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- 629. Le comité a examiné ce cas à sa réunion de juin 2005 et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration [voir 337e rapport, paragr. 918 à 1046] approuvé par le Conseil d’administration à sa 293e session (juin 2005).
- 630. L’organisation plaignante a présenté de nouvelles allégations dans des communications des 8 mars et 17 mai 2006.
- 631. Le gouvernement a fait parvenir de nouvelles observations dans des communications des 13 mars et 17 mai 2006.
- 632. La République islamique d’Iran n’a ratifié ni la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 633. A sa réunion de mai-juin 2005, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 337e rapport, paragr. 1046]:
- a) Regrettant de ne pas posséder suffisamment d’éléments pour déterminer si le recours à la force publique à l’encontre des travailleurs sur le site de la fonderie de cuivre de Khatoonabad était justifié, le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations complémentaires concernant les charges retenues et les jugements rendus dans les affaires concernant les menaces de violence et d’incendie criminel à Khatoonabad. Il veut croire, par ailleurs, que toutes les mesures nécessaires seront prises à l’avenir pour qu’il n’y ait plus d’excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations.
- b) Notant que l’organisation plaignante a fait état de 80 personnes environ arrêtées et de 15 gardées en détention pour interrogatoire suite à des mouvements de protestation contre l’intervention de la police à Khatoonabad et à Shar-e-Babak, le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur cette affaire et de lui communiquer de nouvelles informations et de lui faire savoir si les personnes arrêtées sont encore détenues et, le cas échéant, quelles sont les charges retenues contre elles dans le cadre de ces deux incidents et de fournir des détails à cet égard. Le comité demande par ailleurs à l’organisation plaignante de lui fournir toutes les informations relatives au lien qui pourrait exister entre les événements de Shar-e-Babak et les actions de protestation des travailleurs concernant les mesures sociales et économiques.
- c) Le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations détaillées concernant les circonstances dans lesquelles quatre personnes ont été tuées durant les incidents à Shar-e-Babak.
- d) Le comité demande au gouvernement de répondre aux allégations de l’organisation plaignante concernant de graves atteintes à la régularité de la procédure et lui demande de veiller à ce qu’une procédure régulière soit garantie durant ces procès.
- e) Le comité demande au gouvernement de veiller à ce que toutes les actions engagées contre MM. Salehi, Hosseini, Divangar, Abdlpoor, Hakimi, Khodkam et Tanomand, liées à l’organisation de la marche de la Fête du travail et à la participation pacifique à cette marche, même si elle a eu lieu sans autorisation préalable, soient abandonnées.
- f) Le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations précises et détaillées sur les charges retenues contre MM. Salehi, Hosseini, Divangar, Abdlpoor, Hakimi, Khodkam et Tanomand, et en particulier de lui transmettre des copies des jugements concernant leur cas dès qu’ils seront rendus.
- g) Le comité demande par ailleurs au gouvernement de fournir des informations en réponse aux allégations supplémentaires formulées par l’organisation plaignante dans sa communication en date du 7 février 2005 concernant l’arrestation de dirigeants de l’Association des enseignants, des interventions au cours d’une grève à l’usine de textile du Kurdistan et des actes de harcèlement qui ont suivi contre des représentants des travailleurs ainsi que différents textes législatifs adoptés ou en cours d’adoption qui restreindraient les droits syndicaux d’un grand nombre de travailleurs.
- B. Nouvelles allégations
- 634. Dans sa communication du 8 mars 2006, l’organisation plaignante a fait parvenir des informations complémentaires sur les incidents de Khatoonabad et de Saqez.
- 635. Concernant l’incident de Khatoonabad, l’organisation plaignante joint une coupure de journal du 27 janvier 2004 de l’Agence de presse iranienne pour les questions du travail (ILNA) portant sur un communiqué de la Centrale des conseils islamiques du travail. D’après l’organisation plaignante, le communiqué, publié directement après que quatre travailleurs aient été tués à Khatoonabad, confirme que des travailleurs ont été tués et blessés dans la province de Kerman. Même s’il semble exister pour le Conseil une certaine confusion quant au lieu exact de l’incident, il semble très clair que les autorités ont fait preuve d’une violence excessive durant la grève. L’organisation plaignante souligne que deux ans après la mort des quatre travailleurs à Khatoonabad personne n’a été déclaré responsable, et qu’à sa connaissance les familles des victimes n’ont toujours pas reçu de dédommagement.
- 636. Concernant la manifestation pour la Fête du travail du 1er mai 2004 à Saqez, l’organisation plaignante allègue que sept dirigeants syndicaux et militants, Mahmoud Salehi, Jalal Hosseini, Mohsen Hakimi, Borhan Divangar, Mohammad Abdlpoor, Esmail Khodkam et Hadi Tanomand, qui avaient été arrêtés le 1er mai 2004 en raison de leur militantisme en faveur des droits des travailleurs, et ensuite inculpés de coopération avec le parti politique interdit Komala, avaient été arrêtés avant le début de la manifestation du 1er mai 2004. Cette manifestation était censée commencer à 17 heures au Parke Kodak (Parc des enfants) à Saqez, mais à 17 heures, avant le début de la manifestation, les forces de sécurité et des agents en civil ont attaqué les participants et arrêté une cinquantaine de personnes, dont les sept personnes accusées d’activités politiques illégales. La femme de Mohsen Hakimi a confirmé par la suite qu’il n’y avait pas eu de cérémonie ni de rassemblement le 1er mai 2004, dans une déclaration du 13 novembre 2005.
- 637. D’après l’organisation plaignante, l’accusation a reproché à M. Salehi, au cours de sa brève audience devant le tribunal le 1er février 2005, d’avoir écrit deux documents annexés par l’organisation plaignante, à savoir un article intitulé «Etablissement d’un indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran» et une déclaration condamnant le massacre de plusieurs grévistes par les forces de sécurité à Khatoonabad en janvier 2004. De plus, l’organisation plaignante souligne le fait qu’au cours de la première comparution de Mahmoud Salehi devant un tribunal le 1er février le Procureur a inclus la réunion avec la mission de la CISL, qui avait eu lieu le 29 avril 2004, dans sa lecture de l’acte d’accusation. Ces charges contre M. Salehi ont été renouvelées au cours de sa deuxième audience. Le 18 avril 2005, après sa deuxième comparution, Mahmoud Salehi a fait le bref résumé suivant pour décrire certains des échanges au cours de son procès.
- 18 avril 2005
- A l’adresse des travailleurs et de la population compatissants de Saqez :
- Comme vous le savez, le 1er mai 2004, alors que nous nous préparions à participer à une célébration de la Fête du travail, les forces des services secrets nous ont arrêtés et nous ont fait subir 11 jours d’interrogatoire poussé. Nous avons été remis en liberté après qu’une caution scandaleusement élevée ait été versée par les citoyens compatissants et généreux de Saqez. Depuis notre libération, nous avons été convoqués à comparaître devant le tribunal à plusieurs reprises. La dernière audience a eu lieu le 5 avril 2005. Depuis cette dernière comparution, nos amis et des personnes préoccupées par notre sort nous ont souvent demandé, à ma famille et à moi-même, où en était la procédure. Je vais donc essayer de faire un bref résumé des allégations portées contre moi par le juge lors de ma dernière audience.
- 1. Le juge: Une cassette se rapportant au 26 Bahman (Jour de Komala) a été trouvée chez vous. Mahmoud: Non, je n’ai rien à voir avec cela.
- 2. Le juge: Vous avez distribué une affiche de Karl Marx le 1er mai. Mahmoud: Non, je ne l’ai pas fait.
- 3. Le juge: 10 exemplaires d’un communiqué ont été trouvés chez vous. Mahmoud: Il n’y avait aucun communiqué chez moi, et ce n’est pas vrai.
- 4. Le juge: On a trouvé chez vous un livre intitulé «Main-d’œuvre bon marché, travailleurs silencieux». Mahmoud: J’ai une bibliothèque avec de nombreux ouvrages. Je n’utilise les livres que pour les lire. Pourquoi vos agents n’ont-ils pas emporté d’autres livres comme ceux d’Imam All et de M. Beheshti (des dirigeants religieux)?
- 5. Vous avez écrit trois articles sur la situation des femmes en Iran et vous les avez envoyés à des organisations internationales. Mahmoud: Cette allégation est fausse et je ne l’accepte pas.
- 6. Vous avez écrit plusieurs lettres à la Confédération internationale des syndicats libres (CISL). Mahmoud: J’ai rencontré la mission de la CISL le 29 avril 2004. Le gouvernement iranien a accordé un visa à cette mission, et ma réunion avec la mission de la CISL, qui était légale, a été observée par les autorités gouvernementales.
- 7. Vous avez préparé un tableau sur le coût de la vie pour une famille de cinq personnes et vous l’avez distribué publiquement. Mahmoud: Oui, j’ai préparé ce tableau et je l’ai donné à l’Office pour la sécurité des travailleurs et à l’Office des affaires sociales afin qu’ils en tiennent compte pour la fixation du salaire minimum en 1383.
- 8. Un cahier a été trouvé chez vous, il reprend plusieurs articles sur le travail. Mahmoud: Oui, il m’appartient, et je l’ai écrit en 1379 (2000-01) durant mon incarcération à la prison centrale de Saqez. Il s’agit d’un cahier personnel et il ne cause aucun problème.
- 9. Où avez-vous été arrêté? Mahmoud: Sur l’avenue Masjid Mullah Zahed.
- 10. Participiez-vous à la manifestation? Mahmoud: Non, il n’y a eu aucune manifestation, donc je ne pouvais pas participer à une manifestation. Le juge: Donc vous niez avoir été arrêté lors de la manifestation? Mahmoud: Oui, je suis témoin que je n’ai pas été arrêté au cours de la manifestation.
- Chers travailleurs, et autres personnes intéressées, le rapport ci-dessus est juste un bref résumé des accusations et des allégations qui ont été présentées contre moi par le juge le 5 avril 2005.
- Mahmoud Salehi
- 638. D’après l’organisation plaignante, alors que l’affaire n’a toujours pas été tranchée par les tribunaux, Mahmoud Salehi et Mohsen Hakimi poursuivent leurs activités syndicales indépendantes, et ont fondé le 4 mai 2005 avec d’autres travailleurs un «Comité de coordination pour la constitution d’organisations de travailleurs». Cependant, Mahmoud Salehi a été arrêté le 4 août 2005 pendant une heure pour avoir participé à une des nombreuses manifestations de protestation qui ont suivi l’assassinat de Shivan Qaderi, un militant de l’opposition kurde, en juillet 2005. Avant d’être relâché, on l’a mis en garde contre toute participation ultérieure à des manifestations ou des grèves à Saqez. L’organisation plaignante estime que cette arrestation est un nouvel acte de harcèlement à l’encontre de M. Salehi en représailles pour ses activités de syndicaliste indépendant, étant donné qu’il a été menacé s’il participait à quelque manifestation que ce soit, et notamment à des grèves.
- 639. L’organisation plaignante allègue en outre que, le 7 août 2005 à 2 heures du matin, les forces de sécurité ont fait une perquisition chez Borhan Divangar. Il a été arrêté, et son ordinateur ainsi que d’autres affaires lui appartenant ont été saisis, et il a été inculpé plus tard dans la journée entre autres choses pour son appartenance au «Comité de suivi de la mise en place d’organisations du travail libres» (la CISL pense qu’il s’agit de l’organisation mentionnée plus haut, que MM. Salehi, Hakimi et d’autres personnes ont fondée), son appartenance à l’organisation des travailleurs sans emploi nouvellement créée, de diriger en Iran un site Internet relatif au travail appelé «Tashakol» (www.tashakol.com) et d’avoir participé à la vague de manifestations à Saqez qui a suivi l’assassinat de Shivan Qaderi. Borhan Divangar a été gardé en détention jusqu’au 12 septembre 2005. Au début de sa détention, sa femme n’a été autorisée que brièvement à lui rendre visite et elle aurait remarqué des traces de mauvais traitements sur son visage. La CISL a reçu des rapports selon lesquels il aurait été battu au point d’avoir des difficultés à parler.
- 640. D’après l’organisation plaignante, le 9 novembre 2005, Mahmoud Salehi, l’ancien président de l’Association des travailleurs de la boulangerie de Saqez et le cofondateur du Comité de coordination pour la constitution d’organisations de travailleurs, a été condamné à cinq ans de prison et trois ans de relégation dans la ville de Ghorveh. Jalal Hosseini, membre de l’Association des travailleurs de la boulangerie de la ville de Saqez, a été condamné à trois ans de prison, alors que Hadi Tanomand et Esmail Khodkam ont été acquittés.
- 641. L’organisation plaignante ajoute que Mahmoud Salehi, Jalal Hosseini, Hadi Tanomand et Esmail Khodkam ont tous été acquittés de l’accusation d’appartenance à l’organisation interdite Komala. Malgré cela, MM. Salehi et Hosseini ont été condamnés sur la base de l’article 610 du Code pénal islamique, prescrivant des peines de deux à cinq ans d’emprisonnement pour association en vue de conspirer pour commettre des crimes contre la sécurité nationale. L’organisation plaignante a demandé à plusieurs reprises à avoir accès aux audiences du tribunal pour pouvoir vérifier si les défendeurs avaient droit à une procédure équitable, et pour connaître le détail des accusations portées contre eux, mais elle n’a pas pu obtenir de visas pour entrer dans le pays. Elle n’a pas pu obtenir tous les détails concernant l’acte d’accusation et le jugement de ces deux personnes; cependant, elle a reçu une liste de prétendues accusations qui est annexée à sa communication.
- 642. L’organisation plaignante ajoute que, le 11 novembre 2005, Mohsen Hakimi, Borhan Divangar et Mohammad Abdlpoor ont été tous les trois condamnés à deux ans de prison. Ils ont été reconnus coupables d’«avoir tenté de mettre en péril la sécurité nationale en participant à un rassemblement illégal», c’est-à-dire qu’ils ont été reconnus coupables d’avoir fêté le 1er mai 2004. Au bout du compte, cinq des sept personnes initialement accusées ont été condamnées, et seuls Hadi Tanomand et Esmail Khodkam ont été acquittés.
- 643. L’organisation plaignante estime que ces cinq personnes ont été condamnées pour leurs activités syndicales, particulièrement du fait qu’elles avaient été arrêtées initialement en raison de leur participation à la fête du 1er mai 2004 et que leur inculpation a eu lieu peu de temps après. De plus, au cours du procès de M. Salehi, ses activités de syndicaliste ont été retenues contre lui par l’accusation et par le juge, dont une réunion avec la délégation de la CISL en avril 2004. Le principal avocat des défendeurs a informé la CISL qu’il serait fait appel des condamnations et que ces cinq personnes ne seraient pas emprisonnées tant que les verdicts définitifs n’auraient pas été prononcés.
- 644. De plus, d’après l’organisation plaignante, un certain nombre de chefs d’accusation contre Mahmoud Salehi sont toujours en suspens. L’organisation plaignante a été informée que certaines des accusations avaient été renvoyées devant un tribunal civil, alors que le procès s’était déroulé jusqu’à présent devant le Tribunal islamique révolutionnaire. Les accusations qui ont été transférées devant le tribunal civil concernent le tableau rédigé par M. Salehi intitulé «Etablissement d’un indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran». M. Salehi a été accusé de «troubler l’opinion publique», accusation qui est du ressort des tribunaux civils, alors que le Tribunal islamique révolutionnaire est compétent en matière d’accusations en matière d’activités antigouvernementales. D’après les informations obtenues par Mohsen Hakimi, les tribunaux civils n’acceptent pas forcément que les audiences soient publiques.
- 645. L’organisation plaignante a également indiqué que, le 23 février 2006, Borhan Divangar a été convoqué devant le tribunal. L’audience a duré une heure et quinze minutes et s’est déroulée à huis clos. Cependant, la CISL estime que cela concerne les accusations portées contre lui durant son arrestation du 7 août 2005, qui avait été suivie de deux mois de détention.
- 646. En dernier lieu, l’organisation plaignante a déclaré qu’elle enverrait des informations complémentaires sur les autres violations qu’elle avait évoquées précédemment dans une autre communication.
- 647. Dans une communication datée du 17 mai 2006, la CISL transmet des informations supplémentaires concernant les procès de Saqez; elle indique que le gouvernement iranien l’a informée que la cour d’appel a infirmé tous les verdicts prononcés contre MM. Salehi, Hosseini, Hakimi, Divangar et Abdlpoor. La CISL cite en outre une traduction officieuse du verdict concernant M. Salehi: «Vu les aspects matériels du cas et étant donné que, selon les rapports de police et les fais consignés au dossier, les actions des défendeurs n’ont pas eu pour effet de provoquer le rassemblement illégal en question, et compte tenu du fait que les défendeurs ont été arrêtés avant que puissent survenir une émeute ou des activités contre la sécurité intérieure du pays, lesdites accusations ne pouvaient être fondées sur ces actions qui auraient permis de les juger.» Le verdict initial a été cassé et le défendeur déclaré innocent de ces accusations. Toutefois, la cour d’appel renvoie également aux autres accusations, assemblée et collusion dans le but de porter atteinte à la sécurité intérieure et extérieure du pays (art. 610 du Code pénal islamique) dont le défendeur n’avais jamais été informé auparavant, ce qui viole son droit à la défense. La Cour renvoie donc cet aspect du dossier au tribunal de première instance pour examen plus approfondi.
- 648. La CISL a été informée que les verdicts concernant MM. Hosseini et Abdlpoor (textes joints à la communication) sont identiques et tient pour acquis que les verdicts dans les autres cas sont semblables. Tout en accueillant favorablement l’annulation d’une partie des sentences, ce qui constitue un signe positif, la CISL se déclare préoccupée du fait que les accusations portées en vertu de l’article 610 du Code pénal islamique ont été renvoyées devant le Tribunal révolutionnaire de Saqez. Selon la CISL, cette accusation reste un obstacle important aux activités syndicales légitimes de MM. Salehi, Hosseini, Hakimi, Divangar et Abdlpoor. Les accusations en suspens sont graves et pourraient leur valoir une peine d’emprisonnement.
- 649. La CISL rappelle en outre que la cour d’appel n’a pas traité des charges renvoyées à un tribunal public, accusant M. Salehi de trouble à l’ordre public pour avoir rédigé un tableau intitulé «Calcul de l’indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran». La CISL indique enfin qu’elle ne possède aucune information sur l’audience du 23 février 2006 où M. Divangar aurait, selon elle, subi son procès pour les accusations portées contre lui le 7 août 2005.
- C. Réponse du gouvernement
- 650. Le gouvernement a présenté de nouvelles informations en réponse aux recommandations du comité, dans une communication du 13 mars 2006. En particulier, le gouvernement indique que le ministère du Travail et des Affaires sociales avait été informé par le ministère de la Justice, dans les lettres nos M/111/01/219 du 22 novembre 2005, M/111/01/264 du 14 décembre 2005 et M/111/01/415 du 1er mars 2006, des derniers événements et des arrêts des tribunaux concernant les deux affaires de «Saqez» et de «Shar-e-Babak».
- 651. Le gouvernement répète qu’il a toujours respecté le principe de la liberté syndicale et le droit d’organisation des travailleurs, et qu’il a fait tous les efforts voulus pour améliorer les conditions économiques et sociales des travailleurs dans l’ensemble du pays. Le gouvernement estime que le droit aux rassemblements publics est un aspect important et indiscutable des droits syndicaux et qu’il est inscrit dans la Constitution. Par conséquent, le recours à la force pour les questions relatives au travail ne fait en aucun cas partie de sa politique. Chaque année, des centaines de rassemblements et de défilés ont lieu en Iran sans qu’il y ait le moindre trouble. Les principes des rassemblements et des discours publics sont reconnus et acceptés et sont la norme pour la société civile, et il n’y a jamais de poursuites contre les participants ou le public s’ils observent un minimum de règles et si la loi est respectée dans ces manifestations. Par conséquent, comme dans tout Etat souverain, ces réunions et manifestations, quel qu’en soit le motif, ne doivent pas entraîner d’infractions à l’ordre et à la loi. En application de l’article 8 de la convention no 87, toutes les associations de travailleurs et d’employeurs doivent obtenir une autorisation officielle du gouvernement avant d’organiser un rassemblement ou un défilé. Le gouvernement a souligné qu’en Iran il n’est pas illégal d’organiser des rassemblements ou une fête le 1er mai à condition d’avoir obtenu au préalable les autorisations correspondantes du ministère de l’Intérieur.
- 652. D’après le gouvernement, il est évident que, dans les verdicts rendus par le tribunal de Saqez, les actions engagées contre les défendeurs portaient essentiellement sur les accusations d’assemblées illégales et interdites, des émeutes entraînant des troubles à l’ordre public et une violation de la sécurité publique. Bien que d’anciens prisonniers, des dissidents reconnus, des gauchistes antigouvernementaux notoires et des marxistes aient participé activement à la manifestation du 1er mai 2005, il n’y a eu aucune poursuite contre eux étant donné qu’il n’y a pas eu de troubles ni de révolte au cours de ces incidents.
- 653. De plus, le gouvernement a indiqué que les préoccupations exprimées par l’organisation plaignante au sujet de l’arrestation des accusés en raison de leur rencontre avec sa mission ne semblaient pas fondées. La mission de la CISL a rencontré de nombreuses personnes au cours de son séjour en Iran, qui n’ont jamais été contactées par la police ou les forces de sécurité par la suite.
- 654. Pour ce qui est du huis clos au cours des procès, le ministère de la Justice indique qu’«en ce qui concerne les incidents du 1er mai et les troubles à l’ordre public, toutes les audiences ont été publiques, à une exception près, au cours de laquelle des personnes de l’assistance ont délibérément essayé de perturber l’audience, ce qui a conduit le juge à demander une séance à huis clos».
- 655. Concernant l’issue des sept procès relatifs aux incidents de Saqez, le gouvernement indique que Mohammad Salehi a été condamné pour instigation d’«émeute» et de «manifestations illégales» à un total de huit ans de prison, dont trois ans de relégation dans la ville de Qorveh, à titre de clémence (dossier no Sh/263/83). Halal Hosseini (Jalal Hosseini d’après l’organisation plaignante) a été condamné à trois ans de prison pour instigation de «manifestations illégales et violentes» (dossier no Sh/254/83). Borhan Divangar, Mohammad Abdlpoor et Mohsen Kam-gooyan (Mohsen Hakimi selon l’organisation plaignante) ont été condamnés à deux ans de prison pour instigation de «manifestations illégales et violentes» (dossiers nos Sh/260/83, Sh/258/83 et Sh/255/83 respectivement). Les cinq ont été acquittés des accusations de sympathie envers des groupes subversifs. En dernier lieu, Ismaiel Khodkam (Esmail Khodkam d’après l’organisation plaignante) et Hadi Tanomand ont été acquittés de toutes les accusations portées contre eux (dossiers nos Sh/262/83 et Sh/261/83).
- 656. Le gouvernement fait savoir, en outre:
- – que tous les défendeurs en cause, d’après leur acte d’accusation, ont été reconnus coupables de manifestations illégales et violentes et de troubles à l’ordre public, et non pas d’avoir participé à une fête du 1er mai ou de mener des activités syndicales ou relatives au travail;
- – que la loi iranienne prévoit que, pour pouvoir faire des manifestations et des défilés, il faut obtenir au préalable l’autorisation du ministère de l’Intérieur. Les manifestations violentes dans les cas mentionnés n’avaient rien à voir avec des activités syndicales, et étaient en infraction évidente des dispositions de la loi;
- – que les organismes chargés de l’enquête ont affirmé que les allégations portées contre les défendeurs reposaient sur des «manifestations illégales», ainsi que des «actes de violence» entraînant des atteintes à l’ordre et des troubles sociaux. En réalité, les années précédentes, un certain nombre de manifestations avaient eu lieu dans tout le pays pour la Fête du travail. Etant donné qu’elles étaient pacifiques, aucune restriction n’avait été imposées à ces manifestations.
- 657. Concernant les incidents de Shahr-e-Babak, le gouvernement a fourni des informations sur la dernière communication du ministère de la Justice au ministère du Travail et des Affaires sociales dans la correspondance susmentionnée, en réponse aux demandes d’informations précises et détaillées concernant ces incidents.
- 658. D’après le gouvernement, les allégations de l’organisation plaignante ne sont pas fondées. Les autorités publiques n’ont pas droit de regard sur un contrat fait entre parties tierces, le sous-traitant de la fonderie et les travailleurs en l’occurrence. Le sous-traitant qui a construit la fonderie dans le village de Khatoonabad pour la Compagnie nationale iranienne des industries du cuivre nie avoir fait des promesses de contrats d’emploi permanents aux 1 500 travailleurs qui avaient été recrutés pour la construction de l’usine. De toute façon, une promesse ou un engagement de ce genre n’implique aucune obligation pour la Compagnie nationale iranienne des industries du cuivre.
- 659. Contrairement aux suppositions de l’organisation plaignante, selon lesquelles les affrontements ont commencé lorsque la police a employé la force pour tenter de déloger les piquets de grève qui occupaient le devant de l’usine depuis huit jours, le rapport du chef du Département de la justice de la province de Kerman confirme les rapports antérieurs du gouvernement, qui indiquaient que la violence n’a éclaté que lorsque les émeutiers ont commencé à s’attaquer à la propriété publique, à des banques et à d’autres bâtiments à Shar-e-Babak. Le rapport confirme, en le déplorant, que quatre citoyens ont été tués et que des dizaines de personnes ont été temporairement arrêtées à la suite d’importants troubles à l’ordre public.
- 660. Le ministère de la Justice nie les allégations au sujet de la fouille individuelle des maisons, des tortures qu’auraient subies les personnes arrêtées et de l’état critique des blessés. Contrairement aux informations contenues dans le rapport de l’organisation plaignante, aucune des personnes tuées dans le contexte des émeutes n’était un travailleur de la fonderie.
- 661. Les actions engagées dans le cadre d’un système judiciaire indépendant et souverain, afin d’examiner les accusations contre les quatre personnes tuées, ont rejeté les allégations selon lesquelles elles faisaient partie des émeutiers. Au contraire, l’arrêt du tribunal a reconnu la culpabilité des forces de police et les a condamnées à verser une indemnité pour la mort de citoyens innocents.
- 662. A la suite du verdict rendu par un tribunal militaire qui mettait fin aux actions contre les forces de police impliquées dans la dispersion de la manifestation, et la mort par inadvertance de ces quatre personnes, leurs familles ont fait appel de la décision du tribunal militaire. La cour de justice de la province de Kerman a donc renvoyé l’affaire des forces de police déclarées coupables devant la Cour suprême nationale, qui entendra bientôt l’affaire (dossier no 15/4/85/2/83).
- 663. Même si des dizaines de personnes ont été arrêtées au cours des incidents de Shahr-e-Babak et de Khatoonabad, elles ont pratiquement toutes été immédiatement remises en liberté. Selon les dernières informations du ministère de la Justice, seuls six défendeurs ont été reconnus coupables de conduite illégale par le tribunal général de Shahr-e-Babak.
- 664. L’affaire des troubles à l’ordre public et des émeutes de Shahr-e-Babak a finalement été examinée par le tribunal (dossier no 124/83/3), et le tribunal général de la ville a reconnu six personnes coupables et leur a infligé à chacune entre six et douze mois de prison.
- 665. La cour d’appel a examiné le dossier le 14 janvier 2006 dans la ville de Kerman, et les amendes des défendeurs ont été suspendues pour trois ans et leurs peines d’emprisonnement ont été également réduites. L’un d’entre eux a été ensuite remis en liberté contre le paiement d’une caution de 1 million de rials (110 dollars des Etats-Unis) seulement.
- 666. Dans une communication datée du 17 mai 2006, le gouvernement transmet copie d’une lettre envoyée à la CISL, mentionnant l’acquittement des cinq personnes arrêtées le 1er mai 2004 à Saquez. Dans la lettre jointe, le gouvernement renvoie à l’information fournie par l’avocat d’un des défendeurs arrêtés le 1er mai 2004 et auparavant acquittés, indiquant que MM. Salehi, Hosseini, Hakimi, Divangar et Abdlpoor ont été acquittés des accusations de réunion illégale et de trouble social portées contre eux. Les renseignements reçus par le gouvernement indiquent également que la cour d’appel a attiré l’attention du tribunal de première instance sur les irrégularités survenues lors du dépôt des accusations contre les défendeurs à l’audience initiale. Le gouvernement déclare que le jugement de la cour d’appel constitue peut-être une bonne indication de l’existence d’un système judiciaire véritablement indépendant et impartial, qui s’efforce de rendre une justice véritablement humaine.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité- 667. Le comité note que les allégations dans le présent cas concernent une répression policière violente de grèves, de protestations et du rassemblement pour la Fête du travail à Saqez; l’arrestation, la détention et la condamnation de plusieurs dirigeants syndicaux et de militants pour leurs activités syndicales; l’arrestation des dirigeants de l’Association des enseignants; des interventions au cours d’une grève à l’usine de textile du Kurdistan et le harcèlement ultérieur des représentants des travailleurs; et des textes de loi adoptés ou en cours d’adoption qui restreindraient les droits syndicaux d’un grand nombre de travailleurs.
- Khatoonabad et Shahr-e-Babak
- 668. Concernant la répression violente d’une grève et des protestations sur le site de la fonderie de cuivre de Khatoonabad le 24 janvier 2004, le comité rappelle que lors de son examen antérieur il avait regretté de ne pas posséder suffisamment d’éléments pour déterminer si le recours à la force publique à l’encontre des travailleurs en lutte était justifié, et qu’il avait demandé au gouvernement de fournir des informations complémentaires concernant les charges retenues et les jugements rendus dans les affaires concernant les menaces de violence et d’incendie criminel auxquelles le gouvernement avait fait référence de façon générale dans son rapport et qui, d’après le gouvernement, ne laissaient pas d’autre choix à la police que d’utiliser les gaz lacrymogènes et les canons à eau.
- 669. Le comité relève que l’organisation plaignante a présenté à ce sujet un communiqué de presse de la Centrale des conseils islamiques du travail du 27 janvier 2004, juste après les incidents de Khatoonabad et de Shahr-e-Babak, qui semblerait indiquer que les autorités ont déployé une force excessive contre les travailleurs de la province de Kerman (Khatoonabad et Shahr-e-Babak font partie de cette province). Bien que le communiqué semble faire référence à des mouvements de protestation concernant les mines de Mirook, d’après l’organisation plaignante, il ferait référence en réalité aux incidents de Khatoonabad (ce qui montre qu’il règne une certaine confusion pour le conseil quant au lieu des incidents). Le communiqué indique notamment: «Nous avons assisté jusqu’à présent à des mouvements de protestation, de grèves, de grèves avec occupation et de manifestations de travailleurs pour faire respecter leurs droits, mais malheureusement nous remarquons qu’on a répondu maintenant par les armes aux justes revendications des travailleurs, et qu’il y a eu malheureusement un nombre considérable de tués et de blessés. Le Gouverneur de Kerman, incapable de donner des réponses convaincantes aux travailleurs de mines de Mirook de Kerman, a recours à la force et utilise les forces spéciales contre eux. Les travailleurs sont-ils des ennemis extérieurs et faut-il répondre à tous les mouvements de protestation à coups de fusil?»
- 670. Le comité observe que le gouvernement a largement répété les informations qu’il avait déjà fournies sur ces incidents, et qu’il soulignait qu’il n’y avait pas eu d’accord pour accorder des contrats de travail permanents aux travailleurs occasionnels qui protestaient parce que leurs contrats de travail se terminaient à la fin des travaux de construction de la fonderie par le sous-traitant de la Compagnie nationale iranienne des industries du cuivre.
- 671. Le comité regrette que le gouvernement n’ait pas présenté d’informations complémentaires sur les menaces alléguées de violence et d’incendie criminel perpétrées par les travailleurs de Khatoonabad. Le comité déplore l’absence d’informations qui auraient pu l’aider à évaluer si le recours à la force à l’encontre des travailleurs sur le site de la fonderie de cuivre de Khatoonabad était justifié. Le comité rappelle que les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l’ordre public serait sérieusement menacé. L’intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre les dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent les instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 137.]
- 672. Concernant les affrontements de Shahr-e-Babak, qui se sont produits le même jour que les incidents dans la ville voisine de Khatoonabad, le comité rappelle que lors de l’examen précédent de ce cas il avait demandé au gouvernement de fournir plus de détails sur les circonstances dans lesquelles quatre personnes avaient été tuées, ainsi que les motifs présumés de leur implication dans ces événements, puisque le gouvernement avait indiqué que ces personnes n’étaient pas des travailleurs de la fonderie de Khatoonabad et qu’elles participaient en réalité à une action de protestation politique sans motif social ou économique.
- 673. Le comité observe à ce sujet que d’après l’organisation plaignante les quatre victimes étaient des travailleurs, et que deux ans après leur mort personne n’a été déclaré responsable et que leurs familles n’ont reçu aucune indemnité.
- 674. Le comité remarque en outre qu’au dire du gouvernement le ministère de la Justice, après avoir effectué une enquête, a confirmé que la violence n’avait éclaté à Shahr-e-Babak que lorsque les «émeutiers» avaient commencé à s’attaquer à la propriété publique, à des banques et à d’autres bâtiments, ce qui a malheureusement entraîné la mort de quatre citoyens et l’arrestation temporaire de dizaines de personnes à la suite d’importants troubles à l’ordre public. Aucune des personnes tuées n’était un travailleur de la fonderie. Les actions judiciaires engagées pour examiner l’incident ont rejeté les allégations selon lesquelles les quatre personnes tuées faisaient partie des émeutiers; la police a été reconnue coupable et a été condamnée à payer une indemnité pour la mort de citoyens innocents. Cependant, le tribunal militaire a par la suite décidé de mettre fin aux actions contre les forces de police impliquées dans la dispersion des manifestations et la mort par inadvertance de ces quatre personnes. Leurs familles ont fait appel de cette décision et la cour de justice de la province de Kerman a renvoyé devant la Cour suprême nationale cette affaire, qui est encore en cours d’examen, et dont le dossier porte le no 15/4/85/2/83.
- 675. Le comité fait donc remarquer qu’à la suite d’une enquête il est apparu que les quatre personnes tuées dans les événements de Shar-e-Babak ne participaient pas à des actions de protestation politique, comme l’avait indiqué auparavant le gouvernement. Le comité déplore la perte de ces vies humaines innocentes, et souligne une fois de plus que l’intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler. Le comité demande au gouvernement de prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent les instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. Le comité note que l’affaire des quatre personnes innocentes tuées par la police au cours des incidents de Shahr-e-Babak est en cours d’examen devant la Cour suprême et demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la procédure, et de lui communiquer la décision finale dès qu’elle aura été rendue.
- 676. Le comité rappelle qu’au cours de l’examen précédent de ce cas il avait demandé au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les arrestations d’environ 80 personnes et de lui communiquer de nouvelles informations pour lui faire savoir si les personnes arrêtées dans le cadre des incidents de Khatoonabad et de Shahr-e-Babak étaient encore détenues, et le cas échéant les charges retenues contre elles dans le cadre de ces deux incidents, et de fournir des détails à cet égard.
- 677. Le comité note que le gouvernement a indiqué à ce sujet que, bien que des dizaines de personnes aient été arrêtées au cours des incidents de Shahr-e-Babak et de Khatoonabad, elles ont pratiquement toutes été immédiatement remises en liberté. Cependant, six défendeurs ont été reconnus coupables de troubles à l’ordre public et d’émeute par le tribunal général de Shahr-e-Babak (dossier no 124/83/3) et avaient été chacun condamnés à des peines de six à douze mois de prison. La cour d’appel de la ville de Kerman a suspendu le 14 janvier 2006 les amendes des défendeurs pour trois ans, et a également écourté leurs peines d’emprisonnement. L’un d’entre eux a été ensuite remis en liberté contre le paiement d’une caution de 110 dollars des Etats-Unis.
- 678. Le comité regrette que le gouvernement ne fournisse aucune information sur les noms, les professions et l’affiliation éventuelle à un syndicat de ces six personnes condamnées, ni sur les actes précis qui leur sont reprochés, ainsi que les motifs de leur condamnation. Le comité demande au gouvernement de lui communiquer des informations à ce sujet, en incluant les décisions des tribunaux condamnant ces six personnes pour troubles à l’ordre public et émeute à Shahr-e-Babak.
- Saqez
- 679. Lors de l’examen précédent, le comité avait demandé au gouvernement de répondre aux allégations de l’organisation plaignante concernant de graves atteintes à la régularité de la procédure lors des procès de MM. Salehi, Hosseini, Divangar, Abdlpoor, Hakimi, Khodkam et Tanomand; de veiller à ce que toutes les charges retenues contre eux dans le cadre de l’organisation de la marche de la Fête du travail en 2004 et de la participation pacifique à cette marche, même si elle a eu lieu sans autorisation préalable, soient immédiatement abandonnées; de lui fournir des informations précises et détaillées sur les charges retenues contre eux et de lui transmettre copie des jugements concernant leur cas dès qu’ils seraient connus.
- 680. Le comité note que, d’après l’organisation plaignante: 1) les sept dirigeants syndicaux et militants (Mahmoud Salehi, Jalal Hosseini, Mohsen Hakimi, Borhan Divangar, Mohammad Abdlpoor, Esmail Khodkam et Hadi Tanomand) ont été arrêtés le 1er mai 2004 en raison de leur militantisme en matière de droits syndicaux; qu’ils ont été par la suite accusés de coopération avec le parti politique interdit Komala; 2) qu’ils ont été arrêtés avant même que le rassemblement pour la Fête du travail n’ait commencé le 1er mai 2004, quand les forces de sécurité et des agents en civil ont attaqué les participants et en ont arrêtés environ 50; 3) au cours des audiences devant les tribunaux (le 1er février et le 18 avril 2005), le Procureur a accusé Mahmoud Salehi d’avoir écrit un article intitulé «Etablissement d’un indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran» et une déclaration condamnant le massacre de plusieurs grévistes par les forces de sécurité à Khatoonabad en janvier 2004; les charges portaient également sur la réunion entre M. Salehi et la mission de la CISL le 29 avril 2004 lors de la lecture des chefs d’accusation; de fausses charges ont également été retenues contre M. Salehi au cours de ces audiences; 4) Mahmoud Salehi a de nouveau été arrêté le 4 août 2005 pendant une heure pour avoir participé à une des nombreuses protestations qui ont suivi l’assassinat de Shivan Qaderi, un militant de l’opposition kurde, en juillet 2005; qu’avant d’être remis en liberté, on l’a mis en garde contre toute participation ultérieure à des manifestations ou des grèves à Saqez; 5) le 9 novembre 2005, Mahmoud Salehi a été condamné par le tribunal de première instance à cinq ans de prison et trois ans de relégation dans la ville de Ghorveh, sur la base de l’article 610 du Code pénal islamique, qui prescrit des peines de deux à cinq ans d’emprisonnement pour association en vue de conspirer pour commettre des crimes contre la sécurité nationale; 6) Mahmoud Salehi a également été informé qu’il était accusé de «troubler l’opinion publique» en raison de son article «Etablissement d’un indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran» et que son affaire était toujours examinée par le tribunal civil compétent; 7) Jalal Hosseini a été condamné par le tribunal de première instance à trois ans de prison le même jour que Mahmoud Salehi sur la base de l’article 610 du Code pénal islamique pour association en vue de conspirer pour commettre des crimes contre la sécurité nationale; Hadi Tanomand et Esmail Khodkam ont été acquittés; 8) le 11 novembre 2005, Mohsen Hakimi, Borhan Divangar et Mohammad Abdlpoor ont également été condamnés par le tribunal de première instance à deux ans de prison pour «avoir tenté de mettre en péril la sécurité nationale en participant à un rassemblement illégal»; 9) l’organisation plaignante (la CISL) s’est vu refuser l’accès aux audiences des tribunaux; 10) la cour d’appel a infirmé les verdicts prononcés par le tribunal de première instance contre MM. Salehi, Hosseini, Hakimi, Divangar et Abdlpoor, sous les accusations de participation à des émeutes et à des réunions illégales à Saquez, tout en renvoyant devant le tribunal de première instance les accusations portées en vertu de l’article 610 du Code pénal islamique
- 681. L’organisation plaignante souligne que tous les accusés ont été déclarés non coupables en ce qui concerne les charges d’appartenance à l’organisation interdite Komala. Selon l’organisation plaignante, leur condamnation par le tribunal de première instance ne pouvait donc être imputable qu’à leurs activités de syndicalistes, étant donné que leur arrestation initiale a été faite dans le cadre de leur participation à la Fête du travail de 2004, et qu’au cours des audiences du tribunal pour M. Salehi en particulier ses activités de syndicaliste ont été explicitement retenues contre lui et incluaient une réunion qu’il avait eue avec la délégation de la CISL.
- 682. Le comité note que, d’après le gouvernement: 1) organiser des célébrations et des rassemblements pour fêter le 1er mai n’est pas considéré comme illégal à condition d’avoir obtenu l’autorisation pertinente du ministère de l’Intérieur au préalable; 2) les actions judiciaires engagées contre les sept défendeurs reposaient essentiellement sur des charges d’assemblées illégales et interdites et des émeutes conduisant à des troubles à l’ordre public et la violation de la sécurité publique; cinq défendeurs ont été condamnés pour manifestations illégales et violentes et troubles à l’ordre public et non pas pour avoir participé à la Fête du travail ou mener des activités syndicales ou relatives au travail; 3) les préoccupations exprimées par l’organisation plaignante quant au fait que les défendeurs auraient été arrêtés en raison de leur rencontre avec sa mission semblent infondées, puisque cette mission a rencontré d’autres personnes qui n’ont pas été contactées par la police ou les forces de sécurité; 4) les manifestations n’avaient rien à voir avec des activités syndicales et en infraction manifeste aux dispositions de la loi; 5) toutes les audiences ont été publiques à l’exception d’une seule où une partie du public assistant au procès a délibérément essayé de perturber les débats, ce qui a amené le juge à ordonner une session à huis clos; 6) Mahmoud Salehi a été initialement condamné par le tribunal de première instance pour instigation d’«émeute» et «manifestations illégales» à un total de huit ans d’emprisonnement, dont trois ans de relégation dans la ville de Ghorveh à titre de clémence (dossier no Sh/263/83); 7) Jalal Hosseini a été condamné par le tribunal de première instance à trois ans de prison pour instigation de «manifestations illégales et violentes» (dossier no Sh/254/83); 8) Borhan Divangar, Mohammad Abdlpoor et Mohsen Hakimi ont été condamnés à deux ans de prison par le tribunal de première instance pour instigation de «manifestations illégales et violentes» (dossiers nos Sh/260/83, Sh/258/83 et Sh/255/83, respectivement); 9) tous les cinq ont été acquittés des accusations de sympathie envers des groupes subversifs et acquittés par la cour d’appel des accusations de réunion illégale et de troubles à l’ordre social, pour lesquelles ils avaient été condamnés par le tribunal de première instance; 10) Esmail Khodkam et Hadi Tanomand ont été acquittés de toutes les charges qui pesaient sur eux (dossiers nos Sh/262/83 et Sh/261/83).
- 683. Le comité note avec intérêt les dernières informations reçues à la fois de l’organisation plaignante et du gouvernement, mentionnant que MM. Salehi, Hosseini, Hakimi, Divangar et Abdlpoor ont été acquittés de certaines accusations pour lesquelles ils avaient été reconnus coupables et condamnés à des peines allant de deux à cinq ans d’emprisonnement. Toutefois, le comité observe également que les accusations portées en vertu de l’article 610 du Code pénal islamique (assemblée et collusion dans le but de porter atteinte à la sécurité intérieure et extérieure du pays) restent apparemment en instance et ont été renvoyées pour examen devant le tribunal de première instance. Le comité doit rappeler que dans le premier examen de ce cas, d’après le gouvernement, ces personnes avaient été arrêtées parce qu’elles étaient suspectées d’être membres et partisans de deux groupes politiques interdits (le Parti «Komala» et le Parti communiste) qui auraient rejoint la manifestation et en auraient perturbé le déroulement, détournant le rassemblement à des fins politiques et non plus syndicales. [Voir 337e rapport, paragr. 1037.] Etant donné l’absence de condamnation pour ces motifs politiques, le comité éprouve les plus grandes difficultés à comprendre comment ces autres accusations pourraient être liées à d’autres motifs qu’à leurs activités syndicales.
- 684. De plus, le comité remarque qu’une fois de plus le gouvernement n’a fourni aucune information précise sur la manière dont la marche pacifique de Saqez est devenue violente, ni pourquoi il était indispensable que les forces de sécurité interviennent. Le comité doit une fois de plus souligner que dans les affaires où les plaignants allèguent que des dirigeants syndicaux ou des travailleurs ont été arrêtés en raison de leurs activités syndicales, et où les réponses des gouvernements se bornent à réfuter ces allégations, ou à indiquer que les arrestations ont été opérées en raison d’activités subversives, pour des raisons de sécurité intérieure ou pour des crimes de droit commun, le comité s’est fait une règle de demander aux gouvernements en question des informations aussi précises que possible sur les allégations incriminées, et en particulier en ce qui concerne les actions judiciaires entreprises et le résultat de ces actions, pour lui permettre de procéder en connaissance de cause à l’examen des allégations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 98.]
- 685. Concernant l’indication du gouvernement selon lequel le rassemblement n’avait rien à voir avec des activités syndicales, le comité rappelle une fois de plus que les organisations chargées de défendre les intérêts socio-économiques des travailleurs devraient en principe pouvoir utiliser la grève pour appuyer leur position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique économique et sociale, qui ont des répercussions immédiates pour leurs membres, et plus généralement pour les travailleurs, notamment en matière d’emploi, de protection sociale et de niveau de vie. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 480.]
- 686. Au vu de ce qui précède, le comité doit rappeler une fois de plus l’importance qu’il attache au principe selon lequel le droit d'organiser des réunions publiques et des cortèges à l'occasion du 1er mai constitue un aspect important des droits syndicaux. S’il appartient aux syndicats de respecter les dispositions légales visant à assurer le maintien de l'ordre public, les autorités publiques n'en sont pas moins tenues de s'abstenir de toute intervention de nature à restreindre le droit des syndicats d’organiser librement la tenue et le déroulement des réunions. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 134 et 144.] Le comité s’attend en outre que, lorsqu’il réexaminera le dossier, le tribunal de première instance tiendra pleinement compte des principes ci-dessus et que MM. Salehi, Hosseini, Hakimi, Divangar et Abdlpoor seront acquittés rapidement de toutes les accusations restantes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- 687. Le comité observe également avec préoccupation que le gouvernement n’a pas répondu aux allégations selon lesquelles deux des documents utilisés comme preuve contre M. Salehi au cours de son procès comprennent l’article qu’il a écrit sur l’établissement d’un indice du coût de la vie ainsi qu’une déclaration qu’il avait faite pour condamner le massacre de plusieurs grévistes à Khatoonabad en janvier 2005, actes qui, dans les deux cas, entrent dans le cadre de l’exercice d’activités syndicales légitimes. En outre, le comité est vivement préoccupé par les nouvelles allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles M. Salehi aurait été accusé de «perturber l’opinion publique» en raison de son article «Etablissement d’un indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran» et qu’une action est en cours devant le tribunal civil compétent. Le comité demande instamment au gouvernement d’abandonner toutes les accusations retenues contre M. Salehi pour son article «Etablissement d’un indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran», qui pour le comité entre dans le cadre de l’exercice d’activités syndicales légitimes. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des mesures qu’il aura adoptées dans ce sens.
- 688. En dernier lieu, le comité note avec préoccupation les informations supplémentaires fournies par l’organisation plaignante au sujet de l’arrestation, de l’incarcération, des allégations de voies de faits graves et de l’assignation devant les tribunaux de M. Borhan Divangar, en août 2005, accusé entre autres choses d’appartenance à un comité de coordination pour la constitution d’organisations de travailleurs (créé par Mahmoud Salehi et Mohsen Hakimi le 4 mai 2005), d’appartenance à l’organisation des travailleurs sans emploi récemment créée, de diriger en Iran un site Internet relatif au travail appelé «Tashakol» et d’avoir participé aux mouvements de protestations qui ont suivi l’assassinat du militant de l’opposition kurde Shivan Qaderi. Le comité demande au gouvernement de lui fournir immédiatement ses commentaires à ce sujet.
- Autres allégations
- 689. Le comité déplore que le gouvernement n’ait pas fourni d’informations en réponse aux allégations supplémentaires présentées par l’organisation plaignante dans sa communication du 7 février 2005, en dépit de la demande qui lui avait été faite par le comité à ce propos. Ces allégations concernent: 1) l’arrestation de dirigeants de l’Association des enseignants; 2) des interventions au cours d’une grève à l’usine de textile du Kurdistan et des actes de harcèlement qui ont suivi contre des représentants des travailleurs; ainsi que 3) différents textes législatifs adoptés ou en cours d’adoption qui restreindraient les droits syndicaux d’un très grand nombre de travailleurs. [Voir 337e rapport, paragr. 957-966.] A ce sujet, le comité rappelle au gouvernement que le but de l’ensemble de la procédure établie par l’Organisation internationale du Travail en ce qui concerne l’examen des allégations relatives à des violations de la liberté syndicale est de garantir le respect de la liberté syndicale des employeurs et des travailleurs, en droit comme en fait. Même si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître à leur tour l’importance qu’il y a à ce qu’ils présentent, en vue d’un examen objectif, des réponses détaillées et précises aux allégations formulées à leur encontre. [Voir premier rapport, paragr. 31.]
- 690. Pour ce qui est des allégations concernant l’arrestation des dirigeants de l’Association des enseignants, le comité rappelle que l’organisation plaignante a fait référence aux informations diffusées par l’agence de presse iranienne officielle, l’Agence de presse de la République islamique (IRNA), indiquant que Mahmoud Beheshti Langarudi, secrétaire général de l’Association des enseignants, et Ali-Ashgar Zati, le porte-parole de cette organisation, avaient été arrêtés le 12 juillet 2004. L’organisation plaignante ajoute qu’ils ont été arrêtés en raison de leurs activités syndicales et des grèves qu’ils avaient organisées en mars et en juin 2004 pour le non-paiement des salaires. M. Langarudi a été cité à comparaître devant un tribunal en mai 2004, pour des faits liés aux grèves de mars 2004, auxquelles 200 000 travailleurs avaient pris part. Il a été accusé d’être entré illégalement dans une école, d’avoir quitté son poste pendant les heures de travail, et d’avoir incité des enseignants «agitateurs» à faire grève. L’organisation plaignante croit savoir, d’après l’IRNA, que les arrestations de juillet 2004 pourraient aboutir à des accusations de violation de la sécurité nationale et d’organisation de deux manifestations en juin, pour demander des augmentations de salaire et le paiement des arriérés de salaires pour un montant de 5,2 milliards de rials (620 millions de dollars E.-U.). D’après l’organisation plaignante, l’Association des enseignants a fait l’objet d’intimidations visant à la faire taire, et n’a pas fait de déclaration à propos des arrestations malgré une manifestation des enseignants le 19 juillet 2004 devant l’entrée principale du Majles (le Parlement iranien) à Téhéran. L’organisation plaignante a ajouté que MM. Mahmoud Beheshti Langarudi et Ali-Asghar Zati n’ont été libérés sous caution qu’à la mi-août 2004. M. Zati a dû payer une caution de 70 millions de tomans et M. Beheshti de 50 millions. Toutefois, d’autres membres de l’association auraient été arrêtés dans la province de Mazandaran, au nord du pays.
- 691. Le comité rappelle qu’il a toujours reconnu que le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux et que les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestations pacifiques pour défendre leurs intérêts professionnels. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 132 et 475.] Le comité estime qu’une grève pour obtenir une augmentation de salaire et le paiement des arriérés de salaires entre dans le cadre de l’exercice d’activités syndicales légitimes. Le comité souligne que les mesures d’arrestations de syndicalistes peuvent créer un climat d’intimidation et de crainte empêchant le déroulement normal des activités syndicales, et que la détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques en général et des libertés syndicales en particulier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 71 et 76.] Observant que les deux dirigeants syndicaux sont restés en détention pendant un mois, le comité souligne que les mesures de détention préventive peuvent impliquer une grave ingérence dans les activités syndicales, qui semblerait devoir être justifiée par l’existence d’une crise ou situation sérieuse et qui pourrait donner lieu à des critiques, à moins qu’elle ne soit accompagnée de garanties judiciaires appropriées, mises en œuvre dans des délais raisonnables. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 85.] Le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations détaillées sur toutes les accusations retenues contre Mahmoud Beheshti Langarudi, secrétaire général, et Ali-Ashgar Zati, porte-parole de l’Association des enseignants, ainsi que sur toutes les décisions rendues par les tribunaux, et de prendre toutes les dispositions pour veiller à ce qu’au cas où ces charges porteraient sur leurs activités syndicales elles soient abandonnées par les autorités compétentes à la lumière des principes susmentionnés. Le comité demande à être informé à ce sujet.
- 692. Pour ce qui est des allégations concernant des interventions au cours d’une grève à l’usine de textile de la ville de Sanandaj au Kurdistan, le comité note que, d’après l’organisation plaignante, l’usine a été encerclée par les forces de sécurité pour en couper l’accès durant une grève avec occupation pour protester contre les licenciements collectifs annoncés par la direction. La grève avait commencé le dimanche 31 octobre 2004, et le 1er novembre l’ensemble de l’usine s’y était ralliée et elle avait reçu un large soutien d’autres usines, d’autres syndicats, d’autres travailleurs et de citoyens. Le 2 novembre 2004, le ministère du Travail aurait appelé le Gouverneur du Kurdistan, l’armée et la direction à mettre un terme à la «rébellion». La grève s’est terminée le 3 novembre lorsque l’employeur et les autorités gouvernementales ont accepté d’augmenter les indemnités de licenciement, mais ils ne se sont pas engagés à ne pas procéder à d’autres licenciements. D’après l’organisation plaignante, l’accord a été négocié alors que l’usine était encore encerclée, et les négociations ont été suivies par le chef local des forces armées qui, à un moment, a brandi un imprimé, criant et menaçant les représentants des travailleurs.
- 693. L’organisation plaignante explique que de nouvelles grèves ont éclaté le 22 décembre quand l’employeur a décidé de licencier cinq travailleurs. Les revendications des grévistes portaient sur leurs contrats et leurs conditions de travail, et incluaient la réintégration des cinq travailleurs licenciés. Craignant que les forces de sécurité ne se déploient à nouveau devant l’usine comme elles l’avaient fait en novembre 2004, les travailleurs ont élu un comité pour défendre leurs droits. L’employeur et les forces de sécurité ont alors exercé des pressions sur les membres du comité, et en particulier sur son président, Shis Amani, pour mettre un terme à la grève. Il a été interrogé et menacé à plusieurs reprises et ce n’est que grâce au soutien des travailleurs qu’il a évité la détention. D’autres représentants des travailleurs (MM. Hadi Zarei, Iqbal Moradi, Hassan Hariati, Fashid Beheshti Zad et Ahmad Fatehi) ont également été menacés de licenciement et d’arrestation. De nombreux travailleurs auraient été renvoyés et des militants soumis à d’«immenses pressions».
- 694. Au dire de l’organisation plaignante, le 6 janvier 2005, une commission créée par le Département du travail comprenant des représentants des forces de sécurité, du Département du travail, de la direction et du ministère de l’Information (sécurité publique) a négocié pendant plus de cinq heures avec les représentants des travailleurs et est parvenue à un accord (le 1er janvier 2005, la commission avait menacé les grévistes de tous les renvoyer). Les grévistes ont accepté de reprendre le travail à certaines conditions, comprenant le paiement d’indemnités de licenciement aux cinq travailleurs licenciés correspondant à trois mois de salaire par année d’emploi à l’usine plus d’autres indemnités. Depuis la fin de la grève suite à l’accord du 6 janvier, les représentants des travailleurs auraient fait l’objet de mesures de harcèlement et auraient été soumis à un interrogatoire le 19 janvier 2005 par le ministère des Renseignements. MM. Shis Amani et Hadi Zarei ont tous deux été menacés. Fashid Beheshti Zad a été menacé et accusé d’entretenir des liens avec des partis politiques d’opposition. Les autorités et l’employeur étaient aussi en train de chercher des excuses pour ne pas respecter l’accord.
- 695. Le comité doit rappeler une fois de plus le principe mentionné plus haut, selon lequel il a toujours reconnu que le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 132.] Le comité demande au gouvernement de veiller à respecter pleinement ce principe à l’avenir. De plus, le comité note avec une vive préoccupation que d’après l’organisation plaignante, en dépit de l’accord obtenu entre les représentants des travailleurs et le Département du travail, le ministère de l’Information (sécurité publique) et la direction de l’usine en janvier 2005, le ministère des Renseignements a interrogé, menacé et harcelé Shis Amani, Hadi Zarei et Fashid Beheshti Zad. Le comité rappelle que les droits des organisations d’employeurs et de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et affiliés de telles organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 47.] Il demande instamment au gouvernement de diligenter une enquête indépendante pour examiner ces allégations et de le tenir informé des résultats de cette enquête.
- 696. Enfin, le comité déplore que le gouvernement n’ait fourni aucune information relative aux allégations concernant des textes législatifs adoptés ou en cours d’adoption qui restreindraient les droits syndicaux d’un grand nombre de travailleurs (par exemple l’exclusion de la législation du travail des ateliers de moins de dix salariés et un projet excluant les travailleurs temporaires du champ de la législation du travail) et demande au gouvernement de le faire dans les plus brefs délais.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 697. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement de prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent les instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. Notant que l’affaire du meurtre des quatre personnes innocentes par les forces de police au cours des incidents de Shar-e-Babak est en cours d’examen devant la Cour suprême, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’avancement de la procédure et de lui communiquer la décision finale dès qu’elle aura été rendue.
- b) Regrettant que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur les noms, la profession et l’affiliation syndicale éventuelle des six personnes condamnées à la suite des événements de Shar-e-Babak, ni sur les actes précis qui leur étaient reprochés, ainsi que les motifs de leur condamnation, le comité demande au gouvernement de lui communiquer dans les plus brefs délais des informations à ce sujet, en incluant les décisions des tribunaux condamnant ces personnes.
- c) Le comité s’attend fermement à ce que le tribunal de première instance, lorsqu’il réexaminera le dossier, tiendra pleinement compte des principes mentionnés dans ses conclusions, et que MM. Mahmoud Salehi, Jalal Hosseini, Mohsen Hakimi, Borhan Divangar et Mohammad Abdlpoor seront pleinement et rapidement acquittés de toutes les accusations restantes. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- d) Le comité demande fermement au gouvernement d’abandonner les accusations contre M. Salehi pour son article «Etablissement d’un indice du coût de la vie pour une famille de cinq personnes en Iran» dont le comité estime qu’il entre dans le cadre de l’exercice d’activités syndicales légitimes. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des mesures qu’il aura prises dans ce sens.
- e) Notant avec préoccupation les informations supplémentaires présentées par l’organisation plaignante concernant l’arrestation, l’incarcération, les allégations de voies de faits graves et l’assignation devant les tribunaux de M. Borhan Divangar, en août 2005, accusé entre autres choses d’appartenance au Comité de coordination pour la constitution d’organisations de travailleurs (créé par Mahmoud Salehi et Mohsen Hakimi le 4 mai 2005), d’appartenance à l’organisation des travailleurs sans emploi récemment créée, de diriger en Iran un site Internet relatif au travail appelé «Tashakol» et d’avoir participé aux mouvements de protestations à Saqez qui ont suivi l’assassinat du militant de l’opposition kurde Shivan Qaderi, le comité demande au gouvernement de communiquer immédiatement ses commentaires à cet égard.
- f) Le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations détaillées sur toutes les charges retenues contre Mahmoud Beheshti Langarudi, secrétaire général, et Ali-Ashgar Zati, porte-parole de l’Association des enseignants, ainsi que sur toutes les décisions rendues par les tribunaux, et de prendre toutes les dispositions pour veiller à ce que, au cas où ces charges porteraient sur leurs activités syndicales, elles soient abandonnées par les autorités compétentes à la lumière des principes mentionnés ci-dessus. Le comité demande à être tenu informé à ce sujet.
- g) Le comité demande instamment au gouvernement de diligenter une enquête indépendante pour examiner les allégations selon lesquelles le ministère des Renseignements a interrogé, menacé et harcelé Shis Amani, Hadi Zarei et Fashid Beheshti Zad et de tenir le comité informé des résultats de cette enquête.
- h) Déplorant que le gouvernement n’ait fourni aucune information au sujet de sa demande précédente relative aux allégations concernant des textes législatifs adoptés ou en cours d’adoption qui restreindraient les droits syndicaux d’un grand nombre de travailleurs (par exemple l’exclusion de la législation du travail des ateliers de moins de dix salariés et un projet en excluant les travailleurs temporaires), le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir ses observations à ce sujet dans les plus brefs délais.