets d’inquiétude était que les employés du secteur public ne seraient pas couverts par la loi générale sur le travail mais seraient soumis à une législation séparée en vertu de la loi sur le service public (PSA). Cette dernière prive les employés du secteur public du droit de négociation collective. Selon le ZCTU, ces modifications constitueraient un recul par rapport aux avantages acquis en vertu de la loi sur le travail harmonisée de 2003, qui octroie aux fonctionnaires le droit de créer et d’appartenir à un syndicat et le droit à la négociation collective. Selon le ZCTU, la modification interdirait également à tous les employés du secteur public le recours à la grève et l’accès à d’autres mécanismes efficaces de règlement des conflits. Dès 2005, les premiers signes de l’impact du nouveau projet de loi se faisaient déjà sentir. Le bruit a ainsi circulé en octobre 2005 que des syndicats d’enseignants du Zimbabwe étaient trop effrayés pour entreprendre une grève, craignant d’être emprisonnés s’ils se mettaient en grève. Le projet de loi a ensuite été adopté et la loi est entrée en vigueur le 30 décembre 2005, sous l’intitulé de Labour Amendment Act, 2005 (loi no 7/2005). Une note de synthèse exhaustive du ZCTU sur le projet de loi analyse en détail l’impact de cette nouvelle loi. Outre l’exclusion des fonctionnaires du champ d’application de la loi sur le travail, elle présente plusieurs caractéristiques inquiétantes. Les articles 25, 79, 80 et 81 donnent au ministre du Travail le pouvoir d’approuver, d’enregistrer et de publier les conventions collectives. Contrairement aux promesses faites par le gouvernement à la CIT en juin 2004, ces articles n’ont pas été abrogés. Le gouvernement a par ailleurs introduit dans la loi une sous-clause obligeant les conventions collectives à prévoir des mesures pour lutter contre la violence sur le lieu de travail. Le ZCTU est convaincu qu’elle pourrait abusivement servir à criminaliser la grève. La loi centralise également la décision sur l’enregistrement des syndicats et des organisations d’employeurs, contre l’avis exprès des syndicats.
- 1386. Qui plus est, la loi renferme des dispositions permettant au directeur de l’enregistrement des sociétés de superviser l’élection de dirigeants d’organisations d’employeurs et de travailleurs, d’annuler des élections, de différer ou de modifier la date d’une élection. En vertu de la nouvelle loi, la décision du directeur de l’enregistrement sera maintenue, même en cas d’appel, alors qu’auparavant un appel permettait de suspendre une telle décision. Cette disposition est contraire à la jurisprudence de l’OIT selon laquelle aucune suspension de syndicat ne devrait prendre effet avant qu’une décision définitive ait été rendue par un organisme judiciaire indépendant. La législation ne contient pas de dispositions interdisant aux employeurs de recruter des travailleurs remplaçants en cas de grève. Toutefois, un employeur a interdiction de recruter de tels travailleurs pendant un lock-out. La loi renferme également un article qui permet aux employeurs de poursuivre des travailleurs en responsabilité lors de grèves illicites. En vertu de l’article 109, point (2), des personnes physiques et morales engagées dans une grève illégale pourront être condamnées à une amende ne dépassant pas le niveau 14 (la loi ne précise pas à quel montant correspond le niveau 14) ou à une peine de prison pour une durée ne dépassant pas cinq ans d’emprisonnement, ou à la fois à une amende et à une peine de prison. De plus, le droit d’un syndicat à recouvrer des cotisations syndicales par pointage pourra être annulé pendant une durée allant jusqu’à douze mois sur ordre du ministre du Travail.
- 1387. L’organisation plaignante joint à ses allégations un DVD contenant:
- 1) de brefs entretiens avec cinq syndicalistes, notamment M. Chibebe, Mme Matibenga et M. James Gumbi, un membre du conseil général du ZCTU. Tous attestent avoir pris part à la manifestation du 13 septembre 2006 et avoir été violemment battus par la police. Dans les cas de M. Chibebe et de Mme Matibenga, les blessures et contusions concordant avec les allégations de l’organisation plaignante sont évidentes;
- 2) une séquence indiquant que c’est bien lors de la manifestation du 13 septembre que plusieurs manifestants se voient ordonner de monter à l’arrière d’un camion par des policiers, qui les frappent à plusieurs reprises avec des bâtons avant de monter dans le camion et de les emmener.
- C. Nouvelles réponses du gouvernement
- 1388. Concernant l’arrestation de syndicalistes alléguée par l’organisation plaignante, le gouvernement réitère, dans une communication du 6 septembre 2006, sa position selon laquelle les arrestations n’avaient aucun rapport avec des activités syndicales mais concernaient plutôt les activités politiques des syndicalistes. Le gouvernement soutient que les personnes concernées s’étaient engagées dans des manifestations et des activités organisées par leur parti politique, qui n’avaient pas été sanctionnées par les organes de contrôle habilités en conformité avec les lois régissant les manifestations de partis politiques.
- 1389. Au sujet de la recommandation antérieure du comité, le gouvernement indique qu’il ne dispose pas de dossier concernant l’arrestation alléguée de M. Choko et de huit autres syndicalistes. Quant au cas de M. Takaona, le gouvernement déclare que la société Zimpapers a fait appel d’une sentence arbitrale rendue en vertu de l’article 98 de la loi sur le travail; la question de la réintégration de M. Takaona continue donc d’être examinée dans le cadre des procédures de règlement des conflits en vigueur au Zimbabwe.
- 1390. Quant au dirigeant syndical, M. Mangezi, le gouvernement déclare pouvoir uniquement encourager son employeur à réexaminer la décision de mutation le concernant. De ce fait, le gouvernement a demandé au syndicat de conseiller à M. Mangezi de déposer auprès du ministère une plainte pour pratique professionnelle abusive, afin que le problème puisse être traité dans le cadre du dispositif de règlement des conflits.
- 1391. Le gouvernement déclare également qu’une mission de contacts directs au Zimbabwe est non seulement inacceptable, mais déplacée. Selon lui, les mécanismes de l’OIT ne peuvent parvenir aux résultats escomptés s’ils sont utilisés pour résoudre des questions qui sont du domaine du politique. Il réitère sa position selon laquelle les allégations formulées contre lui ont leurs racines profondes dans les ambitions politiques d’un petit nombre de dirigeants du ZCTU qui poursuivent des intérêts politiques en abusant des privilèges accordés aux syndicats. Selon le gouvernement, ces personnes occupent également des fonctions dans le parti d’opposition (MDC) et dans un certain nombre d’organisations quasi politiques qui cherchent à renverser, de manière violente et anticonstitutionnelle, le gouvernement actuel.
- 1392. Le gouvernement a joint à sa communication du 6 septembre 2006 des copies d’une décision de la Cour suprême de mars 2006 et d’une décision du Tribunal du travail de novembre 2005 portant respectivement sur la société NetOne et la Zimpost. Concernant NetOne, la Cour suprême a déclaré licite le licenciement de 56 employés, annulant ainsi une précédente sentence arbitrale de réintégration. Dans le cas de Zimpost, le Tribunal du travail a confirmé une sentence arbitrale de réintégration tout en la modifiant légèrement, en ajoutant que, dans le cas où les parties ne parviendraient pas à s’accorder sur le montant de dommages et intérêts à la place de la réintégration, l’une ou l’autre partie pourra demander au tribunal d’évaluer ledit montant.
- 1393. Dans une communication du 1er octobre 2006, le gouvernement déclare que la manifestation du ZCTU a été entreprise en collaboration avec le parti politique d’opposition MDC. Elle cessait dès lors d’être une activité de travailleurs et était soumise aux lois régissant les manifestations politiques. Le gouvernement a refusé d’autoriser cette manifestation car le MDC avait, peu de temps auparavant, provoqué de violentes escarmouches qui auraient pu causer des morts; et il a donc arrêté des dirigeants du ZCTU pour s’être engagés dans une activité illégale. Le gouvernement ajoute que les questions mises en avant par l’organisation plaignante pour justifier la tenue de la manifestation entrent dans le cadre du processus de dialogue social: il est donc sidérant de voir qu’une partie à un processus puisse choisir de continuer à recourir à des affrontements pour des questions sur l’examen desquelles toutes les parties sont engagées. Le gouvernement soutient que, au moins pour l’une des questions ayant motivé l’organisation de la manifestation – la liaison entre les salaires, le seuil de pauvreté et le VIH/SIDA –, l’organisation plaignante et lui-même étaient d’ores et déjà en total accord, comme le prouve le procès-verbal du Forum de négociation tripartite (TNF). Concernant d’autres questions telles que le VIH/SIDA et l’impôt sur le revenu, le gouvernement maintient que l’organisation plaignante aurait pu continuer de les traiter dans le cadre du TNF ou chercher à obtenir d’éventuelles suggestions en la matière de la part des autorités avant d’avoir recours à des manifestations.
- 1394. Dans une communication du 17 octobre 2006, le gouvernement joint une déclaration du commissaire de police, qui récapitule les déclarations faites par écrit et sous serment par des agents de police présents lors de la manifestation du 13 septembre 2006. Cette déclaration affirme que: 1) la manifestation étant illégale, la police avait le droit de disperser les manifestants et d’arrêter ceux qui bravaient l’ordre de dispersion; 2) les manifestants blessés étaient ceux qui résistaient à leur arrestation et à l’ordre de dispersion; 3) la police avait été contrainte de faire usage d’un minimum de force pour venir à bout des manifestants, et c’est ainsi que certains ont été blessés; 4) la police a également émis des allégations selon lesquelles certains manifestants se sont blessés en sautant des véhicules qui les emmenaient vers différents commissariats; et 5) des enquêtes sont toujours en cours pour établir si les membres du ZCTU ont fait ou non l’objet de violences physiques au cours de leur détention au commissariat de Matapi.
- 1395. Dans sa communication du 19 janvier 2007, le gouvernement commence par contester le «complément d’information» transmis par la CISL, puisque le gouvernement a déjà répondu à de nombreuses reprises aux mêmes allégations au titre de plaintes et de cas différents. Il souhaite que la CISL perde l’habitude de présenter de vieilles questions sous un nouvel emballage pour le seul plaisir de mettre le gouvernement du Zimbabwe sur la sellette.
- 1396. Pour ce qui a trait aux expulsions alléguées de syndicalistes internationaux, le gouvernement se réserve entièrement le droit de déterminer ses politiques et ses lois sur l’immigration, en conformité avec les aspirations de la République. L’adhésion à un syndicat ne saurait être utilisée pour contourner les lois et les politiques nationales d’immigration. Le gouvernement souligne qu’il ne souhaite pas compromettre ses lois et ses politiques pour des personnes qui, sous couvert de syndicalisme, sont résolues à déstabiliser le pays.
- 1397. Le gouvernement souligne que les syndicalistes internationaux ne font l’objet d’aucune interdiction générale d’entrée au Zimbabwe et il énumère un certain nombre d’entre eux appartenant à des organisations, telles que le SATUCC ou LO Norway, et le porte-parole des travailleurs du Conseil d’administration, M. L. Trottman, qui ont été accueillis dans le pays. Seules les personnes jugées indésirables pour la survie et le développement sociaux, politiques et économiques du pays ne sont pas autorisées à entrer au Zimbabwe.
- 1398. Il convient de replacer les quelques cas isolés cités par la CISL dans le contexte de l’exercice par le Zimbabwe de son droit souverain à décider de ses lois et de ses politiques d’immigration. Le gouvernement n’a donc nullement à s’excuser d’exercer son obligation constitutionnelle de protéger les intérêts et la sécurité de la majorité des Zimbabwéens.
- 1399. Concernant les allégations de tentatives de remplacement de la direction du ZCTU, auxquelles le gouvernement a répondu à plusieurs reprises, le gouvernement affirme avec force que la direction du ZCTU en appelle abusivement au dispositif de contrôle de l’OIT pour des questions purement internes au syndicat. Les prétendus agents provocateurs sont en fait des membres de la direction du ZCTU qui ont formulé à l’encontre de la direction actuelle du syndicat des allégations de corruption, de mauvaise gestion et de violation de la constitution du ZCTU. Le gouvernement estime que le ZCTU cherche à obtenir le soutien de ses alliés occidentaux, manifestement allergiques au gouvernement du Zimbabwe, en vue de saborder les allégations formulées à leur encontre en qualifiant d’agents du gouvernement les dirigeants des syndicats affiliés au ZCTU. Le gouvernement n’a dès lors pas de commentaires à faire sur des affaires purement internes au ZCTU, dont les dirigeants devraient se voir conseiller de résoudre leurs problèmes internes sans y mêler le nom du gouvernement.
- 1400. Le gouvernement conteste par ailleurs l’allégation du ZCTU selon laquelle la CIO aurait confirmé par des rapports de presse son intention de faire partir les dirigeants du ZCTU. De plus, les soi-disant menaces de mort dont ces derniers auraient fait l’objet ne peuvent être prouvées par le moindre début de preuve et sont basées sur des ouï-dire; le but étant de faire du battage autour de la sécurité des dirigeants du ZCTU juste pour masquer leurs activités contre l’ordre établi et s’attirer la compassion de leurs sponsors et contacts en Occident.
- 1401. Sur la question des allégations d’arrestations pendant les préparations de la fête du 1er mai, le gouvernement déclare avoir diligenté une enquête sur ces allégations et n’avoir obtenu aucune information sur la question. Le gouvernement estime qu’il s’agit d’une manipulation d’événements imaginaires par le ZCTU, qui n’a véritablement de cesse de chercher à discréditer le gouvernement du Zimbabwe. Le gouvernement affirme que les activités syndicales ne sont pas soumises à la POSA, comme l’a indiqué le ZCTU. Les allégations en question sont des exemples typiques d’événements fabriqués de toutes pièces dans les bureaux du ZCTU en vue d’étayer les efforts de leurs collègues dans l’opposition qui considèrent la POSA comme une entrave à leurs aspirations anticonstitutionnelles et violentes contre l’ordre établi.
- 1402. Quant aux arrestations survenues les 27 et 28 avril 2005, le gouvernement confirme que les personnes citées ont effectivement été appréhendées alors qu’elles distribuaient du matériel subversif appelant à des troubles civils pour renverser par la violence le gouvernement pendant la marche organisée par le NSSA. Dès lors, les autorités chargées de faire respecter la loi ont agi comme il se devait pour préserver l’ordre public car d’autres travailleurs ayant des opinions politiques différentes auraient pu réagir de la même façon, ce qui aurait conduit à la rupture de l’ordre public. Le gouvernement du Zimbabwe n’a cessé d’encourager publiquement la direction du ZCTU à renoncer à politiser le lieu de travail, mais ces exhortations sont jusqu’ici demeurées vaines puisque les dirigeants du ZCTU continuent de profiter de tous les rassemblements pour faire valoir leurs intérêts politiques.
- 1403. Le coordonnateur du projet d’économie informelle du ZCTU a effectivement fait l’objet d’enquêtes de police portant sur des opérations de change illégales, qui ont ensuite donné lieu à des poursuites judiciaires actuellement en cours d’instruction par les tribunaux.
- 1404. La question relative à des allégations de harcèlement par des voyous et celle des deux véhicules suspects devraient être rejetées avec tout le mépris qu’elles méritent. Le gouvernement note que des allégations semblables formulées par M. R. Majongwe ont été rejetées par le comité, eu égard à leur nature imaginaire.
- 1405. Les allégations à l’encontre de la soi-disant société de sécurité Chinotimba sont des exemples typiques de concurrence entre fédérations, la Chinotimba étant issue du ZFTU, un syndicat rival du ZCTU. Il est très étonnant de constater qu’aucun rapport n’a été rédigé par la police alors que tout le monde sait que les agents de sécurité n’ont aucun pouvoir de maintien de l’ordre.
- 1406. La descente de police dans les bureaux du ZCTU le 13 mai 2005 était effectivement légale, étant donné que la police avait un mandat de perquisition. Il est du devoir de la police d’enquêter quand elle soupçonne qu’un délit a été commis. Il convient également de noter que la direction du ZCTU a saisi les tribunaux, ce qui atteste clairement de la crédibilité de la règle de droit au Zimbabwe.
- 1407. Pour ce qui concerne la représentation des travailleurs à la Conférence de l’OIT, le gouvernement rappelle que la Commission de vérification des pouvoirs a traité cette question, et il réitère sa position selon laquelle il n’a joué aucun rôle dans le choix du candidat du ZCTU, le nom du troisième vice-président du syndicat lui ayant été soumis suite à la suspension de la direction du ZCTU dans laquelle le gouvernement n’a joué aucun rôle.
- 1408. Quant à l’allégation d’arrestation d’activistes du ZCTU pour avoir organisé un débrayage de deux jours, les pièces soumises par la CISL font clairement apparaître que le débrayage avait été organisé par des partis d’opposition politique et non par le ZCTU. Ces partis politiques sont soumis à la POSA. Dans le ZCTU, certaines personnes ont tendance à mettre abusivement en avant leur appartenance au syndicat pour servir leurs intérêts politiques et ont une propension à agiter la bannière syndicale chaque fois qu’ils se font prendre en train d’enfreindre la loi dans le cadre d’activités politiques.
- 1409. Concernant l’allégation de tentatives de discréditation du secrétaire général du ZCTU, il s’agit une fois de plus de luttes internes au ZCTU pour la direction du syndicat, suite aux allégations formulées à l’encontre de la direction de M. Chibebe. Les personnes mentionnées dans les allégations sont effectivement des dirigeants de syndicats affiliés au ZCTU, ce qui est également le cas pour les allégations d’agressions lors d’irruptions au ZCTU, au WAC et à l’hôtel Bronte. Le gouvernement n’a aucune part dans les affaires syndicales, conformément à l’acte législatif no 131 sur la protection contre des actes d’ingérence.
- 1410. Des recherches sur l’arrestation alléguée de Mme Lucia Matibenga, le 19 octobre 2005, ont révélé qu’aucun événement de ce type ne s’est produit. Cette personne étant actuellement contestée dans ses fonctions de direction par d’autres membres du syndicat, elle a fait en sorte, dans la droite ligne de ce que la direction du ZCTU a coutume de faire dans de semblables circonstances, que soient concoctées des allégations à l’encontre du gouvernement pour torpiller la lutte interne au sein de son syndicat.
- 1411. Se référant à sa réponse au Bureau suite à une intervention demandée en relation avec les enquêtes sur les activités du ZCTU, le gouvernement ajoute que, au titre du dépôt des plaintes susmentionnées par des membres du ZCTU, il a convoqué une réunion de tous les membres du conseil général du ZCTU pour établir la réalité des faits. Certains de ces membres ont choisi, de manière constructive, de s’abstenir de participer à cette réunion; mais les éléments soumis par les membres qui y ont assisté se sont avérés suffisants pour convaincre le ministre de la nécessité d’invoquer l’article 120 de la loi sur le travail, ce qui a entraîné la désignation d’un chargé d’enquête indépendant.
- 1412. Le gouvernement n’a pas l’intention de s’exprimer sur le fond de la cause, étant donné que l’affaire est pendante et actuellement examinée par les tribunaux du Zimbabwe, qui ont la plus grande compétence pour traiter au mieux cette question dans tous ses aspects.
- 1413. Quant aux affirmations du ZCTU prétendant qu’ils n’ont pas pu assister à la réunion convoquée par le directeur de l’administration du travail car ils étaient alors en prison, le ministre comprend que seuls deux membres du conseil général se trouvaient dans des cellules de la police, et non en prison, comme l’allègue le ZCTU, après avoir organisé et participé à une manifestation dont les mobiles étaient politiques.
- 1414. Par manque de locus standi, le gouvernement n’a pas à commenter les questions soulevées par les dirigeants du ZCTU au sujet de leurs luttes internes. Il conviendrait de demander à la direction du ZCTU de garder pour elle-même les remous qui l’agitent, sans mêler le nom du gouvernement à leurs bagarres.
- 1415. Le gouvernement souhaite par ailleurs dissiper tout malentendu sur le fait que M. Chibebe a été appréhendé par la police le 8 août 2006 pour répondre à des accusations d’activité en devises illégale, dont M. E. Mutemeri et Mme V. Mushongera sont également coaccusés. Ces accusations n’ont jamais été abandonnées.
- 1416. De plus, l’arrestation alléguée de M. L. Madhuku pour des manifestations en faveur d’une réforme constitutionnelle n’a rien à voir avec des activités de travailleurs. Le président de l’Assemblée constitutionnelle nationale (NCA) est un activiste politique connu. L’inclusion de l’arrestation alléguée du président de la NCA dans des questions relatives à la liberté syndicale des travailleurs témoigne sans ambiguïté de la relation existant entre la direction du ZCTU et les partis politiques d’opposition ainsi qu’avec les organisations quasi politiques telles que la NCA. Ils œuvrent manifestement de concert pour des activités de déstabilisation de l’ordre public. Des travailleurs du Zimbabwe ont à de multiples reprises fait part de leur préoccupation au sujet des manœuvres des dirigeants du ZCTU dans la politique, les accusant de se concentrer sur des intérêts politiques personnels au détriment de la protection sociale des travailleurs.
- 1417. Qui plus est, certaines des informations soumises par la CISL ne figuraient pas dans les allégations présentées à l’origine par le ZCTU et la CISL et n’ont été présentées qu’un an plus tard. Le gouvernement soutient que ces nouveaux incidents sont fabriqués de toutes pièces pour dépeindre le gouvernement du Zimbabwe comme un grave contrevenant aux droits des travailleurs, dans le plus grand intérêt des adversaires du gouvernement du Zimbabwe, en particulier de certains gouvernements occidentaux.
- 1418. Les allégations formulées à l’encontre du ministre-adjoint M. Muguti sont malveillantes et sans fondement. Le gouvernement met au défi le ZCTU et la CISL de fournir des preuves crédibles attestant du bien-fondé de ces allégations scandaleuses.
- 1419. Aucune information n’est parvenue concernant les allégations de torture de M. Taruva telles qu’elles ont été présentées. Il s’agit une fois de plus d’une allégation typiquement forgée de toutes pièces pour ternir l’image du gouvernement du Zimbabwe. Des fonctionnaires de l’école ont confirmé qu’aucun événement de ce type ne s’était produit.
- 1420. A tous les stades importants, le gouvernement a toujours fourni au comité les informations relatives au cas des travailleurs de TelOne licenciés, et ce jusqu’à l’arrêt définitif rendu sur ce cas par la Cour suprême. Le jugement de la Cour suprême a également été transmis à l’OIT. Les allégations de coups assénés par la police n’ont à aucun moment été formulées. Le ZCTU invoque ces questions à ce stade uniquement pour ternir l’image des agents chargés de faire respecter la loi au Zimbabwe, après l’échec de son recours auprès de la Cour suprême. Il s’agit à l’évidence d’une manifestation de sa rancœur après avoir été débouté de son appel, et elle devrait donc être écartée avec le mépris qu’elle mérite. La police a également confirmé qu’aucun incident de ce type ne s’était produit de la manière alléguée.
- 1421. Deux dirigeants du ZCTU ont effectivement été arrêtés le 8 novembre 2005 pour leur participation à une manifestation illégale organisée par le parti politique d’opposition MDC qui n’avait pas été autorisée par l’autorité de contrôle. L’événement n’avait aucun rapport avec des activités syndicales, mais il s’agissait plutôt d’actions purement politiques émanant du MDC auquel ils appartenaient. Il convient également de souligner qu’une simple notification à l’autorité de contrôle d’une manifestation politique n’équivaut pas à une permission d’entreprendre la manifestation en question. En l’occurrence, l’autorité de contrôle n’avait pas donné son consentement à cette manifestation politique.
- 1422. Concernant les arrestations alléguées de syndicalistes en novembre 2005, les tracts présumés confisqués à MM. Kamukutu et Kambanje étaient manifestement de nature subversive puisqu’ils préconisaient le renversement par la violence du gouvernement actuel. Le gouvernement précise que des activités terroristes ne sont pas du tout souhaitables et qu’il est dès lors du devoir de la police de maintenir la paix, l’ordre et la tranquillité.
- 1423. Le gouvernement n’a pas pu obtenir d’informations sur la descente présumée dans les bureaux du ZCTU à Chinhoyi. La police a par ailleurs confirmé qu’aucun rapport n’avait été rédigé au sujet de cette descente de police alléguée.
- 1424. Concernant les démonstrations de masse du 13 septembre 2006, le gouvernement considère que la situation est dénaturée dans le but de faire du battage autour de violations présumées au Zimbabwe, l’idée étant de s’attirer la sympathie des adversaires de la République du Zimbabwe qui sont prêts à faire feu de tout bois pour voir le Zimbabwe figurer sur la liste des comparants devant la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2007.
- 1425. Il faut également noter que l’appel à des manifestations illégales a été un fiasco puisque la majorité des Zimbabwéens a ignoré l’appel pour vaquer à ses affaires quotidiennes. La direction du ZCTU a donc lancé la manifestation en recrutant des voyous du parti politique d’opposition MDC. Les chiffres donnés par le ZCTU et la CISL sont donc le fruit de l’imagination des dirigeants du ZCTU.
- 1426. Le gouvernement met humblement en avant le fait que, alors que la police n’a utilisé la force qu’au minimum pour procéder à des arrestations, le battage fait autour des tortures alléguées est fortement exagéré et vise à gonfler hors de toute proportion l’utilisation minimum de la force par la police, comme cela a été dit avec justesse dans le cas de Mme Matibenga. S’il n’y avait pas eu d’examens ultérieurs en Afrique du Sud, de telles contrevérités auraient été considérées comme vraies du simple fait qu’elles étaient rapportées à l’encontre du gouvernement du Zimbabwe. Cela montre clairement jusqu’où des acteurs politiques du mouvement syndical au Zimbabwe sont prêts à aller pour satisfaire leur insatiable appétit de discréditation du gouvernement du Zimbabwe.
- 1427. Le gouvernement du Zimbabwe est très préoccupé par les déformations malveillantes des déclarations prétendument faites à la presse par le président Mugabe. Il faut par ailleurs noter qu’aucune citation correcte n’est donnée pour authentifier les allégations faites par le ZCTU et la CISL. Lesdites organisations seraient mieux inspirées de chercher à obtenir des éclaircissements auprès des services gouvernementaux concernés avant de présenter des allégations déformées contre le gouvernement et les fonctionnaires de la République du Zimbabwe.
- 1428. Pour ce qui concerne le projet de loi sur les ONG, le gouvernement déclare que cela n’a aucun rapport avec l’activité syndicale. Aux termes du droit du travail, le ZCTU est enregistré en tant que fédération syndicale et non en tant qu’ONG. Il est donc déplacé de discuter et de soumettre au dispositif de l’OIT un élément de législation qui, même en faisant un effort d’imagination maximum, ne s’applique pas aux activités syndicales et aux normes du travail.
- 1429. Le gouvernement considère les observations faites par la CISL et le ZCTU comme des points à examiner dans le cadre de la réforme en cours de la législation du travail et leurs suggestions ont été notées. La modification du droit du travail implique l’examen des différents points de vue et positions de toutes les parties prenantes. La prétention du ZCTU de voir ses avis et suggestions être pris d’emblée en considération aux dépens des avis d’autres parties prenantes telles que les employeurs et la société civile est donc fallacieuse.
- 1430. Il est également intéressant de noter que la CISL présente des allégations vagues contre l’actuelle loi sur le travail sans se référer aux articles précis prouvant le bien-fondé de ses réclamations. A cet égard, le gouvernement défie le ZCTU et la CISL de citer l’article supposé de la loi stipulant que les conventions collectives devraient prévoir des mesures pour lutter contre la violence sur le lieu de travail.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité- 1431. Le comité note que les nouvelles allégations dans ce cas concernent: l’expulsion et l’interdiction d’entrer dans le pays à des syndicalistes étrangers collaborant avec le ZCTU; le parrainage d’une faction rivale au sein du ZCTU tendant à saper la direction du ZCTU; la dissolution de réunions du ZCTU; l’attaque du siège du ZCTU et la confiscation illégale des biens du syndicat; le lancement d’enquêtes portant sur des allégations d’incurie financière pour harceler le syndicat; des propositions de modifications à la législation du travail en violation des principes de la liberté syndicale; et plusieurs cas impliquant l’arrestation, la détention et le passage à tabac de dirigeants et de membres du ZCTU – dont une grande partie ont été commis dans le cadre de la répression d’une manifestation organisée par le ZCTU le 13 septembre 2006. Avant d’aborder le fond du présent cas, le comité doit déplorer, avec la plus grande fermeté, les accusations portées par le gouvernement quant à l’implication de l’OIT dans la fabrication de toutes pièces des nouvelles allégations présentées dans ce cas.
- 1432. Pour ce qui concerne les arrestations et détentions qui ont eu lieu le 13 septembre 2006, le comité note que, selon l’organisation plaignante, la manifestation organisée ce jour-là avait pour objectif de protester, entre autres, contre la pauvreté, la faim, le chômage, l’inflation et les coûts du transport élevés. Le comité regrette profondément que le gouvernement s’en tienne à définir cette allégation comme du «battage» destiné à gagner la sympathie de ses adversaires, sans apporter à cette allégation la réponse sérieuse et précise qu’elle mérite. Le comité observe que, d’une manière plus générale, le gouvernement répond en réitérant la position qu’il avait adoptée auparavant concernant des allégations de nature semblable – à savoir que les personnes concernées ont été arrêtées pour s’être engagées dans des manifestations politiques illégales et non pour une activité syndicale légitime. Le comité se voit dans l’obligation de rappeler une fois encore, comme il l’a fait à sa session de juin 2005 [voir 337e rapport, paragr. 1661], que les activités syndicales ne doivent pas être restreintes strictement à des questions de travail puisque les politiques et les choix des gouvernements ont nécessairement un impact sur les travailleurs; les organisations syndicales doivent en conséquence pouvoir exprimer publiquement leur opinion sur la politique du gouvernement au sens large du terme. Alors que les organisations syndicales ne doivent pas abuser de leur activité politique en outrepassant leurs fonctions propres et en promouvant des intérêts essentiellement politiques, une interdiction générale de toute activité politique par les syndicats, outre qu’elle serait incompatible avec les principes de la liberté syndicale, manquerait du réalisme nécessaire à son application pratique. Les organisations syndicales peuvent vouloir exprimer publiquement, par exemple, leur opinion sur la politique économique et sociale du gouvernement. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 502-503.]
- 1433. Selon l’organisation plaignante, des membres et des dirigeants du ZCTU ont également été arrêtés et détenus les 28 avril, 9 juin, 4 et 7 août, 20 septembre, 19 octobre, 7 et 8 novembre 2005, et les 8 et 15 août 2006. Le comité déplore le fait que de nombreuses allégations de cette nature continuent d’être formulées, en dépit de sa recommandation antérieure au gouvernement de s’abstenir de recourir à des mesures d’arrestation et de détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales. [Voir 337e rapport, paragr. 1671.] Le comité doit une fois encore souligner que la détention de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques, en général, et des libertés syndicales, en particulier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 64.] Notant par ailleurs qu’un certain nombre de syndicalistes et de dirigeants du ZCTU ont été accusés en vertu de la loi pénale (Codification et Réforme) en relation avec leur participation à la manifestation du 13 septembre 2006, notamment 29 membres du ZCTU à Harare, 11 à Chegutu et 11 à Kadoma, le comité prie instamment le gouvernement d’abandonner les accusations relatives à des activités syndicales présentées à l’encontre de ces syndicalistes et de s’abstenir de recourir à des mesures d’arrestation et de détention de syndicalistes ou de dirigeants syndicaux pour des motifs liés à leurs activités syndicales. Tout en notant l’affirmation du gouvernement que la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) n’est pas utilisée contre des syndicalistes, le comité considère qu’une action de protestation économique et sociale constitue effectivement une activité syndicale légitime qui doit être protégée. Le comité prie donc instamment le gouvernement de s’assurer qu’aucune autre accusation au titre de la POSA n’est pendante contre des syndicalistes pour leur exercice d’une activité syndicale légitime.
- 1434. Concernant les coups et blessures subis par des syndicalistes le 13 septembre 2006, le comité note que, selon le gouvernement, la police a fait un usage minimum de la force pour disperser les manifestants et qu’aucun des officiers de police, dont les déclarations écrites sous serment sont jointes à sa réponse, n’a été témoin d’actes de violence commis à l’encontre des syndicalistes arrêtés. Toutefois, le comité prend également note des informations précises fournies par l’organisation plaignante à l’appui de ces allégations. Lesdites informations comprennent une séquences vidéo dans laquelle les dirigeants du ZCTU attestent avoir été détenus et frappés le jour en question, et dans laquelle on peut facilement discerner leurs contusions et blessures. De plus, l’organisation plaignante allègue également des actes de violence commis à d’autres occasions contre des syndicalistes: la torture du syndicaliste du PTUZ, M. Harry Taruva, le 20 septembre 2005 (allégation que le gouvernement rejette purement et simplement), le matraquage et la dispersion de 300 travailleurs tenant une veillée le 30 octobre 2005, et les violences physiques sur M. Chibebe le 15 août 2006. Le comité rappelle à cet égard que les droits des organisations d’employeurs et de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pression ou de menaces de toute nature à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu’il incombe aux gouvernements de veiller au respect de ce principe. Qui plus est, dans les cas où la dispersion d’assemblées publiques ou de manifestations par la police a entraîné la perte de vies humaines ou de blessures graves, le comité a attaché une importance spéciale à ce que l’on procède immédiatement à une enquête impartiale et approfondie des circonstances et à ce qu’une procédure légale régulière soit suivie pour déterminer le bien-fondé de l’action prise par la police et pour déterminer les responsabilités. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 45 et 49.] Tout en notant que le gouvernement indique que des enquêtes ont été effectuées pour établir si des membres du ZCTU avaient ou non été agressés après leur détention au commissariat de Matapi, le comité prie instamment le gouvernement, eu égard à la gravité des allégations, de diligenter une enquête indépendante sur toutes les allégations de coups et de mauvais traitements, qui devra être conduite par une personnalité ayant la confiance de toutes les parties concernées. Il demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de l’enquête.
- 1435. L’organisation plaignante indique également, faisant référence aux événements des 12 et 13 septembre 2006, que, le 25 septembre 2006, le président Mugabe a déclaré à des journaux que la police a eu raison de traiter sévèrement les dirigeants syndicaux ces jours-là. A quoi le gouvernement répond en affirmant que cette allégation constitue une déformation malveillante de ses propos, qui aurait dû être clarifiée auprès du service gouvernemental concerné. Compte tenu des positions contradictoires sur ce point et en l’absence de tous éléments nouveaux ultérieurs, le comité ne peut que demander au gouvernement de veiller à ce qu’aucune déclaration ne soit faite par des responsables gouvernementaux qui pourrait être perçue comme une menace ou une intimidation destinée à des syndicalistes ou au mouvement syndical dans son ensemble.
- 1436. Le comité note que, selon l’organisation plaignante, le gouvernement a cherché à déstabiliser le ZCTU en fomentant une lutte interne au sein du syndicat par son soutien à des factions rivales chargées de s’opposer aux dirigeants et de perturber les réunions du ZCTU. A l’appui de cette allégation, l’organisation plaignante renvoie aux faits suivants: la parution en mars 2005 d’une série d’articles dans lesquels des dirigeants de syndicats affiliés au ZCTU accusent la direction centrale de ce dernier de fraude et de corruption; la perturbation d’une réunion du conseil exécutif du ZCTU le 19 mars 2005 par l’AAAWU, une faction rivale à l’intérieur du ZCTU qui, selon l’organisation plaignante, reçoit un soutien financier du gouvernement; la perturbation le 6 avril 2005 d’une réunion du conseil général au cours de laquelle des membres de syndicats affiliés au ZCTU ont tenté de faire discuter de force d’une motion exigeant la démission des dirigeants du ZCTU sous les accusations de corruption et de fraude; des agressions physiques commises le 23 avril 2005 sur des membres du ZCTU par des agents provocateurs de deux syndicats affiliés au ZCTU; et la perturbation le 9 juillet 2005 par des membres de l’AAAWU d’une réunion du WAC du ZCTU, au cours de laquelle plusieurs membres du WAC ont fait l’objet d’agressions physiques. Le comité se voit contraint d’exprimer sa préoccupation devant la gravité de ces allégations. Qui plus est, bien qu’il ne soit pas en position de vérifier des allégations concernant des conflits internes au sein du ZCTU, le comité doit néanmoins noter avec inquiétude que, d’après les allégations, les responsables de ces actes sont des factions du ZCTU qui opèrent sous l’ordre des autorités ou en collaboration avec elles. Tout en notant que le gouvernement indique que ces allégations concernent exclusivement les affaires syndicales internes, le comité note avec un profond regret que le gouvernement ne répond pas, de manière précise, aux sérieuses préoccupations générées, notamment pour ce qui a trait à des allégations d’agressions physiques, pas plus qu’il n’indique les mesures prises pour enquêter sur leur véracité et déterminer les responsables. Dans ces conditions, le comité prie instamment le gouvernement de diligenter une enquête indépendante et exhaustive sur ces allégations, en vue de clarifier totalement les faits en déterminant les responsabilités, en punissant les coupables et en empêchant que de tels actes se reproduisent.
- 1437. Selon l’organisation plaignante, la preuve de l’intention du gouvernement de fomenter une lutte interne au sein du ZCTU en s’ingérant dans ses affaires intérieures est également clairement attestée par son refus de parrainer le président démocratiquement élu du syndicat, M. Lovemore Matombo, et son secrétaire général, M. Wellington Chibebe, comme délégués à la CIT de juin 2005; au lieu de quoi le gouvernement soutient les nominations de M. Elias Mlotshwa et de M. Edmund Ruzive, de la faction de l’AAAWU. Tout en notant que le gouvernement déclare n’avoir joué aucun rôle dans le choix du candidat du ZCTU, le comité note que les conclusions de la Commission de vérification des pouvoirs relatives à cette question corroborent les allégations de l’organisation plaignante. Dans sa résolution du problème, la commission a en particulier noté que «les actes du gouvernement ne sont pas conformes aux principes de la liberté syndicale et constituent une ingérence dans les activités internes d’une organisation de travailleurs» et a estimé que la procédure de désignation de la délégation des travailleurs n’a pas respecté les conditions d’impartialité, de transparence et de prévisibilité requises en vertu de l’article 3, paragraphe 5, de la Constitution de l’OIT. [Voir troisième rapport de la Commission de vérification des pouvoirs de l’OIT, Compte rendu provisoire no 4D, paragr. 51-62, 93e session, 2005.] Le comité considère que de tels actes d’ingérence dans les activités internes d’un syndicat constituent une violation fondamentale des principes de la liberté syndicale et de la convention no 87 que le gouvernement a ratifiée. Il prie fermement le gouvernement de respecter pleinement le droit des syndicats d’organiser leur administration interne, sans ingérence de la part d’autorités publiques, et de garantir que le ZCTU aura le droit de déterminer les délégués syndicaux chargés de le représenter dans les forums nationaux et internationaux.
- 1438. Concernant l’irruption de la police dans les locaux du ZCTU et la saisie de dossiers, de disquettes et de devises, tout en notant que le gouvernement affirme que la perquisition était légale et conduite avec un mandat de perquisition, le comité observe que, selon l’organisation plaignante, il y a eu un certain nombre d’irrégularités portant à la fois sur le mandat lui-même et sur la manière dont la perquisition a été conduite. Notant que l’organisation plaignante a saisi la Haute Cour en contestant la légalité de la perquisition et de la confiscation de ses biens, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de cette affaire et de lui transmettre une copie de la décision finale dès qu’elle aura été rendue.
- 1439. Concernant les allégations relatives à l’enquête du gouvernement sur les finances du ZCTU, le comité observe, en se basant sur les allégations de l’organisation plaignante, que: 1) bien que l’enquête, conduite par un commissaire aux comptes expert désigné par le gouvernement, ne soit parvenue à trouver aucune pièce à conviction probante, le mandat du chargé d’enquête a été ensuite prolongé au-delà de sa date d’expiration prévue pour mars 2006; 2) le 19 juillet 2006, le résumé analytique du rapport d’enquête a été communiqué au ZCTU par le ministre du Travail, mais les conclusions de ce rapport – qui formulaient un certain nombre d’allégations concernant des opérations de change et le détournement de fonds du syndicat – n’ont été rendues disponibles que plus tard; et 3) le rapport a été transmis par le chargé d’enquête à la police pour les suites à donner. Le gouvernement déclare que l’affaire est pendante.
- 1440. Le comité note ensuite que, d’après l’organisation plaignante et le gouvernement, le 8 août 2006, le secrétaire général du ZCTU, M. Wellington Chibebe, a été interrogé par les autorités en relation avec des allégations d’opérations de change illégales. Selon l’organisation plaignante, ce cas avait déjà fait auparavant l’objet d’une enquête avant d’être abandonné, mais il a été rouvert après la présentation du rapport d’enquête sur les finances du ZCTU. Notant que, d’après les informations dont il dispose, il semble qu’il y ait eu un certain nombre d’irrégularités de procédure pour ce qui a trait à la fois à l’enquête sur les finances du ZCTU et à l’accusation contre M. Chibebe et ses collègues, le comité demande au gouvernement d’apporter une réponse précise et exhaustive au sujet de ces enquêtes et de lui transmettre les textes intégraux de toutes décisions judiciaires rendues à cet égard.
- 1441. Le comité note par ailleurs que le gouvernement indique qu’une action en justice est actuellement pendante contre le coordonnateur du projet d’économie informelle du ZCTU pour des présomptions de transactions en devises illégales, et il demande au gouvernement de lui transmettre une copie du jugement dès qu’il aura été rendu.
- 1442. Concernant l’expulsion et le refus de laisser entrer des syndicalistes, tout en prenant note de la réponse du gouvernement selon laquelle certains syndicalistes étrangers ont été autorisés à entrer dans le pays, le comité est alarmé par la déclaration du gouvernement disant que ceux qui se sont vu interdire l’entrée étaient indésirables pour la survie et le développement sociaux, politiques et économiques du pays, même si leurs visites concernaient des programmes d’aide et de coopération entre leurs syndicats respectifs et le ZCTU ou l’un de ses syndicats affiliés. A cet égard, le comité rappelle, ainsi qu’il l’a fait dans son examen antérieur de ce cas, que la recherche de conseils et d’un soutien auprès de mouvements syndicaux bien établis dans la région, dans l’objectif d’aider les organisations syndicales nationales à se défendre ou à se développer, constitue une activité syndicale pleinement légitime, même lorsque la tendance syndicale diffère de la ou des tendance(s) dans le pays, sous réserve des dispositions de la législation nationale relatives à l’admission d’étrangers; ce principe ayant pour corollaire que les formalités que doivent accomplir les syndicalistes et les dirigeants syndicaux pour entrer sur le territoire d’un Etat ou participer à des activités syndicales sur ce territoire devraient être fondées sur des critères objectifs exempts de discrimination antisyndicale. [Voir 337e rapport, paragr. 1667.] Le comité note que le gouvernement n’a fourni aucune information à ce sujet. Il prie une nouvelle fois le gouvernement d’autoriser à l’avenir les missions de soutien mutuel dans le pays et de fonder toute approbation uniquement sur des critères objectifs sans recourir à des décisions de nature antisyndicale.
- 1443. Le comité note que le gouvernement a indiqué que: 1) il ne dispose d’aucun dossier concernant M. Choko et les huit autres syndicalistes qui avaient pris part à la manifestation du 18 novembre 2003 à Bulawayo; et 2) concernant le cas de M. Takaona, la société Zimpapers fait actuellement appel d’une sentence arbitrale rendue en vertu de l’article 98 de la loi sur le travail. Concernant l’accusation contre M. Choko et les huit autres syndicalistes, le comité rappelle que l’arrestation et la détention de syndicalistes pour l’exercice d’une activité syndicale constituent des violations des principes de la liberté syndicale. Toutefois, il ne poursuivra pas plus avant cette question sans autres informations de la part de l’organisation plaignante. Concernant M. Takaona, le comité rappelle qu’il a été relevé de ses fonctions de journaliste au journal Zimpapers le 4 mars 2004 du fait de ses activités syndicales. [Voir 336e rapport, paragr. 897.] Notant que l’employeur Zimpapers a fait appel d’une sentence arbitrale ordonnant la réintégration de M. Takaona, le comité – compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis le licenciement de M. Takaona – demande une nouvelle fois au gouvernement de veiller à ce qu’il soit rapidement réintégré dans ses fonctions, ou à un poste équivalent, sans perte de salaire ou d’indemnités et de le tenir informé à cet égard.
- 1444. Le comité prend note du projet de loi sur les organisations non gouvernementales (le «Projet ONG») qui, selon l’organisation plaignante, vise à empêcher les ONG locales de recevoir des fonds pour des «questions de gouvernance» –, y compris la promotion et la protection des droits de l’homme et les questions de gouvernance politique. L’organisation plaignante indique que le ZCTU s’est dit inquiet que le projet de loi puisse être concocté pour l’empêcher de recevoir des financements étrangers pour ses activités. A cet égard, le comité rappelle que toutes les organisations d’employeurs et de travailleurs devraient avoir le droit de recevoir une assistance financière des organisations internationales d’employeurs et de travailleurs, respectivement, qu’elles soient ou non affiliées à ces organisations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 744.] Notant que le gouvernement déclare que ce projet de loi ne s’applique pas aux syndicats, le comité s’attend à ce que le gouvernement veillera, si le Projet ONG est adopté, à ce qu’il ne restreigne d’aucune manière le droit des syndicats à recevoir une assistance financière étrangère pour des activités syndicales légitimes.
- 1445. Le comité note les allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles la loi de modification du droit du travail 2005 [«Labour Amendment Act 2005»] empiète sur les droits syndicaux en excluant les fonctionnaires du champ d’application de ses dispositions, leur refusant ainsi les droits de grève et de négociation collective; en accordant au ministre du Travail le pouvoir d’approuver les conventions collectives; en permettant le maintien des décisions du directeur de l’enregistrement même en cas d’appel, alors qu’auparavant un appel pouvait permettre de suspendre une telle décision; et en autorisant les employeurs à recruter des travailleurs remplaçants en cas de grève.
- 1446. Pour ce qui concerne les fonctionnaires, le comité rappelle que le droit de grève ne peut être restreint ou interdit uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat. Une définition trop extensive de la notion de fonctionnaire est susceptible d’aboutir à une limitation très large, voire à une interdiction, du droit de grève de ces travailleurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 574-575.] Qui plus est, tous les agents de la fonction publique, à l’exception de ceux qui sont commis à l’administration de l’Etat, devraient bénéficier du droit de négociation collective, et une priorité devrait être accordée à la négociation collective comme moyen de règlement des différends survenant à propos de la détermination des conditions et modalités d’emploi dans le secteur public. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 886.]
- 1447. Pour ce qui a trait au pouvoir du ministre d’approuver les conventions collectives, le comité rappelle que le fait de subordonner l’entrée en vigueur des accords collectifs souscrits par les parties à l’homologation de ces accords par les autorités est contraire aux principes de la négociation collective et de la convention no 98. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1012.]
- 1448. Concernant les décisions du directeur de l’enregistrement, le comité rappelle qu’une décision d’interdiction de l’enregistrement d’un syndicat qui avait été légalement reconnu ne doit pouvoir prendre effet qu’une fois écoulés les délais légaux, sans qu’un appel ait été interjeté ou que la décision ait été confirmée en appel par l’autorité judiciaire. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 301.] Enfin, pour ce qui a trait au recrutement de travailleurs remplaçants en cas de grève, le comité rappelle que, si une grève est légale, l’utilisation d’une main-d’œuvre étrangère à l’entreprise afin de remplacer les grévistes, pour une durée indéterminée, comporte un risque d’atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 633.]
- 1449. Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour réexaminer la loi de modification du droit du travail (2005), en totale consultation avec les partenaires sociaux, et de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que cette modification respecte les principes susmentionnés.
- 1450. Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de la plainte.
- 1451. Avant de conclure, le comité est bien obligé de noter avec une profonde préoccupation que la situation des syndicats au Zimbabwe n’a pas évolué et a peut-être même encore empiré, depuis son dernier examen du cas, qui avait donné lieu aux commentaires suivants [voir 342e rapport, paragr. 1052]:
- … Le comité regrette profondément la dégradation de la situation syndicale au Zimbabwe depuis son dernier examen du cas, qu’il avait jugée extrêmement sérieuse. [Voir 337e rapport, paragr. 1670.] Le comité réitère sa profonde préoccupation à cet égard et attire une fois de plus l’attention du Conseil d’administration sur la situation. Enfin, le comité demande au gouvernement d’accepter une mission de contacts directs.
- 1452. Au vu de ce qui précède, le comité note avec une profonde préoccupation que le gouvernement a refusé sa demande d’accepter une mission de contacts directs. Il prie instamment le gouvernement de réexaminer sa demande pour une telle mission et attire une fois de plus l’attention du Conseil d’administration sur la gravité de la situation du climat syndical au Zimbabwe.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 1453. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité prie instamment le gouvernement d’abandonner les accusations pour des raisons liées à des activités syndicales portées à l’encontre de plusieurs personnes ayant participé à la manifestation du 13 septembre 2006 et de s’abstenir de recourir à des mesures d’arrestation et de détention de syndicalistes ou de dirigeants syndicaux pour des motifs liés à leurs activités syndicales. De plus, il prie instamment le gouvernement de s’assurer qu’aucune autre accusation n’est actuellement pendante contre des syndicalistes en vertu de la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) pour leur exercice d’une activité syndicale légitime.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement de diligenter une enquête indépendante, qui devra être menée par une personnalité ayant la confiance de toutes les parties concernées, pour déterminer si des membres du ZCTU ont ou non été frappés après leur détention au commissariat de Matapi, de même que pour enquêter sur les autres allégations de coups et de mauvais traitements. Il demande au gouvernement de le tenir informé des résultats de l’enquête.
- c) Le comité prie instamment le gouvernement de diligenter une enquête indépendante et exhaustive au sujet des allégations relatives à la perturbation de réunions du ZCTU et à l’agression physique de membres du ZCTU par des factions rivales à l’intérieur du ZCTU, en vue de clarifier totalement les faits, de déterminer les responsabilités, de punir les coupables et d’empêcher la répétition de tels actes.
- d) Le comité prie fermement le gouvernement de respecter totalement le droit des syndicats d’organiser leur administration interne sans aucune ingérence des autorités publiques et de veiller à ce que le ZCTU ait le droit de choisir les dirigeants syndicaux chargés de le représenter dans les forums nationaux et internationaux.
- e) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la procédure intentée par le ZCTU auprès de la Haute Cour concernant la perquisition de son siège et la confiscation de ses biens, et de lui transmettre une copie de la décision finale dès qu’elle aura été rendue.
- f) Le comité demande au gouvernement de donner une réponse précise et exhaustive au sujet de l’enquête sur les finances du ZCTU et sur l’interrogatoire de M. Wellington Chibebe pour mauvaise gestion financière, et de lui transmettre le texte intégral de toutes décisions judiciaires rendues à cet égard.
- g) Le comité prie instamment le gouvernement d’autoriser des missions de soutien mutuel dans le pays, en soumettant toute approbation uniquement à des critères objectifs, sans recourir à des décisions de nature antisyndicale.
- h) Le comité demande une nouvelle fois au gouvernement de veiller à ce que M. Takaona soit rapidement réintégré dans ses fonctions à la Zimpapers, ou à un poste équivalent, sans perte de salaire ou d’indemnités, et de le tenir informé à cet égard.
- i) Le comité s’attend à ce que le gouvernement veille à ce que le projet de loi ONG, s’il est adopté, ne restreigne d’aucune manière le droit des syndicats à recevoir une assistance financière internationale pour des activités syndicales légitimes.
- j) Le comité demande au gouvernement de réexaminer la loi de modification du droit du travail (2005), en totale consultation avec les partenaires sociaux, et de prendre le mesures nécessaires pour veiller à ce qu’elle soit modifiée de manière à respecter les principes énoncés dans ses conclusions.
- k) Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de la plainte.
- l) Le comité prie instamment le gouvernement de réexaminer sa demande pour une mission de contacts directs.
- m) Le comité prie une nouvelle fois le Conseil d’administration d’accorder une attention toute particulière à la gravité de la situation relative au climat syndical au Zimbabwe.