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- 385. La plainte figure dans des communications de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datées des 27 mars, 2 juin, 19 août 2002 et 10 janvier 2003. La Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie (FIOM) s’est associée à la plainte et a formulé des allégations additionnelles dans une communication datée du 3 avril 2002.
- 386. Le gouvernement a présenté une réponse à certaines des allégations dans une communication datée du 26 septembre 2002.
- 387. La Chine n’a ratifié ni la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du plaignant
A. Allégations du plaignant
- 388. Dans sa communication datée du 27 mars 2002, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a officiellement porté plainte contre la République populaire de Chine pour violations des principes de la liberté syndicale, sur la base des faits exposés en détail ci-après et dans des documents annexés, dont deux lettres adressées au président Jiang Zemin les 15 et 27 mars 2002.
- 389. Les deux lettres en question concernent des mesures répressives, notamment menaces, intimidation, intervention des forces de sécurité, passages à tabac, détentions, arrestations et autres mauvais traitements auxquels ont été soumis des dirigeants, des représentants élus et des membres d’organisations de travailleurs indépendantes dans les provinces de Heilongjiang, Liaoning et Sichuan. Tous les événements qui y sont décrits se sont produits au cours de mars 2002.
- 390. La toute première préoccupation de la CISL dans ce contexte est la situation personnelle de M. Yao Fuxin, âgé de 56 ans, dirigeant de l’organisation de travailleurs indépendante à l’usine d’alliages ferreux (FAF) à Liaoyang, qui a été arrêté le 17 mars 2002. La CISL ajoute qu’il a été sévèrement maltraité par des agents de la sécurité publique après avoir été détenu ou, pire, qu’il a peut-être été effectivement tué pendant sa détention officielle.
- 391. L’arrestation de M. Yao Fuxin a eu lieu quelques jours seulement après que plus de 10 000 travailleurs licenciés, pour la plupart de la FAF, eurent organisé une manifestation de masse à Liaoyang, exigeant qu’une solution soit trouvée aux problèmes économiques et sociaux auxquels ils se heurtaient, que des mesures légales soient prises contre les dirigeants corrompus de l’usine et que le service de sécurité publique s’abstienne d’arrêter l’un quelconque des représentants des travailleurs librement élus.
- 392. Les autorités locales ont réagi en recourant à l’intimidation et aux menaces habituelles et finalement, à la force brutale. Le 11 mars, les agents du Bureau de la sécurité publique (BSP) ont averti plusieurs organisateurs qu’ils participaient à des activités illégales. La CISL rejette fermement et catégoriquement cette accusation car les travailleurs ne faisaient qu’exercer pacifiquement leurs droits légitimes, garantis par les conventions de l’OIT nos 87 et 98.
- 393. Le matin du 12 mars, les travailleurs ont marché sur le siège du gouvernement municipal de Liaoyang, exigeant une réunion avec les responsables locaux, qui a finalement été accordée plus tard dans la journée. M. Pang Qingxiang, âgé de 58 ans, et 12 autres représentants des travailleurs ont rencontré le Secrétaire général adjoint du Comité du parti communiste chinois (PCC) de Liaoyang, les maires adjoints, le Secrétaire général du gouvernement et de la Commission législative, le Président de la Cour de Liaoyang, le procureur général et le chef du BSP local. Les travailleurs ont reçu l’assurance qu’il n’y aurait pas d’arrestations.
- 394. Cinq jours plus tard, le BSP a arrêté M. Yao Fuxin et a lancé une vaste opération de sécurité pour arrêter douze autres représentants des travailleurs indépendants. Le lendemain, le 18 mars, plus de 30 000 travailleurs provenant d’une vingtaine d’entreprises publiques ont marché sur les bureaux de la mairie et du BSP, exigeant la libération de M. Yao Fuxin, mais la police a nié qu’il ait été arrêté.
- 395. Cependant, la répression du mouvement des travailleurs indépendants par les autorités n’a pas pris fin avec l’arrestation de M. Yao Fuxin. Les 18, 19 et 20 mars, des dizaines de milliers de travailleurs de Liaoyang, en provenance de diverses usines, se sont rassemblés devant les bureaux de la mairie, exigeant la libération de M. Yao Fuxin. Le 20 mars, comme plus de 2 000 travailleurs de la FAF s’étaient de nouveau rassemblés devant la mairie pour exiger sa libération, un autre représentant des travailleurs, nommé Gu Baoshu, a pénétré dans le siège du bureau de la sécurité pour négocier, mais il a été immédiatement arrêté. Un travailleur témoin de cette arrestation a informé les travailleurs à l’extérieur, lesquels sont alors entrés en force dans le bureau et ont libéré Gu.
- 396. Entre-temps, les autorités municipales ont déployé un important contingent de policiers armés pour essayer de mettre fin à la manifestation des travailleurs. Vers la fin de la matinée, les travailleurs ont décidé de rentrer chez eux, mais, pour protéger leurs représentants élus, plus de 40 travailleurs âgés ont fait cercle autour d’eux. Non loin de l’Hôtel de Ville, une centaine de policiers ont attaqué et battu les travailleurs âgés. La police a brisé le cercle protecteur et arrêté trois des représentants. Beaucoup de travailleurs âgés ont été blessés dans cette action de la police, mais on ne connaît pas encore exactement leur nombre, leur identité et leur état de santé actuel.
- 397. Les trois représentants des travailleurs qui ont été arrêtés au cours de l’action policière le 20 mars (outre Yao Fuxin, arrêté le 17 mars) sont les suivants: Pang Qingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming. Le lendemain matin, environ un millier de travailleurs de la FAF se sont à nouveau rassemblés devant les bureaux de la mairie. Ils ont exigé la libération des quatre représentants des travailleurs arrêtés. Au cours de cette action de protestation, Guo Suxiang (56 ans), femme du dirigeant arrêté Pang Qingxiang, a aussi été arrêtée par la police (elle a été libérée le lendemain). Un autre travailleur de l’usine de fibres de Liaoyang a essayé d’intervenir en s’écriant «cette arrestation est injustifiée!», à la suite de quoi la police l’a aussi arrêté et l’a emmené. On ne connaît toujours pas son nom, mais il demeure en détention.
- 398. Le 21 mars, le BSP du district municipal de Bal Ta a adressé un avis de détention aux familles des quatre représentants des travailleurs pour «manifestation illégale». Ils sont détenus à la prison de la ville de Tieling. Enfin, la femme de Yao Fuxin, qui avait reçu la visite du directeur de district du BSP à son domicile, a été informée par ce dernier que son mari «était dans un état très grave à l’hôpital à la suite d’une crise cardiaque» et que «le BSP avait déjà envoyé 10 000 yuan à l’hôpital pour les soins médicaux».
- 399. Vérification faite auprès de sa famille, il a été déterminé que M. Yao Fuxin était en parfaite santé au moment de son arrestation et qu’il n’avait jamais eu de problèmes cardiaques auparavant. La CISL se demande donc si l’état de santé de Yao Fuxin était critique à la suite de coups, de tortures ou de mauvais traitements subis pendant qu’il était gardé par les agents de sécurité de Liaoyang ou, pire encore, si éventuellement il n’avait pas été tué par ces agents ou par le personnel placé sous leur autorité directe. La Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie, dans sa communication datée du 3 avril 2002, a aussi exprimé ses préoccupations au sujet de la santé de Yao Fuxin et du sort des autres représentants des travailleurs détenus.
- 400. Le plaignant fait aussi référence à une manifestation avec «sit-in» au siège du Bureau de l’administration pétrolière de Petrochina (BAP) à Daqing, le 24 mars ou aux alentours de cette date, à l’occasion de laquelle 500 travailleurs ont été menacés par près de 1 000 policiers et éléments paramilitaires, certains ayant revêtu leur équipement antiémeute, et à une grève qui a commencé le 13 mars 2002 à l’usine de textiles de Guangyuan dans la province de Sichuan, par laquelle les travailleurs exigeaient que la direction de l’usine négocie les conditions des licenciements. Plusieurs grévistes ont été frappés par la police à l’endroit du piquet à l’extérieur de l’usine et une douzaine environ ont été détenus le 18 mars ou à une date proche.
- 401. S’agissant de la protestation organisée par les travailleurs à la Compagnie pétrolière de Daqing, le plaignant rappelle la situation de 50 000 travailleurs au gisement pétrolier de Daqing, dans la province de Heilongjiang, qui menaient une action collective depuis le 1er mars 2002 pour protester contre la rupture unilatérale de leurs contrats en matière de licenciement par leur employeur.
- 402. Trois mille travailleurs du gisement pétrolier de Daqing se sont rassemblés devant le BAP de Daqing le 1er mars pour protester contre la suppression, par la compagnie, de la prime de chauffage s’élevant à 3 000 RMB par an et contre l’augmentation arbitraire de la somme que chaque travailleur est tenu de verser pour le fonds de sécurité sociale, qui est passée de 2 600 yuan en 2000 à 4 600 yuan cette année. Les travailleurs concernés ont établi la Commission syndicale provisoire des travailleurs licenciés du BAP de Daqing et ont élu des représentants. Des manifestations de solidarité ont été organisées par les travailleurs aux gisements pétroliers de Xingjiang et de Shengli, de même qu’à ceux de Liahe, dans la province de Liaoning.
- 403. Dans sa communication datée du 2 juin 2002, le plaignant présente des informations supplémentaires concernant l’évolution de plusieurs des cas susmentionnés ainsi qu’un nouveau cas à Sichuan.
- Faits nouveaux à Liaoyang (province de Liaoning)
- 404. Pour ce qui est des quatre représentants des travailleurs arrêtés à Liaoyang en mars 2002 (Yao Fuxin, Pang Qingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming), le plaignant ajoute qu’ils ont été accusés le 30 mars d’avoir organisé des «manifestations illégales», une accusation qui peut entraîner une peine d’emprisonnement de cinq ans.
- 405. Le premier de ceux qui ont été arrêtés, Yao Fuxin, est dans un état très grave. Le 11 avril, la femme de Yao Fuxin, Guo Xiujing, a été autorisée à voir son mari, détenu à la prison de Tieling (à 120 km de Liaoyang), pour la première fois depuis son arrestation par la police. Guo a dit qu’il avait perdu la sensibilité de la partie droite du corps, que sa main droite tremblait et que sa jambe droite était faible. On pense qu’il a eu une attaque cardiaque provoquée par un début de maladie cardiaque qui a suivi le traitement brutal que lui a fait subir la police. (Yao Fuxin n’avait auparavant jamais eu de maladie cardiaque ou autre maladie.) Bien qu’il ait été brièvement hospitalisé en mars, il a été ramené à la prison de Tieling où son état a depuis empiré. Malgré cela, Yao Fuxin se voit refuser l’accès aux soins médicaux, y compris la réintégration à l’hôpital ou la libération conditionnelle pour raisons de santé.
- 406. Le plaignant indique que, depuis le dépôt initial de sa plainte, beaucoup d’autres informations ont fait surface sur les événements qui ont entraîné les manifestations de mars 2002. En fait, les problèmes affectant la FAF et d’autres entreprises à Liaoyang et dans les environs avaient déjà commencé plusieurs années auparavant. Ces informations ainsi que des détails concernant les manifestations de mars 2002, qui n’étaient pas connus avant, ont été joints en annexe à la communication.
- 407. Le 11 avril ou vers cette date, des parents de Xiao Yunliang se sont employés à trouver un avocat pour assurer sa défense. Mais la police a rejeté une demande de visite formulée par ce dernier, disant que Xiao avait refusé de prendre un avocat.
- 408. Le 15 avril, les travailleurs de Liaoyang sont allés au bureau des plaintes de la mairie pour solliciter la libération des quatre détenus. Afin d’éviter d’autres arrestations, les travailleurs ont décidé de ne pas organiser d’autres manifestations de rue, envoyant au lieu de cela plusieurs représentants, dont Gu Baoshu (qui a été arrêté le lendemain) pour négocier avec les autorités. Néanmoins, la prudence des travailleurs et leur tentative de négociation ont échoué avec l’arrestation de Gu. Le 16 avril, deux policiers en civil ont frappé à sa porte. Puis, ils l’ont ouverte avec une clé, ont attaché Gu et l’ont frappé. Lorsque les travailleurs de l’usine ont appris la nouvelle, nombre d’entre eux se sont précipités vers l’immeuble où il habitait et se sont heurtés aux policiers qui l’avaient arrêté. Ces derniers, qui se trouvaient à l’extérieur, ont écarté de force les travailleurs qui faisaient bloc et ont emmené Gu dans une voiture de police.
- 409. Les travailleurs ont présenté sur place une demande de manifestation adressée au secrétaire en chef de la mairie, lequel est venu à l’usine pour apaiser les travailleurs. Cependant, il a immédiatement indiqué que la demande devrait comporter les noms des organisateurs, sous peine d’être dénuée de validité. Les travailleurs ont refusé d’inscrire le moindre nom sur la demande; en outre, ils ont déclaré que si Gu Baoshu n’était pas libéré et que l’autorisation de manifester n’était pas accordée, ils se rendraient collectivement à Beijing pour présenter une pétition ou bien ils bloqueraient la voie ferrée. Face à une telle pression des travailleurs, Gu Baoshu a été libéré la même nuit. Il avait été cruellement frappé par les agents durant sa détention. Gu a exigé que le BSP prenne en charge ses frais médicaux et fasse une enquête pour déterminer qui était responsable du passage à tabac. Les autorités ont répondu par de nouvelles menaces de détention.
- 410. Le 5 mai, vers minuit, les travailleurs ont affiché en secret des avis sur les murs des immeubles où logent les travailleurs, les appelant à présenter une pétition collective aux autorités les 7 et 8 mai en faveur de la libération des détenus. Le lendemain matin, les avis ont été enlevés par la police. Ensuite, durant deux jours consécutifs, 400 à 500 travailleurs qui avaient entendu parler des avis affichés sur les murs se sont à nouveau rassemblés devant l’immeuble de la mairie et ont demandé la libération de tous les représentants des travailleurs arrêtés. Guo Xiujing et trois autres représentants des travailleurs ont aussi présenté une demande de manifestation, comportant les signatures de 20 travailleurs. Le BSP a rejeté la demande sans plus d’explications.
- 411. Le 9 mai, des centaines de travailleurs se sont une nouvelle fois rassemblés devant l’immeuble de la mairie et ont déployé une bannière portant l’inscription suivante: «nous exigeons que les pouvoirs publics libèrent les représentants des travailleurs arrêtés». Des fonctionnaires sont brusquement sortis de l’immeuble et ont essayé de s’emparer de la bannière, sans toutefois y parvenir. Le lendemain, les travailleurs ont exigé de rencontrer le maire. Deux fonctionnaires du bureau des plaintes de la mairie sont apparus et ont dit que si les travailleurs nommaient des représentants, ils organiseraient une entrevue avec le maire. Mais les travailleurs ont refusé car ils avaient peur que la seule intention des autorités soit d’identifier les leaders pour les arrêter. Finalement, le chef du bureau des plaintes est sorti et a accepté la pétition des travailleurs, promettant de la remettre immédiatement au maire. Cette lettre contenait cinq demandes:
- – que les autorités libèrent les représentants des travailleurs arrêtés; faute de quoi, qu’une action en justice soit engagée dès que possible, car les représentants des travailleurs ne doivent pas être indéfiniment maintenus en détention;
- – que les autorités municipales rendent public le rapport sur les faillites forcées et répondent aux exigences raisonnables des travailleurs dans un délai donné;
- – que la répression des responsables corrompus soit accentuée et qu’une déclaration claire soit faite aux travailleurs de la FAF au sujet de leurs revendications dans un proche avenir;
- – que les autorités punissent légalement les agents de police qui ont abusé de leur position officielle et ont frappé Gu Baoshu de sang-froid;
- – que, pour des raisons humanitaires, les autorités autorisent les travailleurs de la FAF à rendre visite, en groupes séparés et à des occasions distinctes, à leurs représentants détenus à la prison de Tieling (Pic de fer).
- Il était aussi indiqué dans la pétition que les travailleurs de la FAF adresseraient à Beijing une demande de manifestations collectives à moins que les autorités municipales ne satisfassent rapidement à ces exigences.
- 412. Le 15 mai, plusieurs centaines de travailleurs de la FAF se sont de nouveau rassemblés devant les bâtiments administratifs pour déployer des bannières et demander pacifiquement aux autorités de libérer les détenus. A dix heures exactement, plus de dix policiers en civil sont sortis de la cour de l’immeuble en chargeant, ont attaqué les travailleurs à coups de poing et de pied et se sont emparés des bannières. Des affrontements s’en sont suivis, les travailleurs protégeant les bannières. Durant ces affrontements, le fils d’un travailleur de la FAF à la retraite, dont la mère avait été frappée lors de l’assaut donné par la police, a exigé de savoir pourquoi ils avaient attaqué sa mère, avec pour résultat qu’il a été sévèrement frappé par la police et emmené. A la fin, le bureau des plaintes de la ville l’a fait libérer.
- 413. Dans un incident distinct, Wang Dawei, autre personne clé dans la lutte des travailleurs de la FAF, s’est rendu à Beijing pour porter plainte auprès de nombreux départements du gouvernement central, mais il s’est heurté à l’indifférence la plus complète. Après avoir appelé une fois la famille de Guo Xiujing, au début de son voyage, pour faire part de l’évolution de la situation concernant les plaintes, il a disparu. On ne sait toujours pas ce qu’il est devenu et le plaignant craint qu’il n’ait aussi été arrêté.
- Répression à Daqing (province de Heilongjiang)
- 414. Outre les informations communiquées dans sa plainte initiale, le plaignant ajoute que le déploiement de 800 policiers paramilitaires dans la ville de Daqing pour disperser les travailleurs qui protestaient a été suivi par une campagne d’intimidation au cours de laquelle des douzaines de travailleurs ont été détenus sur des périodes allant jusqu’à deux semaines et libérés à condition qu’ils ne participent plus aux manifestations. De plus, plusieurs représentants de la Commission syndicale provisoire des travailleurs licenciés du BAP, au statut indépendant, dans la ville de Daqing, ont été détenus le 11 mars durant des négociations avec des responsables. On ne sait pas ce que sont devenus ces syndicalistes indépendants, ainsi que 60 autres travailleurs ayant participé à des actions de protestation dans la ville de Daqing. Ni les pouvoirs publics, ni la Fédération des syndicats de Chine (FSC) n’ont répondu aux demandes de la CISL sur cette question. En mars, cependant, la Fédération provinciale des syndicats de Heilongjiang aurait, selon le journal Ming Pao qui la cite dans son édition du 28 mars, déclaré ce qui suit: «La FSC ne tolérera pas que les travailleurs s’organisent de cette façon.»
- 415. A la fin mars, au cours d’une des manifestations qui ont eu lieu sur la place de «l’Homme de fer» de Daqing, une femme d’une cinquantaine d’années, mariée à un travailleur de Daqing licencié, a été battue et arrêtée après qu’elle eût fait un discours. Il a été dit qu’elle faisait la grève de la faim dans un centre de détention. Le 27 mars, Li Yan, un travailleur à la retraite âgé de 60 ans, a aussi été arrêté. Au moment de la rédaction de ce rapport, on ne sait pas ce que sont devenues ces deux personnes.
- 416. Au cours de la période qui a suivi le dépôt de la plainte, d’autres informations ont fait surface concernant le contexte social à Daqing. Ainsi, en octobre 2001, plus de 300 travailleuses de l’usine de couvertures de Daqing qui avaient été licenciées ont organisé une pétition collective devant les bâtiments administratifs, demandant que les autorités, soit renégocient leurs offres globales en matière de licenciement pour se conformer à la politique officielle de la ville de Daqing, soit les réintègrent dans leurs emplois. Alors que les offres globales en la matière, dans la région, s’élevaient à 3 500 RMB par année de service, les travailleuses avaient reçu une somme forfaitaire de 10 000 RMB. Entre-temps, leur usine avait été vendue à un investisseur privé et avait repris la production avec de nouveaux travailleurs.
- 417. Le 15 octobre 2001, la police antiémeute a attaqué plusieurs centaines de travailleuses qui s’étaient rassemblées devant la mairie. Deux travailleurs et trois travailleuses ont été arrêtés et beaucoup d’autres ont été blessés, certains gravement. Lorsque des collègues ont manifesté le lendemain, exigeant la libération des prisonniers, on leur a dit que les détenus ne seraient libérés que si leurs collègues réglaient les frais de pension correspondant à la durée de leur détention.
- 418. Une autre manifestation le 23 octobre 2001 s’est soldée par l’arrestation de deux dirigeants supplémentaires. Entre-temps, la FSC a dit que le cas ne la concernait pas, tout en reconnaissant qu’elle n’avait pas participé à l’opération initiale de restructuration de l’usine, qui avait eu lieu deux années plus tôt, en violation des lois existantes. Quant aux autorités municipales, elles ont refusé de confirmer le nombre des personnes arrêtées mais ont déclaré que les travailleurs «avaient eu un comportement illégal en criant des slogans et en déployant des bannières». Elles ont également dit que les travailleurs avaient reçu une compensation appropriée au regard des lois en vigueur.
- Condamnation de défenseurs des droits des travailleurs
- dans le Sichuan
- 419. Le plaignant indique que Hu Mingjun et Wan Sen, deux militants de l’opposition démocratique qui défendaient les droits des travailleurs dans le Sichuan, ont été condamnés à de lourdes peines de prison. Hu Mingjun et Wang Sen, dans la province de Sichuan, sont des dirigeants du Parti démocratique chinois (PDC), qui n’est pas reconnu par les autorités. Hu vivait à Chengdu et Wang à Dayhou, lorsque, le 18 décembre 2000, environ 1 000 travailleurs de l’aciérie de Dazhou ont organisé une manifestation publique, car ils n’avaient pas été payés depuis un an. Hu et Wang avaient des contacts avec les manifestants.
- 420. Le PDC du Sichuan a publié une déclaration comportant trois demandes:
- – les travailleurs devraient être autorisés à organiser leurs propres syndicats conformément au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui avait été récemment signé par le gouvernement chinois (le plaignant rappelle toutefois que la Chine a ratifié le pacte ultérieurement, en février 2001, assorti d’une réserve formelle concernant l’article 8 a), à savoir la disposition qui garantit expressément la liberté syndicale);
- – que le gouvernement garantisse aux travailleurs au chômage le droit à des moyens d’existence en améliorant le système de sécurité sociale;
- – que le gouvernement résolve le problème fondamental de la corruption, qui avait provoqué les manifestations.
- 421. Wang a été arrêté le 30 avril 2001 à Dazhou; quant à Hu, il a été arrêté le 30 mai. Ils ont été accusés d’«incitation à la subversion du pouvoir de l’Etat», une accusation qui peut entraîner une sentence maximale de cinq ans d’emprisonnement. Plus d’un an après, le 30 mai 2002, ils ont été condamnés, dans le cadre d’un procès à huis clos, par le tribunal populaire intermédiaire de Dazhou, sous l’inculpation de subversion, qui est une accusation plus grave, fréquemment employée contre les militants syndicaux indépendants. Le chef d’inculpation a apparemment été modifié au cours du procès lui-même et, selon les sources du plaignant, c’est la preuve de la position dure adoptée vis-à-vis de ceux qui organisent les travailleurs après les protestations de masse à Liaoyang. Les «éléments de preuve» utilisés à leur procès consistent en la déclaration susmentionnée du PDC dans le Sichuan. Ils ont été accusés d’inciter, au nom de l’«organisation hostile» du PDC, les travailleurs de Dazhou à manifester et de les organiser à cette fin, perturbant ainsi la stabilité sociale.
- 422. Hu a été condamné à onze ans de réclusion, et il aurait déjà décidé de ne pas faire appel; Wang a été condamné à dix ans de réclusion. Des rapports antérieurs indiquent qu’un troisième individu, Zheng Yongliang, avait aussi été arrêté à l’occasion de cette affaire. On ne sait pas s’il a depuis été libéré ou s’il a été condamné dans le cadre du même procès.
- 423. Dans sa communication datée du 19 août 2002, la CISL ajoute qu’un militant syndical indépendant a été détenu en juin dernier dans la province de Shanxi pour avoir tenté d’établir une fédération pour les travailleurs à la retraite. Di Tiangui, âgé de 57 ans, ancien employé de l’Etat à l’usine de machines de Dazhong, a passé plus de deux mois entravé et menotté dans un centre de détention à Taiyuan, capitale de la province de Shanxi. Di a été détenu par la police le soir du 1er juin parce qu’il était soupçonné d’«établir une organisation illégale». Il aurait provoqué la colère des autorités en cosignant une déclaration, à une date antérieure cette année-là, appelant à établir une fédération nationale représentant 30 millions de travailleurs à la retraite anciennement employés dans des entreprises publiques.
- 424. M. Di et d’autres militants ont apparemment été poussés à entreprendre leur action après avoir constaté que les retraités ne touchaient qu’une faible retraite, voire aucune, et étaient privés des services sociaux de base comme les soins de santé. Ils ont décidé de tenter d’établir une fédération de travailleurs retraités à l’échelle nationale, après avoir vu que les pétitions adressées par la voie officielle n’avaient pas eu de suites. La police a officiellement arrêté Di le 15 juillet pour «incitation à la subversion du pouvoir de l’Etat». Ce chef d’inculpation peut entraîner de lourdes peines de prison – et c’est généralement ce qui se produit. En outre, ces arrestations et inculpations sont manifestement pratiquées par les autorités afin de dissuader les autres travailleurs qui pourraient être intéressés de joindre leurs efforts en faveur d’une activité syndicale indépendante. De fait, selon les rapports actuels, les autres militants syndicaux indépendants, intimidés par le traitement sévère appliqué à Di, sont entrés dans la clandestinité.
- 425. La nouvelle de la détention de M. Di a été confirmée auparavant, ce mois-ci, par un fonctionnaire de la police à Taiyuan, lequel a néanmoins nié que le prisonnier ait été maltraité, ce qui ne correspond pas du tout à ce que rapportent les membres de sa famille, qui s’inquiètent énormément que Di «ne puisse pas supporter l’épreuve physique». Ils soulignent qu’il souffre d’hypertension artérielle et de maladie vasculaire et que son état de santé s’est brusquement dégradé durant sa détention. Lorsqu’on lui a rendu visite en prison le 21 juin, il était paraît-il «amaigri» et «il avait des ulcères aux pieds, lesquels étaient si gonflés qu’il ne pouvait même pas mettre de chaussures, et il était entravé de telle manière qu’il ne pouvait pas se tenir debout».
- 426. Le plaignant souligne que la détention d’un syndicaliste indépendant ou d’un militant des droits des travailleurs est inadmissible au regard des principes de l’OIT. En outre, il se dit choqué par le traitement des prisonniers en Chine, en particulier de ceux qui sont détenus en raison de leur action en faveur des droits des travailleurs. De l’avis du plaignant, le traitement infligé à M. Di est brutal, douloureux et complètement inadapté, et en tant que tel, il s’apparente à la torture.
- 427. Enfin, dans sa communication datée du 10 janvier 2003, la CISL fait part de ses graves préoccupations au sujet du procès en attente de Yao Fuxin et de Pang Qingxiang sous le chef d’inculpation modifié de subversion, qui peut entraîner une peine d’emprisonnement à vie ou même une condamnation à mort.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 428. Dans sa communication datée du 26 septembre 2002, le gouvernement présente les informations ci-après.
- 429. Le gouvernement indique que, ces derniers mois, il a procédé à une enquête poussée sur les individus et les incidents visés, y compris des visites aux départements concernés tels que les ministères de la Sécurité publique, de la Sécurité d’Etat et des Affaires judiciaires, la CISL et les autorités locales.
- Usine de textiles, ville de Guangyuan, province de Sichuan
- 430. Au début de 2002, l’usine de textiles de la ville de Guangyuan dans la province de Sichuan a fait faillite. Mécontents de l’indemnité reçue après que l’entreprise eût vendu ses actifs fixes, certains des travailleurs se sont à plusieurs reprises rassemblés à l’intérieur et autour du site de l’usine, bloquant les principales voies de communication dans la ville et troublant l’ordre social normal à Guangyuan. A la fin, les questions de l’indemnisation et des versements en faveur des travailleurs à la suite de la faillite de l’entreprise ont été résolues grâce à la médiation d’un groupe tripartite chargé de procéder à une enquête, comprenant les autorités de la province de Sichuan et de la ville, le syndicat et l’entreprise. Vérification faite, aucun affrontement ne s’est produit pendant ce temps.
- Groupe des alliages ferreux SA, ville de Liaoyang,
- province de Liaoning
- 431. Le Groupe des alliages ferreux SA de la ville de Liaoyang, dans la province de Liaoning, une entreprise municipale, a subi des pertes sur plusieurs années successives depuis 1996. En octobre 2001, une proposition de mise en faillite a été acceptée après examen par le congrès des représentants du personnel du groupe. En novembre, la procédure de mise en faillite a été officiellement engagée.
- 432. Du 11 au 21 mars 2002, plus de 500 personnes du Groupe d’alliages ferreux de la ville de Liaoyang, y compris des membres du personnel employés à l’époque et des retraités, ont présenté un appel collectif aux autorités municipales, exigeant que les dirigeants de l’entreprise qui avaient fait preuve de corruption soient punis, que le niveau des versements forfaitaires et de l’indemnisation financière soit relevé, et que les versements en attente en matière de salaires et d’assurance sociale soient effectués. Pour répondre aux demandes des travailleurs, un groupe d’enquête a immédiatement été organisé par les autorités municipales, lequel a procédé à des enquêtes méticuleuses et approfondies sur les questions soulevées par les requérants. Les mesures suivantes ont été prises:
- 1) Punition des individus corrompus conformément à la loi. Les organes judiciaires ont procédé à une enquête sur les actes illégaux et criminels commis par des individus corrompus dans l’entreprise et les ont traités conformément à la loi: une personne a été condamnée; une procédure légale est engagée contre une personne; une personne est détenue en prison en tant que criminel; trois personnes sont en liberté provisoire en attendant d’être jugées; et des dossiers ont été constitués aux fins d’enquêter sur sept personnes.
- 2) Mobilisation multilatérale de fonds pour garantir les moyens de subsistance de base des travailleurs. L’entreprise a procédé à une allocation initiale de 30 millions de yuan pour les versements forfaitaires en faveur des travailleurs et se prépare à leur verser rétroactivement les salaires et les allocations de sécurité sociale en convertissant en liquide les actifs visés par la faillite. Les points clés du mécanisme d’apurement des comptes sont les suivants: un travailleur se trouvant à cinq ans de l’âge légal de la retraite, ou moins, pourra se voir appliquer la procédure de retraite anticipée, sa pension étant versée mensuellement par les organismes de la sécurité sociale; les travailleurs qui étaient employés avant l’introduction du système des contrats de travail recevront une somme forfaitaire équivalant à trois fois le salaire moyen versé l’année dernière aux travailleurs des entreprises implantées dans la ville considérée; les travailleurs qui ont été recrutés après l’introduction du système des contrats de travail recevront une indemnité financière forfaitaire.
- 3) Aide au réemploi des travailleurs licenciés. A la fin de mars, puis au commencement d’avril 2002, les départements municipaux de l’emploi ont tenu deux consultations de grande envergure sur l’emploi, avec pour thème l’organisation de salons consacrés à l’aide à l’emploi pour les travailleurs licenciés par le Groupe des alliages ferreux de la ville de Liaoyang. Il en est résulté la conclusion de contrats de travail préliminaires pour plus de 1 000 personnes à la fois au total, ce qui a résolu le problème de l’emploi pour certaines des personnes concernées.
- 433. A ce moment-là, un travailleur de l’usine de laminage de la ville de Liaoyang, Yao Fuxin, et trois travailleurs de la FAF de la ville de Liaoyang, Pang Qingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming, ont conjointement exécuté des activités de terrorisme et de sabotage planifiées, menaçant gravement la sécurité publique, troublant l’ordre public et portant atteinte aux biens publics. Comme ils avaient enfreint la loi, les autorités chargées de la sécurité publique les ont convoqués pour qu’ils soient jugés conformément à la loi, et ont appliqué des mesures coercitives. Compte tenu du fait que leur comportement était contraire aux dispositions pertinentes du droit pénal de la République populaire de Chine et de la loi de la République populaire de Chine régissant les réunions, défilés et manifestations, le 27 mars 2002, après accord du Procureur du peuple de la ville de Liaoyang, les autorités chargées de la sécurité publique de la ville ont arrêté Yao Fuxin et les autres personnes susmentionnées, conformément à la loi, sous l’inculpation d’organisation de réunions, manifestations et défilés illégaux. Actuellement, des dossiers sont en cours de constitution pour juger l’affaire.
- Gisements pétroliers de Daqing
- 434. Face à la vive concurrence sur les marchés pétroliers internationaux ces dernières années, la Compagnie pétrolière de Daqing a adopté une série de mesures de restructuration, y compris la réduction des effectifs pour accroître l’efficacité, en vue d’améliorer sa gestion et sa compétitivité. Dès 2000, une partie du personnel a volontairement mis fin aux contrats de travail conclus avec l’entreprise, la procédure étant engagée sur demande des personnes concernées, avec l’accord de l’entreprise et consignation de la décision. Tout au long de ce processus, l’entreprise non seulement a versé intégralement l’indemnité telle qu’elle avait été déterminée, mais a aussi versé une somme additionnelle importante, à savoir une allocation forfaitaire destinée à aider chaque individu, de façon à garantir les conditions de vie de base de ceux qui avaient mis fin à la relation de travail.
- 435. Au début de 2002, des milliers de personnes qui avaient mis fin aux relations de travail avec le Bureau de l’administration pétrolière de Daqing au moment du versement d’une indemnité ont changé d’avis et ont exigé d’être réemployées. Le 1er mars 2002, elles se sont rassemblées dans l’immeuble du Bureau de l’administration pétrolière de Daqing. Le 4 mars, une partie du groupe a stoppé des trains sur la ligne de Bingzhou. Puis, une partie du groupe a lancé une attaque contre l’immeuble du Bureau de l’administration pétrolière de Daqing et a endommagé des automobiles. Afin de maintenir l’ordre et de prévenir toute détérioration de la situation, la police a été envoyée pour faire son devoir.
- 436. Après cet incident, les autorités à tous les niveaux ont fait part de leurs vives préoccupations. Le gouvernement central a organisé un groupe d’enquête tripartite comprenant des représentants des ministères et commissions concernés, du syndicat et de l’entreprise, qui se sont rendus à Daqing pour enquêter sur place. Des discussions ont eu lieu avec la participation de représentants de ceux qui avaient mis fin à leurs contrats de travail au moment du versement d’une indemnité, des autorités de la province de Heilongjiang et de la ville de Daqing, du siège de la Compagnie chinoise des pétroles et du Bureau de l’administration pétrolière de Daqing, et ceux qui avaient mis fin à leurs contrats de travail ont fait part de leurs observations.
- 437. Après avoir demandé à toutes les parties de formuler des observations, le siège de la Compagnie chinoise des pétroles a publié des Suggestions préliminaires visant à améliorer la gestion pour ceux qui avaient mis fin à leurs contrats de travail au moment du versement d’une indemnité, demandant au Bureau de l’administration pétrolière de Daqing de s’atteler sérieusement au problème de ces individus, de s’efforcer davantage de résoudre le problème de leur maintien dans les régimes de sécurité sociale et de créer activement les conditions facilitant leur réemploi, en vue de conserver la dynamique des réformes globales et du développement durable de la compagnie. Il a également été demandé de porter toute l’attention voulue à la solution des difficultés réelles qu’ils rencontraient dans leur vie quotidienne.
- 438. Selon certaines informations, à l’heure actuelle, ceux qui avaient mis fin à leurs contrats de travail ont accepté les mesures susmentionnées. Durant la gestion de cet incident, il n’y a pas eu d’affrontements entre la police et les manifestants.
- 439. Le gouvernement ajoute, plus généralement, que la Chine est dans un processus de transition d’une économie planifiée à une économie socialiste de marché. Pour améliorer la gestion et la compétitivité, il est inévitable que les entreprises publiques choisissent de procéder à une restructuration économique et licencient une partie de leurs effectifs. Il ne fait pas de doute que les réformes vont dans le bon sens, et la Chine conservera fermement le cap de la restructuration et de l’ouverture au monde extérieur. La Chine étant le plus gros pays en développement du monde avec une population énorme, il serait difficile d’éviter que des conflits se produisent au cours de la restructuration économique. La Chine a la détermination et la capacité voulues pour résoudre ces problèmes par des réformes profondes tout en se développant au plan économique et social.
- 440. Le gouvernement chinois fait très attention à protéger les droits fondamentaux des travailleurs licenciés, des chômeurs, des retraités et des autres membres de la population à faibles revenus, et à leur donner des conditions de vie appropriées. Depuis 1998, le gouvernement chinois a adopté un système innovant de «triple sécurité», qui inclut un mécanisme destiné à garantir le minimum vital pour les travailleurs licenciés par les entreprises publiques, un système d’assurance chômage et un mécanisme visant à garantir un niveau de vie minimum pour les citadins. Entre-temps, des mesures ont été prises pour garantir le versement intégral en temps opportun des allocations aux travailleurs licenciés par les entreprises publiques et des pensions aux retraités.
- 441. La Chine s’est résolument employée à réformer le système de sécurité sociale. A la suite d’une décennie d’efforts, elle a établi un régime de sécurité sociale préliminaire indépendant des entreprises. En particulier ces dernières années, les régimes des pensions, de l’assurance maladie, de l’assurance chômage, de l’assurance contre les accidents du travail et de l’assurance maternité ont été améliorés, la collecte des primes a été renforcée et la couverture de la sécurité sociale a été augmentée. Grâce aux efforts qu’elle a déployés pour établir un système de sécurité sociale et promouvoir l’emploi, la Chine a offert un filet de sécurité de base en la matière aux personnes de tous horizons, protégeant efficacement le droit des citoyens à la vie et au développement (ce qui est la base des droits de l’homme) et le droit des citoyens à l’emploi (ce qui est la base du travail décent). Les résultats obtenus et l’expérience créée par la Chine constituent d’importantes contributions aux travaux sur les affaires sociales internationales et sont largement reconnus dans les milieux internationaux.
- 442. Le gouvernement affirme par ailleurs qu’il s’est toujours préoccupé des droits démocratiques de tous les citoyens et les a protégés, y compris le droit à la liberté syndicale. Il existe des dispositions explicites à cet effet dans la Constitution, le droit du travail et la loi sur les syndicats. En tant que Membre responsable de l’Organisation internationale du Travail, la Chine reconnaît et respecte tous les principes énoncés dans la Constitution de l’OIT, y compris le principe de la liberté syndicale, et a déployé des efforts incessants pour les réaliser.
- 443. Il faut toutefois souligner que les incidents qui se sont produits en 2002 dans certains endroits en Chine, ainsi qu’il est mentionné dans le cas no 2189, sont de simples conflits du travail résultant de l’ajustement des intérêts lors de la réduction des effectifs des entreprises, et ne sont aucunement liés à la liberté syndicale. Dans la ville de Liaoyang, Yao Fuxin et ses trois complices ont profité de certains travailleurs qui lançaient un appel aux autorités et ont à plusieurs reprises planifié des activités illégales pour troubler l’ordre public et mettre en danger la sécurité publique. Un tel comportement n’a rien à voir avec la liberté syndicale. Aucun gouvernement responsable d’un Etat régi par le droit ne serait resté le témoin passif de ces événements. Les allégations de la CISL diffèrent des faits et constituent une interprétation erronée de ces faits.
- 444. Le gouvernement conclut que les faits en cause en l’espèce sont déjà assez clairs, et qu’il ne devrait pas être nécessaire d’en débattre au Comité de la liberté syndicale. Néanmoins, dans le souci de promouvoir la coopération et de renforcer la compréhension, le gouvernement exprime son désir de maintenir le dialogue avec le comité.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 445. Le comité note que les allégations dans le présent cas se rapportent à l’emploi de mesures répressives, y compris menaces, intimidation, intervention des forces de sécurité, passages à tabac, détentions, arrestations et autres mauvais traitements infligés à des dirigeants, à des représentants élus et à des membres d’organisations de travailleurs indépendantes à l’usine d’alliages ferreux (FAF) dans la province de Liaoning et à la Compagnie pétrolière de Daqing dans la province de Heilongjiang, ainsi qu’à une intervention policière violente à l’occasion d’une manifestation de travailleurs à l’usine de textiles de Guangyuan et à la condamnation de défenseurs des droits des travailleurs dans la province de Sichuan. Enfin, le plaignant allègue la détention, l’arrestation et le mauvais traitement, dans la province de Shanxi, d’un militant syndical indépendant pour avoir essayé d’établir une fédération de travailleurs à la retraite.
- Usine d’alliages ferreux (FAF) à Liaoyang (province de Liaoning)
- 446. Le comité note avec préoccupation les allégations spécifiques concernant l’arrestation et la détention de Yao Fuxin, Pang Qingxiang, Xiao Yunliang, Wang Zhaoming, dirigeants et représentants de l’organisation de travailleurs indépendante à la FAF, sous l’inculpation de manifestation illégale, à la suite d’une manifestation de masse en mars 2002 visant à soutenir plus de 10 000 travailleurs licenciés. L’arrestation le 20 mars des trois derniers représentants aurait donné lieu à une intervention policière violente et brutale entraînant de nombreuses blessures pour beaucoup de manifestants. Le plaignant allègue par ailleurs que Gu Baoshu, représentant des travailleurs, et Guo Suxiang, femme du dirigeant arrêté Pang Qingxiang, ont été aussi brièvement arrêtés et détenus et qu’un travailleur contestataire non identifié de l’usine de fibres de Liaoyang demeure en détention. Outre les allégations concernant l’intervention policière violente durant la manifestation du 20 mars visant à faire libérer Yao Fuxin, d’autres allégations de violence policière et de passages à tabac ont été faites pour ce qui est de manifestations ultérieures le 15 mai.
- 447. Le comité note aussi avec une profonde de préoccupation les allégations selon lesquelles l’état de santé de Yao Fuxin est très grave ainsi que les soupçons de torture ou d’autres mauvais traitements qui planent sur sa détention. En particulier, le plaignant allègue que Yao Fuxin souffre d’une attaque causée par un commencement de maladie cardiaque, à la suite du traitement brutal que lui a fait subir la police. Après une brève hospitalisation en mars, il a été ramené au centre de détention de Tieling où, bien que son état se soit continuellement détérioré, il se serait vu refuser l’accès aux soins médicaux, y compris un retour à l’hôpital ou une libération conditionnelle pour raisons de santé.
- 448. Le plaignant a également formulé des allégations de mauvais traitements et de passages à tabac au sujet de la brève détention de Gu Baoshu. Il allègue par ailleurs que la police a rejeté une demande de visite présentée par l’avocat de Xiao Yunliang, déclarant que Xiao avait refusé l’assistance d’un avocat. Enfin, le comité note l’allégation selon laquelle Wang Dawei a disparu à la suite de ses interventions concernant le conflit à la FAF.
- 449. S’agissant des manifestations au Groupe des alliages ferreux, provoquées par les conséquences de la faillite de l’usine, le gouvernement indique qu’un groupe d’enquête a été immédiatement organisé pour examiner les revendications des travailleurs concernant la corruption dans l’entreprise et l’indemnisation financière en matière de salaires et de sécurité sociale. Il note d’autre part que le gouvernement fait état de mesures prises pour punir les individus corrompus, mobiliser des fonds pour garantir les besoins essentiels des travailleurs et aider au réemploi des travailleurs licenciés.
- 450. Plus généralement, le comité note les diverses explications fournies par le gouvernement concernant les conséquences du processus de transition d’une économie planifiée à une économie socialiste de marché et les nombreuses dispositions prises par le gouvernement pour résoudre les problèmes qui en découlent et protéger les droits fondamentaux des travailleurs. Le gouvernement indique qu’il s’est toujours préoccupé des droits démocratiques des citoyens, y compris le droit à la liberté syndicale, et qu’il les a toujours protégés, mais il ajoute que les incidents visés par la présente plainte ne sont que des conflits du travail résultant de l’ajustement des intérêts lors de la réduction des effectifs des entreprises et ne sont aucunement liés à la liberté syndicale.
- 451. Le gouvernement relie ce contexte général au cas particulier des travailleurs de la FAF, indiquant que Yao Fuxin, Pang Qingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming ont tiré profit de certains travailleurs qui lançaient un appel aux autorités et ont à plusieurs reprises planifié des activités de terrorisme et de sabotage, menaçant gravement la sécurité publique, troublant l’ordre public et endommageant les biens publics. Le gouvernement indique qu’ils ont été convoqués pour être jugés conformément à la loi sous l’inculpation d’organisation de réunions, manifestations et défilés illégaux, et que des mesures coercitives ont été appliquées par les autorités chargées de la sécurité publique. Le gouvernement conclut que les allégations de la CISL s’écartent des faits dont elles constituent une interprétation erronée.
- 452. Tout en prenant dûment note des explications fournies par le gouvernement au sujet des mesures prises pour répondre aux demandes des travailleurs et pour garantir les besoins fondamentaux, le comité note avec regret que très peu d’informations ont été communiquées en ce qui concerne la seule question dont il est saisi pour laquelle il est compétent, à savoir la question de la garantie du respect des principes fondamentaux de la liberté syndicale. Ce manque d’informations est d’autant plus regretté que les plaignants ont fourni des renseignements détaillés sur le rôle et les activités des quatre représentants des travailleurs de la FAF. Le comité prend note de l’indication générale du gouvernement selon laquelle ces représentants des travailleurs auraient planifié des activités illégales pour troubler l’ordre public et mettre en danger la sécurité publique, mais il observe que le gouvernement ne communique aucun détail quant à la nature illicite spécifique de leurs activités tout en admettant néanmoins que tout le contexte était celui d’un conflit du travail. A la lumière des informations fournies par le gouvernement, le comité lui demande de lever les charges concernant les actes de terrorisme, de sabotage et de subversion.
- 453. Dans ces conditions, le comité doit rappeler que la détention de dirigeants syndicaux pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques, en général, et des libertés syndicales en particulier. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 71.] D’autre part, notant que le gouvernement n’a communiqué aucune information en réponse aux allégations spécifiques d’intervention policière violente dans les manifestations des travailleurs, sinon une indication selon laquelle les responsables de la sécurité publique avaient appliqué des «mesures coercitives» à ceux qui auraient enfreint la loi, le comité rappelle que les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels. Les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l’ordre public est sérieusement menacé. L’intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 132.]
- 454. Compte tenu de ce qui précède, le comité demande au gouvernement d’établir une enquête impartiale et indépendante sur les allégations d’intervention policière violente à l’occasion des manifestations en relation avec la lutte des travailleurs à la FAF à Liaoyang le 20 mars et le 15 mai 2002. Il est demandé au gouvernement de fournir des informations détaillées au comité sur les résultats de cette enquête et d’indiquer les mesures prises pour indemniser les travailleurs blessés. Le comité demande d’autre part au gouvernement d’établir une enquête indépendante sur les allégations concernant la gravité de l’état de santé de Yao Fuxin et les soupçons de torture ou de mauvais traitements qui planent sur sa détention. Le comité demande également au gouvernement de l’informer des résultats de cette enquête et des éventuelles mesures prises au cas où il serait constaté que Yao Fuxin a été maltraité durant sa détention, y compris les mesures prises pour faire en sorte qu’il reçoive les soins médicaux nécessaires.
- 455. Quant aux brèves détentions de Gu Baoshu, représentant des travailleurs, et de Guo Suxiang, épouse du dirigeant arrêté Pang Qingxiang, le comité rappelle que l’arrestation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans l’exercice d’activités syndicales légitimes constitue une violation des principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 70.] Notant par ailleurs les allégations selon lesquelles Gu Baoshu a été passé à tabac durant sa brève détention, le comité demande au gouvernement d’établir une enquête indépendante sur ces allégations et d’informer le comité des résultats et des éventuelles mesures prises au cas où il serait constaté que Gu Baoshu a été maltraité durant sa détention. Enfin, il demande au gouvernement de fournir tous renseignements qu’il peut avoir sur ce qu’est devenu Wang Dawei.
- 456. S’agissant de l’arrestation et la détention de Yao Fuxin, Pang Qingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming, compte tenu de l’insuffisance de la réponse du gouvernement quant à la nature précise des activités ayant troublé l’ordre public et menacé la sécurité publique et du fait que l’inculpation initiale de manifestation illégale a été transformée en «subversion» neuf mois après l’incident et deux semaines avant le procès (un crime qui serait passible d’une peine d’emprisonnement à vie, voire de la peine de mort), le comité demande au gouvernement de fournir des informations spécifiques et détaillées sur les charges portées contre les quatre représentants des travailleurs. Entre-temps, le comité rappelle qu’il a considéré que la condamnation de syndicalistes à des peines de prison sévères pour des motifs de «perturbation de l’ordre public» pouvait permettre, vu le caractère général du chef d’inculpation, de réprimer des activités de nature syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 64.] Sans perdre de vue ces considérations, le comité demande au gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour libérer immédiatement les représentants des travailleurs de la FAF encore détenus et de s’assurer que les charges qui pèsent sur eux seront levées. Il demande au gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
- 457. S’agissant des allégations concernant le fait que l’avocat de Xiao Yunliang n’a pas accès à son client, le comité rappelle que les syndicalistes détenus doivent, à l’instar des autres personnes, bénéficier d’une procédure judiciaire régulière et avoir le droit à une bonne administration de la justice, à savoir notamment être informés des accusations qui pèsent contre eux, disposer du temps nécessaire à la préparation de leur défense, communiquer sans entrave avec le conseil de leur choix et être jugés sans retard par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 102.] Le comité demande au gouvernement de s’assurer que la bonne administration de la justice est garantie en ce qui concerne tous les représentants des travailleurs nommés dans la présente plainte.
- Siège du Bureau de l’administration pétrolière (BAP)
- de la Compagnie chinoise des pétroles,
- Daqing (province de Heilongjiang)
- 458. Le comité note les allégations concernant les menaces émanant de quelque 1 000 policiers et éléments paramilitaires vis-à-vis des travailleurs durant une manifestation avec occupation du siège du BAP de la Compagnie chinoise des pétroles en mars 2002. Selon le plaignant, des travailleurs participant à cette manifestation ont été détenus sur une période allant jusqu’à deux semaines et libérés à condition qu’ils ne participent plus aux manifestations. Le comité note avec une inquiétude particulière les allégations selon lesquelles plusieurs représentants de la Commission syndicale provisoire des travailleurs licenciés du BAP, établie d’une manière indépendante, et 60 travailleurs ayant participé à des actions de protestation dans la ville de Daqing auraient été détenus le 11 mars, et l’on ne sait toujours pas ce qu’ils sont devenus. Le plaignant allègue aussi l’arrestation et la détention d’une femme de cinquante ans, non identifiée, et d’un travailleur retraité, Li Yan, dont on ne sait pas ce qu’ils sont devenus.
- 459. Le comité note les informations générales relatives au conflit aux gisements pétroliers de Daqing communiquées par le gouvernement et son explication selon laquelle les travailleurs avaient changé d’avis quant à l’indemnité financière offerte au cours d’un processus de restructuration de la compagnie et avaient exigé d’être réemployés. Selon le gouvernement, en mars 2002, ces travailleurs ont arrêté des trains, lancé un assaut contre le bâtiment du BAP et endommagé des voitures. Tout en indiquant que, pour maintenir un ordre approprié et empêcher que la situation ne se détériore, la police a été envoyée pour exercer son devoir, le gouvernement ajoute qu’aucun heurt ne s’est produit entre la police et les manifestants. Ultérieurement, un groupe d’enquête tripartite composé, selon le gouvernement, des représentants des ministères et commissions concernés, du syndicat et de l’entreprise a été établi et diverses mesures ont été proposées en ce qui concerne l’assurance de sécurité sociale et les conditions de réemploi. Le gouvernement ajoute qu’il y a des informations indiquant que ceux qui avaient mis fin à leurs contrats de travail ont accepté ces mesures.
- 460. Tout en notant les efforts déployés par le gouvernement pour résoudre ce conflit au moyen d’un groupe d’enquête tripartite, le comité note avec regret que, hormis une déclaration d’ordre général selon laquelle il n’y a pas eu de heurts entre la police et les manifestants, le gouvernement n’a pas répondu aux allégations concernant la détention, le 11 mars, de plusieurs représentants de la Commission syndicale provisoire des travailleurs retraités du BAP, établie d’une manière indépendante, et de quelque 60 autres travailleurs ayant participé aux actions de protestation dans la ville de Daqing, ainsi que d’une femme de 50 ans non identifiée et d’un travailleur retraité, Li Yan, dont on ne sait toujours pas, selon le plaignant, ce qu’ils sont devenus. Rappelant que la détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques, en général, et des libertés syndicales en particulier [voir Recueil, op. cit., paragr. 71], le comité demande au gouvernement de répondre concrètement à ces allégations et de fournir toutes les informations dont il dispose sur les arrestations qui peuvent avoir été faites en relation avec les actions de protestation à Daqing, sur le point de savoir si des individus sont encore détenus et sur les éventuelles charges qui peuvent avoir été portées contre eux.
- Intervention de la police lors d’une grève à l’usine de textiles
- de Guangyuan, la condamnation de défenseurs des travailleurs dans la province de Sichuan et la détention d’un militant
- syndical indépendant dans la province de Shangxi
- 461. Dans la province de Sichuan, les allégations mentionnent l’intervention de la police à l’occasion d’une grève à l’usine de textiles de Guangyuan, aussi en mars 2002, lors de laquelle plusieurs grévistes ont été passés à tabac par la police sur le lieu du piquet à l’extérieur de l’usine et environ une douzaine ont été détenus. Les plaignants allèguent aussi que deux militants de l’opposition démocratique, Hu Mingjun et Wang Sen (et éventuellement un troisième militant mentionné dans des rapports antérieurs, Zheng Yongliang) ont été condamnés à de lourdes peines de prison pour avoir agi au nom des travailleurs qui s’organisaient.
- 462. Le comité note que, selon le gouvernement, les travailleurs de l’usine de textiles de Guangyuan, mécontents de l’indemnité qu’ils avaient reçue lorsque l’usine a fait faillite, s’étaient rassemblés à plusieurs reprises dans l’enceinte de l’usine et à l’extérieur, bloquant les grandes voies de communication dans la ville et troublant l’ordre social normal à Guangyuan. Selon le gouvernement, les questions relatives à l’indemnisation ont été résolues par voie de médiation par un groupe d’enquête tripartite.
- 463. Tout en prenant note de l’indication d’ordre général donnée par le gouvernement selon laquelle les travailleurs avaient troublé l’ordre social normal dans la ville, le comité doit rappeler l’importance qu’il attache au principe mentionné plus haut selon lequel l’intervention des forces de l’ordre doit être dûment proportionnée au danger pour l’ordre public que les autorités s’efforcent de contrôler et les gouvernements devraient prendre des mesures pour faire en sorte que les autorités compétentes reçoivent des instructions adéquates de façon à éliminer le danger qu’implique le recours à une violence excessive lorsqu’elles contrôlent des manifestations qui pourraient entraîner des troubles de l’ordre public. Compte tenu des nombreuses allégations formulées dans la présente plainte concernant l’usage excessif de la force par la police à l’occasion de divers conflits se déroulant dans différentes parties du pays, le comité demande au gouvernement d’envisager d’établir des instructions pertinentes à l’intention des forces de l’ordre visant à éliminer le danger qu’implique le recours à la violence excessive lorsqu’on contrôle des manifestations.
- 464. Enfin, le comité note que le gouvernement n’a pas répondu aux allégations concernant les deux militants de l’opposition démocratique, Hu Mingjun et Wang Sen (et éventuellement Zheng Yongliang) qui auraient été condamnés à de lourdes peines de prison pour avoir agi au nom des travailleurs qui s’organisaient, ni aux allégations selon lesquelles un militant syndical indépendant, Di Tiangui, ancien employé de l’Etat à l’usine de machines de Dazhong, a été détenu le 1er juin 2002 dans la province de Shangxi pour avoir essayé d’établir une fédération pour les travailleurs à la retraite et a été inculpé d’«incitation à la subversion du pouvoir de l’Etat». Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées à cet égard et, en particulier, en ce qui concerne les préoccupations soulevées par l’état de santé de Di Tiangui et les allégations de mauvais traitements.
- * * *
- 465. Sur un plan plus général, et en tenant pleinement compte du contexte de transition décrit par le gouvernement et de sa détermination à réaliser simultanément le développement de l’économie comme du volet social, le comité considère que, précisément dans ce contexte, la seule solution durable au conflit social apparemment croissant que connaît le pays passe par le respect intégral du droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix en garantissant la possibilité de créer, dans un climat de pleine sécurité, des organisations indépendantes de celles qui existent déjà et de tout parti politique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 273.] Tout en notant la déclaration du gouvernement selon laquelle la liberté syndicale est garantie par les dispositions explicites de la Constitution, du droit du travail et de la loi sur les syndicats, le comité doit faire référence aux conclusions auxquelles il est parvenu antérieurement au sujet de certains obstacles législatifs importants à la pleine garantie de la liberté syndicale. En particulier, lors de l’examen du cas no 2031 [voir 321e rapport, paragr. 165], le comité a rappelé que, lorsqu’il avait examiné deux plaintes précédentes présentées contre le gouvernement de la Chine [voir 286e rapport (cas no 1652) et 310e rapport (cas no 1930)], il avait conclu que les obligations prévues aux articles 5, 8 et 9 de la Loi sur les syndicats empêchaient la création d’organisations syndicales, indépendantes des autorités publiques et du parti au pouvoir, qui auraient pour mission de défendre et de promouvoir les intérêts de leurs mandants et non de renforcer le système politique et économique du pays. Le comité avait ajouté que les articles 4, 11 et 13 résultaient de l’imposition d’un monopole syndical et que l’obligation faite aux organisations de base de rester sous le contrôle d’organisations syndicales faîtières et d’accepter que leurs statuts soient élaborés par le Congès national des membres syndicaux constituait une entrave importante au droit des syndicats d’élaborer leurs propres statuts, d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. Par conséquent, le comité avait conclu que de nombreuses dispositions de la Loi sur les syndicats étaient contraires aux principes fondamentaux de la liberté syndicale et avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les dispositions en question soient modifiées.
- 466. En conclusion, le comité est fortement convaincu que seuls le développement d’organisations libres et indépendantes et la négociation avec l’ensemble des composantes du dialogue social peuvent permettre au gouvernement d’affronter les problèmes économiques et sociaux et de les résoudre au mieux des intérêts des travailleurs et de la nation. De fait, un développement économique et social équilibré requiert l’existence d’organisations fortes et indépendantes qui puissent participer à ce processus. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 24 et 25.] Dans ce contexte, le comité demande une nouvelle fois au gouvernement d’examiner la possibilité d’accueillir une mission de contacts directs dans le pays, en vue de promouvoir une pleine mise en œuvre de la liberté syndicale. Le comité espère que le gouvernement accueillera favorablement cette suggestion, formulée dans un esprit constructif, dans le but de l’aider à trouver les solutions appropriées aux problèmes existants.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 467. Compte tenu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement d’instituer une enquête impartiale et indépendante sur les allégations d’intervention violente de la police vis-à-vis des manifestations liées à la lutte des travailleurs à l’usine d’alliages ferreux de Liaoyang le 20 mars et le 15 mai 2002. Le gouvernement est prié de communiquer au comité des informations détaillées sur les résultats de cette enquête et d’indiquer les mesures prises pour indemniser les éventuels travailleurs blessés.
- b) Le comité demande, d’autre part, au gouvernement d’instituer une enquête indépendante sur les allégations concernant la gravité de l’état de santé de Yao Fuxin et les soupçons de torture ou de mauvais traitements entourant sa détention. Le gouvernement est prié d’informer le comité des résultats de cette enquête et de toute mesure prise au cas où il serait constaté que Yao Fuxin a été maltraité pendant sa détention, y compris les mesures prises pour faire en sorte qu’il reçoive les soins médicaux qui seraient nécessaires.
- c) Le comité demande au gouvernement d’instituer une enquête indépendante sur les allégations selon lesquelles Gu Baoshu a été passé à tabac durant sa brève détention et d’informer le comité des résultats de cette enquête et de toute mesure prise au cas où il serait constaté qu’il a été maltraité. Il demande aussi au gouvernement de fournir toutes les informations qu’il peut avoir sur ce qu’est devenu Wang Dawei.
- d) Etant donné les indications du gouvernement que les événements survenus au groupe des alliages ferreux se situent dans un contexte de conflit du travail, le comité demande au gouvernement de lever toutes les charges relatives à des actes de terrorisme, sabotage et subversion.
- e) Le comité demande aussi au gouvernement de fournir des informations concrètes et détaillées sur les charges portées contre Yao Fuxin, Pang Qingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming. Entre-temps, il demande au gouvernement de prendre les dispositions nécessaires aux fins de la libération immédiate des éventuels représentants des travailleurs de la FAF encore détenus et de s’assurer que les charges portées contre eux sont levées. Le gouvernement est prié de tenir le comité informé à cet égard.
- f) Le comité demande au gouvernement de s’assurer qu’une procédure régulière est garantie pour tous les représentants des travailleurs mentionnés dans la présente plainte.
- g) Le comité demande au gouvernement de répondre concrètement aux allégations selon lesquelles les représentants de la Commission syndicale provisoire des travailleurs retraités du BAP et quelque 60 autres travailleurs ayant participé à des actions de protestation dans la ville de Daqing ainsi qu’une femme âgée de 50 ans non identifiée et un travailleur à la retraite, Li Yan, ont été détenus le 11 mars. Il demande par ailleurs au gouvernement de fournir toutes les informations dont il dispose sur les arrestations qui ont pu être faites en relation avec les actions de protestation à Daqing, sur le point de savoir si des individus sont encore détenus et sur les charges qui ont pu être retenues contre eux.
- h) Compte tenu des nombreuses allégations figurant dans la présente plainte concernant l’usage excessif de la force par la police dans divers conflits qui se sont produits dans différentes parties du pays, le comité demande au gouvernement d’envisager d’établir des instructions pertinentes à l’intention des forces de l’ordre visant à éliminer le danger qu’implique le recours à une violence excessive lorsqu’on contrôle des manifestations.
- i) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur les deux militants de l’opposition démocratique, Hu Mingjun et Wang Sen (et éventuellement Zheng Yongliang), qui auraient été condamnés à de lourdes peines de prison pour avoir agi au nom des travailleurs qui s’organisaient et sur les allégations selon lesquelles un militant syndical indépendant, Di Tiangui, a été détenu le 1er juin 2002 dans la province de Shanxi pour avoir essayé d’établir une fédération pour les travailleurs à la retraite. Le gouvernement est prié, en particulier, de fournir des informations sur l’état de santé de Di Tiangui et les allégations selon lesquelles il aurait été maltraité durant sa détention.
- j) Le comité demande une nouvelle fois au gouvernement d’examiner la possibilité d’accueillir une mission de contacts directs dans le pays en vue de promouvoir une pleine mise en œuvre de la liberté syndicale. Le comité espère que le gouvernement accueillera favorablement cette suggestion, formulée dans un esprit constructif, dans le but de l’aider à trouver les solutions appropriées aux problèmes existants.