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- 37. Le présent cas a été examiné par le comité en novembre 1978, date à laquelle il a soumis certaines conclusions en la matière que le Conseil d'administration a adoptées à sa 208e session (14-17 novembre 1978)2. Par une lettre en date du 22 janvier 1979, l'Association des économistes, sociologues et statisticien(ne)s a communiqué de nouvelles allégations. Par des lettres en date du 24 janvier 1979, six organisations syndicales canadiennes ont appuyé cette plainte. Le gouvernement a transmis ses observations dans une lettre en date du 26 avril 1979.
- 38. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il n'a ratifié ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 39. La plainte initiale, en date du 9 mars 1978, concernait un projet de loi (projet de loi C-28) tendant à modifier la loi sur les relations de travail dans la fonction publique, qui, selon l'organisation plaignante, constitue une violation de la convention no 87, dans la mesure où il refuse la liberté d'association à certaines catégories de fonctionnaires de haut niveau. Dans sa réponse, le gouvernement a déclaré que le projet de loi C-28 n'était plus à l'ordre du jour du Parlement et que, de ce fait, il n'existait plus de fondement à la plainte.
- 40. Le comité, ayant noté cette information transmise par le gouvernement, avait toutefois rappelé qu'en vertu de l'article 2 de la convention no 87, ratifiée par le Canada, le droit de constituer des organisations et d'y adhérer doit être reconnu aux travailleurs sans distinction d'aucune sorte, les seules exceptions prévues par la convention ayant trait aux forces armées et à la police.
- 41. Le comité s'était aussi référé à l'article 3 de la convention no 87 qui établit que les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d'action. Le comité avait déclaré qu'il découle de cette disposition que les syndicats devraient avoir le droit, par le moyen de la négociation collective ou par tout autre moyen légal, de chercher à améliorer les conditions de travail de ceux qu'ils représentent. A sa session de 1978, la Conférence internationale du Travail a adopté la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978. Aux termes de l'article 7 de cette convention, "des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures permettant la négociation des conditions d'emploi entre les autorités publiques intéressées et les organisations d'agents publics, ou de toute autre méthode permettant aux représentants des agents publics de participer à la détermination desdites conditions. Néanmoins, le comité avait souligné qu'en vertu de l'article 1, la mesure dans laquelle les garanties prévues par la convention no 151 s'appliqueront aux agents de niveau élevé dont les fonctions sont normalement considérées comme ayant trait à la formulation des politiques à suivre ou à des tâches de direction ou aux agents dont les responsabilités ont un caractère hautement confidentiel sera déterminée par la législation nationale.
- 42. Sous réserve de ces considérations, et étant donné que le Parlement n'était plus saisi du projet de loi mis en cause, le Conseil d'administration, en approuvant le paragraphe 68 du 187e rapport du comité, avait décidé que le cas n'appelait pas de sa part un examen plus approfondi.
- 43. Dans les nouvelles allégations qu'elle a présentées en date du 22 janvier 1979, l'organisation plaignante a déclaré qu'un nouveau projet de loi (C-22) reprenant essentiellement les mêmes termes que le projet de loi C-28 examiné ci-dessus, mais faisant peser de plus grands risques encore sur les droits de négociation collective des agents de la fonction publique avait été soumis au Parlement canadien, pour première lecture, en date du 21 novembre 1978. Le texte du projet de loi C-22 de 1978 tendant à modifier la loi sur les relations de travail dans la fonction publique était annexé à la lettre de l'organisation plaignante. Celle-ci se référait, en particulier, à l'article 1, paragraphes 4 et 5, du projet de loi C-22, qui, à son avis, excluaient du bénéfice du droit de négociation collective toute personne employée au conseil du Trésor, et permettraient l'exclusion d'une personne qui:
- "c) a ou exerce
- i) des fonctions et des responsabilités de gestion ou de direction à l'égard de l'élaboration, de la mise en oeuvre et de l'administration des politiques ou des programmes du gouvernement, ou
- ii) le contrôle effectif des employés,
- c.1) fait des recommandations de conséquences sur les attributions décrites à l'alinéa c)".
- 44. Selon l'organisation plaignante, un grand nombre d'agents publics y compris ceux qui soumettent des recommandations à la direction et les administrateurs de programme se verraient ainsi privés du droit de se syndiquer librement aux tins de négocier collectivement les salaires et les conditions d'emploi.
- 45. En outre, l'organisation plaignante a appelé l'attention sur une modification proposée tendant à insérer un nouvel article 19.1(1) dans la loi et déterminant la méthode à employer pour exclure certains agents du secteur public de la négociation collective. Selon elle, cette modification permettrait l'exclusion immédiate de ces agents de la négociation collective, sous réserve d'un réexamen de la question par la commission des relations de travail dans la fonction publique.
- 46. Enfin, l'organisation plaignante a avancé qu'une modification proposée de l'article 68 de la loi supprimerait le droit d'interroger contradictoirement les personnes qui rassemblent les données utilisées pour les procédures d'arbitrage.
- 47. Dans sa réponse en date du 26 avril 1979, le gouvernement déclare que le Parlement a été dissous récemment en vue d'une élection générale et qu'en conséquence, le projet de loi C-22 ne figure plus sur l'ordre du jour du Parlement. Ainsi les fondements sur lesquels s'appuyait cette plainte n'existent plus.
- 48. Néanmoins, le gouvernement cite certains avis selon lesquels certaines personnes risquent, dans le contexte des relations entre travailleurs et direction, de se trouver dans une situation de conflit d'intérêt. Ces opinions ont été exprimées par le président du conseil du Trésor et par l'ancien président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Celui-ci estime que l'exclusion de ces personnes de la négociation collective répond à la nécessité d'établir une ligne de démarcation entre les personnes se trouvant du côté de la direction et celles qui n'interviennent pas dans la direction. Tous les textes législatifs modernes se rapportant aux relations professionnelles que le Canada et les Etats-Unis ont adoptés reconnaissent qu'il faut distinguer entre les "types administratifs" et les "types non administratifs". Il convient, poursuit-il, de tenir compte du besoin que ressentent les organisations de travailleurs de voir identifier les personnes à qui la loi interdit toute ingérence dans les droits des salariés. Le gouvernement souligne que la définition figurant dans le projet de loi parle de "fonctions de gestion ou de direction" et de "contrôle effectif des employés". En outre, la référence aux personnes employées au conseil du Trésor n'est rien de plus que la reconnaissance du fait que le conseil est, de par la loi, l'employeur des agents publics et qu'il exerce cette fonction par l'intermédiaire de son personnel.
- 49. Le gouvernement ajoute que le projet de loi ne vise pas à exclure de la négociation collective toutes les personnes qui surveillent d'autres agents. En fait, le paragraphe 4, de l'article 26, de la loi sur les relations de travail dans la fonction publique prévoit la constitution d'une unité de négociation collective qui comprendrait des employés ayant pour fonction la surveillance d'autres employés; le projet de loi C-22 ne prévoit ni la suppression ni la modification de ces dispositions.
- 50. En ce qui concerne la procédure prévue dans le projet de loi (concernant la désignation de personnes ne devant pas faire partie d'une unité de négociation), le gouvernement souligne le fait que la Commission des relations de travail dans la fonction publique, organisme indépendant quasi judiciaire, conserverait, en définitive, le pouvoir de décision sur toute exclusion proposée par l'employeur. De par ces dispositions, ce projet de loi diffère nettement de l'ancien (C-28).
- 51. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle le projet de loi n'autoriserait pas l'interrogation contradictoire des personnes qui rassemblent les données utilisées dans le processus d'arbitrage, le gouvernement déclare que ce mode de procéder n'a jamais été une caractéristique de l'arbitrage telle que le prévoit la loi. Les parties à l'arbitrage ont toujours eu le droit de soumettre ou de réfuter, sans aucune restriction, n'importe quelle donnée qu'elles estiment pertinente. Les dispositions du projet de loi C-22 ne restreindraient en aucune façon ce droit. La décision définitive quant à la pertinence ou à la précision des données soumises par les parties continuera d'être du ressort du conseil d'arbitrage. De toute façon, les organisations de salariés auraient toute latitude de renoncer à la poursuite de l'arbitrage, si elles estiment qu'il se déroule de façon non satisfaisante.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 52. Le comité note les informations fournies par le gouvernement, et en particulier le fait que le nouveau projet de loi n'est plus soumis au Parlement. En ce qui concerne les questions de principe qui se posent, il ne peut que référer aux observations faites au sujet du projet de loi précédent, et rappelées aux paragraphes 40 et 41 ci-dessus. Néanmoins, étant donné qu'il ressort des observations du gouvernement que celui-ci n'exclut pas la possibilité de saisir le Parlement réuni en une nouvelle session de modifications législatives identiques ou semblables, le comité estime qu'il pourrait être utile qu'il fasse quelques observations sur les questions qui ont été soulevées.
- 53. En ce qui concerne l'allégation concernant un aspect particulier de la procédure d'arbitrage, le comité estime que, puisque aucune question se rapportant à la discrimination antisyndicale :.e semble être en cause, il n'est pas appelé à exprimer un avis sur la nécessité de faire de l'interrogatoire contradictoire un élément de cette procédure.
- 54. Pour ce qui est des autres aspects du cas, il convient de noter qu'aux termes de la loi sur les relations de travail dans la fonction publique, tout employé peut être membre d'une association d'employés et participer à l'activité légitime de l'association d'employés dont il est membre (article 6). En outre, il est interdit à toute personne préposée à la gestion ou à des fonctions confidentielles de participer à la formation ou l'administration d'une association d'employés ou à la représentation des employés par une telle association ou de s'y immiscer (article 8).
- 55. Dans la loi, les termes "personne préposée à la gestion ou à des fonctions confidentielles" s'entendent de toute personne qui occupe un poste de confiance auprès du gouverneur général, d'un ministre de la Couronne ou qui est employée en qualité de conseiller juridique au ministère de la Justice. Ces termes désignent aussi toute autre personne employée dans la fonction publique et désignée par la Commission des relations de travail dans la fonction publique, ou par l'employeur (sous réserve de la décision de la commission en cas d'objection), comme étant une personne qui a des responsabilités de direction en ce qui a trait à l'établissement et à l'implication des programmes du gouvernement, ou dont les fonctions comprennent celles d'un administrateur du personnel ou qui est directement impliquée dans le mécanisme de la négociation collective pour le compte de l'employeur; ou qui est tenue de s'occuper officiellement, pour le compte de l'employeur, d'un grief; ou qui occupe un poste de confiance auprès de l'une de ces personnes. Aux termes du projet de loi C-22, cette désignation par l'employeur prendrait effet sur réception de l'avis par la commission. Néanmoins, l'agent négociateur approprié aurait le droit de déposer auprès de cette commission une objection à cette décision et la commission pourrait alors déterminer si la personne a été ou non correctement désignée. Une désignation qui n'aurait pas été faite correctement par l'employeur cesserait de prendre effet à la date de la décision de la commission. En ce qui concerne d'autres personnes qui, de l'avis de la commission, ne devraient pas faire partie d'une unité de négociation en raison de leurs fonctions et de leurs responsabilités envers l'employeur, il appartiendrait à la commission, selon le projet de loi C-22, tout comme aux termes de la loi actuellement en vigueur, d'établir des règlements d'application générale concernant la manière dont ces personnes doivent être désignées.
- 56. En outre, le projet de loi C-22 modifierait la loi en incluant dans la définition mentionnée ci-dessus toute personne qui est employée au conseil du Trésor ainsi que - sur des désignations de l'employeur ou de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, comme cela a été exposé plus haut - toute personne qui a ou exerce "le contrôle effectif des employés" ou qui "fait des recommandations de conséquences" à des personnes exerçant des fonctions de gestion, de direction ou de contrôle.
- 57. En revanche, comme le gouvernement le fait observer, l'article 26(4) de la loi, au sujet duquel aucune modification n'a été proposée, autorise les employés d'un groupe d'occupation dont les fonctions comprennent la surveillance d'autres employés de ce groupe à constituer une unité de négociation collective. Ces dispositions ne semblent pas toutefois couvrir nécessairement certaines des personnes mentionnées dans le projet de loi C-22, telles que celles qui font des recommandations de conséquences à la direction. En outre, le projet de loi inclurait l'ensemble du personnel du conseil du Trésor, indépendamment de toute considération de niveau hiérarchique, dans la catégorie des personnes préposées "à la gestion ou à des fonctions confidentielles", puisque ce conseil représente le gouvernement, en sa qualité d'employeur, dans le processus de négociation.
- 58. Etant donné que le Canada reconnaît des droits de négociation collective aux agents publics, le comité estime que bien que le Canada n'ait pas ratifié la convention no 151, les principes qu'il énonce fournissent des directives particulièrement appropriées dans les questions faisant l'objet du présent examen. Le comité souhaiterait, en conséquence, suggérer que, si le gouvernement envisage de soumettre à nouveau les modifications proposées, il pourrait estimer souhaitable de réexaminer le projet de loi en vue de maintenir les exclusions qu'il prévoit dans les limites de celles qu'envisage l'article 1er, paragraphe 2, de ladite convention, c'est-à-dire de les restreindre aux agents de niveau élevé dont les fonctions sont normalement considérées comme ayant trait à la formulation des politiques à suivre ou à des tâches de direction, ou aux agents dont les responsabilités ont un caractère hautement confidentiel.
- 59. Enfin, le comité considère que lorsque le représentant d'une unité de négociation fait objection à la désignation, par l'employeur, d'une personne comme étant "préposée à la gestion ou à des fonctions confidentielles", la suspension de l'effet d'une telle désignation jusqu'à ce que la Commission des relations de travail dans la fonction publique ait tranché l'objection constituerait une garantie supplémentaire en vue de la protection des droits syndicaux des agents de la fonction publique.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 60. Dans ces conditions, notant que le projet de loi révisé auquel l'organisation plaignante se réfère n'est pas inscrit à l'ordre du jour du Parlement, et sous réserve des considérations exprimées aux paragraphes 54 à 59 ci-dessus, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que le présent cas n'appelle pas un examen plus approfondi de sa part.