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- 60. La Fédération américaine du travail et Congrès des organisations industrielles (AFL-CIO) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique dans une communication datée du 27 juillet 1990. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication datée du 2 mai 1991.
- 61. Les Etats-Unis n'ont ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 62. Dans sa communication du 27 juillet 1990, l'AFL-CIO allègue en substance que la législation du travail des Etats-Unis et la jurisprudence permettent le remplacement permanent des travailleurs menant légalement des grèves économiques, ce qui donne lieu à des violations de la liberté syndicale, ainsi que des droits d'association et de négociation collective.
- 63. L'organisation plaignante déclare que, même si un employeur ne peut légalement licencier des employés pour avoir exercé leur droit de grève, dans les cas de grèves dites "économiques" par opposition aux grèves où ont été commises des pratiques déloyales du travail, il peut embaucher des remplaçants permanents en lieu et place des grévistes. Cette doctrine a été énoncée pour la première fois par la Cour suprême des Etats-Unis en 1938 dans l'affaire Labor Board v. Mackay et élaborée par la suite dans les affaires Bellknap v. Hale (1983) et TWA v. IFFA (1989) (ci-après appelée "Mackay" ou "doctrine Mackay"). Les employeurs ont le droit de recruter des employés pour remplacer de façon permanente les employés menant une grève économique dans les industries régies par la loi sur les relations de travail dans l'industrie ferroviaire (RLA), ainsi que dans celles auxquelles s'applique la loi nationale sur les relations professionnelles (NLRA). Le plaignant joint en annexe plusieurs documents expliquant l'historique et les arguments juridiques sur la question des remplaçants de grévistes. Dans la plupart des cas, il s'agit de mémoires présentés par divers groupes ou dirigeants syndicaux lors des audiences des sous-comités du Sénat ou de la Chambre des représentants au sujet d'un projet de loi actuellement étudié, visant à modifier la NLRA.
- 64. Le plaignant soutient qu'il n'existe souvent aucune différence en pratique entre un congédiement et le remplacement permanent des grévistes. Par exemple, des lettres (jointes à l'appui d'un des mémoires mentionnés ci-dessus) envoyées aux employés de la société Kraft se lisaient comme suit: "Nous vous informons par la présente que votre poste a été comblé par un remplaçant." Cela ne constitue pas à strictement parler un avis de licenciement, mais le résultat en est semblable; les moyens de pression concertés et protégés ne sont pas en fait protégés. L'organisation plaignante donne de nombreux exemples (également tirés des mémoires présentés aux sous-comités) de situations où des grévistes ont été remplacés de façon permanente, et des conséquences de ces mesures sur la négociation collective:
- - Hoover Group Plant à Charlotte, Michigan (annexe B);
- - Anvin Automotive Industries à North Vernon, Indiana (annexe B);
- - Phelps Dodge à Ajo, Clifton et Morenci, Arizona (annexe C);
- - Woodstock Die Cast à Woodstock, Illinois (annexe D);
- - Continental , Eastern et United Airlines (annexe E);
- - Transworld Airlines (annexe F);
- - Washington Beef Inc à Topperish et Yakima, Washington (annexe G);
- - Payless Northwest Drug Stores Inc. à Spokane, Washington (annexe G);
- - Kraft/SS Pierce Foodservice à Peabody, Massachusetts (annexe H);
- - International Paper à Jay, Maine (annexe I);
- - Greyhound Lines, partout aux Etats-Unis, (annexe J);
- - Chicago Tribune Company à Chicago, Illinois (annexe Q);
- - Magic Chef/Maytag à Cleveland, Tennessee (annexe Q);
- - Hormel Meat Packing à Austen, Minesotta (annexe Q);
- - Brown & Sharpe Manufacturing Co., dans le Rhode Island (annexe Q);
- - Colt Firearms au Connecticut (annexe Q);
- - Boise Cascade à Rumford, Maine (annexe Q);
- - Marathon Letourneau Co. (annexe Q);
- - St. Joe Mineral Corporation, Missouri (annexe Q).
- 65. Selon l'organisation plaignante, les employeurs ont recouru plus fréquemment au remplacement permanent de grévistes dans les années quatre-vingt, comme l'indique un document préparé par le Bureau du Vérificateur général des Etats-Unis (annexe L). Cela a gravement déséquilibré les relations professionnelles en plaçant la force du droit d'un seul côté de la table des négociations; cela a provoqué une augmentation des différends entre les syndicats et les employeurs, et parmi les travailleurs eux-mêmes; cela a sapé le processus de négociation collective et, dans de nombreux cas, a entraîné la disparition de syndicats, avec la perte de droits de représentation que cela suppose.
- 66. La grève est souvent devenue une arme que l'employeur utilise dans le cadre d'une stratégie pour éliminer les syndicats. Le remplacement permanent des grévistes constitue l'élément essentiel de cette stratégie. Bien que les employeurs soient légalement tenus de négocier de bonne foi, certains d'entre eux insistent pour obtenir des modifications inacceptables et parfois fondamentales dans une convention collective, ou pour obtenir des concessions qui ne sont pas justifiées par les résultats financiers de la compagnie; cette attitude vise à provoquer une grève économique, ce qui permet à l'employeur d'embaucher des remplaçants permanents. Au terme de la période d'un an, prévue dans la loi, après l'expiration de la convention collective (à moins que des plaintes de pratique déloyale du travail n'aient été déposées, ce qui peut suspendre la procédure, au moins temporairement), l'employeur peut faire procéder à un vote de désaccréditation afin d'éliminer le syndicat, scrutin auquel les remplaçants permanents ont le droit de participer. Dans certains cas, des remplaçants permanents sont recrutés, voire formés, avant la grève. Dans la grève à la société Greyhound par exemple, la société a commencé à publier des offres d'emploi dans les principaux journaux du pays trois semaines avant l'expiration de la convention collective (annexe J); l'employeur a évidemment fait le nécessaire pour que les membres du syndicat en question, affilié à l'AFL-CIO, en soient informés. Par ailleurs, si une convention collective est conclue durant une grève, un problème supplémentaire est fréquemment soulevé à la table des négociations, soit le droit des grévistes de retrouver les emplois qui ont été comblés par des remplaçants permanents.
- 67. Aux Etats-Unis, les employeurs peuvent s'ingérer dans la décision des travailleurs sur l'opportunité de s'affilier à un syndicat. Si l'on excepte quelques restrictions, par ailleurs peu nombreuses et fort limitées, un employeur peut légalement organiser, notamment durant les heures de travail, une vigoureuse campagne antisyndicale visant tous les employés, individuellement ou en groupe. Dans la quasi-totalité de ces campagnes, la question des grèves joue un rôle essentiel dans la propagande des employeurs: les employés sont généralement informés que, s'ils constituent un syndicat et déclenchent une grève économique, ils peuvent être remplacés de façon permanente. Dans son mémoire au sous-comité du Sénat, un professeur de l'Université du Texas a déclaré, après avoir étudié 35 campagnes d'affiliation syndicale dans le secteur privé: "Dans pratiquement chaque campagne, l'employeur a annoncé qu'il négocierait fermement, de telle sorte que les employés savaient qu'ils devraient faire la grève pour obtenir des avantages substantiels. Les employés ont également été informés que, si une grève était déclenchée, leurs postes pourraient être comblés par des remplaçants permanents, option que l'employeur n'hésiterait pas à exercer." (Annexe R.) Deux exemples assez typiques du recours à cette stratégie dans une campagne antisyndicale par un employeur sont donnés à l'annexe K; il s'agit en l'occurrence d'une campagne menée contre les Métallurgistes unis d'Amérique par la société WCI, filiale nord-américaine de l'entreprise multinationale basée en Suède, Electrolux.
- 68. Si la campagne antisyndicale d'un employeur échoue et que les travailleurs gagnent le droit d'être représentés par un syndicat, la lutte se déplace alors souvent sur le terrain de la négociation de la première convention collective. Dans presque la moitié des établissements où un syndicat s'est nouvellement créé, les travailleurs ne réussissent jamais à négocier une première convention (annexe R). La menace d'un remplacement permanent des travailleurs est particulièrement importante à ce moment crucial, où une nouvelle organisation syndicale est encore fragile.
- 69. Le fait que les employeurs puissent légalement embaucher des remplaçants permanents pour prendre la place des grévistes économiques sape la liberté syndicale et la négociation collective, et ce à tous les stades. Cela entrave le processus de constitution des syndicats, nie aux travailleurs la protection d'une première convention collective, incite les employeurs à détruire des relations professionnelles stables et établies de longue date, et entraîne des pertes d'emploi et de droit de représentation pour les travailleurs.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 70. Dans sa communication du 2 mai 1991, le gouvernement soutient que la législation du travail en vigueur aux Etats-Unis protège adéquatement les droits et intérêts des travailleurs et des employeurs, et que la possibilité offerte aux employeurs de recruter des remplaçants permanents ne constitue donc pas une violation du droit de grève. Le gouvernement élabore sa réponse aux allégations de l'organisation plaignante, sous les cinq rubriques suivantes:
- - la doctrine relative aux travailleurs remplaçants constitue depuis longtemps une composante de la législation du travail des Etats-Unis, qui tente de réaliser un équilibre entre les droits et intérêts des travailleurs et des employeurs;
- - les grévistes économiques qui sont remplacés conservent leur statut d'employés et bénéficient de droits de réintégration substantiels;
- - il est interdit aux employeurs de se servir des travailleurs remplaçants pour évincer un syndicat qui a déclenché la grève;
- - le déclin du syndicalisme et la diminution des arrêts de travail aux Etats-Unis ne sont pas dus à la doctrine relative aux travailleurs remplaçants;
- - les données existantes n'établissent pas que le recours aux travailleurs remplaçants a augmenté au cours des dernières années.
- 71. En ce qui concerne le premier point, le gouvernement déclare que les objectifs de la législation du travail des Etats-Unis sont de promouvoir et de protéger la négociation collective, perçue comme le mode de gestion des relations professionnelles, et d'interdire la discrimination contre les employés à cause de leurs opinions ou de leurs activités syndicales. Pour atteindre ces objectifs, la législation des Etats-Unis donne aux travailleurs et aux employeurs certains droits et outils économiques, grâce auxquels ils peuvent négocier. Le gouvernement conserve un rôle strictement neutre dans ce processus: par l'intermédiaire du Conseil national des relations professionnelles (NLRB) et des tribunaux fédéraux, il s'assure que les droits en question sont protégés, mais il n'impose pas de résultat particulier à la table des négociations.
- 72. Le texte fondamental en matière de législation du travail aux Etats-Unis est la loi nationale sur les relations professionnelles (NLRA), adoptée en 1935; elle prévoyait l'établissement du NLRB et disposait que la négociation collective constitue le mécanisme fondamental pour la négociation des accords entre employeurs et employés. La NLRA régit les relations professionnelles dans la plupart des industries du secteur privé aux Etats-Unis et garantit le droit de grève à tous les employés visés par la loi. L'article 13 dispose ce qui suit: "aucune disposition de la présente loi, sous réserve des exceptions qui sont expressément prévues, ne peut être interprétée de façon à entraver, prévenir ou restreindre le droit de grève, ou de façon à modifier les limites ou réserves apportées à ce droit". En guise de contrepartie au droit de grève, les employeurs ont le droit de poursuivre l'exploitation de l'entreprise durant une grève, et notamment celui d'embaucher des remplaçants pour combler les postes des grévistes.
- 73. La Cour suprême des Etats-Unis s'est prononcée pour la première fois en 1938 sur la question des travailleurs remplaçants dans l'affaire NLRB v. Mackay Radio & Telgraph Co.; interprétant les dispositions protégeant le droit de grève des travailleurs, elle a conclu que la NLRA n'empêchait pas les employeurs d'embaucher, de façon temporaire ou permanente, des employés pour remplacer les grévistes. La Cour a fait une distinction entre les grèves économiques (concernant les conditions et modalités d'emploi) et les grèves ayant donné lieu à des pratiques déloyales du travail (déclenchées ou prolongées à cause de la commission, par l'employeur, d'actes illégaux aux termes de la NLRA). Dans les grèves économiques, lorsque des remplaçants permanents ont été embauchés, les employeurs sont tenus de réintégrer les grévistes lorsque des postes deviennent vacants. Toutefois, s'il est établi qu'un employeur a provoqué une grève par ses pratiques déloyales du travail, il doit immédiatement réintégrer les grévistes qui offrent de reprendre le travail sans conditions, et ce même si des travailleurs remplaçants doivent être licenciés pour leur faire place. La logique de cette distinction entre les grèves économiques et les autres est évidente: si un employeur cause ou prolonge une grève par ses pratiques déloyales du travail (c'est-à-dire en commettant une violation de la NLRA), on lui interdit d'aggraver encore la violation en remplaçant de façon permanente ses employés grévistes; en revanche, si le différend porte sur des revendications économiques que l'employeur ne peut ou ne veut accepter, il peut embaucher des remplaçants permanents pour combler les postes des employés qui choisissent de ne pas travailler. Toutefois, si elle donne aux employeurs confrontés à un grève économique la possibilité d'embaucher des remplaçants permanents, la législation des Etats-Unis confère simultanément des protections substantielles aux employés grévistes.
- 74. Il est également important de souligner qu'une grève économique peut devenir une grève dite de pratique déloyale du travail si, comme les tribunaux fédéraux et le NLRB l'ont fréquemment déclaré, l'employeur se rend coupable de pratiques déloyales du travail qui provoquent ou prolongent la grève économique. Les exemples d'actes d'un employeur susceptibles de modifier le caractère de la grève comprennent notamment: geste unilatéral de l'employeur sur des questions au sujet desquelles la NLRA l'oblige à négocier avec les représentants des employés; licenciement injustifié de grévistes; retrait injustifié de la reconnaissance du syndicat en tant qu'agent négociateur des employés; omission, de mauvaise foi, de fournir des renseignements financiers appropriés au syndicat. Si l'organisme compétent en vient à une telle conclusion, la grève économique devient une grève comportant des pratiques déloyales du travail, et les grévistes ont alors droit à être réintégrés immédiatement dans leurs fonctions s'ils proposent à l'employeur de reprendre le travail sans conditions. Bien que la NLRA ait été modifiée plusieurs fois par le Congrès au cours des années, la doctrine relative aux travailleurs remplaçants est restée pratiquement inchangée depuis 1938.
- 75. Le gouvernement déclare en ce qui concerne le second point que la législation des Etats-Unis permet à un employeur d'embaucher des travailleurs pour prendre la place des employés qui mènent une grève économique. En l'absence d'une décision concluant que l'employeur s'est livré à des pratiques déloyales du travail (ce qui change la nature de la grève) l'employeur n'est pas tenu de réintégrer immédiatement les grévistes économiques à la fin de la grève. Toutefois, la loi interdit à l'employeur de licencier les grévistes. Même s'ils sont remplacés, les grévistes économiques conservent leur statut d'employés et ont un droit préférentiel de réintégration. Le paragraphe 2(3) de la NLRA dispose que le mot "employé" comprend "toute personne dont le travail a cessé à cause d'un différend du travail ou d'une pratique déloyale du travail, ou en rapport avec ceux-ci, et qui n'a pas trouvé un emploi régulier sensiblement équivalent ..." Par conséquent, un gréviste économique conserve son statut d'employé jusqu'à ce qu'il retrouve un emploi régulier équivalent.
- 76. La Cour suprême a clarifié en 1967, dans l'affaire NLRB v. Fleetwood Trailer Co. Inc., les responsabilités des employeurs quant à la réintégration des grévistes économiques. Un employeur qui ne réintègre pas dans leurs fonctions des grévistes économiques à la fin d'une grève se rend coupable d'une pratique déloyale du travail, sauf s'il démontre l'existence de "justifications commerciales légitimes et substantielles", comme une baisse de la production ou le fait que des travailleurs remplaçants occupent les emplois des grévistes. Si un gréviste économique demande à reprendre son travail sans conditions, l'employeur doit faire appel à ses services lorsqu'un poste pour lequel il est qualifié devient vacant, par exemple lorsqu'un travailleur remplaçant quitte l'entreprise ou lorsque la production reprend à son plein niveau. Ce droit de réintégration concerne non seulement le poste que le gréviste occupait avant la grève, mais à tout autre emploi pour lequel il possède les qualifications voulues. Ainsi, un employeur ne peut refuser de réintégrer un gréviste économique au prétexte que le poste qu'il occupait auparavant n'existe plus. Par ailleurs, l'employeur doit également réintégrer tous les grévistes économiques qualifiés avant d'engager de nouveaux employés. Le droit de réintégration d'un gréviste économique ne s'éteint que s'il refuse une offre d'un poste similaire ou substantiellement équivalent, ou s'il trouve ailleurs un emploi régulier et à peu près semblable. Dans l'affaire NLRB v. Erie Resistor Corp., la Cour suprême a étendu les droits à l'emploi des grévistes économiques en restreignant le pouvoir des employeurs d'octroyer des droits d'ancienneté particuliers aux travailleurs remplaçants. La Cour a statué qu'un employeur qui accorde une "ancienneté préférentielle" aux remplaçants ou aux employés qui reprennent le travail durant une grève, commet une pratique déloyale du travail au sens de la NLRA. En outre, l'employeur n'a pas le droit d'offrir aux travailleurs remplaçants des conditions d'emploi supérieures à celles de l'offre finale faite aux grévistes. De plus, le fait qu'un employé participe à une grève ne peut nuire à ses droits d'ancienneté; lorsqu'il est réintégré, un gréviste économique est avantagé par rapport aux travailleurs remplaçants moins anciens que lui en ce qui concerne le salaire, les avantages sociaux ainsi que les conditions et modalités d'emploi qui sont fonction de l'ancienneté.
- 77. S'agissant du troisième point (en réponse à l'allégation de l'organisation plaignante, selon qui les employeurs peuvent délibérément forcer le syndicat à déclencher une grève en refusant de conclure une convention, en embauchant des travailleurs remplaçants durant la grève, ce qui affaiblit, voire détruit le syndicat), le gouvernement déclare que la négociation "simulée" est illégale aux termes de la NLRA. Un employeur qui négocie de façon à pousser le syndicat à la grève viole l'obligation de négocier de bonne foi et se rend ainsi coupable de pratique déloyale du travail. Comme il a déjà été mentionné, la grève peut alors changer de nature et l'employeur serait obligé de réintégrer immédiatement les grévistes même s'ils ont été entre-temps remplacés. Dans une telle situation, l'employeur s'expose également à d'autres dommages-intérêts, par exemple le paiement d'une rémunération rétroactive. Ainsi, dans une récente grève menée par les Travailleurs unis de l'automobile (UAW) contre une filiale de Colt Industries, il a été décidé qu'il y avait eu pratiques déloyales du travail, quatre ans après le début de la grève. Un juge de droit administratif du NLRB a ordonné à l'employeur de réintégrer dans leurs fonctions tous les grévistes qui ne l'avaient pas encore été, et de leur payer rétroactivement leur salaire; le règlement finalement conclu entre les parties a coûté 13 millions de dollars à l'employeur, y compris 10 millions de dollars en salaires rétroactifs.
- 78. Par ailleurs, même si un employeur a remplacé ses employés grévistes, le syndicat continue à représenter tous les employés de l'unité de négociation. Tant les grévistes que les remplaçants sont censés être représentés par le syndicat, sauf si les employés en décident autrement lors d'un vote de désaccréditation supervisé par le NLRB, ou si l'employeur peut apporter des preuves objectives démontrant que le syndicat ne recueille plus l'appui de la majorité des employés. Durant une période d'un an à partir du début de la grève, les grévistes remplacés ont le droit, inscrit dans la loi, de participer à ces scrutins de désaccréditation. En 1990, la Cour suprême a renforcé les droits des syndicats dans des cas où des employeurs avaient embauché des remplaçants permanents. Dans l'affaire NLRB v. Curtin Matheson Scientific, Inc., un employeur avait embauché des remplaçants durant une grève et avait ensuite tenté de cesser de reconnaître le syndicat, en partant du principe que les remplaçants, qui constituaient alors la majorité des effectifs, lui étaient hostiles. La Cour suprême a toutefois statué qu'un employeur ne peut tenir pour acquis que les remplaçants s'opposent automatiquement au syndicat et qu'un retrait de la reconnaissance du syndicat pour ce motif constituait donc une pratique déloyale du travail.
- 79. Les employeurs peuvent être dans l'incapacité de poursuivre l'exploitation de l'entreprise durant une grève s'ils n'embauchent pas des remplaçants: c'est là une simple réalité économique. De plus, les travailleurs possédant les qualifications voulues refusent souvent d'accepter un emploi temporaire, ou de traverser des lignes de piquetage si on ne leur offre pas un emploi permanent. Toutefois, étant donné que les grévistes économiques jouissent de droits substantiels de réintégration et de protection syndicale, les employeurs ne décident ni fréquemment ni facilement de recourir à des remplaçants. Par exemple, un employeur pourrait décider d'engager des remplaçants pour poursuivre l'exploitation durant une grève mais, si le NLRB statue par la suite que la grève a été causée ou prolongée par une pratique déloyale du travail de l'employeur, la compagnie peut avoir à payer deux fois pour le même travail: les remplaçants sont payés et l'employeur se voit intimer l'ordre de réintégrer les grévistes avec rémunération rétroactive, pour remédier à la violation de la loi. Ces ordonnances du NLRB peuvent manifestement avoir des conséquences financières dévastatrices, dont les employeurs doivent tenir compte dans leurs réactions face à une grève.
- 80. En ce qui concerne le quatrième point (en réponse à l'allégation du plaignant, selon qui la doctrine Mackay a grandement nui au pouvoir de négociation des syndicats et à leur aptitude à mener des grèves, et a donc contribué au déclin du syndicalisme aux Etats-Unis), le gouvernement déclare que le déclin du syndicalisme et la diminution du nombre d'arrêts de travail ne sont pas attribuables à la doctrine Mackay. Cet arrêt a été rendu en 1938 et, durant les décennies qui ont suivi, les syndicats et les grèves n'en ont pas été affectés. En fait, le syndicalisme a été florissant jusqu'à ce que sa croissance se ralentisse dans les années soixante-dix. Le déclin graduel des effectifs syndicaux depuis lors est attribuable à de nombreux facteurs et notamment: avant tout une modification de la structure économique des Etats-Unis (régression du secteur industriel au profit du secteur tertiaire); concurrence globale accrue; évolution de la population active; et, selon certains analystes, une opinion publique moins favorable aux syndicats. Depuis les années soixante-dix, les Etats-Unis ont subi de graves récessions, connu une augmentation phénoménale de la concurrence étrangère et vécu la déréglementation dans des secteurs industriels importants. Tous ces facteurs ont profondément influencé la composition de la population active. Les industries manufacturières, qui avaient toujours constitué un bassin important de recrutement pour les syndicats, ont notamment connu de nombreuses pertes d'emploi, tandis que le secteur tertiaire, traditionnellement moins syndiqué, a accru sa part du marché du travail.
- 81. La compression des effectifs syndicaux s'est accompagnée d'une diminution très importante du nombre d'arrêts de travail (grèves et lock-out) depuis les années quatre-vingt. L'AFL-CIO soutient que la grève menée en 1981 par l'Organisation professionnelle des contrôleurs du trafic aérien (PACTO) explique en large partie ce phénomème; selon l'AFL-CIO, les travailleurs de la PACTO ont été remplacés, il est devenu acceptable pour les employeurs de remplacer leurs employés grévistes de façon permanente; toujours selon le plaignant, le nombre de grèves a baissé parallèlement à l'augmentation du recours aux travailleurs remplaçants (ou à la menace de le faire). Toutefois, il faut bien comprendre que l'affaire de la PACTO est différente d'une grève économique légale dans laquelle l'employeur embauche des travailleurs remplaçants. Durant cette grève, il ne s'agissait pas de l'embauche de remplaçants; en fait, les membres de la PACTO étaient plutôt des employés du gouvernement fédéral assurant un service essentiel, qui ont déclenché une grève en violation de la loi, ont été congédiés et ont perdu tous leurs droits à l'emploi. De nouveaux employés ont alors été embauchés pour combler les postes vacants. Le déclin du nombre d'arrêts de travail est plus vraisemblablement dû à la baisse du taux de syndicalisation et à l'évolution des conditions industrielles, mentionnées ci-dessus. Confrontés à une concurrence croissante, les employeurs ont été forcés de réduire les coûts du travail et ont donc plus tendance à résister aux demandes syndicales, même face à une grève éventuelle. Les syndicats qui comprennent également ces nouvelles réalités économiques semblent eux aussi plus hésitants à déclencher une grève que par le passé. Par ailleurs, l'évolution du climat professionnel et économique a débouché sur une meilleure coopération entre les syndicats et les employeurs dans le règlement des différends de travail, ainsi que pour la poursuite des intérêts et objectifs communs.
- 82. Le gouvernement soutient enfin que les données existantes n'établissent pas que le recours aux remplaçants permanents a augmenté durant les dernières années. Le rapport du 6 juin 1990 préparé par le Bureau du vérificateur général des Etats-Unis (GAO) et mentionné dans la plainte de l'AFL-CIO conclut "qu'il n'existe pas de données complètes sur le recours aux remplaçants permanents de grévistes". En fait, il existe si peu de données sur ce sujet que le GAO a pu seulement évaluer les opinions des travailleurs et des employeurs sur le point de savoir si les employeurs avaient embauché des remplaçants permanents plus fréquemment dans les années quatre-vingt que ce n'avait été le cas dans les années soixante-dix. De plus, lorsque le GAO a pu recueillir des données sur les cas où les employeurs avaient effectivement embauché des remplaçants, ses conclusions ne concordent pas avec l'allégation de l'organisation plaignante, selon qui le recours aux remplaçants permanents constitue un phénomène largement répandu et en pleine croissance.
- 83. Pour obtenir des renseignements concrets sur cette question, le GAO a recueilli des données sur le recours aux remplaçants permanents, grâce à un échantillon des arrêts de travail en 1985 et 1989, la première et la dernière année pour lesquelles des renseignements informatisés étaient disponibles. Se fondant sur ces données limitées, le GAO a estimé que dans les deux années faisant l'objet du sondage, des remplaçants permanents n'ont été embauchés que dans 15 pour cent des grèves signalées au FMCS. En janvier 1991, le GAO a publié une mise à jour de son rapport "Grèves et utilisation de remplaçants permanents de grévistes de 1970 à 1980", où il a affiné son évaluation du nombre de grèves au cours desquelles les employeurs avaient embauché des remplaçants permanents, le ramenant à 17 pour cent chaque année. Ce qui est plus important encore, les auteurs de l'étude, en plus d'évaluer le nombre de grèves où des remplaçants permanents avaient été embauchés, ont estimé qu'en 1985 et 1989, seulement 4 pour cent de tous les grévistes avaient été remplacés de façon permanente.
- 84. L'organisation plaignante a décrit quelques cas pathétiques pour tenter d'étayer ses allégations sur le recours croissant aux travailleurs remplaçants et ses conséquences néfastes sur la situation des grévistes. Le GAO a évalué le pourcentage des grèves au cours desquelles des travailleurs ont été remplacés ainsi que le pourcentage de grévistes remplacés, mais il n'existe pas de données démontrant si ces grévistes ont été réembauchés, ni quand ils l'ont été. Néanmoins, il semble que le remplacement permanent de grévistes économiques consitue l'exception plutôt que la règle: l'expérience pratique donne à penser que les grévistes perdent rarement leur emploi en réalité. Comme il est mentionné ci-dessus, le rapport mis à jour du GAO estime que dans les années faisant l'objet du sondage, seulement 4 pour cent des grévistes ont été remplacés. La législation du travail des Etats-Unis dispose que ces grévistes conservent leur statut d'employé, avec des droits préférentiels de réintégration. Par conséquent, il est probable que beaucoup d'entre eux, sinon la plupart, ont ensuite été réintégrés aux termes d'un protocole de retour au travail, en raison de la conversion de la grève économique en grève comportant des pratiques déloyales du travail ou, à défaut, par le simple jeu de la rotation des effectifs. Contrairement aux allégations de l'AFL-CIO, il semble que le recours aux travailleurs remplaçants n'ait que peu d'effets permanents sur l'emploi des grévistes. On pourrait en fait soutenir que l'expression "remplaçants permanents" est un leurre. Tout comme les rapports du GAO n'établissent pas l'allégation de l'AFL-CIO, soit que le recours aux travailleurs remplaçants a augmenté de façon significative dans les années quatre-vingt, les diverses décisions judiciaires rendues depuis 1938 au sujet des remplaçants permanents, y compris les jugements cités plus haut, démontrent que les employeurs ont toujours exercé ce droit, même si ce n'était pas fréquemment.
- 85. Le gouvernement conclut que les règles de droit permettant aux employeurs de remplacer les grévistes économiques font partie intégrante des relations industrielles aux Etats-Unis depuis l'adoption de la NLRA en 1935; elles n'ont pratiquement pas été modifiées et, jusqu'à tout récemment, n'ont pas été contestées. Cette politique générale découle de l'objectif global de la législation des Etats-Unis, visant à équilibrer les droits et intérêts des travailleurs et employeurs au sein d'un système de relations professionnelles à caractère démocratique. Les syndicats et les employeurs ont développé dans le cadre de la NLRA des moyens économiques très élaborés afin contrebalancer leur pouvoir de négociation respectif. L'outil le plus puissant à la disposition des travailleurs est leur droit de grève; les employeurs ont le droit corollaire de poursuivre leurs opérations en dépit d'une grève. Dans de nombreux cas, les travailleurs remplaçants ne sont pas disposés à traverser des lignes de piquetage pour des emplois qui ne sont que temporaires, ou à accepter des emplois de cette nature. Les employeurs ont donc des impératifs économiques et commerciaux justifiant qu'ils puissent offrir des emplois permanents à des remplaçants. Néanmoins, tout en offrant aux employeurs cette option dans le cas d'une grève économique, la législation fait en sorte que les grévistes remplacés conservent leur statut d'employé et jouissent de droits substantiels de réintégration et de protection d'ancienneté. Etant donné l'existence de ces mesures de protection, le gouvernement estime qu'il n'y a pas violation de la liberté syndicale des travailleurs aux Etats-Unis. Le système de négociation collective crée parfois des difficultés pour les employés et les employeurs, mais le gouvernement considère qu'il s'agit du système le plus efficace et le plus équitable pour les travailleurs du pays. Une grande partie de la croissance de l'emploi aux Etats-Unis dans les dernières années est due à la flexibilité et au dynamisme que permet ce système unique de relations professionnelles. Le gouvernement estime que, loin de violer les droits syndicaux, le droit du travail des Etats-Unis - y compris la possibilité pour les employeurs d'embaucher des travailleurs permanents pour remplacer les grévistes économiques - a prouvé qu'il est équitable, équilibré et dans l'intérêt public.
- 86. Le gouvernement a joint à ses observations un mémoire préparé par le United States Council for International Business (USCIB). Même s'il ne considère pas ce mémoire comme partie intégrante de ses observations, le gouvernement a mentionné dans sa lettre du 2 mai 1991 qu'il s'attendait que le comité examine ce document, où le USCIB soulève la plupart des éléments factuels et des arguments juridiques avancés par le gouvernement et qu'on peut résumer comme suit:
- - le déclin de la représentation syndicale n'est pas dû à la doctrine Mackay mais à un large éventail de facteurs (tels ceux qui sont énumérés dans les observations du gouvernement);
- - le recours aux remplaçants de grévistes est resté approximativement au même niveau durant plus de cinquante ans, ce que démontrent les données existantes;
- - les remplaçants ne sont pas utilisés pour détruire les syndicats, mais plutôt en fonction des impératifs commerciaux et économiques;
- - le droit du travail des Etats-Unis assure un équilibre équitable entre les intérêts divergents des employés et des employeurs, en limitant substantiellement le recours aux remplaçants et en donnant aux grévistes économiques des droits préférentiels de réintégration, pouvant être obtenus devant le NLRB et les tribunaux fédéraux.
- 87. Le USCIB s'interroge également, par voie préliminaire, sur la justification d'une plainte devant le Comité de la liberté syndicale pour évaluer une politique du travail des Etats-Unis, alors qu'il n'existe pas de cas concrets par rapport auxquels le comité peut évaluer l'application de la loi et de la pratique à des circonstances particulières. Si on ne lui expose pas les faits d'une grève donnée, le comité n'est pas en mesure d'évaluer la plainte. L'USCIB conclut que la politique des Etats-Unis en matière de remplacement des grévistes et l'interprétation qui en a été donnée dans l'arrêt Mackay ne constituent pas une violation des droits syndicaux.
C. C. Conclusions du comité
C. C. Conclusions du comité
- Conclusions du comité
- 88 Le comité a étudié attentivement les observations élaborées présentées par toutes les parties concernées. Avant d'examiner la question fondamentale, c'est-à-dire les aspects substantifs de la doctrine Mackay et ses effets en pratique, le comité souhaite préciser que les renseignements statistiques qui lui ont été fournis ne lui permettent pas de conclure avec quelque certitude si les employeurs ont effectivement utilisé plus fréquemment les travailleurs remplaçants durant les dernières années, et s'il existe ou non un lien entre le recours aux travailleurs remplaçants et le déclin du syndicalisme et de la négociation collective, comme l'allègue l'organisation plaignante.
- 89 Le comité note par ailleurs que la législation et la jurisprudence des Etats-Unis semblent effectivement mieux protéger les grévistes dans les situations où des pratiques déloyales du travail sont commises que dans celles où il s'agit d'une grève strictement économique, ce que démontrent certains exemples fournis par le gouvernement. Toutefois, le comité préfère ne pas s'appesantir sur cette distinction - en dépit de son incidence très concrète sur les perspectives de réemploi des grévistes économiques -, tout d'abord parce qu'il n'est pas compétent (et ne dispose pas des témoignages, preuves et arguments complets) pour prendre une telle décision, qu'il est préférable de laisser au NLRB ou aux tribunaux; deuxièmement, ce qui est peut-être une raison plus importante, parce que cette distinction fait perdre de vue le problème fondamental dans le présent contexte, soit de déterminer si la législation et la jurisprudence du travail des Etats-Unis sur cette question (la doctrine "Mackay") sont en conformité avec les principes de la liberté syndicale.
- 90 Le cadre législatif et jurisprudentiel de cette affaire peut être résumé ainsi:
- - l'article 13 de la NLRA garantit le droit de grève;
- - en contrepartie de ce droit, les employeurs ont le droit de poursuivre leurs opérations durant une grève, y compris celui d'embaucher des remplaçants permanents;
- - les tribunaux font une distinction entre les grévistes économiques et les employés faisant une grève à l'occasion de laquelle sont commises des pratiques du travail déloyales; ces derniers jouissent de meilleurs droits de réintégration;
- - la liste des actes de l'employeur qui peuvent transformer une grève économique en une grève comportant des pratiques déloyales du travail comprend notamment les actions suivantes: mesures unilatérales des employeurs sur des questions qu'ils sont tenus de négocier avec les représentants des employés, en vertu de la NLRA; licenciements injustifiés de grévistes; retrait injustifié de la reconnaissance du syndicat en tant qu'agent négociateur des employés; omission, de mauvaise foi, de fournir des renseignements financiers appropriés au syndicat. Lorsque l'organisme compétent en vient à de telles conclusions, la grève économique devient une grève comportant des pratiques déloyales du travail et les grévistes ont alors droit à être réintégrés immédiatement dans leurs fonctions s'ils proposent à l'employeur de reprendre leur travail sans conditions;
- - les syndicats bénéficient également d'une certaine protection aux termes de la NLRA, dans la mesure où ils continuent à représenter tant les grévistes que les remplaçants (sauf si un vote de désaccréditation est tenu);
- - bien que les tribunaux aient clarifié et étendu dans une certaine mesure les droits de réintégration des grévistes économiques (notamment dans les arrêts Fleetwood Trailer et Erie Resistor), les grévistes économiques qui ont été remplacés de façon permanente n'ont droit à être réintégrés dans leurs fonctions que lorsque des postes sont vacants - s'ils le deviennent -, par exemple si des travailleurs remplaçants décident de quitter l'entreprise.
- 91 Ce dernier point signifie en pratique qu'en l'absence d'une décision concluant à l'existence de pratiques déloyales du travail, ce qui de toute façon peut prendre plusieurs années avant que toutes les possibilités d'appel soient épuisées, un employeur peut légalement remplacer des grévistes économiques et ce de façon permanente. Cela signifie également qu'un travailleur qui a légalement exercé son droit de grève prévu par la loi peut se retrouver de façon permanente exclu de son emploi, même s'il n'est jamais officiellement licencié par l'employeur. Comme il est mentionné ci-dessus, les données existantes n'établissent pas que le recours aux travailleurs remplaçants a augmenté ces dernières années, qu'il est devenu une pratique généralisée ou qu'il existe un lien certain entre l'application de la doctrine Mackay et le déclin du syndicalisme aux Etats-Unis. Toutefois, on a fourni au comité des exemples, tirés de mémoires présentés devant les sous-comités législatifs, démontrant qu'il arrive effectivement des situations où des grévistes économiques voient leur poste occupé par des remplaçants permanents.
- 92 Le droit de grève est l'un des moyens essentiels dont diposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Le comité estime que ce droit fondamental n'est pas véritablement garanti lorsqu'un travailleur qui l'exerce légalement risque de voir son emploi occupé de façon permanente, tout aussi légalement, par un autre travailleur. Le comité estime que, si une grève est légale, l'utilisation d'une main-d'oeuvre étrangère à l'entreprise afin de remplacer les grévistes pour une durée indéterminée comporte un risque d'atteinte au droit de grève, qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 93. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
- Le comité invite le gouvernement à tenir compte de ce que, si une grève est légale, l'utilisation d'une main-d'oeuvre étrangère à l'entreprise afin de remplacer les grévistes, pour une durée indéterminée, comporte un risque d'atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux.