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Definitive Report - REPORT_NO310, June 1998

CASE_NUMBER 1946 (Chile) - COMPLAINT_DATE: 20-NOV-97 - Closed

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255. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication du Collège des professeurs du Chili A.G., datée du 20 novembre 1997. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 10 février 1998.

  1. 255. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication du Collège des professeurs du Chili A.G., datée du 20 novembre 1997. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 10 février 1998.
  2. 256. Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 257. Dans sa communication datée du 20 novembre 1997, le Collège des professeurs du Chili A.G. signale que depuis 1990, avec le retour de la démocratie au Chili, un processus s'est engagé en vue du recouvrement des droits que les membres de la fonction publique avaient perdus au cours de la période antérieure de régime autoritaire, principalement en matière d'augmentation des rémunérations, lesquelles ont subi une grave détérioration durant ladite période. De cette manière, et conformément aux engagements pris par le gouvernement de l'époque dans le cadre de son programme fondamental, il a été procédé à l'instauration d'une table ronde annuelle du secteur public, à laquelle ont participé, d'une part, les représentants du gouvernement et, d'autre part, les dirigeants des organisations du secteur public et de la CUT. Sur la base d'un dialogue franc et direct, la table ronde est parvenue à des accords qui, par la suite, ont été repris par des lois de la République. Ces accords avaient pour but de définir le réajustement général des rémunérations et autres avantages destinés aux membres de la fonction publique. A ce propos, il convient de signaler que ces accords, de même que les lois qui les institutionnalisaient ensuite, étaient adoptés pour une durée d'un an. L'organisation plaignante signale que de cette manière, au fil des ans, les précédents d'une négociation collective ont été créés. Et ce, même si cette dernière a bénéficié de facto d'une reconnaissance institutionnelle tant sur la forme que sur le fond, d'après des "règles du jeu" qui, en dépit des problèmes qui se posaient, ont été acceptées en définitive, et outre le fait que les hausses de salaires découlant de ces règles aient pu sembler insuffisantes.
  2. 258. L'organisation plaignante signale qu'en parallèle, et selon les intérêts spécifiques et particuliers que chaque organisation représente, différents accords sectoriels ont été conclus avec le gouvernement. Il s'agit d'accords indépendants, tant par l'esprit que par la lettre, conclus en sus des réajustements généraux auxquels ont participé la CUT et les autres syndicats de la fonction publique. Dans la plupart des cas, ces augmentations salariales par secteur ont été précédées par des actions de mobilisation. En 1997, le gouvernement a modifié, d'une façon unilatérale et absolument arbitraire, les "règles du jeu" qu'il avait lui-même acceptées au moment des accords précédents, en refusant de négocier et en déposant à l'Assemblée nationale le projet de loi sur le réajustement général, négligeant les procédures et les mécanismes de négociation jusqu'alors considérés comme reconnus et légitimés par les deux parties.
  3. 259. Plus précisément, l'organisation plaignante allègue que les organisations du secteur public et la CUT ont adressé au gouvernement, en date du 14 octobre 1997, un mémorandum comprenant les souhaits et les demandes des travailleurs, à débattre dans le cadre du processus de négociation correspondant à l'année 1997. En date du 17 octobre 1997, le gouvernement a convoqué, par l'intermédiaire des ministres des Finances, du Travail et de la Sécurité sociale et de l'Economie, une double réunion de travail pour le lundi 20 octobre suivant, de 10 heures à 13 heures puis à partir de 15 h 30, afin de "rapprocher les positions" et d'explorer les possibilités d'un accord de réajustement général et de primes dans le secteur public. Tout de suite, la déclaration suivante a été émise: "étant donné l'ordre du jour législatif chargé et le manque de temps disponible pour examiner ce projet de loi, il devient nécessaire de le déposer mardi prochain, pour que le réajustement général et les primes puissent entrer en vigueur dès le 1er décembre, responsabilité principale du gouvernement". L'organisation plaignante ajoute qu'il est invrai-semblable de la part du gouvernement de prétendre que celles-ci aboutissent, dans un délai n'excédant pas douze heures de négociations, à un accord d'aussi grande envergure. L'organisation plaignante indique que le mécanisme imposé par le gouvernement était inacceptable, entre autres pour la raison suivante: cela signifie l'obligation, non de conclure un accord, mais d'accepter ou de rejeter une proposition rigide des autorités, sujette à des délais de négociation qui, en aucun cas, ne permettraient la consultation des organisations de base, faisant ainsi l'impasse sur certains principes élémentaires de liberté et de démocratie syndicales. D'après l'organisation syndicale, le délai de douze heures fixé par le gouvernement pour conclure les négociations démontre clairement que ce dernier n'avait pas l'intention de négocier et que sa décision était prise d'avance, à savoir déposer le projet de réajustement général à l'Assemblée nationale sans l'accord des organisations syndicales du secteur public.
  4. 260. L'organisation plaignante allègue également le changement des règles de la négociation. L'organisation signale que, comme l'indique la réponse du gouvernement à son mémorandum, les paramètres déterminant le réajustement général étaient, jusqu'en 1996, l'inflation, ou hausse du coût de la vie, la productivité, et ce qu'on a appelé le "plus d'équité" (justice sociale redistributive minimale). Néanmoins, dans le présent cas, le paramètre de la productivité a été éliminé d'une façon unilatérale étant donné que, d'après les autorités, ce critère avait déjà fait l'objet d'une négociation dans le cadre des accords passés avec les organisations sectorielles. Selon l'organisation plaignante, cet argument est entièrement faux, tendancieux et mal intentionné. L'organisation plaignante cite, à titre d'exemple, la loi no 19 504 qui rend compte du dernier accord conclu entre le Collège des professeurs du Chili A.G. et le gouvernement. L'article 2 de ce texte de loi signale qu'il sera procédé à l'augmentation particulière des rémunérations pour l'année 1998 "indépendamment des réajustements généraux des rémunérations effectués pour l'ensemble du secteur public". De plus, l'article premier de ladite loi, relatif à la hausse des rémunérations pour l'année 1997, ne fait pas la moindre référence au réajustement effectué durant l'année en question pour le secteur public, pas plus qu'il n'indique que cette hausse ait été accordée à valoir sur le réajustement. L'organisation plaignante affirme que, par conséquent, c'est une loi récemment promulguée de la République du Chili qui vient démentir les autorités, en ce qui concerne le fait que la productivité a été prise en compte par l'accord dont la loi en question constitue un fidèle reflet: cette loi n'indique nulle part que ladite augmentation particulière des rémunérations du corps enseignant devait être imputée au réajustement général des rémunérations du secteur public, pour ce qui est du paramètre de la productivité. Plus encore, la loi exprime précisément le contraire, ce qu'indique avec la plus grande clarté l'usage du mot "indépendamment".
  5. 261. De même, l'organisation plaignante allègue l'existence de pratiques antisyndicales ayant attenté à l'exercice de la liberté syndicale. L'organisation plaignante signale que les négociations sectorielles concernant les membres de la fonction publique ont eu lieu, en général, dans le cadre d'une action de mobilisation, par l'invocation de l'exercice légitime du droit de grève et par d'autres mesures tendant à manifester les divergences existantes vis-à-vis du gouvernement, en dehors de toute idée étrangère à la défense des intérêts économiques et sociaux.
  6. 262. L'organisation plaignante signale que son attention a été retenue par la note confidentielle no 015 du 15 septembre 1997, souscrite par le sous-secrétaire d'Etat au Travail et adressée aux représentants régionaux du ministère du Travail et de la Sécurité sociale à l'occasion des négociations alors en cours avec l'Association nationale des employés des finances (ANEF), note dont voici le passage pertinent: "La directive de l'ANEF a annoncé un plan national de mobilisation pour exiger un réajustement général de 30 pour cent au motif de la "dette historique" et d'autres revendications; c'est pourquoi je souhaiterais un rapport hebdomadaire sur les actions, les instructions et les modalités d'application de ce plan de mobilisation au niveau régional." L'organisation plaignante indique que cette note confidentielle révèle non seulement un abus de pouvoir et un outrepassement des compétences accordées au sous-secrétaire d'Etat au Travail par l'ordonnance juridique interne, mais encore une ingérence illicite, illégitime et abusive dans les activités et dans le fonctionnement des organisations syndicales.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 263. Dans sa communication du 10 février 1998, le gouvernement déclare ce qui suit:
  2. 1) en date du 13 octobre 1997, le sous-secrétaire d'Etat au Travail a convié par écrit, au nom des ministres des Finances et du Travail, le président et les représentants de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) à une réunion avec lesdits ministres, pour participer au "processus de dialogue technique sur le travail afin de déterminer le réajustement général et les primes dans le secteur public". Cette réunion s'est déroulée le mardi 14 octobre 1997, à 12 heures, au cabinet du ministre du Travail et de la Sécurité sociale;
  3. 2) en date du 14 octobre 1997, 12 organisations de travailleurs du secteur public, sous la coordination de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), ont remis, lors de la réunion avec les ministres, un "Mémorandum du secteur public au gouvernement concernant le processus de négociation de l'année 1997", où figurent, en résumé, les revendications à caractère économique suivantes: i) réajustement général des rémunérations du secteur public de 14,1 pour cent, comprenant l'inflation prévue de 5,5 pour cent plus une réévaluation de 8,6 pour cent; ii) augmentation de 20 pour cent du revenu minimum des employés de la fonction publique; iii) octroi des 500 bourses d'études supérieures créées à l'intention des membres de la fonction publique; iv) création d'un fonds d'acquisition de logements; v) création d'un fonds d'études supérieures à l'intention des enfants des membres de la fonction publique, équivalant à 250 bourses complètes; vi) fixation de la prime de Noël à 40 000 pesos pour les personnes dont les revenus n'atteignent pas 250 000 pesos et à 25 000 pesos pour les personnes dont les revenus dépassent cette somme; vii) fixation de la prime pour les fêtes nationales à 30 000 et à 25 000 pesos, respectivement, pour les tranches de revenu définies selon le même critère de 250 000 pesos; viii) octroi d'un bon de scolarité à l'intention des employés suivant des études jusqu'au niveau supérieur, avec une limite d'âge de 24 ans; ix) octroi d'une allocation de bien-être de 55 000 pesos par travailleur; x) création d'un plan de retraite spécial;
  4. 3) au cours de la réunion constitutive du "dialogue technique sur le travail concernant le réajustement général et les primes dans le secteur public", tenue le mardi 14 octobre 1997, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a proposé aux dirigeants de la CUT et des organisations de la fonction publique de procéder selon le programme de travail suivant: a) phase initiale, comportant l'analyse technique de l'évolution des salaires au sein du secteur public, les compromis préalables, l'exposé des revendications des travailleurs, les nouveaux critères du gouvernement, et enfin le rapport technique de la délégation gouvernementale aux ministres des Finances et du Travail; b) séances de travail avec les ministres en vue de définir le réajustement général et les primes;
  5. 4) en date du 14 octobre 1997, le sous-secrétaire d'Etat au Travail a convié le président de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) à la première réunion de travail le mercredi 15 octobre, dans le but d'évaluer les compromis préalables (qualifications, plans de retraite, comités de sécurité au travail, crèches, etc.). En outre, le président de la CUT a été invité à participer à deux séances supplémentaires, la première consacrée à connaître en détail le mémorandum présenté aux ministres sur les revendications à caractère économique, la seconde centrée sur l'exposé du point de vue gouvernemental sur l'évolution des salaires au sein de la fonction publique et sur les nouveaux critères salariaux liés à la productivité sectorielle. La tenue de ces deux réunions a été fixée au jeudi 16 octobre et au vendredi 17 octobre 1997;
  6. 5) en date du 17 octobre 1997, au moyen d'une note, les ministres du Travail et de la Sécurité sociale, des Finances et de l'Economie donnent connaissance au président de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) de leur point de vue et de leurs propositions concernant le document intitulé "Mémorandum du secteur public au gouvernement concernant le processus de négociation de l'année 1997". Le document ministériel, intitulé "Propositions du gouvernement au vu du mémorandum de la Centrale unitaire des travailleurs au gouvernement, concernant le processus de détermination du réajustement des rémunérations et autres avantages pour l'année 1998", comprend des propositions à caractère économique pouvant être résumées comme suit: i) réajustement général, calculé sur la base de l'inflation anticipée (4,5 pour cent) et d'un supplément de 20 pour cent, ce qui donne en définitive une augmentation salariale de 5,4 pour cent; ii) proposition de ne procéder à aucune innovation en matière de revenus minima, étant donné que le nouveau système d'incitation au mérite donne lieu à un accroissement supplémentaire des rémunérations; iii) octroi de 500 bourses d'études supérieures en 1998; iv) impossibilité d'instituer des systèmes sociaux en matière de logement, la politique du gouvernement dans ce domaine étant fondée sur des critères d'équité; v) impossibilité d'instituer de nouveaux avantages en matière d'enseignement supérieur, les autorités estimant que leur politique dans ce domaine répond de manière satisfaisante aux demandes des citoyens; vi) octroi d'une prime de Noël de 19 500 pesos pour les employés touchant moins de 205 000 pesos et de 11 500 pesos pour ceux touchant un revenu plus élevé; vii) octroi d'une prime pour les fêtes nationales de 26 100 pesos et de 19 850 pesos, respectivement, pour les tranches de revenu définies selon le même critère de 205 000 pesos; viii) octroi d'un bon de scolarité de 28 200 pesos; ix) octroi d'une allocation de bien-être de 47 000 pesos par travailleur; x) proposition de maintenir les accords sectoriels déjà conclus. En raison du peu de temps disponible, les ministres ont invité les dirigeants syndicaux de la CUT et des organisations de travailleurs de la fonction publique, au moyen de la même note de réponse, à "une double séance de travail au ministère des Finances le lundi 20 octobre de 10 heures à 13 heures et, par la suite, à partir de 15 h 30, afin de rapprocher les positions et d'explorer les possibilités d'un accord sur le "réajustement général et les primes dans le secteur public". Etant donné l'ordre du jour législatif chargé et le manque de temps disponible pour l'examen de ce projet de loi, il devient nécessaire de le déposer mardi prochain, pour que le réajustement général et les primes puissent entrer en vigueur dès le 1er décembre, responsabilité principale du gouvernement." Les ministres ont ensuite invité les représentants syndicaux, s'ils sont disponibles, à poursuivre les travaux et pourparlers durant la fin de la semaine (samedi 18 et dimanche 19 octobre), ou le lundi 20, selon l'ordre du jour ci-dessus;
  7. 6) en date du 20 octobre 1997, la réunion des ministres du Travail et de la Sécurité sociale, des Finances et de l'Economie avec les dirigeants de la CUT et des organisations du secteur public s'est tenue pour déterminer le montant du réajustement général et des primes au sein du secteur public pour l'année 1998. Néanmoins, après plusieurs heures de pourparlers et d'échanges d'arguments, les représentants des travailleurs ont maintenu leur demande initiale d'un réajustement de 14,1 pour cent des rémunérations (8,6 pour cent de réévaluation plus 5,5 pour cent d'inflation enregistrée). Devant l'impossibilité d'un accord, étant donné la position inflexible des dirigeants syndicaux, et compte tenu du fait que le projet de loi devait être déposé d'urgence au Parlement, le Président de la République a déposé ledit projet pour son examen le 21 octobre 1997, son entrée en vigueur étant prévue pour le 1er décembre 1997;
  8. 7) en guise de récapitulation, le gouvernement rappelle avoir considéré comme entamé, dès le 14 octobre 1997, "le processus de dialogue technique sur le travail concernant le réajustement général et les primes" avec la Centrale unitaire des travailleurs et les organisations syndicales de travailleurs affiliés à cette dernière, dans le cadre de sa politique du travail et des salaires dans le secteur public, politique qui a pour objectif l'amélioration continue et parallèle des conditions de travail des employés dudit secteur et des services que la fonction publique apporte aux citoyens. Au cours dudit processus, les représentants du gouvernement ont effectué une série de rencontres avec les représentants des travailleurs et des milieux universitaires, rencontres qui ont permis d'analyser différents sujets, tels que l'évolution des salaires dans le secteur public, la décentralisation des relations de travail et la diligence de la fonction publique, ainsi que l'état d'avancement des accords conclus entre le gouvernement et la CUT en date du 16 novembre 1996, et celui de leur application. A l'issue de ces rencontres, un rapport technique consignant le résultat de celles-ci a été élaboré puis remis aux représentants des travailleurs;
  9. 8) au cours la période mentionnée, les représentants du gouvernement ont fait savoir qu'ils étaient disposés à travailler avec la diligence requise par les circonstances, attendu que, comme il a été signalé plus haut, l'ordre du jour législatif chargé et le peu de temps disponible pour examiner le projet de loi rendaient nécessaire d'élaborer celui-ci au plus vite, afin de permettre son entrée en vigueur le 1er décembre 1997. Malheureusement, ces arguments n'ont pas été entendus par les syndicats et, bien que le gouvernement ait annoncé sa disponibilité, la réunion de travail avec les ministres des Finances, du Travail et de l'Economie n'a pu avoir lieu qu'un jour avant le délai fixé pour conclure l'élaboration du projet. C'est pourquoi, du point de vue du gouvernement, tous les efforts nécessaires ont été effectués, durant le court laps de temps disponible, pour faire avancer effectivement le processus de dialogue. De plus, le gouvernement était entièrement disponible pour accomplir tous les efforts supplémentaires qui auraient été nécessaires pour déterminer, de manière concertée, le réajustement et les primes pour l'année 1998. En dépit de la volonté affichée par le gouvernement, tous ces efforts se sont révélés infructueux;
  10. 9) le gouvernement signale que le dialogue social ne s'arrête pas en première instance et qu'un désaccord partiel ne signifie pas son échec. Loin du gouvernement l'idée d'abandonner le dialogue en tant qu'instrument privilégié des rapports entre les autorités et les travailleurs, étant donné que le gouvernement est profondément convaincu de sa valeur. Cette conviction s'est manifestée par de multiples initiatives destinées à créer, à promouvoir et à renforcer le dialogue et la coopération entre employeurs et travailleurs, aussi bien dans le secteur privé qu'au sein de la fonction publique. En témoignent les initiatives destinées à faire progresser la ratification par le Parlement de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978;
  11. 10) le gouvernement considère sa politique salariale comme appropriée, car elle a permis de mettre en oeuvre des incitations salariales destinées aux fonctionnaires des services de santé et aux enseignants, ainsi que de créer des mécanismes salariaux de même nature en accord avec les fonctionnaires des municipalités et ceux de l'administration centrale de l'Etat. Dans ce contexte, le réajustement des rémunérations fixé pour 1998 a pour objet de compenser la hausse des prix estimée pour l'année en question et complète les augmentations de salaires prévues par les accords sectoriels. L'effet conjugué du réajustement général et des accords sectoriels permet d'affirmer que la hausse moyenne des salaires des membres de la fonction publique pour 1998 atteindra 11 pour cent en termes nominaux. Cette hausse est nettement supérieure à la hausse de 8 pour cent en termes nominaux des rémunérations du secteur privé en 1997. Le gouvernement signale qu'il a mis en pratique une politique du travail dans le secteur public, axée sur l'institutionnalisation des instances de dialogue en matière de travail et la création d'incitations salariales au mérite, afin de revaloriser la fonction publique, tout en améliorant la qualité des services rendus par les organismes de l'Etat aux citoyens, en particulier aux moins nantis d'entre eux;
  12. 11) en date du 10 novembre 1997, le Président de la République a promulgué le texte approuvé par le Parlement, texte publié au "Journal officiel" du 19 novembre 1997, sous la désignation de loi no 19 533, prévoyant le réa-justement des rémunérations des travailleurs de la fonction publique et l'octroi de primes et autres avantages pécuniaires, dispositions entrées en vigueur le 1er décembre 1997.
  13. 264. En ce qui concerne l'allégation relative à la prétendue ingérence illégale et illégitime du sous-secrétaire d'Etat au Travail dans les activités et le fonctionnement des organisations syndicales du secteur public, à travers la note confidentielle no 015 du 15 septembre 1997, le gouvernement déclare que la note en question comprenait des instructions destinées à divers administrateurs dépendant du sous-secrétariat au Travail, tels que les secrétaires régionaux du ministère, au nombre de 13 pour l'ensemble du pays. Le gouvernement informe que ces instructions avaient pour objet de demander des informations sur les demandes de réajustement des rémunérations que l'Association nationale des employés des finances (ANEF) aurait alors formulées, demandes qui, supposait-on, atteignaient 30 pour cent. Le gouvernement indique qu'en outre les administrateurs concernés ont reçu pour instruction de faire en sorte que les hausses de salaires accordées à la fonction publique depuis 1990 touchent également les régions, et de faire connaître la disponibilité totale du gouvernement pour aborder une nouvelle étape en matière de salaires, centrée sur les incitations et les primes au mérite, aussi bien à titre individuel que par équipes, destinées aux membres de la fonction publique. Enfin, le gouvernement affirme qu'il n'y a eu, par conséquent, aucune pratique antisyndicale ou ingérence à l'encontre des activités des organisations syndicales.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 265. Le comité observe que, dans le présent cas, l'organisation plaignante allègue certains manquements au processus de négociation collective dans le secteur public, attribuables aux autorités gouvernementales, ainsi qu'un changement des règles en matière de négociation, le gouvernement ne prenant pas en compte le critère de la productivité pour la hausse des salaires pour 1998, contrairement à ce qui était pratiqué depuis quelque temps. De plus, le comité observe que l'organisation plaignante allègue que les autorités gouvernementales se seraient livrées à des pratiques antisyndicales au moyen d'une note confidentielle adressée aux secrétaires régionaux du ministère du Travail.
  2. 266. En ce qui concerne l'allégation relative aux manquements au processus de négociation collective dans le secteur public, attribuables aux autorités gouvernementales, le comité prend note de ce que le gouvernement signale, dans sa réponse, les faits suivants: i) le 13 octobre 1997, le sous-secrétaire d'Etat au Travail a invité par écrit la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) à participer au processus de dialogue technique sur le travail afin de déterminer le réajustement général et les primes dans le secteur public; ii) le 14 octobre 1997, 12 organisations de travailleurs du secteur public, sous la coordination de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), ont remis aux autorités un mémorandum faisant état de leurs revendications à caractère économique; iii) le 17 octobre 1997, les autorités gouvernementales ont transmis par écrit au président de la CUT la proposition du gouvernement au vu du mémorandum de la CUT relatif au processus de détermination du réajustement des rémunérations et autres avantages pour l'année 1998; iv) le 20 octobre 1997, la réunion avec les dirigeants de la CUT et des organisations du secteur public s'est tenue mais, après plusieurs heures de pourparlers et d'échanges d'arguments, les représentants des travailleurs ont maintenu leur demande initiale en matière de réajustement des rémunérations; v) devant l'impossibilité d'un accord et compte tenu de ce que le projet de loi devait être déposé d'urgence au Parlement le 21 octobre en vue de son entrée en vigueur le 1er décembre, le Président de la République l'a déposé pour son examen.
  3. 267. A cet égard, le comité observe que, comme il ressort des allégations de l'organisation plaignante et de la réponse du gouvernement, un processus de négociation a eu lieu entre les organisations syndicales du secteur public et les autorités. Cependant, le comité observe que, dans le présent cas, la durée du processus de négociation collective en vue du réajustement des salaires dans le secteur public a été de cinq jours -- du 14 au 20 octobre --, durée qui s'est révélée, compte tenu des circonstances, insuffisante, et ce d'autant plus que la négociation proprement dite (c'est-à-dire une fois connues les propositions des organisations syndicales et les contre-propositions des autorités) s'est vue limitée à une journée (le 20 octobre). Dans ces conditions, le comité considère que les organisations syndicales du secteur public n'ont pu disposer d'un temps suffisant pour négocier les réajustements salariaux pour 1998, ce qui, dans le cas d'espèce, est contraire à l'esprit de la négociation collective. Le comité demande donc au gouvernement de prévoir, à l'avenir, la convocation des organisations syndicales du secteur public avec suffisamment d'avance, afin de procéder avec un laps de temps raisonnable à la négociation collective des conditions d'emploi des travailleurs de ce secteur. Et ce, notamment s'il faut tenir compte de la nécessité de respecter des délais serrés pour présenter les projets de lois au Parlement.
  4. 268. En ce qui concerne l'allégation relative au changement des règles de la négociation, le gouvernement n'ayant pas pris en considération le critère de la productivité dans la hausse des salaires pour 1998, contrairement à ce qui était pratiqué depuis quelque temps, le comité prend note de la déclaration suivante du gouvernement: 1) le réajustement des rémunérations pour 1998 a pour objet de compenser la hausse des prix estimée pour l'année en question et complète les augmentations de salaires convenues antérieurement; 2) l'effet conjugué du réajustement général et des accords sectoriels permet d'affirmer que la hausse moyenne des salaires des membres de la fonction publique en 1998 atteindra 11 pour cent en termes nominaux; 3) une politique du travail a été mise en pratique dans le secteur public, axée sur l'institutionnalisation des instances de dialogue en matière de travail et sur la création d'incitations salariales au mérite. A cet égard, tout en observant qu'une augmentation des salaires des travailleurs du secteur public a été prévue pour l'année 1998 et qu'une politique d'incitations salariales a été instituée, le comité désire souligner que la détermination des critères à prendre en compte par les parties pour fixer les salaires (hausse du coût de la vie, productivité, etc.) est matière à négociation entre celles-ci, et il ne revient pas au comité de se prononcer sur les critères à retenir en matière de réajustements salariaux. Au vu de ce qui précède, le comité ne poursuivra pas l'examen de cette allégation.
  5. 269. En ce qui concerne l'allégation relative au fait que les autorités gouvernementales se seraient livrées à des pratiques antisyndicales par le biais d'une note confidentielle adressée aux secrétaires régionaux du ministère du Travail (le texte de la note a été retranscrit dans les allégations de l'organisation plaignante), le comité prend note de ce que le gouvernement déclare que la note en question comprenait des instructions destinées à divers administrateurs dépendant du sous-secrétariat au Travail, demandait des informations sur les demandes de réajustement des rémunérations que l'Association nationale des employés des finances (ANEF) aurait alors formulées, et pressait les administrateurs concernés de faire en sorte que les hausses de salaires accordées à la fonction publique depuis 1990 s'appliquent également aux régions, de même que la politique relative à la nouvelle étape en matière de salaires. A ce sujet, le comité observe que le texte de la note confidentielle incriminée par l'organisation plaignante révèle, de la part des autorités gouvernementales, le souci de prendre connaissance des "actions, instructions et modalités d'application de ce plan de mobilisation au niveau régional". De l'avis du comité, la note en question pourrait participer du souci des autorités pour que les actions de mobilisation se déroulent conformément à la législation, par exemple pour que soient prises les mesures permettant d'organiser un service minimum dans l'éventualité d'une grève. En outre, le texte de ladite note ne fait pas ressortir l'intention d'effectuer une ingérence illicite dans les activités syndicales des organisations de travailleurs du secteur public, pas plus qu'il n'ordonne des mesures en ce sens.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 270. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
    • Considérant que les organisations syndicales du secteur public n'ont pu disposer d'un temps suffisant pour négocier les réajustements salariaux pour 1998, ce qui, dans le cas d'espèce, est contraire à l'esprit de la négociation collective, le comité demande au gouvernement de prévoir, à l'avenir, la convocation des organisations syndicales du secteur public avec suffisamment d'avance, afin de procéder avec un laps de temps raisonnable à la négociation collective des conditions d'emploi des travailleurs de ce secteur. Et ce, notamment s'il faut tenir compte de la nécessité de respecter des délais serrés pour présenter les projets de lois au Parlement.
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