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- 90. La Fédération des employés de banque du Pakistan (PBEF) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux dans une communication datée du 16 décembre 1985. Le gouvernement a fait part de ses observations dans une communication en date du 6 mai 1986.
- 91. Le Pakistan a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 92. La PBEF, dans sa communication du 16 décembre 1985, allègue que la société de banque American Express poursuit une politique d'hostilité et de tracasseries contre ses salariés depuis sa création au Pakistan. Selon la PBEF, deux des secrétaires généraux et un président du syndicat ont été licenciés ou contraints de quitter leur emploi à la banque et, le 3 octobre 1985, cette dernière a licencié 54 autres personnes sans donner de motif et sans en référer au syndicat des salariés ou à la PBEF. Parmi les personnes licenciées figurent le secrétaire général du syndicat de Lahore et le vice-président du syndicat de Karachi, le secrétaire à l'information, le trésorier et trois membres du comité exécutif.
- 93. La PBEF déclare que ces mesures sont contraires non seulement à la convention collective entre la PBEF et la banque, mais aussi au paragraphe 26 de la Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale. L'organisation plaignante explique que des démarches vaines écrites et orales ont été effectuées auprès du ministère du Travail en vue d'un règlement négocié du problème et de la réintégration des salariés licenciés, ainsi qu'auprès du consulat et de l'ambassade des Etats-Unis au Pakistan.
- 94. Les licenciements, selon l'organisation plaignante, ont été effectués à la suite de la tenue d'un séminaire d'éducation ouvrière de deux jours organisé par la PBEF les 21 et 22 septembre 1985 dans les locaux de la banque, l'employeur n'ayant accordé son autorisation qu'après que le syndicat eut menacé d'engager une action directe. La PBEF allègue que les emplois des travailleurs licenciés ont depuis été affectés à des travailleurs sous contrat temporaire employés par la banque à des salaires inférieurs.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 95. Dans sa communication du 6 mai 1986, le gouvernement déclare que, selon les renseignements dont il dispose, la direction de l'American Express a licencié 54 salariés, après avoir informatisé ses opérations au Pakistan. Les licenciements ont été effectués sur la base du principe "dernier entré, premier sorti"; les travailleurs licenciés ont reçu un mois de salaire en guise de préavis de licenciement, ainsi que les indemnités prévues par la loi telles que les gratifications et les fonds de prévoyance.
- 96. Le gouvernement déclare que toutes les sociétés commerciales au Pakistan ont le droit de réorganiser leurs opérations selon leurs besoins et de garder les effectifs correspondant à leur propre stratégie économique et commerciale. La société de banque American Express a modernisé ses activités selon ses besoins et, pour ce faire, elle a mis fin aux services de ses salariés en surnombre. Le gouvernement ajoute que, en se passant des services de certains de ses salariés, la direction a respecté les procédures légales contenues dans l'ordonnance de 1968 sur l'emploi dans l'industrie et le commerce au Pakistan occidental. En conséquence, l'allégation de l'organisation plaignante n'est pas fondée.
- 97. Selon le gouvernement, l'ordonnance de 1968 protège les droits des travailleurs et prévoit la réparation des dommages résultant du licenciement injustifié des salariés. Selon le règlement no 12 et l'article 25 A de l'ordonnance de 1969 sur les relations professionnelles, dont copie a été fournie par le gouvernement, il ressort qu'aux termes du règlement 12 a)tout travailleur victime de licenciement a le droit de contester la décision et de demander des indemnités au tribunal du travail. En cas d'échec, le travailleur a le droit de porter l'affaire devant le tribunal d'appel du travail. Les tribunaux d'appel - présidés par des juges de la Haute Cour - rendent des sentences définitives. Le gouvernement affirme donc que, dans le présent cas, si les travailleurs estimaient que les décisions de licenciement de la société de banque American Express étaient illégales ou injustifiées, ils auraient dû faire appel contre ces décisions conformément aux lois du pays. Or, explique-t-il, lorsque le ministère a pris contact avec l'organisation plaignante pour établir les faits, la réponse de cette dernière a montré que sans exercer les droits susmentionnés et épuiser les recours prévus par la loi, le syndicat s'était adressé au BIT en déposant une plainte contre le gouvernement du Pakistan, lequel n'est pas du tout impliqué directement dans ce cas. Le gouvernement conclut que le motif de cette plainte est de faire pression sur lui pour l'obliger à intervenir dans cette affaire, intervention qui n'est justifiée selon lui ni par les faits ni par la loi.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 98. Avant d'examiner le présent cas quant au fond, le comité estime approprié d'attirer l'attention du gouvernement sur la position qu'il a adoptée auparavant dans des cas ayant trait à des questions de procédures nationales. Le comité a toujours considéré que le recours aux procédures judiciaires nationales, quel qu'en soit le résultat, est sans aucun doute un facteur à prendre en considération dans l'examen d'un cas, mais que, étant donné la nature de ses responsabilités, il ne saurait se considérer comme lié par les règles selon lesquelles les procédures nationales de recours doivent être épuisées. (Voir, par exemple, 60e rapport, cas no 234 (Grèce), paragr. 89.) Par ailleurs, le comité a déclaré à plusieurs occasions que, lorsque la législation nationale prévoit des procédures d'appel auprès de tribunaux indépendants et que ces procédures n'ont pas été utilisées pour les questions en cause dans la plainte, il doit en tenir compte lorsqu'il examine la plainte. (Voir, par exemple, 14e rapport, cas no 88 (France/Soudan), paragr. 30.)
- 99. En outre, le comité rappelle au gouvernement que, bien que les faits du présent cas concernent des licenciements par un employeur du secteur privé, il incombe au gouvernement, en particulier par suite de sa ratification des conventions sur la liberté syndicale, de veiller à ce que les principes de la liberté syndicale, notamment les garanties figurant dans les conventions, soient pleinement respectés dans le pays.
- 100. S'agissant des informations disponibles dans le présent cas, le comité relève que les raisons données par l'organisation plaignante et par le gouvernement pour les licenciements d'octobre 1985 sont totalement contradictoires: le syndicat affirme qu'ils sont dus à la participation des intéressés à un séminaire d'éducation syndicale, tandis que le gouvernement mentionne l'informatisation des opérations de la banque qui a entraîné une réduction du personnel. De plus, le comité déplore que la réponse du gouvernement ne fournisse pas d'informations ni d'explications au sujet des deux secrétaires généraux et du président du syndicat plaignant qui auraient été licenciés.
- 101. Par le passé, le comité a déclaré que des mesures de discrimination antisyndicale ne devaient pas être autorisées sous prétexte de licenciements pour des motifs économiques. (Voir, par exemple, 234e rapport, cas no 1173 (Canada/Colombie britannique), paragr. 82.) Dans le présent cas, toutefois, l'organisation plaignante ne fait pas mention des mesures de modernisation prises par l'employeur et évoque seulement en termes généraux "une politique d'hostilité et de tracasseries" contre les salariés et la réaffectation des emplois à des travailleurs sous contrat temporaire à des taux de salaires inférieurs. Il est fait mention de la convention collective entre la PBEF et la société mais, bien qu'elle ait eu la possibilité, conformément à la procédure, de fournir des renseignements et des informations complémentaires à l'appui de ses allégations, l'organisation plaignante n'a pas fourni de copie de la convention. Ces renseignements complémentaires auraient mieux permis au comité d'évaluer les relations entre le syndicat et l'employeur et, en particulier, la position prise par les deux parties au sujet des licenciements et des changements technologiques dans cette banque.
- 102. Le comité, dans ces conditions, ne peut que conclure que les renseignements mis à sa disposition ne sont pas suffisants pour déterminer s'il y a eu ou non violation des droits syndicaux. En outre, il note que les victimes n'ont pas fait usage des procédures mises à leur disposition au plan national, telles qu'elles ont été décrites par le gouvernement, pour demander réparation. De plus, le comité note que les 54 travailleurs licenciés ont reçu toutes les prestations financières et autres qui leur étaient dues.
- 103. Le comité rappelle néanmoins que les gouvernements doivent, en cas de nécessité, prendre des dispositions pour que les travailleurs soient protégés contre les mesures, notamment le licenciement, susceptibles de provoquer, ou qui ont pour objet la discrimination antisyndicale dans l'emploi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 104. Dans ces conditions et considérant l'ensemble du cas, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité considère que les renseignements mis à sa disposition ne sont pas suffisants pour déterminer s'il y a eu violation des droits syndicaux.
- b) Le comité rappelle néanmoins que les gouvernements doivent, en cas de nécessité, prendre des dispositions afin que les travailleurs soient protégés contre les mesures, notamment le licenciement, susceptibles de provoquer, ou qui ont pour objet la discrimination antisyndicale dans l'emploi.