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Interim Report - REPORT_NO329, November 2002

CASE_NUMBER 2174 (Uruguay) - COMPLAINT_DATE: 21-JAN-02 - Closed

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  1. 779. L’Association des employés du CASMU (AFCASMU) a présenté cette plainte par une communication du 21 janvier 2002. L’AFCASMU a envoyé de nouvelles allégations dans une communication datée du 11 juin 2002. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date du 22 mai 2002.
  2. 780. L’Uruguay a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 781. Dans sa communication du 21 janvier 2002, l’Association des employés du CASMU (Centre d’assistance du Syndicat du personnel médical de l’Uruguay) – AFCASMU fait état de graves incidents survenus au sein de la mutuelle CASMU par suite d’une grève décidée en assemblée générale le 10 janvier 2002, dont la réalisation a entraîné une répression antisyndicale manifeste.
  2. 782. L’AFCASMU explique que, depuis plus de trois ans, le CASMU verse (de façon échelonnée) le salaire de ses employés avec un retard allant jusqu’à trois mois et que, dernièrement, les salaires au titre des congés payés n’ont pas été versés; la situation a empiré au cours des derniers mois de l’année 2001. Face à cet état de choses, les travailleurs réunis en assemblée, le 10 janvier 2002, ont décidé, pour pallier cette situation, de prendre différentes mesures, dont certaines de nature corrective, en vue d’améliorer le fonctionnement du système de santé. Il a notamment été décidé «que le 14 janvier tous les salaires devraient être payés, faute de quoi le 15 janvier le personnel de la salle d’opération et celui du centre d’équipement de la clinique 2 ne pénétreraient pas dans les locaux, tout comme l’ensemble du comité directeur de l’AFCASMU, conseillé et appuyé par le personnel de base de la clinique et par des collègues d’autres services soutenant cette action. Par ailleurs, faute de versement de tous les salaires le 11 du mois suivant, une grève de 24 heures aurait lieu dans tous les blocs opératoires et centres d’équipement.» Cette décision a été prise à la majorité et communiquée le 11 janvier aux autorités de la clinique, selon les modalités prescrites. Il convient de préciser que, lorsque des mesures sont prises qui touchent à tout domaine relevant de l’assistance médicale, un personnel de garde est prévu pour les salles et les cas d’urgence – ce fut également fait en cette occasion. Le 14 janvier, les salaires de novembre et décembre n’ayant pas été versés, il fut décidé de mettre en œuvre le 15 janvier, dans le bloc chirurgical et la salle d’équipement de la clinique 2, la mesure évoquée tout en assurant une assistance professionnelle 24 heures sur 24, comme en témoignent les présences enregistrées par l’association des employés. L’ensemble du personnel se trouvait dans le réfectoire de la clinique 2 au cas où il aurait été nécessaire de modifier les tours de garde. Ces derniers ont été coordonnés avec l’aide du responsable technique du bloc chirurgical. La directrice de la clinique était également présente et n’a constaté aucune irrégularité s’agissant des soins ou des cas d’urgence.
  3. 783. L’AFCASMU allègue que la direction technico-administrative du CASMU a décidé le jour même d’envoyer un avis de suspension du service sans salaire à 46 des 78 travailleurs ayant pris part à cette mesure et d’ouvrir une enquête à leur sujet. Il convient d’ajouter que cette décision a été avalisée par le comité directeur du CASMU, organe politique chargé de la gestion de l’institution, après qu’il eut rencontré des représentants de l’association des employés qui ont précisé les conditions dans lesquelles la mesure décidée par l’assemblée avait été mise en œuvre. L’AFCASMU a reçu le 16 janvier une télécopie lui notifiant la décision précitée.
  4. 784. L’AFCASMU ajoute que l’association s’est réunie en assemblée générale le 17 janvier et a décidé, entre autres, de présenter un recours en amparo demandant l’annulation de la suspension des 46 travailleurs et de la retenue de leurs salaires au motif de leur participation à une activité syndicale. Il a également été décidé de présenter une plainte auprès du ministère du Travail et de l’OIT (Comité de la liberté syndicale).
  5. 785. Dans une communication du 11 juin 2002, l’organisation plaignante allègue que, par suite d’une manifestation tenue hors du lieu de travail contre les mesures économiques adoptées par le gouvernement, les autorités de l’institution ont décidé d’entamer une procédure contre cinq travailleurs ayant participé à cette action (Mme Sadi et MM. Daniel Fernández, Julio César Ximens, Héctor Pereira et Cyro Simoes).

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 786. Dans sa communication en date du 22 mai 2002, le gouvernement déclare avoir consulté l’Inspection générale du travail ainsi que la Direction nationale du travail au sujet de la plainte en question et n’avoir trouvé aucune trace d’un conflit.
  2. 787. Le gouvernement ajoute que l’AFCASMU, à la suite d’une décision syndicale approuvée par son assemblée générale le jeudi 10 janvier 2002, a décidé que, si le CASMU n’avait pas payé les salaires du personnel le 14 janvier de ce même mois, une grève partielle et sectorielle aurait lieu dans le bloc chirurgical et le centre d’équipement de la clinique 2. Les salaires n’ayant pas été versés, une grève de 24 heures a eu lieu le 15 janvier 2002, au cours de laquelle un service de garde a été assuré par le personnel médical syndiqué.
  3. 788. Conformément à la décision du comité directeur, le CASMU a décidé le 16 janvier d’ouvrir une enquête (qui devait se terminer le 23 janvier) sur les travailleurs ayant participé à l’action syndicale, et de les suspendre avec retenue totale de leurs salaires et avantages sociaux pour la durée de l’enquête. De l’avis des travailleurs, la décision du 16 janvier enfreint les droits fondamentaux suivants: liberté syndicale et droit de grève (dans le cas présent, il s’agit d’un arrêt de travail sectoriel atypique).
  4. 789. Le 17 janvier, l’AFCASMU a décidé de présenter un recours en amparo demandant la nullité de la suspension des 46 travailleurs et de la retenue de leurs avoirs au motif d’une activité syndicale.
  5. 790. L’enquête s’est achevée le 21 janvier, la suspension des intéressés a été levée, ils ont été réintégrés à leur poste et sont donc retournés au travail.
  6. 791. Dans le cadre du recours en amparo, une audition a eu lieu en présence des représentants du syndicat; après avoir écouté les témoins et considéré que le CASMU avait réintégré les travailleurs à leur poste, le tribunal a statué qu’il «n’y a ni violation de droit ni dommage irréparable et qu’il est possible dans le cadre d’une procédure ordinaire d’obtenir la révision d’éventuelles sanctions disciplinaires imposées aux plaignants par la défenderesse». La demande d’amparo a donc été rejetée.
  7. 792. Par ailleurs, le ministère du Travail n’aura aucune objection de principe à l’exécution de l’action en amparo et attend les informations sur le résultat de l’enquête que remettront éventuellement les travailleurs.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 793. Le comité observe que l’organisation plaignante allègue en l’espèce que le centre d’assistance du Syndicat du personnel médical de l’Uruguay, le 16 janvier 2002, a suspendu sans salaire 46 travailleurs et ordonné une enquête à leur sujet au motif de leur participation à une action de lutte (syndicale) (en fait, le personnel avait refusé d’entrer dans la salle d’opération et dans le centre d’équipement le 15 janvier 2002; toutefois, des membres de l’association syndicale ont assuré les soins et les services d’urgence et le reste du personnel se trouvait dans le réfectoire au cas où il aurait été nécessaire de renforcer le personnel de garde). L’organisation plaignante explique que 78 travailleurs ont participé à cette action organisée pour protester contre le fait que, depuis plus de trois ans, le CASMU versait les salaires avec un retard allant jusqu’à trois mois et que ceux correspondant à la dernière période de congés payés n’avaient pas été versés.
  2. 794. Le comité prend note de la déclaration du gouvernement: il s’est agi d’un arrêt de travail partiel et sectoriel; les salaires, arriérés et autres prestations n’ont pas été versés et, lors de l’enquête demandée par l’organisme employeur, aucune prestation salariale n’a été effectuée. Le comité prend note qu’une fois achevée l’enquête accélérée il a été mis fin à la suspension et que les travailleurs visés par cette mesure ont réintégré leur poste habituel dès le 21 janvier 2002. Le gouvernement a fait parvenir une copie du jugement d’amparo du 28 janvier 2002, action rejetée «sans condamnation spécifique» eu égard à la nature du recours (il est recevable «lorsqu’il y a violation ou menace imminente de violation d’un droit ou d’une liberté qui entraîne ou entraînera un dommage ne pouvant être réparé suivant les voies judiciaires classiques»), au fait que les employés en question ont été réintégrés à leur poste et qu’il «existe une procédure ordinaire, grâce à laquelle les éventuelles sanctions disciplinaires prises par la défenderesse à l’endroit des plaignants pourraient être révisées».
  3. 795. Le comité a estimé que le droit de grève peut être restreint, voire interdit, dans les services essentiels au sens strict du terme (c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger dans l’ensemble ou dans une partie de la population la vie, la sécurité ou la santé des personnes) [Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1996, paragr. 526] et a jugé que le secteur hospitalier peut être considéré comme un service essentiel. [Recueil, op. cit., paragr. 544.] Le comité a considéré qu’il devrait être possible de maintenir des services minima en cas de grève dans les services essentiels au sens strict du terme. [Recueil, op. cit., paragr. 556.] Le comité observe qu’en Uruguay les grèves ne sont pas interdites dans le secteur hospitalier et qu’il y a eu maintien dans le cas présent de services minima.
  4. 796. Dans les circonstances de ce cas, le comité demande au gouvernement de lui faire savoir pourquoi le CASMU a suspendu sans salaire 46 travailleurs et ouvert une enquête à leur sujet. De même, étant donné que ces travailleurs ont été réintégrés à leur poste cinq jours après la grève partielle, le comité demande au gouvernement de lui faire savoir si les salaires retenus pendant les cinq jours qu’a duré l’enquête ont été versés et si ces travailleurs risquent encore d’être sanctionnés ou si, au contraire, la procédure disciplinaire est close. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
  5. 797. Enfin, le comité note avec préoccupation l’allégation relative à l’enquête ouverte sur cinq travailleurs du CASMU qui ont participé à une action de protestation organisée par le syndicat hors du lieu de travail en réaction aux mesures d’ordre économique adoptées par le gouvernement; il demande à ce dernier de lui communiquer sans délai ses observations à ce sujet et particulièrement de l’informer des résultats de l’enquête en question.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 798. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Tenant compte des circonstances de ce cas, le comité demande au gouvernement de lui faire savoir pourquoi le CASMU a suspendu sans salaire 46 travailleurs et ouvert une enquête à leur sujet. Par ailleurs, étant donné que ces travailleurs ont été réintégrés à leur poste cinq jours après la grève partielle, le comité demande au gouvernement de lui faire savoir si les salaires retenus au cours des cinq jours qu’a duré l’enquête ont été versés et si lesdits travailleurs risquent toujours d’être sanctionnés ou si, au contraire, la procédure disciplinaire est close. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
    • b) Le comité note avec préoccupation l’allégation relative à l’enquête ordonnée sur cinq travailleurs du CASMU au motif qu’ils ont participé à une action de protestation organisée par le syndicat hors du lieu du travail contre les mesures d’ordre économique adoptées par le gouvernement; il lui demande de communiquer sans délai ses observations à ce sujet, et en particulier de l’informer des résultats des enquêtes en question.
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