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Definitive Report - REPORT_NO251, June 1987

CASE_NUMBER 1390 (Israel) - COMPLAINT_DATE: 20-OKT-86 - Closed

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  1. 215. La Fédération des syndicats palestiniens a présenté une plainte en violation des droits syndicaux dans les territoires occupés par Israël contre le gouvernement israélien dans des communications des 20 et 23 octobre 1986, ainsi que du 5 novembre 1986. La CMT a transmis une communication le 23 mars 1987 pour appuyer la plainte. Le gouvernement a transmis ses observations dans une lettre du 24 février 1987.
  2. 216. Israël a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, l949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 217. Dans sa communication du 20 octobre, la Fédération des syndicats palestiniens allègue l'invasion, le 17 octobre 1986, du siège de l'Union des syndicats palestiniens à Jérusalem par les autorités israéliennes avec fouilles des locaux et interrogatoires des personnes présentes, suivis d'arrestations. Dans une communication du 23 octobre, cette organisation fait état d'autres violations des droits syndicaux concernant principalement la Fédération générale des syndicats à Naplouse. Il est allégué que le quartier général de la fédération de Naplouse a été fermé pour un mois à la suite d'une intrusion des forces d'occupation le dimanche 24 août 1986 à ll heures, avec interpellation de M. Shehada El Minawi, secrétaire général de la fédération, auquel il a été ordonné de fermer les locaux pour raisons de sécurité. Le secrétaire général ainsi que le trésorier, M. Shaher Saad, ont été assignés à résidence à Naplouse pour une période de six mois, avec obligation de se faire enregistrer tous les jours au poste de police. L'organisation plaignante allègue également l'arrestation de M. Mohamed El Bechir, secrétaire général adjoint du Syndicat des services médicaux, et de M. Youssef Eid, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l'électricité. Dans la même communication, il est en outre allégué que les autorités d'occupation se sont introduites dans les locaux syndicaux du Syndicat général des entreprises dans les villages d'Abou Diss, El Aizaria et El Sawahera de la province de Jérusalem, où ils ont confisqué des registres et des dossiers et ont arrêté des syndicalistes aux fins d'interrogatoires. De même, le 21 octobre 1986, les bureaux de la Fédération des travailleurs de la construction ont été investis par les autorités israéliennes qui ont détruit des équipements et ont arrêté cinq syndicalistes.
  2. 218. Une autre communication de la Fédération des syndicats palestiniens, en date du 5 novembre 1986, mentionne l'expulsion vers la Jordanie, le 3 novembre 1986, de M. Abdel Jabbar Choukri El Charabati, dirigeant syndical de la Confédération des syndicats de travailleurs de Cisjordanie et président du Syndicat des travailleurs de la ferronnerie et de la mécanique de la ville d'El Khalil. Dans une autre lettre du 5 novembre, l'organisation plaignante allègue en outre l'arrestation suivie de l'expulsion du territoire par le gouverneur militaire de M. Akram Hanié, rédacteur en chef du quotidien "Al Chaab", le 2 novembre 1986.
  3. 219. La Confédération mondiale du travail, dans sa lettre du 23 mars 1987, mentionne l'arrestation de dix membres du comité exécutif de la Fédération des syndicats palestiniens de Gaza.
  4. 220. Dans toutes ses communications, la Fédération des syndicats palestiniens allègue que les autorités israéliennes font preuve de terrorisme et de racisme à l'égard des syndicalistes dans les territoires arabes occupés et que les actions entreprises à l'encontre des syndicats et de leurs biens sont exécutées de manière sauvage.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 221. Par une communication du 24 février 1987, le gouvernement d'Israël a transmis ses observations sur les allégations des plaignants. En premier lieu, il déclare respecter les droits syndicaux et les mettre en oeuvre scrupuleusement dans les territoires sous sa juridiction. Il nie que les activités syndicales aient été restreintes et que des dirigeants syndicaux aient été détenus pour leurs activités syndicales et que des locaux syndicaux aient été fermés pour les mêmes activités. Le gouvernement souligne que, selon lui, les quatre fédérations syndicales qui existent dans les territoires de la rive occidentale du Jourdain et de Gaza sont liées par leurs activités à diverses factions terroristes palestiniennes. Il indique également que, depuis la fin de 1984, les activités terroristes ont augmenté et qu'elles s'exercent sous couvert d'activités syndicales; ainsi, des personnes connues comme syndicalistes ont été appréhendées, accusées et punies pour leur implication dans des actions terroristes. Le gouvernement déclare qu'à maintes reprises il a constaté que des membres de syndicats avaient été inculpés et sanctionnés pour avoir posé des bombes, et que ces activités terroristes, à l'instar d'autres activités illégales ou politiques, sont exercées ostensiblement sous couvert d'activités syndicales. Il déclare également que les dissensions entre les fédérations syndicales elles-mêmes prouvent leur nature véritable et que le champ principal de leurs activités n'a rien à voir avec le mandat qu'elles affichent. Dans certains cas, les "syndicats" sont, selon le gouvernement, constitués même s'ils ne représentent pas d'activité professionnelle dans un domaine spécifique, comme cela est arrivé récemment avec le Syndicat des charpentiers dans la ville de Daharia (Hébron). A l'appui de cette dernière assertion, le gouvernement envoie des tracts de la Fédération des syndicats palestiniens de la faction du Fatah sur le thème de l'"unité de l'OLP".
  2. 222. Le gouvernement déclare ne pas intervenir dans les activités des organisations syndicales mentionnées par les plaignants, à moins qu'il ne lui soit transmis des informations convaincantes sur des activités illégales ou terroristes de ces organisations. Il précise qu'en outre il reconnaît l'existence de syndicats non enregistrés. Concernant spécifiquement les faits allégués dans les communications des organisations plaignantes, le gouvernement répond point par point dans les termes suivants: - lors de la réunion du 17 octobre 1986 du Syndicat des travailleurs de Naplouse, les membres des forces de sécurité israéliennes ont recherché des documents incitant à des activités terroristes. Aucun participant à la réunion syndicale n'a été arrêté; - il en est de même pour la réunion du comité des travailleurs du 20 octobre 1986 dans les villages d'Abou Diss et d'El Sawahira au cours de laquelle les forces de sécurité ont trouvé des documents illégaux mais n'ont arrêté personne; - s'agissant de la fermeture des locaux de la Fédération des syndicats à Naplouse le 24 septembre 1986, elle a été justifiée, selon le gouvernement, par des informations tangibles sur les activités illégales de cette organisation, en particulier le recrutement de membres pour les unités terroristes. Le secrétaire général, M. Shehada El Minawi, a été assigné à résidence pour une durée de six mois par ordonnance militaire, et deux autres membres de l'organisation, MM. El Bechir et Youssef Eid, ont été arrêtés; - l'expulsion de M. Akram Hanié, rédacteur en chef du journal "Al Chaab", et de M. El Charabati de Hébron, tous deux syndicalistes, a été causée par leur engagement personnel dans des activités hostiles pour le compte de leurs guides dans les organisations terroristes palestiniennes. Le gouvernement déclare ne recourir à ce type de mesures que de façon exceptionnelle, et précise à cet égard qu'au cours des deux dernières années 14 personnes seulement ont été expulsées, la plupart vers la Jordanie. En outre, une personne faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion peut interjeter appel devant la Cour suprême d'Israël; - quant aux dix membres du comité exécutif de la Fédération des syndicats palestiniens de Gaza, ils ont été convoqués le 16 décembre 1986 pour enquêter sur leur soutien à des activités terroristes. Aucun d'entre eux n'a été arrêté contrairement aux allégations des plaignants.
  3. 223. Le gouvernement déclare que l'Etat d'Israël continuera de garantir la liberté d'exercer des activités syndicales authentiques mais qu'il lui incombe de distinguer de ces activités toutes les activités de ceux qui "brandiraient la bannière des syndicats comme un pavillon de complaisance".

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 224. Le comité observe que le présent cas concerne des allégations de violations des droits syndicaux de syndicats et de syndicalistes palestiniens dans les territoires arabes occupés par Israël. En premier lieu, le comité relève que les faits allégués se sont déroulés dans la rive occidentale du Jourdain et dans la bande de Gaza, territoires faisant l'objet, depuis juin 1967, d'une occupation militaire de l'Etat d'Israël et, à ce titre, soumis à son administration. Bien qu'il n'appartienne pas au comité de se prononcer sur les questions relatives à l'occupation ou à l'administration de ces territoires, le comité souligne qu'il incombe au gouvernement d'Israël de respecter, en tant que Membre de l'OIT, les principes de la liberté syndicale tels qu'ils découlent de la Constitution de l'OIT dans les territoires occupés où ne s'applique pas sa législation nationale et à l'égard desquels aucune obligation au regard de l'OIT ne découle pour lui du fait d'avoir ratifié les conventions internationales sur la liberté syndicale. A cet égard, le comité rappelle que sa compétence s'exerce indépendamment de la ratification des conventions sur la liberté syndicale.
  2. 225. Il ressort des allégations des plaignants que les autorités militaires israéliennes ont fait irruption à l'improviste dans divers locaux syndicaux de Naplouse et de Jérusalem et que, par la suite, ces locaux ont été fermés temporairement et les réunions syndicales interdites. Au cours de ces opérations, des publications et documents ont été saisis dont le caractère, au dire du gouvernement israélien, était non pas syndical mais politique, voire terroriste. Le comité a pris connaissance du tract du 1er mai 1986 transmis par le gouvernement qui, dans le contexte des luttes ouvrières et syndicales, fait des références à l'OLP et à la situation politique internationale dans le cadre de la question palestinienne. Dans la situation présente, le comité relève que les opérations militaires n'ont précisément visé que les locaux syndicaux et que leur but était de mettre un terme à des activités que les autorités israéliennes considèrent comme terroristes. Le comité n'est pas en mesure de se prononcer sur cet aspect du cas, d'autant plus que les éléments en sa possession ne lui permettent pas de déterminer avec certitude si, dans le cas d'espèce, les syndicats palestiniens concernés ont exercé des activités qui allaient au-delà des activités syndicales authentiques. Le comité constate aussi que le gouvernement n'a pas, de son côté, fourni d'informations spécifiques suffisantes pour démontrer avec certitude le caractère politique des activités qu'auraient exercées les syndicats en question et qui auraient pu justifier les interventions militaires alléguées. En conséquence, le comité rappelle que la liberté de réunion syndicale constitue l'un des éléments fondamentaux des droits syndicaux et que l'inviolabilité des locaux syndicaux a comme corollaire indispensable que les autorités publiques ne peuvent pénétrer dans ces locaux sans être en possession d'un mandat judiciaire les y autorisant. (Voir notamment 230e rapport, cas no 1166 (Honduras), paragr. 112.) Le comité rappelle également que, dans l'intérêt du développement normal du mouvement syndical, il serait désirable que les parties intéressées s'inspirent des principes énoncés dans la résolution sur l'indépendance du mouvement syndical adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 35e session (1952), qui prévoit notamment que l'objectif fondamental et permanent du mouvement syndical est le progrès économique et social des travailleurs et que, lorsque les syndicats décident, en se conformant aux lois et usages en vigueur et à la volonté de leurs membres, d'établir des relations avec les partis politiques ou d'entreprendre une action politique pour favoriser la réalisation de leurs objectifs économiques et sociaux, ces relations ou cette action politique ne doivent pas être de nature à compromettre la continuité du mouvement syndical ou de ses fonctions sociales et économiques, quels que soient les changements politiques qui peuvent affecter la situation dans le pays. Voir notamment 201e rapport, cas no 842 (Argentine), paragr. 40.)
  3. 226. Au sujet des mesures restrictives personnelles dont ont fait l'objet des syndicalistes, assignation à résidence du secrétaire général de la Fédération des syndicats de Naplouse, M. Shehada El Minawi, pour une durée de six mois, arrestations de MM. El Bechir et Youssef Eid et assignation à résidence de M. Shaher Saad, président du Syndicat des mécaniciens, pour la même durée, le comité relève que le gouvernement ne fournit pas d'informations spécifiques à cet égard. En ce qui concerne l'assignation à résidence de syndicalistes, le comité, tout en reconnaissant qu'une telle procédure peut être motivée par une situation critique donnée, attire l'attention du gouvernement sur l'intérêt qu'il y aurait à entourer cette procédure de toutes les sauvegardes nécessaires en vue de garantir qu'elle ne puisse pas être utilisée dans le but de porter atteinte au libre exercice des droits syndicaux. En effet, l'imposition de telles sanctions pour motifs syndicaux constitue une violation des principes de la liberté syndicale. (Voir notamment 172e rapport, cas no 870 (Pérou), paragr. 324.)
  4. 227. Au sujet de l'expulsion de M. Akram Hanié, rédacteur en chef du journal "Al Chaab", par le gouverneur militaire et de M. El Charabati, dirigeant syndical de la Confédération des syndicats de travailleurs de Cisjordanie, le comité note que le gouvernement se borne à indiquer dans sa réponse que ces mesures ne sont prises que de façon exceptionnelle et qu'il peut toujours être interjeté appel devant la Cour suprême d'Israël. En ce qui concerne M. Akram Hanié, il n'apparaît pas clairement au comité si les raisons des mesures prises à son encontre sont de type purement syndical, d'autant plus que les organisations plaignantes ne fournissent pas de précisions à cet égard mais que la personne dont il est question a été citée comme syndicaliste sans autre détail. Le comité ne dispose guère de plus d'informations sur M. El Charabati. Dans ces conditions, le comité ne peut que rappeler qu'une mesure d'exil de syndicalistes, qui est en contradiction avec les droits de l'homme, présente une gravité particulière en privant les intéressés de la possibilité de travailler dans leur pays; de plus, elle les sépare de leurs familles. Elle constitue en outre une atteinte à la liberté syndicale car elle affaiblit les organisations syndicales en les privant de leurs dirigeants. (Voir notamment 217e rapport, cas no 1104 (Bolivie), paragr. 316.)
  5. 228. Le comité relève par ailleurs que dix membres du comité exécutif de la Fédération des syndicats palestiniens de Gaza ont été convoqués par la police le 16 décembre 1986 qui les soupçonnait de se livrer à des activités terroristes. Selon les informations transmises par le gouvernement, ces personnes auraient été relâchées après avoir été interrogées. En l'absence d'informations plus précises sur cet aspect du cas, le comité décide qu'il n'appelle pas un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 229. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité rappelle que la liberté de réunion syndicale est un aspect fondamental des droits syndicaux et que l'inviolabilité des locaux syndicaux devrait être respectée par les autorités. Le comité demande au gouvernement de faire en sorte que les syndicats puissent organiser leurs réunions syndicales dans leurs locaux sans ingérence des autorités militaires.
    • b) Il prie le gouvernement de veiller à ce que des mesures telles que l'assignation à résidence ou l'expulsion de syndicalistes soient entourées des garanties judiciaires nécessaires et, en outre, d'assurer que de telles mesures ne soient pas utilisées de telle façon qu'elles portent atteinte aux droits syndicaux, ou constituent une ingérence dans les activités des organisations syndicales.
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