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- 342. Dans des communications datées des 24 et 27 octobre 1994, l'Organisation internationale de l'énergie et des mines (OIEM) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement de l'Ukraine. Elle a fait parvenir des informations complémentaires à l'appui de sa plainte dans une communication du 30 novembre 1994.
- 343. Le gouvernement a transmis ses observations dans des communications en date des 30 janvier et 15 mars 1995.
- 344. L'Ukraine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. En revanche, l'Ukraine n'a pas ratifié la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 345. L'OIEM déclare que le Conseil républicain du syndicat des travailleurs de l'industrie charbonnière de l'Ukraine (RS PROUP), organisation qui lui est affiliée, est partie à une convention nationale avec les Charbonnages de l'Ukraine qui fixe entre autres les tarifications du travail et garanties sociales (ci-après désignée l'Entente sur les tarifications et garanties sociales). Le premier Vice-premier ministre, M. Constantin Massik, a contresigné cette Entente le 12 février 1992.
- 346. L'OIEM précise que l'Entente sur les tarifications et garanties sociales a été successivement amendée les 10 septembre 1992, 19 juillet, 22 octobre et 14 décembre 1993. Le gouvernement est responsable, conjointement avec les Charbonnages de l'Ukraine, du respect et de l'exécution des obligations qui y sont prévues.
- 347. L'OIEM allègue que, depuis la signature de l'Entente sur les tarifications et garanties sociales, les Charbonnages de l'Ukraine et le gouvernement ont omis ou refusé de remplir de nombreuses obligations qui y sont prévues, notamment pour ce qui est du versement des salaires, du paiement des prestations dues pour maladie professionnelle ou accident de travail ou du respect des dispositions se rapportant à la sécurité au travail et à la sécurité sociale. L'OIEM ajoute que plusieurs intervenants du milieu du travail ont écrit aux autorités gouvernementales afin de dénoncer la situation, mais qu'à ce jour aucune action tendant à y remédier n'a encore été prise.
- 348. L'OIEM conclut que le non-respect des obligations prévues dans l'Entente sur les tarifications et garanties sociales viole le droit à la libre négociation collective puisque les signataires fautifs remettent ainsi en question des clauses essentielles qui ont été librement négociées et qu'ils ont acceptées. De plus, l'OIEM soutient qu'une telle attitude affecte gravement les conditions de vie et les droits acquis des travailleurs.
B. Réponses du gouvernement
B. Réponses du gouvernement
- 349. En réponse aux allégations de l'OIEM, le gouvernement indique qu'il a prié les ministres responsables du Travail, de la Protection sociale, de l'Industrie minière et de la Justice de vérifier dans quelle mesure l'Entente sur les tarifications et garanties sociales était respectée par les parties. A sa demande, la Fédération des syndicats d'Ukraine et l'Organisation des industriels et employeurs d'Ukraine ont également participé à cet exercice.
- 350. Le gouvernement indique qu'à la lumière de cette analyse il apparaît que des dispositions de l'Entente sur les tarifications et garanties sociales, notamment celles se rapportant au paiement des salaires et au versement des indemnités pour maladie professionnelle et accident de travail, ne sont pas respectées.
- 351. Le gouvernement soutient que le manque de ressources financières de l'industrie minière est la principale raison qui explique le non-respect des obligations prévues dans l'Entente sur les tarifications et garanties sociales. Le gouvernement expose par la suite la situation difficile dans laquelle se trouve cette industrie. Depuis les cinq dernières années, la quantité de charbon extrait des mines ukrainiennes n'a pas cessé de diminuer, tombant de 191,7 tonnes en 1988 à 115,7 en 1993. La quantité de charbon extrait au cours des onze premiers mois de 1994 était 18,3 pour cent inférieure au résultat obtenu au cours de la même période l'année précédente. Au 1er décembre 1994, la dette nette de l'industrie minière ukrainienne totalisait 15,6 trillions de karbovanets. La diminution des quantités de charbon produit, ajoutée au retard à payer des débiteurs, a entraîné un sérieux problème de liquidité qui, à son tour, a affecté le versement des salaires et des différentes indemnités dues aux travailleurs.
- 352. Le gouvernement déclare qu'il prend, conjointement avec les autorités compétentes, les mesures nécessaires pour redresser la situation. A ce titre, le gouvernement indique que, le 2 mars 1994, le Conseil des ministres a adopté le décret no 141 en vertu duquel un programme de développement de l'industrie minière et de ses régions a été mis sur pied. Le gouvernement soutient que de telles actions permettront de stabiliser cette industrie et devraient apporter des solutions aux problèmes économiques et sociaux des travailleurs.
- 353. De manière plus générale, le gouvernement indique qu'en octobre 1994 un programme visant à permettre la transition vers une économie de marché et la stabilisation des différents secteurs de l'économie a été adopté. Dans ce contexte, le budget de 1994 a réservé 30 trillions de karbovanets à l'industrie minière, principalement en vue de pourvoir au paiement des salaires et autres indemnités sociales. Au 1er décembre 1994, le ministre des Mines avait reçu plus des deux tiers des karbovanets initialement budgétisés. La Banque nationale d'Ukraine a émis des prêts à des taux préférentiels à différentes industries oeuvrant dans ce secteur. De plus, le gouvernement ajoute qu'une loi ayant pour but d'annuler les dettes des houillères ukrainiennes a été votée en novembre 1994, et qu'un mécanisme incitant au paiement intégral des salaires par une plus grande responsabilisation des chefs d'entreprise est en préparation.
- 354. Le gouvernement conclut en manifestant à nouveau son désir de développer et raffermir la coopération avec l'OIT et réitère sa ferme intention de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer le respect des conventions internationales du travail qu'il a ratifiées.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 355. Le comité observe que la présente plainte concerne le non-respect de dispositions de l'Entente sur les tarifications et garanties sociales à laquelle sont parties les Charbonnages de l'Ukraine et le Conseil républicain du syndicat des travailleurs de l'industrie charbonnière de l'Ukraine (RS PROUP). Le gouvernement a contresigné cette Entente le 12 février 1992.
- 356. Le comité note que la signature, l'identification des parties à l'Entente sur les tarifications et garanties sociales ainsi que son application proprement dite ne semblent pas remises en cause dans le présent cas. De plus, il apparaît de la documentation examinée par le comité que le gouvernement ne contredit pas les allégations de l'organisation plaignante pour ce qui a trait au non-respect de certaines dispositions de cette Entente. En effet, le gouvernement reconnaît que des dispositions de l'Entente sur les tarifications et garanties sociales, qui traitent entre autres du versement des salaires et autres indemnités, n'ont pas été respectées. A cet égard, le comité rappelle le principe général selon lequel "l'interruption de contrats préalablement négociés n'est pas en conformité avec les principes de la négociation collective, parce que ces contrats doivent être respectés". (Cas no 1172, 241e rapport, paragr. 97 à 122.) En d'autres termes, les autorités publiques devraient promouvoir la libre négociation collective et ne pas empêcher l'application des accords collectifs librement conclus, cela étant d'autant plus vrai lorsque ces mêmes autorités agissent à titre d'employeurs, ou se sont portées garantes de l'application des accords en les contresignant.
- 357. Le gouvernement soutient que le non-paiement intégral des salaires et des indemnités dues aux travailleurs est justifié par la crise financière dans laquelle est plongé le pays en général, et son industrie minière en particulier. Le comité prend note des mesures prises par le gouvernement en vue d'assainir l'industrie minière et de pourvoir au paiement des salaires et indemnités sociales. Il lui demande de poursuivre ses efforts dans ce sens afin que l'accord puisse être entièrement mis en oeuvre. Il prie le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation à cet égard.
- 358. Le comité est sensible aux sérieux bouleversements auxquels doit faire face le pays, entraînés notamment par la transition de son économie et par la crise de l'énergie. Toutefois, il apparaît au comité qu'une partie du présent problème semble résulter d'un manque de clarté, voire d'une anomalie, du système de relations professionnelles. En effet, en l'espèce, il n'est pas mis en cause que les salaires, charges sociales et indemnités ont été librement négociés et conclus. Dans un tel cas, le comité estime qu'il conviendrait en premier lieu d'identifier clairement les parties, notamment la partie employeur. En outre, celles-ci devraient favoriser autant que faire se peut la consultation, et le système de relations professionnelles devrait prévoir des mécanismes à cet égard. En d'autres termes, le gouvernement devrait privilégier la mise sur pied de mécanismes qui permettraient aux parties de tenir compte volontairement de considérations relatives à la politique économique et sociale et à la sauvegarde de l'intérêt général. Mais, pour cela, il est tout d'abord nécessaire que les objectifs soient reconnus comme d'intérêt national et fassent l'objet d'une large consultation des parties à cet échelon. Le comité invite donc le gouvernement à envisager la possibilité de mettre sur pied une telle procédure. Le comité estime qu'un tel mécanisme aurait peut-être eu pour conséquence d'éviter le conflit objet du présent cas.
- 359. De façon générale, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer un système de relations professionnelles efficace et stable dans lequel peuvent participer les différentes parties concernées et qui recueille leur confiance, ainsi que des mécanismes de consultation des organisations de travailleurs et d'employeurs dans les processus de restructuration des divers secteurs de l'économie. Il le prie de le tenir informé de tout développement à cet égard. Il rappelle en outre au gouvernement que les services du Bureau international du Travail sont à sa disposition pour toute assistance qu'il estimerait nécessaire en ce domaine.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 360. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Pour ce qui est du non-respect de certaines dispositions de l'Entente sur les tarifications et garanties sociales, le comité rappelle le principe général selon lequel les contrats préalablement négociés avec les organisations de travailleurs doivent être respectés. A cet égard, il prend note des mesures déjà prises par le gouvernement en vue d'assainir l'industrie minière et de pourvoir au paiement des salaires et indemnités sociales et lui demande de poursuivre ses efforts en ce sens, afin que l'accord puisse être entièrement mis en oeuvre.
- b) Le comité invite le gouvernement à envisager des mécanismes qui permettraient aux parties de tenir compte volontairement de considérations relatives à la politique économique et sociale et à la sauvegarde de l'intérêt général.
- c) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer un système de relations professionnelles efficace et stable dans lequel peuvent participer les différentes parties concernées et qui recueille leur confiance, ainsi que des mécanismes de consultation des organisations de travailleurs et d'employeurs dans les processus de restructuration des divers secteurs de l'économie. Il le prie de le tenir informé de tout développement à cet égard. Il rappelle au gouvernement que les services du Bureau international du Travail sont à sa disposition pour toute assistance qu'il estimerait nécessaire en ces domaines.