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- 918. Les plaintes figurent dans les communications de la Fédération nationale des syndicats du Pakistan (PNFTU) en date des 4 et 30 novembre 2002, de la Fédération des travailleurs du Pakistan de l’EOBI en date du 18 octobre 2002, et de la Confédération des syndicats du Pakistan (APFTU) reçue le 4 décembre 2002. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et la Fédération internationale des ouvriers du transport (FITT) se sont associées à la plainte par des communications en date des 13 et 19 février 2003.
- 919. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 28 novembre 2002.
- 920. Le Pakistan a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 921. Dans leurs communications des 18 octobre, 4 et 30 novembre, et 4 décembre 2002, la Fédération nationale des syndicats du Pakistan (PNFTU), la Fédération des travailleurs du Pakistan de l’EOBI et la Confédération des syndicats du Pakistan (APFTU) allèguent que l’Ordonnance sur les relations de travail de 2002 (IRO), qui remplace l’Ordonnance sur les relations de travail de 1969, a été imposée par le gouvernement sans tenir compte des propositions et suggestions des syndicats ni de celles faites conjointement par les travailleurs et des employeurs au niveau du Conseil bilatéral travailleurs-employeurs du Pakistan et que son effet extrêmement restrictif est contraire aux conventions nos 87 et 98.
- 922. Les organisations plaignantes se réfèrent aux divergences suivantes entre la IRO de 2002 et les conventions: restriction du droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations ainsi que celui de s’y affilier; restriction du droit des organisations de travailleurs de constituer des fédérations et des confédérations et de s’y affilier; interventions dans les affaires internes des syndicats et des fédérations de syndicats; restrictions du droit de grève; lourdes peines imposées aux dirigeants syndicaux pour avoir commis des pratiques du travail déloyales; protection insuffisante accordée aux travailleurs contre tous actes de discrimination antisyndicale; organisation judiciaire du travail inefficace et mécanismes de négociation collective insuffisants.
- 923. Dans leurs communications, les organisations plaignantes soulignent que les établissements suivants sont expressément exclus du champ d’application de l’Ordonnance de 2002 sur les relations de travail:
- – la société de chaussures Bata, fournissant des chaussures aux forces armées;
- – Pakistan Security Printing Corporation;
- – Pakistan Security Papers Ltd.;
- – Hôtel de la monnaie du Pakistan;
- – établissements ou institutions subvenant aux traitements, aux soins des personnes malades, infirmes, indigentes et mentalement handicapées;
- – institutions créées pour le paiement des prestations de vieillesse aux employés ou pour le bien-être des travailleurs;
- – membres de la garde et de la surveillance, personnel des services de sécurité et d’incendie d’une raffinerie ou d’établissements engagés dans la production, la transmission ou la distribution de gaz naturel ou de gaz de pétrole liquéfiés ou de produits pétroliers, ou bien le personnel des ports de mer ou d’aéroports;
- – chemin de fer, lorsqu’il est utilisé à des fins de défense; et
- – administration de l’Etat.
- 924. La APFTU ajoute que la nouvelle IRO ne couvre pas les travailleurs agricoles et ne mentionne pas la levée de la suspension ou de l’interdiction des droits syndicaux de la compagnie de distribution d’électricité de Karachi, de la compagnie aérienne internationale pakistanaise et des banques aux termes de l’article 27-B de l’Ordonnance sur les sociétés bancaires de 1999 (modifiée) et des zones franches d’exportation. Ces restrictions quant à l’application de la IRO violent, selon les organisations plaignantes, le droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix ainsi que celui de s’y affilier.
- 925. La PNFTU indique en outre qu’en vertu de l’article 3(1)(d) de la IRO chaque agent de négociation collective doit s’affilier à une fédération nationale enregistrée auprès de la Commission nationale des relations de travail dans un délai de deux mois après avoir été agréé agent de négociation collective ou après la promulgation de la IRO. L’organisation plaignante affirme que cet article viole le droit des syndicats de s’affilier aux fédérations de leur choix puisqu’il est possible que l’agent de négociation collective ne fasse confiance à aucune des fédérations nationales enregistrées. En outre, puisqu’une relation proche et de confiance prend du temps pour se développer, le délai fixé pour l’affiliation est trop court.
- 926. La PNFTU allègue également de l’intervention du gouvernement dans les affaires internes des syndicats et des fédérations de syndicats, puisque, conformément à l’article 19(1) de la IRO, les comptes d’un agent de négociation collective ayant au moins 5 000 adhérents sont sujets à une expertise comptable externe menée par un cabinet comptable désigné par l’agent comptable du registre.
- 927. La PNFTU ajoute que l’article 18 de la IRO exige un enregistrement de chaque fédération auprès de la Commission nationale des relations de travail. Une telle exigence n’existait pas avec la précédente IRO et, selon l’organisation plaignante, elle équivaut à une intervention directe dans les affaires intérieures des fédérations.
- 928. La APFTU allègue que le droit de grève a été restreint par la nouvelle loi puisqu’elle impose des délais plus longs avant qu’un appel à une grève puisse être lancé: 15 jours pour une négociation bilatérale avec un employeur et, si un accord n’est pas intervenu, 15 jours supplémentaires pour une procédure de conciliation. L’organisation plaignante déclare qu’en vertu de la IRO de 1969 ces délais étaient limités à 10-14 jours.
- 929. La APFTU souligne que l’article 65 de la IRO impose aux dirigeants syndicaux de lourdes peines pour l’accomplissement de pratiques déloyales du travail, définies selon l’article 64(1)(d) comme l’action de contraindre ou de tenter de contraindre l’employeur à accepter toute demande par l’intimidation, la coercition, la pression, la menace, la détention ou l’évincement d’un lieu, la dépossession, l’attaque, un dommage physique, une coupure d’eau, de téléphone ou des installations électriques ou par toutes autres méthodes. Les sanctions pouvant être prononcées peuvent inclure l’interdiction pour un dirigeant syndical d’exercer des activités syndicales pour une période illimitée.
- 930. Les organisations plaignantes ajoutent que la nouvelle IRO va à l’encontre de l’obligation du gouvernement de fournir aux travailleurs une protection adéquate contre tous actes de discrimination antisyndicale. En particulier, la APFTU et la PNFTU allèguent que, bien que l’article 46(5) de la nouvelle loi accorde le pouvoir au tribunal du travail d’accorder une indemnité aux travailleurs qui ont été licenciés à tort, elle n’accorde pas au tribunal le pouvoir d’ordonner la réintégration du travailleur. La APFTU ajoute que la nouvelle loi restreint le droit des travailleurs de chercher des recours provisoires auprès de la Commission nationale des relations de travail contre tout «licenciement, renvoi ou déplacement d’un emploi ou transfert» basé sur leur engagement syndical, puisque l’article 49(4)(e) stipule que ces mesures peuvent uniquement être accordées au cours d’un conflit du travail.
- 931. De plus, selon la PNFTU, l’ancienne organisation judiciaire du travail avec la lenteur de sa procédure a été maintenue puisque la Commission nationale des relations de travail fonctionne encore sous la tutelle du ministère du Travail et les tribunaux du travail sous celle des départements provinciaux du travail. La PNFTU affirme également que la Commission nationale des relations de travail, même si elle a été créée par l’ancienne ordonnance sur les relations de travail, a agi contre les intérêts des travailleurs et qu’en dépit de l’opposition de la majorité des organisations syndicales cette institution a été maintenue par la nouvelle ordonnance.
- 932. La PNFTU indique qu’aux termes de l’article 20(11) de la IRO, lorsqu’un syndicat enregistré a été agréé comme agent de négociation collective, aucune candidature pour la désignation d’un nouvel agent de négociation collective pour le même établissement ne peut être déposée pendant trois ans. Selon l’organisation plaignante, cette disposition oblige l’agent de négociation collective à signer un accord collectif pour trois ans. De plus, l’article 60 stipule que l’accord lie les parties pendant deux ans (délai d’un an auparavant) s’il n’y a pas d’accord sur une autre durée.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 933. Dans sa communication du 28 novembre 2002, le gouvernement affirme que l’Ordonnance sur les relations de travail, qui a été promulguée le 26 octobre 2002 et qui abroge la IRO de 1969, a été adoptée après de larges consultations avec toutes les parties intéressées et tenant compte des conventions de l’OIT ratifiées par le Pakistan.
- 934. Le gouvernement affirme que la IRO de 2002 s’applique à tous les établissements à l’exception de ceux qui sont sensibles par nature et où le gouvernement ne peut pas se permettre un ralentissement d’activités ou une grève pour assurer la défense du pays et fournir les biens de première nécessité à l’ensemble de la communauté. Selon le gouvernement, la nouvelle loi élargit son champ d’application puisque certaines catégories de travailleurs précédemment exclues du champ d’application de la IRO, telles que des personnes employées par la PIA (compagnie aérienne internationale du Pakistan), et PTV et PBC (compagnies de radiodiffusion et de télévision du Pakistan), sont maintenant couvertes par l’ordonnance. En outre, le gouvernement affirme que les personnes employées dans des hôpitaux gérés sur une base commerciale sont également couvertes par la IRO de 2002.
- 935. En ce qui concerne le rôle de la Commission nationale des relations de travail, le gouvernement affirme que son rôle a été révisé afin de la transformer en une organisation efficace avec pour objectif particulier de promouvoir un syndicalisme en bonne santé dans le pays.
- 936. De plus, le gouvernement affirme que, dans un souci de rapidité de la justice, les cours d’appel du travail ont été abolies comme l’avait recommandé la Conférence tripartite du travail du Pakistan et que les Hautes Cours sont devenues les cours d’appel pour les recours contre les décisions des tribunaux du travail.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 937. Le comité prend note que les organisations plaignantes dans le cas présent allèguent que l’Ordonnance sur les relations de travail du Pakistan de 2002 (IRO) a été imposée par le gouvernement sans prendre en compte les propositions et suggestions des syndicats. Les organisations plaignantes affirment également que la législation mentionnée viole les principes de la liberté syndicale, en particulier celui qui concerne le droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations ainsi que celui de s’y affilier; le droit des organisations de travailleurs de constituer des fédérations et des confédérations et de s’y affilier; la non-intervention dans les affaires internes des syndicats et des fédérations de syndicats; le droit de grève; la protection accordée aux travailleurs contre tous actes de discrimination antisyndicale; l’organisation judiciaire du travail et le droit de négocier collectivement.
- 938. En ce qui concerne la première allégation, le comité note que les organisations plaignantes allèguent que leurs propositions et suggestions concernant la nouvelle législation n’ont pas été prises en compte, et le gouvernement indique que la IRO a été adoptée après de larges consultations avec toutes les parties intéressées. A cet égard, le comité rappelle l’importance qu’il convient d’attacher à ce que des consultations franches et complètes aient lieu sur toute question ou tout projet de dispositions législatives ayant une incidence sur les droits syndicaux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 927.] Le comité veut croire que toutes les futures consultations avec les partenaires sociaux relatives à une législation affectant les droits syndicaux seront menées à la satisfaction de toutes les parties intéressées.
- 939. En ce qui concerne le droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations ainsi que celui de s’y affilier, le comité note que, d’après les allégations des organisations plaignantes, les établissements suivants sont expressément exclus du champ d’application de l’Ordonnance de 2002 sur les relations de travail: la société de chaussures Bata, lorsqu’elle fournit des chaussures aux forces armées; Pakistan Security Printing Corporation; Pakistan Security Papers Ltd.; l’Hôtel des monnaies du Pakistan; les établissements ou institutions subvenant aux traitements, aux soins des personnes malades, infirmes, indigentes et mentalement handicapées; les institutions créées pour le paiement des prestations de vieillesse des employés ou pour le bien-être des travailleurs; les membres de la garde et de la surveillance, le personnel des services de sécurité et d’incendie d’une raffinerie ou d’établissements engagés dans la production, la transmission ou la distribution de gaz naturel ou de gaz de pétrole liquéfiés ou de produits pétroliers ou le personnel de ports de mer ou d’aéroports; le chemin de fer, lorsqu’il est utilisé à des fins de défense; et l’administration de l’Etat. Il note en plus que, selon la déclaration de la APFTU, la nouvelle IRO ne couvre pas les travailleurs agricoles et ne mentionne pas la levée de la suspension ou de l’interdiction des droits syndicaux de la compagnie de distribution d’électricité à Karachi, de la compagnie aérienne internationale pakistanaise et des banques aux termes de l’article 27-B de l’Ordonnance sur les sociétés bancaires de 1999 (modifiée) et des zones franches d’exportation.
- 940. Le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle la IRO de 2002 est applicable à tous les établissements à l’exception de ceux qui sont sensibles par nature et où le gouvernement ne peut pas se permettre un ralentissement d’activités ou une grève pour assurer la défense du pays et fournir les biens de première nécessité à l’ensemble de la communauté. Selon le gouvernement, la nouvelle loi élargit le champ d’application de la législation puisque certaines catégories de travailleurs précédemment exclues du champ d’application de la IRO, telles que des personnes employées par la PIA (compagnie aérienne internationale du Pakistan), et PTV et PBC (compagnies de radiodiffusion et de télévision du Pakistan), sont maintenant couvertes par l’ordonnance. En outre, le gouvernement affirme que les personnes employées dans des hôpitaux gérés sur une base commerciale sont également couvertes par la IRO de 2002.
- 941. Le comité comprend de la déclaration du gouvernement que l’exclusion du champ d’application de la IRO est étroitement liée à l’interdiction des travailleurs de certains services d’avoir recours à la grève. A cet égard, le comité rappelle qu’alors que le droit de grève peut être restreint ou supprimé pour certaines catégories de travailleurs (dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, ou dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité personnelle ou la santé de l’ensemble ou d’une partie de la population) la garantie du droit à la liberté syndicale devrait s’appliquer à tous les travailleurs, à l’exception des membres de la police et des forces armées. De plus, les membres des forces armées qui pourraient être exclus de l’application de la convention no 87 devraient être définis de façon restrictive; les travailleurs civils des établissements manufacturiers ou d’autres installations ou services des forces armées doivent avoir le droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 219 et 223.] Le comité prie le gouvernement d’amender sa législation afin de garantir que les travailleurs de la société de chaussures Bata, Pakistan Security printing Corporation; Pakistan Security papers Ltd.; l’Hôtel des monnaies du Pakistan; les établissements ou institutions subvenant aux traitements, aux soins des personnes malades, infirmes, indigentes et mentalement handicapées; les institutions créées pour le paiement des prestations de vieillesse des employés ou pour le bien-être des travailleurs; les membres de la garde et de la surveillance, le personnel des services de sécurité et d’incendie d’une raffinerie ou d’établissements engagés dans la production, la transmission ou la distribution de gaz naturel ou de gaz de pétrole liquéfiés ou de produits pétroliers ou le personnel de ports de mer ou d’aéroports; le chemin de fer, et l’administration de l’Etat jouissent du droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier et de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard. Le comité rappelle en outre que les services fournis par les institutions susmentionnées, à l’exception des institutions subvenant aux traitements, aux soins des personnes malades, infirmes, indigentes et mentalement handicapées, ne peuvent être considérés comme essentiels.
- 942. En ce qui concerne la violation alléguée du droit des organisations de travailleurs de constituer des fédérations et des confédérations et de s’y affilier, et plus particulièrement de l’exigence de s’affilier à une fédération nationale enregistrée auprès de la Commission nationale des relations de travail dans un délai de deux mois après avoir été agréé agent de négociation collective ou après la promulgation de la IRO, le comité rappelle que la question de savoir s’il est nécessaire ou non de créer une fédération et de s’y affilier est une question sur laquelle il appartient aux seuls travailleurs et à leurs organisations de se prononcer. De plus, le fait que l’article 2 de la convention no 87 dispose que les travailleurs doivent avoir le droit de constituer les organisations de leur choix ainsi que celui de s’y affilier implique pour les organisations elles-mêmes le droit de constituer les fédérations de leur choix ainsi que celui de s’y affilier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 606 et 610.] Par conséquent, le comité prie le gouvernement de modifier sa législation afin de garantir le droit des organisations de travailleurs de déterminer elles-mêmes si elles souhaitent s’affilier à une fédération et, si c’est le cas, de jouir du droit de constituer la fédération de leur choix ainsi que celui de s’y affilier.
- 943. En ce qui concerne l’allégation portant sur l’intervention du gouvernement dans les affaires internes des syndicats et des fédérations de syndicats, le comité prend note de deux articles auxquels les organisations plaignantes ont fait référence: l’article 19(1) de la IRO, selon lequel les comptes d’un agent de négociation collective ayant au moins 5 000 adhérents sont sujets à une expertise comptable externe menée par un cabinet comptable désigné par l’agent comptable du registre, et l’article 18 qui exige l’enregistrement de chaque fédération auprès de la Commission nationale des relations de travail. Le comité note que le gouvernement n’a fourni aucune observation à ce sujet.
- 944. Concernant l’exigence de l’article 19, le comité rappelle que les mesures de contrôle administratif de la gestion, telles que les expertises comptables, ne devraient être appliquées que dans des cas exceptionnels, lorsque des circonstances graves le justifient (par exemple, en cas d’irrégularités présumées apparues dans les rapports financiers annuels ou à la suite de plaintes émanant de membres), et cela afin d’éviter toute discrimination entre les organisations et de parer au danger d’une intervention des autorités qui risquerait d’entraver l’exercice du droit qu’ont les syndicats d’organiser librement leur gestion, de porter préjudice aux syndicats par une publicité qui pourrait se révéler injustifiée et de divulguer des informations qui pourraient avoir un caractère confidentiel. Le contrôle exercé par les autorités publiques sur les finances syndicales ne devrait pas aller au-delà de l’obligation de soumettre des rapports périodiques. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 443 et 444.] Par conséquent, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’abroger cet article de la IRO et de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- 945. Concernant l’exigence d’enregistrement de chaque fédération auprès de la Commission nationale des relations de travail, le comité considère que, lorsque l’enregistrement de fédérations se limite à une formalité où les conditions ne sont pas telles qu’elles nuisent aux garanties figurant dans la convention no 87, une telle exigence ne constitue pas une infraction à la convention. Dans le cas présent, le comité note que la IRO dispose que le greffier procédera à l’enregistrement d’une organisation si elle remplit les conditions formelles telles que stipulées dans la IRO. Dans le cas où la demande d’enregistrement aurait des lacunes, la IRO prévoit la procédure pour rectifier tout vice de forme. Un recours au tribunal du travail est également prévu en cas de refus d’enregistrement. A cet égard, l’enregistrement obligatoire prévu par la IRO est en lui-même compatible avec la convention. Cependant, le comité note que l’article 18 exige au moins dix syndicats, avec au moins un syndicat par province, pour constituer une fédération ou une confédération au niveau national. Le comité rappelle qu’une législation qui prévoit un nombre minimum trop élevé de syndicats pour constituer un organisme de degré supérieur est en contradiction avec les dispositions de l’article 5 de la convention no 87 et avec les principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 611.] Le comité considère l’exigence minimale de dix syndicats avec au moins un par province pour la création d’une fédération nationale comme trop élevée et, par conséquent, prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour l’abaisser.
- 946. Concernant les allégations de restrictions au droit de grève, le comité note que les organisations plaignantes soulignent que la nouvelle législation impose des délais plus longs avant d’appeler à la grève: quinze jours pour une négociation bilatérale avec un employeur et, si un accord n’est pas intervenu, quinze jours pour une procédure de conciliation. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur le point de savoir s’il y a un délai additionnel pour le préavis de grève et, si tel est le cas, d’en indiquer la durée.
- 947. Concernant l’article 65(5) de la IRO, qui prévoit la possibilité d’interdire à un dirigeant syndical de prétendre à des fonctions syndicales pour le mandat suivant, contrairement à l’allégation des organisations plaignantes faisant état d’une période illimitée, pour avoir commis une pratique du travail déloyale définie de façon extensive par la IRO, le comité considère qu’une telle peine va à l’encontre du droit des travailleurs d’élire leurs représentants librement, étant donné qu’une pratique du travail déloyale à laquelle l’article 65 de la IRO fait référence englobe une large gamme de conduites qui ne rendraient pas nécessairement les personnes reconnues coupables aux termes de cet article, inaptes à occuper un poste de confiance, tel que des fonctions de dirigeant syndical. Par conséquent, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’abroger cet article et de le tenir informé à cet égard.
- 948. Sur la question de la protection contre les actes de discrimination antisyndicale, le comité note l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle bien que l’article 46(5) de la IRO accorde le pouvoir au tribunal du travail d’accorder une indemnité aux travailleurs qui ont été licenciés à tort, il n’accorde pas au tribunal le pouvoir d’ordonner la réintégration du travailleur et que la nouvelle loi restreint le droit des travailleurs de chercher des mesures provisoires auprès de la Commission nationale des relations de travail contre tout «licenciement, renvoi ou déplacement d’un emploi ou transfert» fondé sur leur engagement syndical, puisque l’article 49(4)(e) stipule que ces mesures peuvent uniquement être accordées au cours d’un conflit du travail. Le comité regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune information à cet égard.
- 949. Le comité observe que l’article 46(5) stipule que, dans le cas où un licenciement aurait été reconnu injustifié, le tribunal du travail «peut accorder une indemnité […] en lieu et place de la réintégration du travailleur» et l’article 48(7) prévoit l’appel devant la Haute Cour de la décision du tribunal du travail «ordonnant la réintégration du travailleur ou le versement d’une indemnité». Par conséquent, le comité conclut que la législation prévoit la possibilité de réintégrer les travailleurs dans leur emploi.
- 950. Quant à l’incapacité de la commission d’accorder des mesures provisoires en cas de licenciement des travailleurs engagés dans des activités syndicales, le comité considère que, tant que la protection contre les actes de discrimination antisyndicale est effectivement assurée, les méthodes adoptées pour garantir celles-ci aux travailleurs peuvent varier d’un Etat à l’autre. Une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier, l’absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés, équivalent à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 737 et 749.] En l’absence d’indication des organisations plaignantes et du gouvernement concernant la durée habituelle de la procédure devant la commission, le comité souligne que les cas concernant la discrimination antisyndicale doivent être examinés rapidement, afin que les remèdes nécessaires puissent être réellement efficaces.
- 951. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle des mesures de réintégration ou de compensation peuvent uniquement être accordées au cours d’un conflit du travail, le comité demande au gouvernement de modifier sa législation afin de permettre aux travailleurs d’exercer des voies de recours légales contre les actes de discrimination antisyndicale en tout temps et non pas uniquement lors d’un conflit du travail.
- 952. Le comité prend note de la déclaration des organisations plaignantes selon laquelle, en dépit de l’opposition de la majorité des organisations syndicales, l’ancienne organisation judiciaire du travail avec la lenteur de ses procès a été maintenue et que la Commission nationale des relations de travail a toujours agi contre les intérêts des travailleurs. Le comité note que les versions fournies par les deux parties dans ce domaine sont réciproquement contradictoires, puisque le gouvernement indique que le rôle de la Commission nationale des relations de travail a été révisé afin de rendre son organisation efficace avec comme objectif particulier de promouvoir un syndicalisme en bonne santé dans le pays et de mettre en place une justice rapide, que les cours d’appel du travail ont été abolies comme l’avait recommandé la Conférence tripartite du travail du Pakistan et que les Hautes Cours deviennent des cours d’appel pour les jugements prononcés par les tribunaux du travail.
- 953. Concernant les allégations selon lesquelles les procédures juridiques portant sur les questions du travail sont excessivement longues, le comité rappelle l’importance qu’il attache à ce que de telles procédures se terminent promptement puisqu’une justice en retard est un déni de justice. De plus, le comité tient à souligner l’intérêt d’une consultation des organisations de travailleurs lors de la préparation et de la mise en œuvre d’une législation touchant leurs intérêts, de même que l’importance de promouvoir le dialogue et les consultations sur les questions d’intérêt commun entre les autorités publiques et les organisations de travailleurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 926-929.] Le comité prie le gouvernement d’engager des consultations complètes avec les partenaires sociaux sur l’éventuelle modification de la IRO afin de résoudre cette question à la satisfaction de toutes les parties intéressées. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- 954. En ce qui concerne l’allégation de violation du droit de la négociation collective, le comité note qu’il existe deux séries d’allégations: 1) aucune candidature pour la désignation d’un nouvel agent de négociation collective pour le même établissement ne peut être faite pendant une période de trois ans, dès qu’un syndicat enregistré a été agréé agent de négociation collective (art. 20(11) de la IRO), cette situation oblige l’agent de négociation collective à signer un accord collectif pour trois ans; et 2) la période pendant laquelle des accords collectifs sont en vigueur, dans le cas où cette période n’a pas reçu l’accord des parties, a été prolongée par la nouvelle législation à deux ans (art. 60). En outre, le comité prend note que le gouvernement n’a fourni aucune observation à ce sujet.
- 955. Concernant la première série d’allégations, le comité considère que, s’il y a un changement dans la force relative des syndicats postulant à la faculté de représenter de façon exclusive les travailleurs aux fins de négociation collective, il est souhaitable qu’il existe une possibilité de révision des éléments de fait sur la base desquels cette faculté est accordée. En l’absence d’une telle possibilité, une majorité des travailleurs intéressés pourrait être représentée par un syndicat qui, pendant un laps de temps indûment prolongé, pourrait être empêché d’organiser son administration et ses activités dans le but de promouvoir pleinement les intérêts de ses membres et de les défendre. En outre, lorsque le syndicat le plus représentatif, jouissant des droits exclusifs de négociation, ayant conclu un accord, a perdu sa majorité et qu’un autre syndicat est entre-temps devenu majoritaire et demande l’annulation de cet accord, il devrait être possible de faire les démarches appropriées auprès de l’ employeur au sujet de la reconnaissance de ce syndicat, indépendamment de l’accord. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 836 et 825.] Le comité prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de modifier la IRO en conséquence et de le tenir informé à cet égard.
- 956. En ce qui concerne la période durant laquelle les accords collectifs sont en vigueur, le comité considère qu’une disposition réglementaire prévoyant qu’un accord collectif devrait s’appliquer pendant deux ans lorsqu’il n’y pas eu d’accord entre les parties pour une autre période ne constitue pas une violation du droit de négociation collective.
- 957. Le comité porte à l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations les aspects législatifs de ce cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 958. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Rappelant l’importance qu’il convient d’attacher à ce que des consultations franches et complètes aient lieu sur toute question ou tout projet de dispositions législatives ayant une incidence sur les droits syndicaux, le comité veut croire que les futures consultations avec les partenaires sociaux portant sur la législation ayant une incidence sur les droits syndicaux seront menées à la satisfaction de toutes les parties intéressées.
- b) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que tous les travailleurs de la société de chaussures Bata, Pakistan Security printing Corporation; Pakistan Security papers Ltd.; l’Hôtel des monnaies du Pakistan; les établissements ou institutions subvenant aux traitements, aux soins des personnes malades, infirmes, indigentes et mentalement handicapées; les institutions créées pour le paiement des prestations de vieillesse des employés ou pour le bien-être des travailleurs; les membres de la garde et de la surveillance, le personnel des services de sécurité et d’incendie d’une raffinerie ou d’établissements engagés dans la production, la transmission ou la distribution de gaz naturel ou de gaz de pétrole liquéfiés ou de produits pétroliers ou le personnel de ports de mer ou d’aéroports; le chemin de fer, et l’administration de l’Etat jouissent du droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier.
- c) Le comité prie le gouvernement de modifier sa législation afin de garantir aux organisations de travailleurs le droit de déterminer elles-mêmes si elles souhaitent s’affilier à une fédération et, si c’est le cas, de jouir du droit de constituer des fédérations de leur choix et de s’y affilier.
- d) Rappelant que les mesures de contrôle administratif sur les finances syndicales, telles que les expertises comptables, ne devraient être appliquées que dans des cas exceptionnels, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’abroger l’article 19(1) de la IRO.
- e) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’abaisser le minimum requis de dix syndicats, avec un minimum de un par province, pour la création d’une fédération nationale, que le comité considère comme trop élevé.
- f) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur le point de savoir s’il y a un délai additionnel précédant le préavis de grève et si, tel est le cas, d’en indiquer la durée.
- g) Considérant que l’interdiction faite à un dirigeant syndical de prendre part aux fonctions syndicales pendant le mandat suivant pour avoir commis une pratique déloyale du travail, qui englobe une large gamme de conduites qui ne rendraient pas nécessairement les personnes reconnues coupables, inaptes à occuper un poste de confiance, tel que des fonctions dirigeantes, va à l’encontre du droit des travailleurs d’élire leurs représentants librement, le comité prie le gouvernement d’abroger l’article 65(5) de la IRO.
- h) Le comité prie le gouvernement d’engager des consultations complètes avec les partenaires sociaux sur l’éventuelle modification de la IRO afin de résoudre la question relative à l’organisation judiciaire du travail à la satisfaction de toutes les parties intéressées.
- i) Considérant que, s’il y a un changement dans la force relative des syndicats postulant à la faculté de représenter de façon exclusive les travailleurs aux fins de négociation collective, il est souhaitable qu’il existe une possibilité de révision des éléments de fait sur la base desquels cette faculté est accordée, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de modifier la IRO en conséquence.
- j) Le comité demande au gouvernement de modifier sa législation afin de permettre aux travailleurs d’exercer des voies de recours légales contre les actes de discrimination antisyndicale en tout temps et non pas uniquement lors d’un conflit du travail.
- k) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises ou envisagées dans les domaines mentionnés ci-dessus.
- l) Le comité porte à l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations les aspects législatifs de ce cas.