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- 920. La plainte figure dans une communication en date du 19 décembre 2002 émise par l’Association syndicale de Russie SOTSPROF (SOTSPROF).
- 921. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 5 septembre 2003.
- 922. La Fédération de Russie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante - 923. Dans sa communication du 19 décembre 2002, l’Association syndicale de Russie SOTSPROF allègue que les organes étatiques du pouvoir exécutif font ingérence dans la gestion de l’organisation.
- 924. La partie plaignante déclare notamment que, le 26 mars 2002, les services fiscaux ont établi un mandat de perquisition autorisant l’inspection des locaux de la SOTSPROF et de ses divisions structurelles et territoriales. Cette perquisition, au cours de laquelle certains documents ont été saisis, a été menée le 27 mars 2002. A la date de la plainte, les documents n’avaient toujours pas été rendus et aucune poursuite pénale n’avait été engagée.
- 925. L’organisation plaignante déclare en outre que, le 24 mai 2002, le service de contrôle de la région sud-ouest de Moscou rattaché au ministère de la Fiscalité et du Recouvrement des impôts a décidé de soumettre l’association à un contrôle fiscal sur place en vue de vérifier le calcul et le versement des impôts sur le revenu des personnes physiques. A cet égard, le service avait demandé à la SOTSPROF de lui fournir certains documents émis entre le 1er janvier 1999 et le 1er mai 2002, à savoir: les relevés bancaires, les reçus de versements en espèces, certains rapports financiers, les contrats établis avec les personnes morales et les personnes physiques ainsi que l’inventaire de tous ses biens.
- 926. Considérant que ces contrôles étaient contraires aux dispositions de la loi fédérale sur les syndicats, de même qu’à l’article 3 de la convention no 87, la SOTSPROF a porté plainte auprès des tribunaux et auprès du bureau à Moscou du ministère de la Fiscalité et du Recouvrement des impôts de la Fédération de Russie. Toutefois, les tribunaux ont déclaré qu’il n’y avait pas eu violation de la législation nationale ni de la convention no 87 et que, en conséquence, les actions menées par la police fiscale étaient jugées légales, et les plaintes déposées par le syndicat ont donc été rejetées. Malgré les objections de la SOTSPROF, les services fiscaux ont décidé de mener une enquête au sujet des activités financières de l’organisation. Or considérant que le syndicat ne pouvait exposer ses membres au risque d’être poursuivis au pénal par l’Etat, ce qui risquait d’arriver si les organes étatiques s’emparaient des documents financiers relatifs aux activités du syndicat, le syndicat avait décidé de ne pas répondre à la requête formulée par les pouvoirs publics. Compte tenu de ce refus de produire les documents en question, les services fiscaux ont infligé une lourde amende au président de l’association.
- 927. L’organisation plaignante déclare en outre que, sur ordre des services fiscaux en date du 9 septembre 2002, toutes les opérations portant sur les comptes bancaires de la SOTSPROF ont été suspendues entre le 24 octobre et le 12 novembre 2002. Les services fiscaux ont avancé comme raison officielle l’obligation de fournir des renseignements sur une certaine catégorie de paiements fiscaux pour les six premiers mois de l’année 2002, alors que ce type de renseignement n’est habituellement présenté aux services fiscaux qu’une fois par an. L’association avait déjà fourni son rapport, conformément à la procédure établie. La partie plaignante prétend que le gel des avoirs bancaires a quasiment paralysé les activités de l’association et de sa plus grande section syndicale.
- 928. En outre, le 18 décembre 2002, la police fiscale a, aux côtés des contrôleurs, entrepris une autre perquisition dans les locaux de la SOTSPROF et a saisi ses documents.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement - 929. Dans sa communication du 5 septembre 2003, le gouvernement affirme que, pour ce qui est de la référence faite par l’organisation plaignante à l’article 3 de la convention no 87, les contrôles fiscaux ne vont à l’encontre d’aucun des droits dont sont investies les organisations syndicales aux termes de cet article. Selon le gouvernement, la référence à la loi fédérale sur les syndicats est également sans fondement, étant donné que l’article 24 ne porte que sur l’interdiction des contrôles financiers. La législation ne restreint nullement les contrôles fiscaux menés par les services fiscaux. L’organisation plaignante étant un contribuable, un contrôle fiscal de ses activités a été mené afin de vérifier si les déductions et les transferts des impôts sur le revenu des personnes physiques, conformément à l’article 24 du Code fiscal, se sont faits de manière réglementaire et dans les délais impartis. Conformément aux obligations prescrites aux termes des articles 31 et 87 de ce code, les contrôleurs fiscaux ont réclamé les relevés bancaires et les reçus des versements en espèces, les comptes d’avance, les contrats établis avec les personnes physiques et morales, ainsi que les inventaires des capitaux fixes et des biens non matériels soumis à l’imposition. Les originaux de ces documents ont été rendus au syndicat le 23 janvier 2003.
- 930. Selon le gouvernement il ressort, après enquête menée au sujet des allégations avancées dans le cas en question, que certaines violations de la loi fédérale sur les opérations d’investigation ont bien été commises, en ce qui concerne les perquisitions effectuées dans les locaux du syndicat et la saisie des documents. Le bureau, à Moscou, du ministère public a protesté auprès du chef de la division de Moscou du service fédéral de la police fiscale réclamant que les torts soient réparés, que les contribuables soient rétablis dans leurs droits et que les coupables soient punis. Ces demandes ont été entièrement satisfaites.
- 931. Le gouvernement déclare en outre que l’Inspection de la circonscription administrative de la région sud-ouest de Moscou, rattachée au ministère de la Fiscalité et du Recouvrement des impôts, a décidé de suspendre les opérations bancaires de l’Association SOTSPROF. Toutefois, cette décision prise par erreur a été révoquée le 3 décembre 2003. Le gouvernement précise par ailleurs que, puisque le syndicat n’est impliqué dans aucune activité commerciale, les plaintes selon lesquelles le syndicat aurait subi des pertes sont sans fondement.
- 932. Enfin, le gouvernement déclare que, malgré les droits reconnus dans la législation, à savoir notamment le droit de faire appel d’une décision de justice, l’organisation plaignante a choisi de ne pas faire appel de la décision du tribunal de rejeter la plainte de la SOTSPROF, et que l’organisation n’a donc pas utilisé tous les moyens mis à sa disposition pour défendre ses intérêts. A cet égard, le gouvernement précise que le paragraphe 3 de l’article 46 de la Constitution de la Fédération de Russie dispose que les citoyens ont le droit de s’adresser aux organes interétatiques pour la protection des droits et libertés de l’homme à deux conditions: il faut que la Fédération de Russie ait signé un accord international pertinent et que tous les moyens de protection juridique internes aient été épuisés.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité - 933. Le comité note que l’organisation plaignante allègue des actes d’ingérence de la part des pouvoirs publics dans la gestion du syndicat. Elle déclare notamment que les services fiscaux ont opéré plusieurs contrôles sur place en vue de vérifier le calcul et le versement des impôts sur le revenu des personnes physiques. De plus, l’organisation plaignante prétend que, sur ordre des services fiscaux, les opérations bancaires de l’association ont été suspendues entre le 24 octobre et le 12 novembre 2002.
- 934. Pour ce qui est des contrôles fiscaux au cours desquels des documents relatifs aux activités financières de l’organisation ont été saisis, l’organisation plaignante prétend que ces contrôles sont contraires à la législation nationale qui interdit aux pouvoirs publics de mener des enquêtes financières au sujet des activités des syndicats. Le comité prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle l’organisation plaignante est un contribuable et qu’à ce titre elle peut être assujettie à des contrôles fiscaux. Le gouvernement déclare en outre que les contrôles fiscaux ne sauraient être considérés comme des enquêtes financières interdites aux termes de la législation nationale. Le comité prend également note du fait que le gouvernement admet que certaines irrégularités ont été commises au cours de la perquisition dans les locaux du syndicat. Le gouvernement déclare toutefois que des mesures ont été prises pour rétablir les droits du syndicat et pour punir les coupables. Selon le gouvernement, les documents saisis ont été rendus au syndicat le 23 janvier 2003.
- 935. Le comité considère que, si les investigations fiscales doivent être différenciées des investigations discrétionnaires dans toutes les activités financières des syndicats, la question est de savoir si ces investigations peuvent s’accompagner de perquisitions dans les locaux des syndicats sans mandat de l’autorité judiciaire. Le comité est d’avis que, si les syndicats ne peuvent prétendre se soustraire à une perquisition dans leurs locaux, ces perquisitions ne devraient avoir lieu que sur mandat de l’autorité judiciaire ordinaire, lorsque cette autorité est convaincue qu’il y a de solides raisons de supposer qu’on trouvera sur les lieux les preuves nécessaires à la poursuite d’un délit de droit commun, et à la condition que la perquisition soit limitée aux objets qui ont motivé la délivrance du mandat. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 180.] Le comité regrette que certaines irrégularités aient eu lieu au cours du contrôle fiscal des activités financières de l’organisation plaignante et demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que de telles irrégularités ne se produisent plus à l’avenir. Le comité demande également au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’aucune perquisition dans les locaux syndicaux ne puisse avoir lieu sans un mandat de l’autorité judiciaire ordinaire.
- 936. En ce qui concerne le gel des avoirs bancaires du syndicat, le comité constate, d’après les documents fournis par l’organisation plaignante de même que la déclaration du gouvernement, que les services fiscaux qui ont décidé de geler les avoirs bancaires du syndicat ont révoqué leur décision dès qu’ils ont constaté l’erreur technique à l’origine de cette décision. Le comité prend également bonne note de la déclaration du gouvernement selon laquelle l’organisation plaignante ne peut avoir subi de pertes puisqu’elle n’avait aucune activité commerciale.
- 937. Rappelant que le gel d’avoirs bancaires syndicaux peut constituer une grave ingérence des pouvoirs publics dans les activités syndicales [voir Recueil, op. cit., paragr. 439], le comité regrette que, à la suite d’une erreur technique, les services fiscaux aient décidé de geler les avoirs bancaires de la SOTSPROF. Le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que de telles irrégularités ne se produisent plus à l’avenir.
- 938. En ce qui concerne la question des voies de recours nationales, le comité note que l’article 46(3) de la Constitution russe dispose que «chacun a le droit de s’adresser aux organes interétatiques pour la protection des droits et libertés de l’homme, dès lors que tous les moyens de protection juridique internes ont été épuisés». Le comité aimerait souligner le fait qu’il a toujours considéré que, compte tenu de ses responsabilités, sa compétence en matière d’examens des allégations n’est pas subordonnée à l’épuisement des procédures nationales.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 939. A la lumière des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité regrette que certaines irrégularités aient eu lieu au cours du contrôle fiscal des activités financières de l’organisation plaignante et demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que de telles irrégularités ne se produisent plus à l’avenir. Le comité demande également au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’aucune perquisition dans les locaux syndicaux ne soit possible sans un mandat de l’autorité judiciaire.
- b) Rappelant que le gel d’avoirs bancaires syndicaux peut constituer une grave ingérence des pouvoirs publics dans les activités syndicales, le comité regrette que, à la suite d’une erreur technique, les services fiscaux aient pris la décision de geler les avoirs bancaires de la SOTSPROF. Le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que de telles irrégularités ne se produisent plus à l’avenir.