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Interim Report - REPORT_NO241, November 1985

CASE_NUMBER 1309 (Chile) - COMPLAINT_DATE: 03-OKT-84 - Closed

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  1. 750. Le comité a examiné ce cas à ses réunions de février et mai 1985, au cours desquelles il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 238e rapport, paragr. 330 à 364, et 239e rapport, paragr. 298 à 340, approuvés respectivement par le Conseil d'administration à ses 229e et 230e sessions (fév.-mars et mai 1985).)
  2. 751. Depuis lors, le BIT a reçu des plaignants les communications suivantes: Confédération internationale des syndicats libres (CISL): 22 mai 1985, 4 et 31 juillet 1985, 9 et 22 août 1985, 9, 24, 25 et 27 septembre, 7 octobre 1985; Confédération nationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois, des matériaux de construction et activités connexes: 15 mai 1985; Coordinadora Nacional Sindical (CNS): 23 mai 1985; Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE): 30 mai 1985, 1er et 15 octobre 1985; Groupement national des travailleurs: 3 juin 1985; Confédération mondiale du travail (CMT): 5 juin et 3 octobre 1985; Fédération syndicale mondiale (FSM): 8 juillet 1985, 8 et 21 août 1985; Syndicats d'entreprise nos 1 et 6 d'El Salvador et no 8 de Sewell y Minas de la Corporation nationale du cuivre: 31 juillet 1985; Union internationale des syndicats de la métallurgie: 20 septembre 1985. Le gouvernement, pour sa part, a fourni ses observations dans des communications des 8, 15, 29 août, 11 septembre et 16 octobre 1985.
  3. 752. Le Chili n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 753. Les plaintes déposées dans le cadre du présent cas concernaient divers événements qui s'étaient produits au Chili depuis septembre 1984. Les allégations s'étaient référées à l'intervention des forces de l'ordre lors de la journée de protestation organisée le 4 septembre 1984 qui se serait soldée par le décès de dix personnes, de nombreux blessés et plus d'un millier d'arrestations. Les plaignants avaient mis notamment en exergue le cas de Juan Antonio Aguirre Ballesteros qui aurait été arrêté puis torturé et dont le corps avait été retrouvé par la suite. Le gouvernement avait indiqué, à cet égard, que des enquêtes étaient menées par les tribunaux criminels compétents.
  2. 754. Il apparaissait, à la lumière des allégations formulées, que le siège de certaines organisations syndicales (notamment la Confédération du bâtiment, l'Association professionnelle des enseignants du Chili (AGECH) et le syndicat Chilectra) avait fait l'objet d'assauts de la part des forces de l'ordre, au cours desquels du matériel aurait été détruit, de la documentation confisquée et des syndicalistes arrêtés. Le gouvernement avait nié avoir donné des ordres pour effectuer des perquisitions dans les locaux syndicaux en question. En outre, le lendemain de l'assaut donné au local de l'AGECH, MM. Manuel Guerrero, président du secteur métropolitain de cette organisation, et José Manuel Parada, fonctionnaire du Vicariat de la solidarité, avaient été enlevés sur la voie publique. Par la suite, leurs corps avaient été retrouvés, horriblement mutilés. Le gouvernement avait indiqué qu'une enquête judiciaire avait été ouverte.
  3. 755. Les plaignants avaient également fait état de nombreuses mesures d'arrestation et de relégation prises à l'encontre de syndicalistes. Selon le gouvernement, certains d'entre eux n'avaient pas été arrêtés, d'autres avaient recouvré la liberté, et les motifs des relégations n'étaient pas liés à des activités syndicales.
  4. 756. Enfin, le comité avait été saisi d'allégations relatives à des atteintes portées à l'exercice du droit de réunion, notamment à l'encontre d'un syndicat d'entreprise de la Corporation nationale du cuivre. Le gouvernement n'avait pas fourni de réponse sur ce point.
  5. 757. A sa session de mai-juin 1985, le Conseil d'administration avait approuvé les conclusions suivantes du comité:
    • a) Le comité exprime sa profonde préoccupation devant les difficultés auxquelles se heurtent un nombre important d'organisations syndicales chiliennes et leurs dirigeants. Le comité estime que le gouvernement devrait prendre d'urgence toutes les mesures nécessaires pour que disparaisse ce climat de violence, ce qui suppose que soit garanti le respect des droits de l'homme, essentiels pour le développement des activités syndicales.
    • b) Au sujet des décès survenus lors de la Journée nationale de protestation du 4 septembre 1984, le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur l'évolution de l'enquête ouverte à cet égard et les résultats auxquels elle aboutira.
    • c) Au sujet de la mort de MM. Aguirre, Guerrero et Parada, le comité exprime le ferme espoir que les enquêtes ouvertes dans ces différentes affaires permettront de déterminer rapidement les responsabilités. Il demande au gouvernement de continuer à lui fournir des informations sur ces enquêtes.
    • d) Au sujet des assauts donnés contre des locaux syndicaux, le comité déplore que de tels agissements aient été commis à nouveau contre des organisations syndicales. Il note que le gouvernement nie avoir donné des ordres pour effectuer des perquisitions dans ces locaux. Il demande au gouvernement d'ordonner des enquêtes pour rechercher les auteurs de ces attaques qui appellent des mesures sévères de la part des autorités à l'égard des responsables et de fournir des informations sur toutes les enquêtes effectuées à ce sujet.
    • e) Au sujet des mesures d'arrestation et de relégation de syndicalistes, le comité note les informations du gouvernement et notamment que certaines personnes n'ont pas été arrêtées et que d'autres sont en liberté. Il estime que l'accumulation de ces mesures de relégation affaiblit considérablement les organisations syndicales en les privant de leurs dirigeants et en entravant ainsi leurs activités. Il demande au gouvernement de fournir des informations sur la situation des personnes mentionnées en annexe pour lesquelles il n'a pas encore envoyé de réponse et sur les faits concrets à l'origine des mesures prises à leur encontre.
    • f) Au sujet des entraves imposées au droit de réunion, le comité constate avec regret que le gouvernement n'a pas levé ces limitations. Il lui demande de fournir ses observations au sujet des allégations formulées par le syndicat d'entreprise no 6 de la Corporation nationale du cuivre.

B. Nouvelles allégations

B. Nouvelles allégations
  1. 758. Dans sa communication du 22 mai 1985, la CISL se réfère à une lettre que lui a adressée, le 7 mai 1985, la Confédération des travailleurs du cuivre. Cette dernière organisation allègue que, le 27 avril 1985, plusieurs maisons de dirigeants du syndicat El Salvador furent perquisitionnées à Diego de Amalgro pendant que ces personnes assistaient au Congrès national de la confédération.
  2. 759. Le 1er mai 1985, un dirigeant de ce même syndicat fut convoqué au commissariat de carabiniers d'El Salvador. Ce même jour, plusieurs dirigeants du syndicat de la zone andine furent arrêtés et retenus pendant plusieurs heures comme responsables d'une épreuve athlétique organisée dans les rues de la Villa minera andina pour commémorer le 1er mai, alors qu'une autorisation avait été accordée.
  3. 760. Le 3 mai 1985, M. Raúl Montecinos, dirigeant de la zone de Diego de Amalgro et dirigeant national de la confédération, aurait été arrêté puis transféré à la ville de Copiapó.
  4. 761. La Confédération nationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois, des matériaux de construction et activités connexes et le Groupement national des travailleurs allèguent, dans leurs communications des 15 mai et 3 juin 1985, que le 9 avril 1985 le siège de la Confédération du bâtiment a fait l'objet d'une perquisition illégale par un groupe de dix individus armés de mitraillettes et le visage couvert de passe-montagnes. Cette perquisition, effectuée sans mandat légal, a été menée avec violence. Les dirigeants syndicaux présents ont été victimes de vexations, d'agressions et de coups. Les meubles furent cassés et divers biens furent emportés, dont le matériel de formation et les archives de la confédération. Plusieurs dirigeants furent menacés de mort s'ils continuaient à exercer leurs activités.
  5. 762. Un peu plus tard, le même jour, ajoute l'organisation plaignante, des fonctionnaires carabiniers se présentèrent au siège de la confédération et interrogèrent les dirigeants Figueroa Jorquera, Bustamante Garcia et Alvarez, qui furent ensuite emmenés au commissariat puis de nouveau interrogés.
  6. 763. En outre, selon l'organisation plaignante, pendant les mois de mars, avril et mai 1985, plusieurs de ses dirigeants ont été fréquemment suivis, menacés ou inquiétés. Depuis le 9 avril, des carabiniers contrôlent l'entrée du siège syndical et parfois empêchent l'accès des dirigeants et membres.
  7. 764. Devant ces faits, la confédération a saisi la justice par des plaintes et des recours de protection. Il apparaît comme résultat de ces actions judiciaires que les personnels de la Centrale nationale de renseignements, des carabiniers du Chili et de la Police civile des recherches n'ont pas participé à la perquisition effectuée dans le local de la confédération et qu'il n'existait pas de mandat d'arrêt contre les dirigeants syndicaux.
  8. 765. L'organisation plaignante ajoute que, le 15 avril 1985, le ministre de l'Intérieur a poursuivi devant la justice quatre de ses dirigeants, à savoir Sergio Troncoso, José E. Rivera, José Manuel Bustamante et José Figueroa, pour infractions à la loi sur la sécurité de l'Etat, en présentant à l'appui de sa plainte la documentation saisie lors de l'opération paramilitaire du 9 avril au siège syndical. Pour l'organisation plaignante, les liens entre les autorités et le groupe en question sont ainsi clairement démontrés.
  9. 766. Dans sa communication du 23 mai 1985, le CNS mentionne la relégation de plusieurs dirigeants syndicaux (voir annexe), dont certains seraient internés dans un camp, à Conchi, dans le nord du pays.
  10. 767. La CMOPE mentionne également, dans sa communication du 30 mai 1985, diverses relégations de syndicalistes de l'enseignement (dont les noms avaient déjà été communiqués au comité), ainsi que le licenciement de plusieurs membres et dirigeants de l'Association professionnelle des enseignants du Chili (AGECH): Alban Mancilla, Orlando Aguilar, Luis Maldonado, Carlos Trujillo, Nelson Torres, tous dirigeants ou anciens dirigeants du Conseil communal de Castro, ainsi que Juan Ruiz, président du Conseil provincial de Puerto Montt.
  11. 768. Dans sa communication du 4 juillet 1985, la CISL mentionne la situation de Siergo Aguirre, président du Syndicat des travailleurs portuaires de San Antonio, qui a été licencié de la fonction publique par décret suprême après avoir été relégué.
  12. 769. La CISL se réfère également au procès intenté contre quatre dirigeants de la Confédération des travailleurs du bâtiment. Au cours du procès, Manuel Bustos, président de la Coordinadora Nacional Sindical, a été appelé à témoigner et, pendant l'interrogatoire mené par le magistrat instructeur, celui-ci ordonna la détention de Manuel Bustos. Il fut conduit à l'ex-prison publique et enfermé dans une cellule sans lumière. Pendant trois jours, il ne reçut ni eau, ni aliments. Il fut remis en liberté sur décision unanime de la huitième Chambre de la Cour d'appel. Trois jours après la libération de Manuel Bustos, les quatre dirigeants de la Confédération du bâtiment ont été libérés sous caution.
  13. 770. Le Groupement national des travailleurs et la CMT mentionnent aussi, dans leurs communications des 3 et 5 juin 1985, l'arrestation de Manuel Bustos.
  14. 771. Dans sa communication du 8 juillet 1985, la FSM se réfère au cas de Pedro Aroya Díaz Valdez, président du Syndicat des pilotes professionnels et techniques, licencié en 1984 en raison de ses activités syndicales. En outre, son organisation a été virtuellement détruite. Toutes ses démarches pour être réintégré dans son travail ont été infructueuses.
  15. 772. Les syndicats nos 1 et 6 d'El Salvador et no 8 de Sewell y Minas de la Corporation nationale du cuivre ainsi que la CISL, dans leurs communications du 31 juillet 1985, font référence au licenciement de Rodolfo Seguel, président de la Confédération nationale du cuivre. Cette mesure a été entérinée par la Cour suprême suite au recours présenté par l'intéressé. Selon les plaignants, l'inexistence pratique de protection des dirigeants syndicaux empêche l'exercice des mandats syndicaux et met en péril l'autonomie du mouvement syndical. Par la suite, la FSM et la CISL ont envoyé, dans leu rs communications des 21 et 22 août 1985, le texte de la sentence rendue par la Cour suprême dans cette affaire.
  16. 773. Dans leurs communications des 8 et 9 août 1985, la FSM et la CISL protestent contre l'arrestation de dirigeants syndicaux dont Sergio Troncoso, président de la Confédération des travailleurs du bâtiment, et Juan Ponce qui ont été par la suite relégués à Melinka dans l'extrême sud du pays.
  17. 774. La CISL indique, dans son télégramme du 9 septembre 1985, qu'une manifestation convoquée le 4 septembre 1985 par le Groupement national des travailleurs (CNT) a été violemment réprimée. Selon la CISL, dix personnes auraient été tuées et des centaines arrêtées. Plusieurs dirigeants de la CNT avaient été inculpés, en particulier Rodolfo Seguel, Manuel Bustos, José Ruiz Di Giorgio et Sergio Troncoso. Par la suite, dans des communications des 24 et 27 septembre 1985, ainsi que du 3 octobre 1985, la CISL et la CNT signalent que, suite à une décision de trois juges de la Cour suprême, un mandat d'arrêt a été lancé contre Rodolfo Seguel et Manuel Bustos qui ont été incarcérés. Ont été également arrêtés José Ruiz di Giorgio, président du Syndicat des travailleurs du pétrole, Maria Rozas et Mercedes Jerez, dirigeantes de l'Association professionnelle des enseignants du Chili (AGECH). L'UIS de la métallurgie mentionne également l'arrestation et la relégation de Claudio Gallardo, dirigeant de la Confédération des syndicats des travailleurs de la métallurgie (CONSTRAMET). La CMOPE a, quant à elle, allégué, dans sa communication du 1er octobre 1985, que quatre dirigeants syndicaux de l'AGECH ont été arrêtés le 30 septembre. Il s'agit de Jorge Pavez, président; Samuel Bello, trésorier, Luis Campo Leal et Carlos Poblete Avila, membres de l'exécutif national.
  18. 775. Dans sa communication du 25 septembre 1985, la CISL apporte des précisions sur les mesures prises par les autorités à la suite de la manifestation du 4 septembre. Selon la CISL, cette manifestation avait pour objet de demander au gouvernement une réponse aux revendications contenues dans "le cahier de revendications des travailleurs" adopté en août par l'Assemblée nationale des dirigeants du Groupement national des travailleurs. Le gouvernement aurait répliqué à cette journée de protestation par des inculpations de 87 dirigeants d'organisations étudiantes, syndicales et politiques dont 13 dirigeants du Groupement national des travailleurs et 17 dirigeants du Groupement professionnel des enseignants du Chili. En outre, 63 autres personnes auraient été détenues administrativement pendant une période de vingt jours. De même, plus de 500 personnes auraient été arrêtées, dans tout le pays, au cours de manifestations. Elles auraient été mises à la disposition des tribunaux de police locaux pour avoir provoqué des désordres sur la voie publique.
  19. 776. Dans sa communication du 7 octobre 1985, la CISL déclare que Manuel Bustos, Rodolfo Seguel et José Ruiz di Giorgio continuent à être détenus. Sept autres dirigeants syndicaux auraient été également arrêtés et incarcérés à la prison de Santiago (voir annexe). La CMOPE, quant à elle, mentionnant dans sa communication du 15 octobre 1985 l'arrestation de quatre dirigeants de l'AGECH, indique que, selon les organisateurs de la manifestation du 4 septembre, des actes de provocation auraient eu lieu. Elle signale qu'on a relevé que des coups de feu avaient été tirés par les occupants d'une voiture non immatriculée, coups de feu qui auraient causé morts et blessés.

C. Réponses du gouvernement

C. Réponses du gouvernement
  1. 777. Avant de répondre aux allégations spécifiques formulées dans le présent cas, le gouvernement a présenté, dans sa communication du 11 septembre 1985, un commentaire général au sujet de la liberté syndicale au Chili. Il mentionne notamment dans ce commentaire quelles sont les dispositions en vigueur en matière d'obtention de la personnalité juridique, de rédaction des statuts, de droit d'élire les dirigeants, de dissolution par voie judiciaire, de constitution de fédérations et confédérations, d'affiliation à des organisations internationales, de droit syndical et d'emploi, ainsi que d'autonomie syndicale. Après examen de ces diverses dispositions, le gouvernement conclut qu'il croit avoir démontré que la législation nationale applique strictement les conventions nos 87 et 98, bien que celles-ci n'aient pas été ratifiées par le Chili.
  2. 778. Au sujet des libertés civiles, le gouvernement, bien qu'il estime que la situation politique du pays déborde les thèmes que doit traiter le Comité de la liberté syndicale, précise que la Constitution politique de la République a été adoptée en 1980 par 67 pour cent des votants et qu'elle consacre, après une période de transition, le plein respect du système démocratique. Il ajoute qu'en raison de l'expérience vécue par le pays et de l'escalade terroriste, qui secoue tous les peuples d'Amérique latine, la Constitution prévoit des mécanismes d'exception afin de garantir la paix sociale à la population. Parmi ces mécanismes figure l'état de siège lorsqu'il existe une situation de "choc interne" dans le pays. C'est en vertu de cette possibilité qu'a été proclamé l'état de siège entre le 7 novembre 1984 et le 17 juin 1985. Cependant, précise le gouvernement, en vue de protéger la liberté syndicale, a été adopté le décret suprême no 1216 qui établit une réglementation en matière de droit de réunion et qui n'exige aucune autorisation, mais prévoit seulement un préavis de cinq jours, pour la tenue de réunions d'organisations dotées de la personnalité juridique dans leurs propres locaux.
  3. 779. Concernant l'enquête menée par un juge spécial au sujet de la disparition et de la mort de M. Antonio Aguirre Ballesteros, le gouvernement indique que la procédure se trouve dans sa phase d'instruction. Conformément au Code de procédure pénale, en vigueur depuis 1907, cette étape de la procédure est secrète.
  4. 780. Au sujet de l'enquête menée sur la mort de MM. José Manuel Parada, Manuel Guerrero et Santiago Natina, le gouvernement indique également que le procès se trouve dans sa phase d'instruction. Le magistrat instructeur a inculpé deux anciens policiers présumés coupables du délit de "falsification de document public".
  5. 781. Au sujet des allégations relatives à l'assaut donné contre les locaux du Projet de développement démocratique national (PRODEN), le gouvernement indique, dans sa communication du 8 août 1985, que cet organisme est une société anonyme constituée conformément aux dispositions du Code civil concernant les contrats de société. Les dirigeants de cette société sont des anciens parlementaires, et le local où elle a son siège n'est pas un local syndical. Les forces de l'ordre ont rejeté catégoriquement l'allégation selon laquelle elles seraient intervenues dans ce local.
  6. 782. Pour ce qui est des faits survenus au siège de la Confédération du bâtiment, le gouvernement explique, dans sa communication du 11 septembre 1985, que les carabiniers du quatrième commissariat se sont rendus le jour même de l'assaut dans les locaux de la confédération afin d'enquêter sur les délits commis. Les carabiniers trouvèrent alors 20.000 pamphlets politiques, de type subversif, ainsi qu'un abondant matériel de propagande et d'apologie de doctrines prônant la violence. Le ministre de l'Intérieur a saisi la justice pour mener une enquête et sanctionner les coupables. Après enquête, le magistrat instructeur inculpa, pour violation de l'article 4 f) de la loi sur la sécurité de l'Etat (qui sanctionne ceux qui propagent des doctrines destinées à détruire la forme républicaine et démocratique de gouvernement), MM. Troncoso, Figueroa, Rivera et Bustamante et ordonna leur détention.
  7. 783. Au cours de l'enquête, le magistrat a cité comme témoin M. Manuel Bustos puis a ordonné sa détention, après l'avoir interrogé, comme mesure préventive et conformément aux droits que lui attribue le Code de procédure pénale. A la suite d'un recours de protection de ses défenseurs, M. Bustos fut libéré sur décision de la Cour d'appel de Santiago. En outre, le magistrat instructeur donna une suite favorable à une demande de liberté sous caution des quatre dirigeants de la confédération. Cette mesure fut approuvée le 7 juin 1985 par la Cour d'appel de Santiago. Par la suite, le 22 juillet 1985, le magistrat instructeur prit une ordonnance de non-lieu provisoire en faveur des inculpés. En vertu de cette ordonnance, il est mis un terme à la procédure du fait qu'il n'existe pas d'indices suffisants pour accuser certaines personnes. Le dossier est donc ainsi clos.
  8. 784. Au sujet des allégations concernant les arrestations opérées après une perquisition au local du syndicat Chilectra, le gouvernement explique que, dans ce local, s'était tenue une réunion clandestine de partis politiques déclarés hors-la-loi pour leur adhésion au terrorisme. Cette réunion avait pour but de rendre hommage au Parti socialiste du Chili et à son fondateur. Parmi les participants figuraient des personnes étrangères au syndicat Chilectra et à l'entreprise chilienne d'électricité et qui n'avaient aucune relation, même indirecte, avec des activités syndicales. Les personnes arrêtées furent remises en liberté après avoir été soumises à un contrôle d'identité. MM. Victor Hugo Gac, Eugenio Madrid Salgado furent relégués pour une période de trois mois à Chaiten et M. Manuel Dinamarca à Ciudad de Palena pour la même période. Actuellement, ces personnes jouissent d'une pleine liberté de mouvement dans le pays, leur relégation ayant pris fin.
  9. 785. Au sujet des événements survenus à la Villa minera andina, le 1er mai 1985, le gouvernement indique que les travailleurs de cette cité fêtent chaque année la fête du travail, en organisant notamment un office religieux, un championnat de football et des épreuves athlétiques dans les rues de la ville. En vertu des dispositions réglementaires de police, ajoute le gouvernement, une autorisation préalable doit être demandée pour occuper la voie publique. Cependant, l'épreuve athlétique se déroula dans les rues sans autorisation. Un accident de circulation se produisit, provoquant plusieurs blessés. L'officier de police chargé du constat arrêta le présumé responsable, M. Arturo Uribe, directeur d'un des syndicats organisateurs. D'autres dirigeants syndicaux l'accompagnèrent au poste de police. Par la suite, le chef de la police ordonna la libération immédiate de tous les intéressés. Le gouvernement déclare qu'une autre personne citée par les plaignants, M. Raúl Montecinos, est en liberté et qu'il ne possède pas d'informations sur des perquisitions qui auraient eu lieu au domicile de dirigeants syndicaux.
  10. 786. Le gouvernement fournit en outre des informations sur les personnes mentionnées comme arrêtées et reléguées dans le 239e rapport du comité (voir annexe). Le gouvernement précise que les mesures de relégation en question ont été adoptées en vertu des droits conférés au chef de l'Etat par la Constitution pendant l'état de siège. Le 17 juin 1985, il a été mis un terme à l'état de siège qui était en vigueur depuis le 7 novembre 1984. Aux termes de la Constitution, la relégation ne peut excéder quatre-vingt-dix jours. Les faits à l'origine de ces mesures étaient la participation à des activités clandestines de politique partisane sans relation avec des activités syndicales. A aucun moment, précise le gouvernement, on a prétendu affaiblir le mouvement syndical en le privant de ses dirigeants ou en entravant ses activités. En conclusion, sur ce point, le gouvernement estime que les informations fournies démontrent qu'il n'a jamais existé une atmosphère de violence à l'encontre des syndicats. Il ne partage pas l'opinion émise dans les conclusions du comité, car ce dernier a généralisé des cas d'exception et a, de façon erronée, assimilé des actes violents à des activités syndicales.
  11. 787. Au sujet des allégations concernant le droit de réunion, le gouvernement réaffirme que, pendant l'état de siège, les réunions des organisations syndicales dotées de la personnalité juridique peuvent se tenir dans leurs propres locaux sans autorisation préalable, avec un seul préavis de cinq jours au Gouvernorat provincial. Le 17 juin 1985, l'état de siège a pris fin et a été remplacé par l'état d'urgence pour une durée de quatre-vingt-dix jours, en raison de l'existence d'un danger interne pour la sécurité nationale. La Direction de la zone en état d'urgence de la région métropolitaine et de la province de San Antonio a pris un arrêté par lequel les réunions des organisations dotées de la personnalité juridique, les assemblées ayant pour objet la constitution de syndicats et de fédérations, ainsi que les réunions organisées dans l'exercice des droits des travailleurs et des syndicats reconnus dans le cadre de la législation, ne sont pas soumises à autorisation, pourvu qu'elles se tiennent dans les locaux de l'organisation et qu'elles aient pour objet exclusif de traiter de questions considérées par la législation comme relevant de leurs objectifs.
  12. 788. Au sujet de l'allégation concernant l'interdiction d'une réunion du syndicat d'entreprise no 6 du CODELCO, Division El Salvador, le gouvernement indique, dans sa communication du 29 août 1985, que des raisons de sécurité intérieure ont obligé les autorités à suspendre le droit de réunion pendant ces jours. Cette situation exceptionnelle n'a absolument pas paralysé la vie syndicale, puisqu'au cours de cette période huit assemblées syndicales ont été convoquées dans la seconde quinzaine de mars par les syndicats de la Division El Salvador, de même que des élections, au sein de l'organisation plaignante le 2 juillet 1985. Un recours de protection a été déposé devant la Cour d'appel de Copiapó, qui l'a rejeté.
  13. 789. Concernant la situation de M. Pedro Araya, dirigeant du Syndicat national des pilotes professionnels et techniciens de l'entreprise Lan-Chile, le gouvernement déclare, dans sa communication du 11 septembre 1985, que ce syndicat a renouvelé sa direction les 6 et 13 septembre 1984; seules trois personnes sur un total de 18 affiliés participèrent au vote. L'entreprise sollicita alors à la Cour d'appel de Santiago la dissolution du syndicat en vertu de l'article 52 d) du décret-loi no 2756 sur les organisations syndicales prévoyant un nombre minimum de membres (pour les syndicats d'entreprise, 25 membres représentant au moins 10 pour cent de l'ensemble des travailleurs de l'entreprise). Le 23 novembre 1984, la Cour d'appel déclara le syndicat dissous. Après recours de la direction du syndicat devant la Cour suprême, celle-ci confirma le premier jugement. M. Pedro Araya a signé le 30 avril 1985, devant l'Inspection du travail de Maipú, un quitus pour fin de service et a reçu, à titre d'indemnisation, une somme équivalente à 31.000 dollars E.-U.
  14. 790. Au sujet de la situation de M. Rodolfo Seguel, le gouvernement déclare, dans sa communication du 15 août 1985, que l'intéressé a été licencié de l'entreprise CODELCO, le 12 juillet 1983, pour des motifs figurant à l'article 15, nos 4 et 6 du décret-loi no 2200, en relation avec la loi no 12927 de 1958 sur la sécurité de l'Etat, à savoir de multiples actions tendant à susciter et à promouvoir des arrêts de travail à la Division El Teniente, ainsi que d'autres actes illicites. Les défenseurs de M. Seguel ont alors saisi le second tribunal civil de Rancagua en demandant l'annulation du licenciement. Le 12 mars 1984, le tribunal débouta M. Seguel et confirma donc le licenciement. A la suite d'un recours présenté par les défenseurs de M. Seguel, la Cour d'appel de Rancagua annula, le 28 juin 1984, le jugement de première instance. L'entreprise CODELCO formula alors un "recours de plainte" devant la Cour suprême, qui confirma le 18 juillet 1985 le jugement rendu en première instance. A la suite d'un nouveau recours de "réexamen" interjeté par les défenseurs de M. Seguel, la Cour suprême, à l'unanimité des membres de la chambre compétente, a confirmé le licenciement. Ainsi, par décision du pouvoir judiciaire et non du gouvernement, précise ce dernier, M. Seguel s'est trouvé inhabilité à exercer la fonction syndicale qu'il occupait.
  15. 791. Le gouvernement indique, à cet égard, que les statuts de la Confédération des travailleurs du cuivre stipulent, à l'article 21, que la perte de la qualité de dirigeant d'un syndicat affilié fait perdre la qualité de membre du conseil directeur de la confédération. En outre, les statuts du syndicat de base exigent que, pour être dirigeant, il faut travailler dans l'entreprise. Malgré son licenciement, M. Seguel avait été dirigeant du Syndicat professionnel Caletones, numéro un de la Division El Teniente.
  16. 792. Le gouvernement remarque que M. Seguel ne peut exercer des fonctions syndicales au sein de la Confédération des travailleurs du cuivre, en vertu des statuts dont les travailleurs se sont eux-mêmes dotés. Se fondant sur plusieurs principes du Comité de la liberté syndicale en la matière, le gouvernement estime que la procédure a respecté la liberté syndicale. Il fournit en annexe les jugements de première et de deuxième instance, ainsi que l'arrêt définitif de la Cour suprême.
  17. 793. A propos des allégations relatives à l'arrestation de M. Sergio Troncoso, le gouvernement indique que l'intéressé a été arrêté alors qu'il provoquait des désordres et des incidents dans la rue. Il a été relégué à Melinka, le 6 août 1985, puis transféré à Puerto Cisnes le 22 août. Le gouvernement ajoute que l'autre personne mentionnée par les plaignants, M. Juan Ponce, n'a été ni arrêtée, ni reléguée.
  18. 794. Au sujet des événements survenus lors de la manifestation du 4 septembre 1985, le gouvernement indique, dans sa communication du 16 octobre 1985, que le ministère de l'Intérieur a saisi les tribunaux pour établir la responsabilité des instigateurs, organisateurs et promoteurs de cette journée de protestation, ainsi que celle des participants. La Cour de Santiago a inculpé MM. Seguel et Bustos pour infraction à divers articles de la loi sur la sécurité de l'Etat (réunions visant à renverser le gouvernement ou à conspirer contre sa stabilité; convocation de réunions publiques dans des lieux publics sans autorisation ou pouvant entraîner des troubles de la tranquilité publique; incitation à l'interruption, à la suspension collective ou à la grève dans les services publics ou d'utilité publique qui provoquent des troubles de l'ordre public ou des perturbations dans ces services). La Cour à constaté que MM. Seguel et Bustos étaient des récidivistes. Après appel des défenseurs, la Cour suprême a confirmé la décision de première instance à l'unanimité. Les quatre dirigeants de l'AGECH ont été également arrêtés pour leur participation à la manifestation du 4 septembre 1985. Selon le gouvernement, cette journée de protestation s'est soldée par 10 décès, 18 fonctionnaires de police gravement blessés, plus de 100 personnes blessées, 100 millions de pesos de dommages provoqués par des actes de violence et de grands dommages sur des biens publics. La procédure judiciaire intentée à l'encontre des responsables se poursuit actuellement.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 795. Le comité a pris note des réponses détaillées fournies par le gouvernement au sujet des différents aspects du cas. Il a également pris note du commentaire général que le gouvernement a présenté au sujet de la situation syndicale au Chili. Tout en partageant l'opinion du gouvernement selon laquelle les questions politiques échappent à sa compétence, le comité doit souligner l'importance du principe affirmé en 1970 par la Conférence internationale du Travail dans sa résolution sur les droits syndicaux et les libertés civiles, qui reconnaît que "les droits conférés aux organisations de travailleurs et d'employeurs se fondent sur le respect des libertés civiles, qui ont été énoncées notamment dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que l'absence des libertés civiles enlève toute signification au concept des droits syndicaux". Le comité estime donc qu'il lui appartient, dans le cadre de son mandat, d'examiner dans quelle mesure l'exercice des droits syndicaux peut être affecté dans des cas d'allégations d'atteintes aux libertés civiles.
  2. 796. Au sujet des enquêtes effectuées sur les morts de MM. Aguirre, Parada, Guerrero et Natina, le comité note que les procédures sont toujours en cours d'instruction et que, dans l'affaire concernant ces trois dernières personnes, deux anciens policiers ont été inculpés. Le comité, tout en relevant la durée excessive de la procédure d'instruction, exprime le ferme espoir que ces enquêtes pourront aboutir très rapidement et qu'elles permettront de déterminer les responsabilités afin que les coupables puissent être traduits devant la justice. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des développements qui interviendront dans ces affaires.
  3. 797. Au sujet des assauts donnés contre des locaux syndicaux, le comité note que, selon le gouvernement, les différentes forces de l'ordre ne sont pas intervenues dans ces locaux, sauf dans le cas de la Confédération du bâtiment, où elles ont effectué une enquête précisément sur le saccage du siège syndical qui avait eu lieu quelques heures auparavant. Dans ces conditions, le comité ne peut que souligner l'importance d'une protection des locaux syndicaux et la nécessité de faire la lumière sur ces incidents qui se sont produits à plusieurs reprises. Le comité insiste donc auprès du gouvernement pour que des enquêtes judiciaires soient menées afin que les responsables de tels agissements, particulièrement néfastes à l'exercice des droits syndicaux, soient retrouvés le plus vite possible. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  4. 798. Au sujet des arrestations et relégations de syndicalistes, le comité note que les personnes mentionnées dans l'annexe de son précédent rapport ont retrouvé leur liberté de mouvement. Il observe toutefois que, malgré la levée de l'état de siège, plusieurs allégations ont fait état de nouvelles arrestations et relégations sur lesquelles le gouvernement a fourni certaines informations (voir annexe). De l'avis du comité, l'application de mesures répétées de ce type ne peut que développer un climat défavorable aux relations professionnelles dans le pays. Le comité demande donc au gouvernement, dans un souci d'apaisement et de retour à une vie syndicale normale, de prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme le plus rapidement possible à ces relégations. Il le prie de le tenir informé de toutes mesures prises en ce sens.
  5. 799. Le comité a, par ailleurs, remarqué que plusieurs dirigeants syndicaux (MM. Troncoso, Figueroa, Rivera, Bustamante et Bustos) ont été soit inculpés, soit mis en détention provisoire puis ont été libérés au bénéfice d'un non-lieu. A cet égard, le comité doit signaler que l'arrestation par les autorités de syndicalistes contre lesquels aucun chef d'inculpation n'est finalement relevé peut entraîner des restrictions de la liberté syndicale. Les gouvernements devraient prendre des dispositions afin que les autorités intéressées reçoivent des instructions appropriées pour prévenir le risque que comportent, pour les activités syndicales, les mesures injustifiées d'arrestation. (Voir à cet égard par exemple 207e rapport, cas no 963 (Grenade), paragr. 229; 211e rapport, cas no 1025 (Haïti), paragr. 272.)
  6. 800. Le comité a, en outre, pris connaissance des allégations plus récentes concernant l'inculpation de plusieurs dirigeants syndicaux, dont MM. Seguel et Bustos, et de leur arrestation à la suite d'une manifestation organisée par le Groupement national des travailleurs. Il note que, selon le gouvernement, ces mesures ont été prises par les tribunaux sur la base d'infractions commises à la loi sur la sécurité de l'Etat. Il constate que parmi les dispositions relevées par les tribunaux figure l'organisation de grèves dans les services publics qui, dans le cas d'espèce, avaient été déclenchées à l'occasion de la journée nationale de protestation. Il rappelle à cet égard que les organisations syndicales devraient avoir la possibilité de recourir à des grèves de protestation, en vue de défendre les intérêts économiques et sociaux de leurs membres. Le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations sur les suites de la procédure judiciaire intentée contre les responsables et les organisateurs de la journée de protestation.
  7. 801. Au sujet du droit de réunion, le comité a noté les explications fournies par le gouvernement au sujet de l'interdiction d'une assemblée du syndicat no 6 de CODELCO, Division El Salvador, ainsi que ses déclarations concernant les nouvelles dispositions adoptées en ce domaine dans le cadre de l'état d'urgence. Il note en particulier que, sous certaines conditions, aucune autorisation préalable n'est requise pour les réunions syndicales organisées dans les locaux des organisations. Le gouvernement ne précise toutefois pas si ces réunions doivent faire l'objet d'un préavis auprès des autorités. D'une manière générale, le comité tient à rappeler que la liberté de réunion syndicale constitue l'un des éléments fondamentaux des droits syndicaux et que les autorités publiques devraient s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal.
  8. 802. Le comité a été également saisi de plusieurs allégations concernant des licenciements de dirigeants syndicaux dans les secteurs de l'enseignement, de l'aviation, des ports et des mines. Le gouvernement a fourni des réponses au sujet des licenciements de MM. Pedro Araya, président du Syndicat des pilotes professionnels et techniques, et Seguel, dirigeant de la Confédération des travailleurs du cuivre. Le comité note en particulier que M. Pedro Araya a accepté une indemnisation pour son licenciement après que son syndicat eut été dissous par les tribunaux pour nombre insuffisant d'adhérents. A cet égard, le comité estime qu'il n'apparaît pas qu'une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale soit accordée par une législation permettant en pratique aux employeurs, à condition de verser l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur, quand le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale. (Voir par exemple 211e rapport, cas no 1053 (République dominicaine), paragr. 163.)
  9. 803. Pour ce qui est du cas de M. Seguel, le comité note que l'intéressé a été licencié, après procédure judiciaire, selon les dires du gouvernement, pour avoir exercé notamment des actes tendant à inciter ou à promouvoir des arrêts de travail. Le comité doit donc constater dans ces conditions que le licenciement de M. Seguel a eu pour origine des actes qu'il a exercés dans le cadre de ses responsabilités syndicales et qu'il s'agit là d'une mesure de discrimination antisyndicale. Cette mesure revêt un caractère d'autant plus grave que, en vertu de la législation et des statuts de la Confédération des travailleurs du cuivre, l'intéressé ne peut plus être investi d'un mandat syndical. Quand les dirigeants syndicaux sont licenciés pour avoir exercé leur droit de grève, le comité ne peut s'empêcher de conclure qu'ils sont sanctionnés pour leur activité syndicale et qu'ils font donc l'objet d'une discrimination antisyndicale. Le fait qu'une autorité judiciaire intervienne dans la procédure de licenciement ne constitue pas nécessairement, de l'avis du comité, une garantie suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale, les juges saisis n'ayant que la possibilité de s'assurer que la législation nationale a été correctement appliquée. En outre, le licenciement d'un dirigeant syndical risque, en lui faisant perdre de ce fait sa qualité de responsable syndical, de porter atteinte à la liberté d'action de l'organisation et à son droit d'élire librement ses représentants, et peut même favoriser des actes d'ingérence de la part de l'employeur. (Voir par exemple 147e rapport, cas no 677 (Soudan), paragr. 222.)
  10. 804. Le comité constate par ailleurs que le gouvernement n'a pas répondu au sujet des licenciements de dirigeants syndicaux du secteur de l'enseignement (MM. Mancilla, Aguilar, Maldonado, Trujillo, Torres) et du secteur portuaire (M. Aguirre). Le comité demande au gouvernement de fournir ses observations à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 805. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire, et notamment les conclusions suivantes:
    • a) Le comité constate que depuis le dernier examen du cas plusieurs affaires ayant fait l'objet d'allégations devant le comité n'ont pas été traitées par les autorités administratives mais ont été soumises aux autorités judiciaires.
    • b) Au sujet des enquêtes effectuées sur la mort de MM. Aguirre, Parada, Guerrero et Natina, le comité note que les procédures sont toujours en cours d'instruction. Tout en relevant la durée excessive de la procédure d'instruction, il exprime le ferme espoir que ces enquêtes pourront aboutir très rapidement et qu'elles permettront de déterminer les responsabilités afin que les coupables puissent être traduits devant la justice. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des développements qui interviendront dans ces affaires.
    • c) Au sujet des assauts donnés contre des locaux syndicaux, le comité note que, selon le gouvernement, les forces de l'ordre ne sont pas intervenues dans ces locaux. Le comité souligne l'importance d'une protection contre les locaux syndicaux. Il insiste auprès du gouvernement pour que des enquêtes judiciaires soient menées afin que les responsables de tels agissements soient retrouvés le plus vite possible. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • d) Au sujet des arrestations et relégations de syndicalistes, le comité note que les personne mentionnées en annexe de son précédent rapport ont retrouvé leur liberté de mouvement. Il observe cependant que, malgré la levée de l'état de siège, plusieurs allégations ont fait état de nouvelles arrestations et relégations sur lesquelles le gouvernement a fourni certaines informations. Le comité demande au gouvernement, dans un souci d'apaisement et de retour à une vie syndicale normale, de prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme, le plus rapidement possible, à ces relégations. Il le prie de le tenir informé de toutes mesures prises en ce sens.
    • e) Au sujet de l'inculpation et de la détention provisoire de dirigeants syndicaux, le comité signale que l'arrestation par les autorités de syndicalistes contre lesquels aucun chef d'inculpation n'est relevé peut entraîner des restrictions de la liberté syndicale. Le gouvernement devrait prendre des dispositions afin que les autorités intéressées reçoivent des instructions appropriées pour prévenir le risque que comportent, pour les activités syndicales, les mesures injustifiées d'arrestation. Le comité rappelle au gouvernement que les organisations syndicales devraient avoir la possibilité de recourir à des grèves de protestation, en vue de défendre les intérêts économiques et sociaux de leurs membres. Le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations sur les suites de la procédure judiciaire intentée contre les responsables et les organisateurs de la journée de protestation du 4 septembre 1985.
    • f) Au sujet du droit de réunion, le comité rappelle, de manière générale, que la liberté de réunion syndicale constitue l'un des éléments fondamentaux des droits syndicaux et que les autorités publiques devraient s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal.
    • g) Au sujet des licenciements de dirigeants syndicaux, le comité signale notamment que le licenciement d'un dirigeant syndical risque, en lui faisant perdre de ce fait sa qualité de responsable syndical, de porter atteinte à la liberté d'action de l'organisation et à son droit d'élire librement ses représentants et peut même favoriser des actes d'ingérence de la part de l'employeur. Le comité demande au gouvernement de fournir ses observations au sujet des licenciements de dirigeants syndicaux du secteur de l'enseignement et du secteur portuaire.

Z. ANNEXE

Z. ANNEXE
  • LISTE DES PERSONNES MENTIONNEES PAR LES
  • PLAIGNANTS COMME ARRETEES ET REPONSES
  • DU GOUVERNEMENT A LEUR SUJET
  • ABARZUA Sergio
  • Relégation terminée par anticipation le 31 décembre 1984.
  • AGUILAR Juan
  • Relégation terminée le 18 mars 1985.
  • ARANCIBIA Julio
  • Relégation terminée par anticipation le 24 janvier 1985.
  • ARANCIBIA Miguel
  • Relégation terminée par anticipation le 13 mai 1985.
  • ARANCIBIA Oscar
  • Relégation terminée le 23 mars 1985.
  • ARAYA Jorge
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • AREVALO Vladimir
  • Relégation terminée le 21 mars 1985.
  • BUSTAMANTE Manuel
  • Inculpé pour infraction à la loi sur la sécurité de l'Etat. Libéré
  • sous
  • caution. Dossier classé avec non-lieu.
  • GASTRO Ricardo
  • Relégation terminée le 23 mars 1985.
  • CELEDON Luis
  • Pas d'informations sur une éventuelle arrestation.
  • COLOMA José
  • Relégation terminée le 23 mars 1985.
  • DEL RIO Roland
  • Relégation terminée par anticipation le 10 février 1985.
  • DINAMARCA Manuel
  • Relégation terminée le 30 juillet 1985.
  • DINAMARCA Neftall
  • Relégation terminée le 1er mars 1985.
  • ELOY Oscar
  • Relégation terminée le 23 mars 1985.
  • ESCOBAR Vladimir
  • Relégation terminée par anticipation le 24 janvier 1985.
  • ESTORGIO José
  • Inculpé pour infraction à la loi sur la sécurité de l'Etat. Libéré
  • sous
  • caution. Dossier classé avec non lieu.
  • FAUNDEZ Luis
  • Relégation terminée le 28 février 1985.
  • FIGUEROA Luis
  • Inculpé pour infraction à la loi sur la sécurité de l'Etat. Libéré
  • sous
  • caution. Dossier classé avec non-lieu.
  • FUENTES Adriañ
  • Relégation terminée le 15 juillet 1985.
  • FUENTESECA Douglas
  • Relégation terminée le 4 mars 1985.
  • GAC Victor Hugo
  • Relégation terminée le 30 juillet 1985.
  • GARCIA Patricio
  • Pas d'informations sur une éventuelle arrestation.
  • GUTIERREZ Jorge
  • Relégation terminée le 26 février 1985.
  • GUTIERREZ Luis
  • Relégation terminée le 23 mars 1985.
  • LEAL René
  • Relégation terminée le 28 février 1985.
  • LILLO Pedro
  • Relégation terminée par anticipation le 24 janvier 1985.
  • LOYOLA Eduardo
  • Par d'informations sur une éventuelle arrestation.
  • MADRID Eugenio
  • Relégation terminée le 30 juillet 1985.
  • MANRIQUEZ Victor
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • MARILEO Domingo
  • Relégation terminée le 4 avril 1985.
  • MILLAN Hector
  • Relégation terminée le 28 février 1985.
  • PILQUIL Manuel
  • Relégation terminée le 4 avril 1985.
  • SANTOS José
  • Relégation terminée le 4 avril 1985.
  • SIERRA de la FUENTE Benjamin
  • Relégation terminée le 23 mars 1985.
  • SOVAL Sergio
  • Pas d'informations sur une éventuelle arrestation.
  • SUAREZ Antonio
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • TAPIA Lino
  • Relégation terminée le 23 mars 1985.
  • TRONCOSO Sergio
  • Inculpé pour infraction à la loi sur la sécurité de l'Etat. Libéré
  • sous
  • caution. Dossier claseé avec non lieu. Depuis lors relégué à
  • Melinka puis à
  • Puerto Cisnes.
  • VALENCIA Guillermo
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • VALENZUELA José
  • Relégation terminée par anticipation le 24 janvier 1985.
  • AGUIRRE Sergio
  • Relégation terminée par anticipation le 20 mai 1985.
  • ARCOS Humberto
  • Relégation tetminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • AVENDAÑO Enrique
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • CANCINO Sejundo
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • CUETO Carlos
  • Relégation terminée le 29 juin 1985.
  • DIANTA Pablo
  • Relégation terminée le 29 juin 1985.
  • OLIVARES Sergio
  • Relégation terminée le 18 mars 1985.
  • OPAZO Carlos
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • ORDENES Luis de Cruz
  • Relégation terminée le 29 juin 1985.
  • PEÑA Luis
  • Relégation terminée par anticipation le 17 janvier 1985.
  • SANCHEZ Salatiel
  • Relégation terminée le 29 juin 1985.
  • ZAPATA Darió
  • Relégation terminée le 29 juin 1985.
  • MONTECINOS Raúl
  • Pas d'informations sur une éventuelle arrestation.
  • PONCE Juan
  • Ni arrêté, ni relégué.
  • BUSTOS Manuel
  • Inculpé et arrêté pour infraction à la loi sur la sécurité de l'Etat.
  • SEGUEL Rodolfo
  • Inculpé et arrêté pour infraction à la loi sur la sécurité de l'Etat.
  • PAVEZ Jorge
  • Arrêté pour participation à la manifestation du 4 septembre
    1. 1985
  • BELLO Samuel
  • Arrêté pour participation à la manifestation du 4 septembre
    1. 1985
  • CAMPO Luis
  • Arrêté pour participation à la manifestation du 4 septembre
    1. 1985
  • POBLETE Carlos
  • Arrêté pour participation à la manifestation du 4 septembre
    1. 1985
  • LISTE DES PERSONNES MENTIONNEES PAR LES
  • PLAIGNANTS COMME ARRETEES ET
  • ALLEGATIONS FORMULEES A LEUR SUJET SUR
  • LESQUELLES LE GOUVERNEMENT N'A PAS
  • ENCORE ENVOYE D'INFORMATIONS
  • ARAYA Lorenzo
  • Président du Syndicat de la construction d'Autofagasta,
  • relégué à Lago Verde.
  • PIANTA Pablo
  • Dirigeant du Syndicat de la construction de San Antonio,
  • relégué à Toconao.
  • RIVAS Abraham
  • Trésorier du Syndicat de la construction de Concepcioñ,
  • relégué à Sierra
  • Corda.
  • DEIJ Antonio
  • Secrétaire du Syndicat de la construction de Conceptioñ,
  • relégué à Conchi.
  • RUIZ di GIORGIO José
  • Président du Syndicat des travailleurs du pétrole. Arrêté.
  • ROZAS Maria
  • Dirigeante AGECH. Arrêtée.
  • JEREZ Mercedes
  • Dirigeante AGECH. Arrêtée.
  • GALLARDO Claudio
  • Dirigeant CONSTRAMET. Arrêté et relégué.
  • MARTINEZ Arturo
  • Président de la Confédération graphique. Arrêté.
  • SOTO Humberto
  • Secrétaire général du Front unitaire des travailleurs. Arrêté.
  • LILLO Edmundo
  • Président de la Fédération nationale des travailleurs du
  • commerce. Arrêté.
  • OSORIO Eduardo
  • Dirigeant AGECH. Arrêté.
  • FIGUEROA José
  • Président suppléant Confédération du bâtiment. Arrêté.
  • RIVERA José
  • Dirigeant national Confédération du bâtiment. Arrêté.
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