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Definitive Report - REPORT_NO230, November 1983

CASE_NUMBER 1193 (Greece) - COMPLAINT_DATE: 13-APR-83 - Closed

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  1. 294. Le Centre ouvrier d'Athènes, organisation qui déclare être une section de la Confédération générale du travail de Grèce (CGTG), a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale en Grèce le 13 avril 1983. Elle a aussi adressé des informations complémentaires à l'appui de sa plainte le 18 mai 1983. Le gouvernement, pour sa part, a répondu dans une communication du 11 août 1983. En outre le président du Mouvement démocratique libre syndical, M. Karakistos, qui a signé la plainte initiale en tant que président du Centre ouvrier d'Athènes, a déclaré appuyer la plainte du Centre ouvrier d'Athènes dans une communication reçue le 4 octobre 1983. Cette communication a immédiatement été transmise au gouvernement pour commentaires et observations.
  2. 295. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 296. Le Centre ouvrier d'Athènes qui prétend se composer de 625 syndicats et de 400.000 membres allègue dans sa communication du 13 avril 1983 la destitution par le gouvernement du comité directeur de la CGTG qui avait été élu à peine 45 jours auparavant et la nomination d'un nouveau comité directeur composé de personnes appartenant à 80 pour cent aux organisations du parti au pouvoir. La plainte porte aussi sur la loi no 1264/82 qui aurait supprimé le droit des travailleurs d'élaborer les statuts de leurs organisations professionnelles et d'élire leurs représentants, sur la loi no 1320/80 qui aurait supprimé le droit de libre négociation collective et sur la loi no 1346/82 qui aurait accordé au ministre du Travail la compétence pour financer les organisations professionnelles dans le but de les soumettre à ses désirs en vue du congrès annoncé de la CGTG; enfin, la plainte porte sur la prétendue vague de poursuites contre les syndicalistes opposants que le gouvernement aurait lancées pour imposer par la peur un syndicalisme étatique, "phénomène que l'on rencontre uniquement dans les pays totalitaires" déclare l'organisation plaignante. Cette communication est signée notamment de l'ex-ministre du Travail, M. Laskaris, de l'ex-ministre de la Justice, M. Stefanakis, d'un président honoraire de la CGTG, du secrétaire général de l'administration élue de la CGTG, M. Saitis, d'un avocat à la Cour de cassation et de l'ex-secrétaire de l'organisation de l'administration élue de la CGTG, et porte la mention pour le Comité exécutif de l'administration légalement élue de la CGT grecque qui a été destituée par décision judiciaire, le Président Karakitsos et le secrétaire général Saitis.
  2. 297. Dans une seconde très longue communication du 18 mai 1983, l'organisation plaignante précise que non seulement le comité directeur de la CGTG mais aussi ceux de nombreuses organisations syndicales auraient été destitués. Tout en admettant que ces destitutions ont été prononcées par le biais des tribunaux judiciaires, elle affirme que ces interventions se sont déroulées "dans un climat de terreur et de pression psychologique exceptionnel", ce qui a permis au gouvernement de faire adopter une loi visant à asservir complètement le mouvement syndical et à réduire au silence la voix des travailleurs.
  3. 298. Selon l'organisation plaignante, la destitution du comité directeur de la CGTG se serait produite de la façon suivante: trente-deux jours après la fin des travaux du congrès de la CGTG et alors qu'Andréas Papandréou était au pouvoir depuis le 18 octobre 1981, cinq organisations syndicales liées au parti gouvernemental ont introduit un recours devant le tribunal de paix d'Athènes mettant en doute la validité des élections du comité directeur de la CGTG et ont demandé que des mesures soient prises pour surseoir à l'exécution des décisions du congrès de la CGTG. Or, rappelle l'organisation plaignante, le comité directeur avait été élu avec une majorité de 65 pour cent des voix. La suspension des effets des décisions du congrès de la CGTG a été prononcée le 17 novembre 1981 par le juge de paix qui, déclare l'organisation plaignante, est l'instance la plus basse du système judiciaire grec. Le juge de paix a émis une décision édictée à la suite de l'intervention de certains milieux car elle a exaucé les voeux des syndicalistes de l'appartenance gouvernementale. Les cinq organisations syndicales précitées ont alors, en date du 7 décembre 1981, sollicité la nomination d'un comité directeur provisoire. L'audience sur la question s'est tenue le 9 décembre à la suite d'une procédure judiciaire éclair. Les représentants de 26 fédérations syndicales et centres ouvriers ont soutenu le point de vue de l'organisation plaignante devant le juge de paix unique mais les organisations requérantes rivales de l'organisation plaignante ont sollicité et obtenu la nomination pour une année d'un nouveau comité directeur composé de syndicalistes appartenant exclusivement au parti au pouvoir et aux deux partis communistes qui existent en Grèce. Le 15 décembre 1981, les organisations requérantes rivales de l'organisation plaignante ont demandé au juge de paix le report d'un recours au mois de mars 1982, ce qu'il fit en fixant l'audience au 12 février 1982. Entre-temps, le 29 décembre 1981, le tribunal de première instance d'Athènes avait nommé le comité directeur provisoire à la tête de la CGTG composé de personnes totalement incompétentes. Cette décision a été adoptée sur ordre du parti au pouvoir sans tenir compte des 26 organisations syndicales qui assistaient à l'audience et qui sont intervenues en faveur du comité directeur élu de la CGTG. Le recours introduit par les organisations rivales de l'organisation plaignante a été examiné le 12 février 1982 par le juge de paix qui a exclu de l'audience la partie défenderesse, à savoir l'organisation plaignante. Celle-ci allègue que la décision a accordé au comité directeur de la CGTG, imposé de l'extérieur, le droit d'admettre les accusations ayant fait l'objet du recours relatif à la soi-disant falsification des élections pendant le congrès. Elle allègue en outre que, par le biais des recours aux tribunaux, d'autres organisations syndicales ont été livrées aux mains des militants qu'elle appelle "fanatiques" du parti du Pasok (parti socialiste grec) et des deux partis communistes grecs. Le comité directeur élu de la CGTG s'est pourvu en cassation contre la nomination du comité directeur provisoire pour avoir omis de tenir compte de toutes les parties qui assistaient à l'audience et pour avoir statué "ultra petits" puisqu'elle portait sur un sujet qui outrepassait le cadre de la question qui faisait l'objet de la demande des organisations intéressées, poursuit l'organisation plaignante. Elle ajoute que le pourvoi en cassation a d'abord été examiné le 1er octobre 1982 par les membres de la première chambre politique de la Cour de cassation présidée par M. Consta qui venait d'être promu à ce poste. La Cour de cassation, conclut l'organisation plaignante, l'a débouté en considérant que le Centre ouvrier d'Athènes, même s'il était une des parties défenderesses au cours de l'audience qui a abouti à la décision attaquée, ne peut avoir recours à la Cour de cassation puisqu'il n'est pas partie défenderesse dans la décision.
  4. 299. Pour ce qui est de l'allégation de suppression du droit des travailleurs d'élaborer leurs statuts et d'élire librement leurs représentants résultant de la loi 1264/82 du 1er juillet 1982, selon l'organisation plaignante, l'article 1, paragraphe 3, de la loi, admet comme organisation syndicale de premier degré les sections locales des syndicats, contrairement aux articles 2, 3 et 4 de la convention no 87 qui reconnaît comme principe établi la structure pyramidale de l'organisation syndicale. Les articles 1 et 2 de la loi accordant la personnalité juridique à de simples comités d'entreprise seraient contraires à l'article 5 de la convention no 87 qui n'autorise pas la constitution de fédération ou de confédération par une simple organisation syndicale et ne prévoit pas non plus la possibilité pour cette organisation de créer des associations locales. Les articles 2 et 3 de la loi, prévoyant la mise à disposition des documents et de tous autres éléments concernant les syndicats (livres de comptes, etc.) non seulement aux membres de ces organisations mais aussi aux personnes ayant un "intérêt légitime", pourraient permettre à l'Etat de contrôler les activités des syndicats. L'article 7 de la loi imposant aux syndicats l'affiliation de membres qui peuvent être admis d'office par le juge de paix (la plus basse instance judiciaire) si le syndicat en cause refuse de les inscrire, et l'article 12 imposant comme système électoral obligatoire la représentation proportionnelle simple, et qui établit le nombre de voix qui doit servir de critère électoral et détermine la répartition des sièges entre chaque organisation, seraient contraires aux articles 3 et 8 de la convention no 87 puisque les articles incriminés ne sont pas en harmonie avec les principes généraux du droit d'association en Grèce, à savoir avec les règles contenues dans le Code civil. L'article 9 de la loi déterminant la durée des mandats des organes de direction et contraignant un syndicat qui n'atteint pas un nombre déterminé de membres à ne pas être représenté aux élections aux organisations de deuxième degré obligerait les petites organisations à se dissoudre et serait contraire à l'esprit et à la lettre de la convention no 87, de même que l'article 14 de la loi abolissant le droit de vote et d'éligibilité des journalistes retraités.
  5. 300. Au sujet de l'allégation relative à l'abolition du droit de libre négociation collective, l'organisation plaignante estime qu'il résulte de l'article 27 de la loi no 1320/82. Elle ajoute que les dispositions de cette loi proclament toute grève qui vise à appuyer des revendications d'ordre salarial comme illicite et sanctionnée comme telle.
  6. 301. Au sujet de l'allégation relative aux ingérences du gouvernement dans les affaires financières du syndicat, l'organisation plaignante considère qu'en vertu de l'article 23 de la loi no 1346 du 14 avril 1983 le gouvernement aurait supprimé l'autonomie financière des syndicats. Elle déclare notamment. "les objectifs du gouvernement, à savoir l'asservissement du mouvement syndical, sont ainsi bien mis en évidence et ses énormes mensonges découverts". Elle pense que le gouvernement a adopté cette loi pour induire en erreur les organisations syndicales internationales, le BIT et l'opinion publique en accordant au ministre le pouvoir de procéder, comme bon lui semble et de manière arbitraire, au financement des syndicats d'appartenance gouvernementale afin d'exercer une pression sur chaque organisation syndicale de manière à l'obliger à adhérer au mouvement syndical rattaché au gouvernement. Selon elle, en outre, les fonds de l'ODEPES auraient été remis au foyer ouvrier qui est un organisme gouvernemental, et le ministre du Travail distribuerait ses fonds comme bon lui semble.
  7. 302. Au sujet de l'allégation de persécution de syndicalistes, l'organisation plaignante affirme que l'histoire contemporaine du mouvement syndical grec n'a jamais connu jusqu'à présent une telle vague de persécutions contre des dirigeants syndicaux. Elles consistent à transférer dans les régions éloignées du pays les syndicalistes indépendants, à exercer des pressions psychologiques et des chantages en déclassant les postes qu'ils occupent dans la hiérarchie professionnelle. Ces persécutions se compteraient par centaines et il serait impossible de les énumérer dans le détail. L'organisation plaignante déclare enfin qu'elle a l'intention de soumettre des listes des noms des victimes des persécutions en temps voulu.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 303. Dans sa réponse du 11 août 1983, le gouvernement explique que, aussitôt après son arrivée au pouvoir en 1981, il s'est engagé dans la restitution des libertés syndicales des travailleurs et la démocratisation du mouvement syndical. De ce fait, déclare-t-il, le mouvement syndical jouit désormais d'une indépendance et d'une autonomie financière qui reposent sur des principes démocratiques reconnus tant à l'intérieur du pays qu'à l'étranger, alors que la législation précédemment en vigueur n'offrait pas de telles possibilités, en particulier en ce qui concerne les lois nos 330 de 1976 et 643 de 1977.
  2. 304. Réfutant toutes les allégations de l'organisation plaignante, il estime que la loi no 1264 du 1er juillet 1982 sur la démocratisation du mouvement syndical et la protection des libertés syndicales adoptée par le Parlement grec est une des législations les plus progressistes qui soit et qu'elle répond aux impératifs des dispositions des conventions nos 87 et 98. Il déclare que ce fait a d'ailleurs été observé avec satisfaction par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations du BIT à sa 53e session, le 23 mars 1983, lorsqu'elle s'est référée à un grand nombre d'articles de la loi no 1264 et en particulier aux améliorations législatives par rapport à l'insuffisance de l'extension de la protection qui était précédemment accordée aux dirigeants syndicaux et aux syndicalistes, à la suppression de l'ODEPES (organisme pour la gestion des ressources spéciales des syndicats de travailleurs), à la possibilité d'autofinancement des syndicats par le prélèvement à la source et surtout à l'obligation faite aux employeurs de réengager les salariés licenciés sous l'empire de la loi no 330 en raison de leurs activités syndicales.
  3. 305. Revenant en détail sur les différents points objets de la plainte, le gouvernement regrette que l'organisation plaignante par des documents épars ait tenté de diffamer et par des dénonciations calomnieuses de blesser l'honneur de la justice grecque. Il déclare au sujet de la nomination par voie judiciaire du comité directeur de la CGT de Grèce que l'affaire s'est déroulée conformément à la procédure officielle prévue par la législation en vigueur sans aucune intervention d'une autorité quelconque dans l'oeuvre de la justice et sans ingérence dans les affaires internes des organisations syndicales, lesquelles ont fixé seules leur choix sur le règlement judiciaire du litige.
  4. 306. Le gouvernement explique plus précisément que le mandat des membres des organisations syndicales du deuxième degré aurait dû prendre fin normalement à la fin de 1982, mais que dès avant la date normale d'expiration de ce mandat, les 3, 4 et 5 octobre 1981, la CGT de Grèce a, en toute hâte, convoqué un "congrès" à Chalkidiki pour procéder à l'élection des nouveaux membres afin, selon le gouvernement, de subordonner le mouvement syndical à une fraction de représentants syndicaux et d'exclure de la CGT des organisations syndicales du deuxième degré qui comptaient le plus grand nombre de membres. Sur quoi lesdites organisations syndicales qui comptaient le plus grand nombre de membres ont introduit un recours auprès des tribunaux contre la validité dudit congrès dont le comité directeur avait refusé leur demande, pourtant formulée dans les délais d'inscription au registre d'immatriculation des membres adhérents pour avoir le droit de participer au congrès de Chalkidiki.
  5. 307. Le tribunal compétent, le tribunal de paix d'Athènes, a décidé en date du 8 décembre 1981 de suspendre l'exécution de la décision prise par le congrès de la CGTG portant élection au comité de scrutateurs, du conseil général et du comité directeur de la CGTG sur la demande introduite le 10 novembre 1981 par cinq organisations syndicales qui comptaient le plus grand nombre de membres. Par la suite, poursuit le gouvernement, le 26 avril 1982, le même tribunal de paix a déclaré la nullité du congrès. Le gouvernement précise certains extraits des attendus du jugement en question, en particulier que le congrès s'est tenu "contra legem" et en contravention des dispositions des statuts de la CGTG, que, premièrement, alors que celles-ci (les organisations syndicales) avaient soumis, depuis plus de deux années, des demandes d'inscription au registre spécial d'immatriculation des membres affiliés à la confédération défenderesse (13 organisations sont citées), néanmoins (en contravention de l'article 7, paragraphe 2, des statuts de la confédération défenderesse), le comité directeur compétent de la confédération défenderesse n'a pas procédé à leur enregistrement en tant que membres affiliés à celle-ci dans les six mois suivants, mais peu avant la date de convocation du congrès pour que celles-ci en fussent exclues, ce qui a eu pour conséquence la falsification des résultats des élections; deuxièmement, qu'en contravention des statuts en vigueur (article 18), le bureau provisoire du congrès a interdit la déclaration de candidature pour l'élection des organes du bureau du congrès ainsi que la déclaration de candidature pour l'élection du comité de contrôle des procurations; troisièmement, que bien que les effets des élections à l'issue desquelles les représentants des centres ouvriers des Îles Eubée et Elefsina, délégués audit congrès et dont le nombre excédait vingt, avaient été annulés par des sentences rendues par des tribunaux de paix compétents, ces délégués ont illégalement participé au congrès et influencé par leur vote le résultat des élections; qu'en outre, lors du déroulement d'un scrutin secret pour l'élection du comité tripartite de surveillance du déroulement des élections, des personnes non membres adhérents y avaient assisté, notamment des personnes qui appartenaient au personnel de la CGTG, d'autres fédérations, de l'hôtel, etc., et que, quatrièmement, par abus du droit qui lui avait été conféré en vertu des dispositions statutaires, le comité directeur de la. CGTG s'était refusé à inscrire sur son registre d'immatriculation des membres adhérents des unions du deuxième degré, etc.
  6. 308. Le gouvernement confirme que plusieurs des organisations syndicales qui comptent le plus grand nombre de membres, à savoir la Fédération générale des travailleurs de l'entreprise publique d'électricité, la Fédération des associations d'assurance, la Fédération des ouvriers du bâtiment, la Fédération panhellénique des comptables, la Fédération des ouvriers des industries du bâtiment et du bois, la Fédération panhellénique des syndicats des ouvriers techniciens des tuileries, poteries et professions connexes et la Fédération des pensionnaires des banques, ont introduit devant le tribunal de première instance à magistrat unique d'Athènes, les 7, 8, 9, 10 et 14 décembre 1981, des demandes pour obtenir la nomination d'un nouveau comité directeur provisoire et le renouvellement des membres du conseil d'administration de la CGTG. Ces demandes ont été déclarées recevables le 29 décembre 1981 et le juge a procédé aux dites nominations au prorata du pouvoir électoral attribué aux représentants au nom de leurs organisations syndicales au sein de la CGTG.
  7. 309. Le comité directeur provisoire a reçu du juge un mandat de tutelle sur les affaires de la Confédération telles qu'elles sont déterminées par les statuts et la loi et a convoqué un congrès afin d'élire les organes du comité directeur. La date de convocation du congrès de la CGTG a été fixée du 21 au 23 octobre 1983.
  8. 310. Au sujet des dispositions incriminées de la loi no 1264 de 1982, le gouvernement réplique que, par cette loi, il a été procédé à la prise de mesures effectives en vue de l'assainissement et de la démocratisation du mouvement syndical; ainsi, pour la première fois, la loi reconnaît d'autres formes d'organisation syndicale, c'est-à-dire qu'outre les syndicats il existe des sections locales de syndicats pour des zones plus étendues ou pour l'ensemble de la Grèce et des associations de personnes. La loi prévoit une procédure de réglementation de la question de l'affiliation des membres (concernant l'inscription des membres adhérents sous contrôle judiciaire aux registres spéciaux des organisations syndicales) et la révision de leurs registres. La loi a destitué l'ODEPES et frayé à l'autonomie financière des organisations syndicales. Elle a jeté les bases de la restructuration des organisations afin de corriger les défauts de la fragmentation et du désordre dans l'organisation. Le travailleur peut être affilié à deux syndicats, à savoir à celui de sa branche d'activité et à celui de son entreprise, mais pour élire ses représentants aux organisations de degré supérieur il doit opter pour un seul syndicat; de même, chaque organisation syndicale du premier degré peut devenir membre de deux organisations syndicales du deuxième degré (un centre ouvrier et une fédération) mais chaque organisation syndicale du deuxième degré ne peut devenir membre que d'une seule organisation du troisième degré (confédération). La loi s'est efforcée de remédier aux falsifications et aux doubles représentations par l'application de dispositions qui déterminent que chaque organisation syndicale de premier degré n'élira ses représentants à une organisation syndicale de troisième degré que par l'intermédiaire d'une organisation syndicale du deuxième degré, c'est-à-dire d'une fédération ou d'un centre ouvrier. Elle a introduit la représentation des travailleurs à la majorité simple au sein du comité directeur de l'organisation, elle a étendu la protection accordée aux cadres syndicaux, aux fondateurs des organisations et, pour la première fois, à l'activité syndicale sur les lieux de travail. Elle a consolidé le droit de grève en interdisant de recruter des briseurs de grève, le lock-out et les possibilités de faire suspendre les grèves par ordonnance interlocutoire. Elle a obligé les employeurs à mettre des locaux et une salle de réunion à la disposition des organisations syndicales sur les lieux de travail et à recevoir régulièrement une fois par mois les syndicalistes. Elle a prévu des sanctions pénales contre les employeurs et leurs représentants qui violent les droits syndicaux ou entravent le libre exercice de l'activité syndicale. Elle a supprimé toutes sanctions pénales à l'encontre des dirigeants syndicaux.
  9. 311. Au sujet de l'article 27 de la loi no 1320 de 1983, le gouvernement déclare qu'il n'abolit pas le droit de négociation collective mais qu'il fixe, en ce qui concerne les augmentations de salaires, une limite maximale, pour une période bien limitée, et qu'il autorise par ailleurs le libre exercice de la négociation pour toutes les autres questions faisant l'objet des conventions collectives. La limite maximale des augmentations salariales repose sur l'article 106 de la Constitution qui dispose que, "dans le but de consolider la paix sociale et de protéger l'intérêt général collectif, l'Etat planifie et coordonne les activités économiques du pays en s'efforçant d'assurer le développement économique de tous les secteurs de l'économie nationale". Cette position a fait l'objet de plusieurs jugements rendus dans ce sens.
  10. 312. Au sujet de l'article 23 de la loi no 1346 de 1983, le gouvernement rappelle que la loi syndicale no 1264 a mis fin au fonctionnement de l'ODEPES, l'organisme pour la gestion des ressources spéciales des syndicats des travailleurs qui gérait, sans contrôle de tutelle, les ressources financières des associations syndicales et que cette même loi no 1264 consolide et garantit l'autofinancement des organisations syndicales. Désormais, les organisations syndicales sont habilitées à percevoir les cotisations de leurs membres sur le lieu de travail ou à l'aide du prélèvement à la source effectué par l'employeur. Le législateur a laissé le choix du prélèvement à la source à la négociation ou à une convention de travail collective générale ou à une sentence arbitrale. Si les organisations tardent à régler la question, elle sera réglée par décret présidentiel après consultation des organisations les plus représentatives. Enfin, l'Institut des travailleurs, dit "Foyer ouvrier", s'est vu confier à titre provisoire, mais suivant des critères objectifs, l'aide au fonctionnement des organisations syndicales de deuxième degré les plus représentatives, c'est-à-dire notamment les bourses du travail. Le gouvernement précise que, conformément à la loi no 1264, ce système de financement sera définitivement aboli dans un délai de trois mois à compter de la date de promulgation du décret présidentiel susmentionné et que la CGTG et la Fédération des industries grecques ont répondu à l'appel du ministre du Travail et lui ont soumis des propositions visant à promouvoir l'établissement du décret présidentiel en question.
  11. 313. Au sujet de l'allégation relative aux poursuites dont seraient l'objet des délégués syndicaux, le gouvernement regrette leur caractère vague et les réfute catégoriquement. Il rappelle que, au contraire, il a pris des mesures pour favoriser la réintégration des personnes licenciées entre 1976 et 1982 pour activité syndicale ou pour avoir participé à une grève. Il souligne que, au sujet des cas isolés de licenciement de syndicalistes, le ministère du Travail a vu ses compétences renforcées en vertu de la loi nouvelle et qu'il est investi de responsabilités lui permettant dans une large mesure de contribuer à la résolution des litiges.
    • Allégation supplémentaire
  12. 314. Dans une communication reçue le 4 octobre 1983, M. Karakistos en sa qualité de président du Mouvement libre démocratique syndical, le même qui a signé la plainte initiale en tant que président du Centre ouvrier d'Athènes, a déclaré appuyer la plainte du Centre ouvrier d'Athènes. Il précise en effet que l'administration du Centre ouvrier d'Athènes a été démissionnée par décision judiciaire du juge unique no 4644 du 16 septembre 1983 et il dénonce le fait que le Centre ouvrier d'Athènes ait été capturé par le parti communiste et le PASOK. Il déclare également qu'il ne participera pas à quelque congrès que ce soit qui serait convoqué par le conseil d'administration nommé au Centre ouvrier d'Athènes et de la CGTG.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 315. Le comité observe que cette affaire a trait, premièrement, à un conflit au sein de la Confédération générale des travailleurs de Grèce, deuxièmement, à une critique de la législation syndicale récente, troisièmement, à la répression dont des dirigeants syndicaux feraient l'objet.
  2. 316. Sur le premier grief invoqué par l'organisation plaignante à savoir la destitution du Conseil d'administration de l'organisme syndical suprême des travailleurs grecs, la Confédération générale des travailleurs grecs (CGTG) élu à peine 45 jours auparavant, prononcée par le gouvernement qui aurait nommé à la tête de la confédération un nouveau conseil d'administration composé de personnes appartenant aux organisations du parti au pouvoir, le comité a pris note des explications longues et détaillées fournies tant par l'organisation plaignante que par le gouvernement.
  3. 317. D'une manière générale, en matière de contestations d'élections syndicales, le comité a toujours souligné que les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention qui pourrait limiter le droit des organisations d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion et leurs activités'. Le comité estime, par ailleurs, qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur ce type de conflits internes, sauf si un gouvernement était intervenu d'une manière affectant l'exercice des droits syndicaux et le fonctionnement normal d'une organisation. En effet, un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que le contrôle des élections syndicales doit toujours être confié aux autorités judiciaires.
  4. 318. Dans le cas d'espèce, il ressort des explications fournies par le gouvernement que la date des élections syndicales avait été avancée par le conseil d'administration sortant, que ces élections ont été contestées par des organisations syndicales rivales de l'organisation plaignante qui s'étaient vues refuser par le conseil d'administration sortant l'inscription sur leurs listes électorales pour participer aux élections, et que ces organisations ont soumis le conflit à la justice, laquelle s'est prononcée définitivement. Tout en relevant que, selon l'organisation plaignante, la justice grecque dans cette affaire ne s'est pas prononcée en toute indépendance, le comité n'est pas à même, au vu des éléments du dossier, de se rallier à cette opinion. En conséquence, la justice s'étant prononcée définitivement sur la contestation des élections syndicales, le comité estime que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
  5. 319. Au sujet de l'aspect législatif du cas, le comité, tout en prenant note des griefs soulevés par l'organisation plaignante à propos de la loi no 1264 du 1er juillet 1982, relève qu'à sa session de mars 1983 la Commission d'experts pour. l'application des conventions et recommandations a examiné cette législation en relation avec les conventions nos 87 et 98 et qu'elle a, comme le souligne le gouvernement, noté avec satisfaction certains amendements introduits par la loi nouvelle et demandé à être tenue informée de la solution définitive retenue en matière de recouvrement direct des cotisations syndicales. La commission d'experts a aussi fait remarquer au gouvernement, à propos de retrait du droit de vote et d'éligibilité des journalistes retraités, que cette question devrait être laissée aux statuts des organisations syndicales concernées. Le comité ne peut que réitérer les demandes formulées par la commission d'experts sur ces différents points. D'autre part, après avoir pris connaissance de la loi no 1264, le comité est d'avis que les questions relatives à la structure syndicale, aux élections à la majorité proportionnelle, au libre accès des travailleurs dans les syndicats sous le contrôle du Tribunal et à la consultation des registres des syndicats déposés au greffe du Tribunal en cas d'intérêt légitime ne semblent pas mettre en cause les principes de la liberté syndicale.
  6. 320. A propos des griefs soulevés par l'organisation plaignante au sujet de l'article 23 de la loi no 1946/83 du 14 avril 1983 concernant la prétendue suppression d'autonomie financière des syndicats par le gouvernement qui se chargerait désormais lui même du contrôle du financement des unions syndicales, le comité de même que la commission d'experts relèvent avec satisfaction que, comme les organes de contrôle l'avaient demandé à plusieurs reprises, l'organisme pour la gestion des ressources spéciales des syndicats des travailleurs (ODEPES) a été supprimé par la loi no 1264 qui a transféré les droits et obligations de l'ODEPES à l'Institut des travailleurs (article 27 de la loi). Le comité veut croire cependant que l'article 23 de la loi no 1326/83 du 14 avril 1983 ne confère pas au gouvernement des pouvoirs d'intervention sur la gestion financière des syndicats et soumet l'ensemble de la question à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
  7. 321. A propos du grief relatif à l'article 27 de la loi no 1320/82, le comité observe que cette disposition diffère pendant un an le droit des employeurs d'accorder des augmentations de salaires et interdit à ces mêmes employeurs de répercuter d'éventuelles augmentations dans les coûts de production mais qu'elle maintient le droit de négocier collectivement les conditions de travail sur les aspects autres que salariaux. Etant donné le caractère plutôt dissuasif qu'impératif de cette mesure à l'égard des employeurs et compte tenu de sa limitation dans le temps pour une durée d'une année, le comité estime que la disposition susmentionnée ne semble pas contenir des mesures contraires à l'article 4 de la convention no 98 sur la promotion de la négociation collective d'autant que, contrairement à ce qu'affirme l'organisation plaignante, la loi no 1320/82 ne contient pas d'interdiction de la grève visant les revendications d'ordre salarial. Néanmoins, si la situation à certains égards contraignante en matière de liberté de négociation collective devait se maintenir, le comité pourrait l'estimer critiquable.
  8. 322. A propos de l'allégation de persécution de syndicalistes, le comité observe le caractère vague de l'allégation de l'organisation plaignante et les dénégations fermes du gouvernement. Il observe aussi que l'organisation plaignante n'a pas fourni d'informations pour étayer son allégation. En conséquence, le comité estime que cette allégation n'appelle pas un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 323. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et en particulier les conclusions suivantes:
    • a) A propos des allégations de destitution du conseil d'administration de la CGTG et de persécution contre les syndicalistes, le comité estime que ces allégations n'appellent pas un examen plus approfondi.
    • b) A propos des aspects législatifs du cas, le comité ne peut que réitérer les demandes adressées par la Commission d'experts sur l'application des conventions et recommandations, en particulier concernant la solution définitive retenue en matière de recouvrement direct des cotisations syndicales et le retrait du droit de vote et d'éligibilité des journalistes retraités.
    • c) A propos de l'allégation selon laquelle le gouvernement aurait supprimé l'autonomie financière des syndicats en se chargeant du contrôle de leur financement, le comité de même que la commission d'experts relèvent avec satisfaction que l'ODEPES a été supprimé et que les droits et obligations de cet organisme ont été transférés à l'Institut des travailleurs. Le comité veut cependant croire que l'article 23 de la loi no 1346/83 ne confère pas au gouvernement de pouvoirs d'intervention sur la gestion financière des syndicats, et il soumet l'ensemble de la question à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
    • d) A propos de l'allégation relative à l'abolition du droit de négociation collective, le comité observe que l'article 27 de la loi no 1320/82 de durée limitée puisqu'elle est en vigueur pendant une année a un caractère plus dissuasif qu'impératif à l'égard des augmentations salariales que pourraient accorder les employeurs, qu'il ne porte pas atteinte au droit de négocier collectivement sur les questions autres que salariales et qu'il ne contient pas d'interdiction de la grève visant les revendications salariales comme l'allègue l'organisation plaignante. Dans ces conditions, le comité estime que cet article ne semble pas contenir de mesures contraires à l'article 4 de la convention no 98. Néanmoins, si la situation à certains égards contraignante en matière de négociation collective devait se maintenir, le comité pourrait l'estimer critiquable.
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